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La réglementation CEMAC relative à  la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Etude du cas des personnes politiquement exposées.


par HINASSOU MAHAMAT
Université de Dschang - Master 2 recherche en Droit des Affaires et de l'Entreprise. 2020
  

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Paragraphe 2 : La couverture du blanchiment des capitaux par les paradis-
fiscaux et les places offshores

L'internationalisation du système financier n'est pas sans conséquence. En effet, L'avènement de la mondialisation de nouveaux horizons au crime organisé et à la délinquance économique et financière en particulier. L'imbrication des intérêts publics et privés, la faillite des contrôles produisent des effets délétères à l'intérieur et à l'extérieur des frontières. Ainsi, les réseaux criminels empruntent-ils les multiples circuits d'occultation du système financier mondial et de ses produits nouveaux et méthodes ou techniques à des fins de blanchiment154.

Ce système financier ainsi, internationalisé et décloisonné a offert une plus grande prospérité au blanchiment d'argent dans certains pays ou places financières où il est possible d'y déposer des sommes sans avoir de compte à rendre sur son identité : ce sont les paradis fiscaux et centres ou places offshore.

Il s'agit de pays qui ne prélèvent pas ou peu d'impôts et servent aux non-résidents pour échapper à l'impôt dans leur pays de résidence. Un paradis fiscal est doté de dispositions législatives ou de pratiques administratives empêchant un échange de renseignements avec d'autres pays sur les contribuables. Les paradis fiscaux ou les centres offshores jouent un rôle accru dans les opérations de blanchiment des capitaux, facilitées par des réglementations laxistes et le secret bancaire155.

Associée à certaines structures juridiques (B), ce laxisme de la règlementation dans les paradis-fiscaux (A) constitue un véritable moyen de blanchiment des capitaux.

154 MODOU DIAKHATE (S.), La lutte contre la délinquance économique et financière dans l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et dans l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) : état des lieux et perspectives, Thèse de Docteur en droit privé et sciences criminelles, Université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, février 2017. P. 269.

155 Ibidem.

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A - Le laxisme de la règlementation dans les paradis-fiscaux

Pour attirer les capitaux étrangers, certains pays adoptent une fiscalité plus favorable que celle du reste du monde156. Les principales caractéristiques des paradis-fiscaux et Centres Offshores157 sont généralement les mêmes caractéristiques dans les secteurs financiers et commerciaux. Ainsi, la règlementation est laxiste dans ces territoires à plusieurs niveaux.

Tout d'abord, les paradis-fiscaux ou centres offshores ont une règlementation stricte en matière de secret bancaire, interdisant ainsi la révélation du titulaire du compte bancaire ou des opérations. Il est ainsi extrêmement difficile de connaitre l'identité des personnes y déposant les fonds. La législation des paradis-fiscaux prévoit généralement des sanctions lourdes si les employés des banques transgressent cette règle. Ce secret est opposable aux autorités judiciaires et aux autorités de contrôle158. Ce qui permet à son titulaire d'échapper aux poursuites intentées par son pays. Et les personnes politiquement exposées s'orientent en générale vers les banques de ces territoires pour pouvoir cacher les fonds détournés par elles ou provenant de leurs activités illégales.

Ensuite, la supervision de contrôle est aussi faible. En effet, dans ces territoires ou juridiction comme les îles Caïmans qui dépendent de la couronne britannique, l'institution de supervision qui ne se trouve pas sur place est complice.

En plus, ils ont une règlementation laxiste en matière de propriété et d'enregistrement des sociétés. Le droit des sociétés de ces pays garantit l'anonymat du bénéficiaire des opérations financières réalisées par des ressortissants étrangers qui effectuent, le plus souvent lesdites opérations depuis l'étranger159. Un véritable avantage que recherchent les blanchisseurs.

