Le statut des anciens chefs d'état en Afrique : cas de la République Démocratique du Congopar GuéLord Kalawu Kalawu Université de Kinshasa - Licence en Droit 2019 |
B. Le statut des anciens Chefs d'Etat et son contenuPour sécuriser les Chefs d'Etat retraités de l'ère démocratique, la constitution leur a accordé des privilèges statutaires161 (1). Toutefois, il apparait à travers les textes constitutionnels et législatifs que l'octroi de ces avantages statutaires est assujetti à certaines restrictions au bénéfice du statut (2). 1. Les privilèges statutaires Ces privilèges comportent des avantages matériels (I) mais aussi une protection juridique (II). a. Les avantages matériels En prévision de leur chute ou de leur retraite, la plupart des Chefs d'Etat africains se sont illustrés par leur fortune personnelle impressionnante. Lansiné KABA exprime bien cette idée, il considère que c'est la confusion des pouvoirs et des responsabilités et la confusion entre l'intérêt public et l'intérêt privé au profit d'un seul, en l'occurrence le Chef d'Etat qui sont à l'origine de son enrichissement personnel, illicite. Pour lui, « tout césar aspire à devenir un crésus ».162 Les mirifiques de ces fortunes sont celles de MOBUTU, Jean Bédel BOKASSA163 et Hissène HABRE.164 En conséquence, afin que les Chefs d'Etat de la période démocratique ne soient pas angoissés par le problème de leurs moyens de subsistance après leur sortie du pourvoir et ne soient tentés de détourner et d'accumuler les richesses du patrimoine national, les nouveaux régimes ont 161 Article 104 alinéa 7 162 KABA L., Lettre à un ami sur la politique et le bon usage du pouvoir, Paris, Présence africaine, 1995, pp. 68-69. 163 Sur la fortune de BOKASSA, V.P. LAMOTHE. La Centrafrique de BOKASSA : Un pouvoir néo-patrimonial, Mémoire de DEA- Etudes africaines, CEAN - IEP de Bordeaux, 1982. 164 Sur la fortune de l'ex-président HABRE. V. Tchad, Ministère de la justice, rapport de la commission d'enquête nationale sur les crimes et détournement commis par l'ex-président HABRE et/ou ses complices, Paris. L'harmattan, 1993. 68 accepté de consentir des avantages matériels et logistiques pour que la perte du pouvoir ne s'assimile pas à une déchéance sociale. C'est ainsi que le législateur burkinabé prévoit une pension civile au profit des anciens Chefs d'Etat, dont le montant sera déterminé par décret pris en conseil des ministres.165 En outre, les anciens Chefs d'Etat bénéficient d'un véhicule avec chauffeur et d'une sécurité. Cette pension et ces avantages sont personnels et viagers enchérit M. Fall.166 M. Fall pense que, le législateur guinéen est plus généreux. Comme le prévoit l'article 2 de la loi organique relative aux conditions dans lesquelles les anciens Présidents de la République bénéficient d'avantages matériels et d'une protection, les anciens Présidents de la République ont droit à : > Une allocation dont le montant est égal à six mois de traitement au moment de la cessation des fonctions ; > Une indemnité mensuelle dont le montant est égal au 2/3 du traitement de base mensuel du Président de la république en titre ; > Un secrétariat personnel ; > Une habitation décente ou une indemnité de logement s'il ne dispose pas déjà d'une propriété foncière bâtie ; > Deux voitures à usage personnel avec chauffeur ; > Des soins médicaux pour eux et leurs épouses et leurs enfants mineurs ; > Un passeport diplomatique pour eux et leurs épouses ; > En cas de décès, une pension de réversion d'un montant égal à 80% du traitement est allouée aux veuves et aux enfants mineurs. En outre, ils ont droit à une protection physique par la mise à leur disposition d'un aide de camp et d'une garde permanente de leur habitation.167 Selon lui, le législateur nigérien est tout aussi généreux.168 La législation centrafricaine elle aussi, fait la générosité car outre les avantages matériels, il est alloué à tout ancien Président de la République une pension mensuelle égale à la moitié de l'indemnité de