Enfin, il importe de souligner que la législation dans les paradis-fiscaux protège ou favorise l'évasion fiscale et empêche les procédures judiciaires. En effet, pour ce qui est de la fiscalité, elle est attractive, voire inexistante. Ils permettent dans ce sens de déplacer l'argent

156 TCHABO SONTANG (H. M.), Secret bancaire et lutte contre le blanchiment d'argent en zone CEMAC, Op.cit., p. 16.

157 Les centres « offshores « sont en effet des territoires où des non-résidents ont la possibilité de créer les sociétés et d'utiliser les services financiers offerts par leurs activités à l'extérieure desdits territoires. Ici, les entreprises qui s'installent sous ce régime ne peuvent en effet réaliser de bénéfices qu'à l'extérieur du territoire où elles sont installées, elles jouissent ainsi des avantages fiscaux (Cf. FERJAULT (E), Secret professionnel et blanchiment des capitaux, mémoire magistère de juriste d'affaire, Université Panthéon Assas, mai 2002, p.38 cité par TCHABO SONTANG (H. M.), Secret bancaire et lutte contre le blanchiment d'argent en zone CEMAC, Op.cit., p. 16).

158 MODOU DIAKHATE (S.), La lutte contre la délinquance économique et financière dans l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et dans l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA): état des lieux et perspectives, Op. cit., p. 274.

159 Ibidem

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«sous le nez du fisc« sans que l'on sache où il va. Et le secret bancaire est protégé même dans le cadre d'une fraude fiscale.

Pour ce qui est des poursuites judiciaires relatives à la délinquance économique et financière, il importe de souligner que la plupart des paradis-fiscaux sont tout d'abord des territoires non-coopérants160 et ensuite, même s'il existe une règlementation en matière de criminalité économique, elle est soit laxiste, soit inappliqué161.

Ainsi, il est pratiquement impossible au juge de repérer les informations financières ou des données informatiques, dans un paradis-fiscal ou un centre offshore, qui peuvent disparaitre en un clic pour réapparaitre aussitôt par un autre. Si les traces de telles données sont effacées, la justice aura du mal à vérifier leur existence et du fait de leur migration, elle ne les trouvera jamais162 . Un juge français fait à cet effet un constat amer lorsqu'il affirme que « Force est de constater aujourd'hui que les méandres de la finance internationale, où circulent librement des capitaux douteux noyés dans la masse des capitaux générés par le libéralisme, sont souvent d'une opacité telle qu'il est impossible de dévoiler les circuits masqués du blanchiment. Les places offshores sont prospères et recueillent les fruits de la mondialisation. L'argent sale a su y trouver refuge et le secret bancaire contraint souvent les juges à constater que leurs quêtes sont dans l'impasse »163.

Aux termes de cette analyse, l'on se rend clairement compte que le laxisme de la règlementation dans les paradis-fiscaux est une véritable mine aux pieds du dispositif anti-blanchiment en générale et celui contre les PPE en particulier. Car, du fait de l'anonymat qu'offres ces territoires, les établissements financiers de ces places attirent les hautes personnalités pour mettre à l'abri, du public ou des organismes anti-blanchiment, les fonds provenant de la corruption ou du détournement. Bien plus, ce laxisme fait en sorte que des entreprises (fictives ou réelles) mettent en place des véritables circuits de blanchiment.

160 La liste de ces territoires est établie par le GAFI.

161 MODOU DIAKHATE (S.), La lutte contre la délinquance économique et financière dans l'Union Économique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA) et dans l'Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires (OHADA) : état des lieux et perspectives, Op.cit., p. 275.

162 FALCIANI (H.), « séisme sur la planète finance au coeur du scandale HSBC. Mon combat contre l'évasion fiscale », édition LA DECOUVERT, p. 15.

163 Constat fait par le juge VAN RUYMBEKE (R.) In PARIS-FICARELLI (N.), « Magistrats en réseaux contre la criminalité organisée », Presse Universitaire de Strasbourg, 2008, p. 8.

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