représentation dont bénéficie le Président en exercice. Il reçoit en plus une indemnité forfaitaire pour couvrir les charges de consommation d'eau, d'électricité et de téléphone de sa résidence principale. Il bénéficie aussi de d'hôtel.169 En tenant compte de ce qui précède et considérant la misère qui gangrène la population africaine, nous estimons que ces avantages sont hors-normes et inconstitutionnels et violent aussi les dispositions internationales notamment le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels dans ses articles 1er point 2, 11ème et 25ème.170 165 Loi N° 18/92 du 23 décembre 1992 accordant une pension civile et autres avantages aux anciens Chefs d'Etat 166 Ismaïla M.F., Le pouvoir exécutif..., Op., Cit., p. 211. 167 Loi N° 18/92 du 23 décembre 1992 accordant une pension..., Loc., Cit. 168 Décret N° 94-036/PRM du 04 mars 1994, portant modalités d'application de la loi n°94-005 du 03fevrier 1994, fixant le régime applicable à la pension des anciens Président de la République. JORN du 01 mai 1994. 169 Loi N°97-012 du 31 octobre 1997 accordant une pension et des avantages aux anciens Présidents de la République et son décret d'application en date du 4 mars 1998. 170 Article 1 point 2, Pour atteindre leurs fins, tous les peuples peuvent disposer librement de leurs richesses et de leurs ressources naturelles, sans préjudice des obligations qui découlent de la coopération économique internationale, fondée sur le principe de l'intérêt mutuel, et du droit international. En aucun cas, un peuple ne pourra être privé de ses propres moyens de subsistance. Article 11 point 2, a et b. 2. Les Etats parties au présent Pacte, reconnaissant le droit fondamental qu'a toute personne d'être à l'abri de la faim, adopteront, individuellement et au moyen de la coopération internationale, les mesures nécessaires, y compris des programmes concrets : a) Pour améliorer les méthodes de production, de conservation et de distribution des denrées alimentaires par la pleine utilisation des connaissances techniques et scientifiques, par la diffusion de principes d'éducation nutritionnelle et par le développement ou la réforme des régimes agraires, de manière à assurer au mieux la mise en valeur et l'utilisation des ressources naturelles ; b) Pour assurer une répartition équitable des ressources alimentaires mondiales par rapport aux besoins, compte tenu des problèmes qui se posent tant aux pays importateurs qu'aux pays exportateurs de denrées alimentaires. Article 25, Aucune disposition du présent Pacte ne sera interprétée comme portant atteinte au droit inhérent de tous les peuples à profiter et à user pleinement et librement de leurs richesses et ressources naturelles. 69 For malheureusement, c'est bien la logique qu'a empruntée le législateur congolais en rédigeant la loi sur les anciens Chefs d'Etat donnant les avantages excessifs, taillés sur mesure, aux anciens Chefs d'Etat congolais à savoir : > La pension spéciale ; > L'allocation annuelle pour services rendus ; > Les soins de santé, la rente de survie et la rente d'orphelin ; > Les avantages complémentaires. Hormis ceux-ci, la loi rajoute que tout ancien Président de la République élu bénéficie des avantages complémentaires qui violent le principe énoncé par la constitution dans ces articles 56, 57 et 58, ces avantages sont : V' Une habitation décente fournie par l'Etat ou une indemnité de logement ; V' Un passeport diplomatique pour lui-même, son conjoint et ses enfants mineurs ; V' Un titre de voyage en business class pour lui-même, son conjoint et ses enfants mineurs ; V' Cinq Véhicules pour la fonction et pour usage domestique, après cinq ans deux fois renouvelables ; V' Un service de sécurité doté de moyens logistiques conséquents comprenant au moins deux gardes du corps, trois éléments de sa suite et une section chargée de la garde de sa résidence ; V' Un personnel domestique dont le nombre ne peut dépasser dix personnes ; V' Des locaux faisant office de bureaux pour lui-même et pour son secrétariat dont le nombre ne peut dépasser six personnes ; V' Une dotation mensuelle en carburant ; V' Une indemnité mensuelle pour les frais de consommation d'eau, d'électricité et de téléphone. Assurément, les avantages matériels accordés aux anciens Chefs d'Etat sont importants mais excessifs bien que tolérables si cela peut amener les Présidents en fonction à se garder de s'enrichir illicitement et à quitter le pouvoir chaque fois que le mandat touche à sa fin. En cela, le bon sens veut qu'un ancien Chef d'Etat qui a servi le pays avec dignité et honneur, n'éprouve des difficultés pour subvenir à ses besoins et puisse jouir d'une protection juridique assurée. b. La protection juridique Les Présidents africains redoutent à leur sortie du pouvoir la pauvreté matérielle mais encore plus les poursuites judiciaires qui peuvent les amener dans des situations dégradantes et infamantes. L'angoisse d'être traduit en justice et de se retrouver en prison les amène alors à vouloir se pérenniser à la présidence pour garder leur position de pouvoir qui leur confère l'immunité, voire l'imputé. Comme le relate l'hebdomadaire Jeune Afrique, dans une lettre adressée au Président français Jacques Chirac, le Président SOGLO du Benin avant de quitter le pouvoir a, en dépit de dispositions constitutionnelles, sollicité l'intercession de la France en sa faveur pour la protection et la garantie de la sécurité de sa personne, de sa famille et des membres de son gouvernement. Voici des propos extraits de la lettre : « Je sollicite que, par une déclaration publique, le gouvernement 70 française invite le général KEREKOU à garantir ma sécurité et ma liberté ainsi que celles de ma famille, des membres de mon gouvernement et leurs familles, ainsi que celles de tous ceux qui m'ont publiquement apporté leur soutien f...] en 1991, j'ai accepté dans le souci de préserver la paix sociale, d'accorder l'immunité au Président KEREKOU ».171 En fait, c'est parce que le principe d'un statut des anciens Chefs d'Etat prévu par la constitution béninoise n'était pas encore aménagé par des dispositions législatives pratiques que l'ex-président SOGLO sollicitait des assurances publiques sur sa quiétude post présidentielle.172 En réalité, même si l'idée de juger les anciens Chefs d'Etat pour les délits et crimes commis lors de l'exercice de leurs fonctions a été avancée çà et là,173 elle n'a jamais triomphé. Au contraire, c'est souvent le pardon qui a triomphé sauf quelques évènements qui se sont déroulés au Burkina-Faso sur l'éventuel comparution de l'ancien Président Blaise COMPAORE dans le procès de Thomas SANKARA, des évènements qui sont encore sans suite car cet ancien Président avait obtenu la nationalité ivoirienne. Aussi, certaines des constitutions et textes législatifs et réglementaires adoptés à l'issue de la période transitoire ont institutionnalisé l'immunité de l'ancien président pour des faits ne remontant qu'à son mandat. Au-delà de l'affirmation du principe de protection au niveau du texte constitutionnel, le législateur précise, parfois jusqu'au détail les modalités de la protection de l'ex magistrat suprême. A titre d'exemple, l'article 4 de la loi guinéenne précitée prévoit que les anciens Présidents de la République bénéficient d'une immunité permanente en ce qui concerne les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions. L'article 5 ajoute même que les anciens Président de la République sont protégés contre les offenses, les injures et les calomnies. Ils ne peuvent ni être cités ni être convoqués devant un tribunal, même à titre de témoin. L'article 6 prévoit même des peines contre ceux qui auront offensé, diffamé, calomnié ou injurié un ancien Chef de l'Etat. Le texte gabonais issu des accords de Paris prévoit lui aussi un régime spécial de protection. Ainsi, seule la Haute Cour de Justice est qualifiée pour connaitre des infractions commises par les anciens Présidents de la République pendant l'exercice de leurs fonctions. Les anciens Président de la République ne peuvent comparaître devant aucune juridiction en qualité de témoin, complice, auteur ou co-auteur des infractions pendant l'exercice de leurs fonctions. En outre, les infractions commises pendant l'exercice de leurs fonctions ne peuvent être poursuivies avant une durée égale à celle de deux mandats présidentiels après la cessation de leur fonction. Le texte congolais quant à lui explicite sur le statut pénal que « Tout ancien Président de la République élu jouit de l'immunité des poursuites pénales pour les actes posés dans l'exercice de ses fonctions, article 7. Et l'article 8 enrichit que pour les actes posés en dehors de l'exercice de ses fonctions, les poursuites contre tout ancien Président de la République élu sont soumises au vote à la majorité des deux tiers des membres des deux Chambres du Parlement réunies en Congrès suivant la procédure prévue par son Règlement intérieur. Aucun fait nouveau ne peut être retenu à charge de l'ancien Président de la République élu et enfin, l'article 9 préconise qu'en matière de crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité commis par tout ancien Président de la 171 J.A. N°1480 du 10 au 16 avril 1996, p. 11. 172 Idem 173 C'était un point de vue défendu par certains acteurs de Conférence nationale. Au niveau de la doctrine, le seul acteur à notre connaissance à théoriser le jugement des anciens dirigeants est D.C. Williams. Cf. son étude « Assessing Future Democracy Accountability at Nigeria. Investigative Tribunals and Nigeria Political Culture ». in Scandinavian Journal of Developpement Alternatives. p. 51. Cité par Ismaila M.F., Le pouvoir exétif... Op., Cit., p. 212. 71 République élu, les juridictions nationales ont priorité sur toute juridiction internationale ou étrangère. » L'économie générale de ces dispositions révèle une volonté certaine de tourner le dos à l'idée de traduire les Chefs d'Etat retraités en justice et de garantir une impunité totale. Mais, celle-ci devrait-elle être accordée à tout Chef d'Etat, notamment à ceux qui accèdent démocratiquement ou non aux fonctions de Chef d'Etat mais qui ne les exerce et ne les acquitte pas conformément à la Constitution ? 2. Les restrictions au bénéfice du statut Dans un continent en proie à l'instabilité politique où la prise du pouvoir par des moyens extraconstitutionnels, pendant longtemps considérée comme la voie de principe d'accès au pouvoir, a permis l'arrivée à la présidence de dirigeants peu respectueux des normes démocratiques, il est nécessaire de déterminer des critères d'accès au pouvoir et d'exercice de celui-ci inspirés des principes démocratiques. En conséquence, le respect de ces critères par les Chefs d'Etat devrait être la condition générale, pour bénéficier du statut une fois qu'ils quittent le pouvoir. Cela ne semble pas être l'option des constituants de l'ère démocratique. En effet, l'analyse des dispositions constitutionnelles et législatives consacrées à la question montre que cette idée d'écarter les Chefs d'Etat parvenus au pouvoir par coup d'Etat n'a pas été consacrée ou l'a plutôt faiblement été. Pourtant, la dynamique démocratique enclenchée depuis une décennie devrait progressivement amener les constituants à n'accorder le statut qu'aux Chefs d'Etat démocratiquement arrivés au pouvoir et l'ayant démocratiquement et loyalement exercé. a. Le principe des restrictions Tout ancien Chef d'Etat peut-il bénéficier du statut ? Les constituants guinéen (Art. 36) et togolais (Art. 75) n'indiquent aucune restriction ou condition, ils accordent donc le statut à tout ancien Chef d'Etat, quelle que soit la voie par laquelle il est arrivé au pouvoir et quelle que soit la façon dont il a exercé ce pouvoir et l'a quitté. Ce n'est pas le point de vue d'autres constituants comme ceux du Mali, du Niger, de la République Centrafricaine, du Bénin ainsi que de la République Démocratique du Congo. L'article 52 de la constitution du Mali, repris in extenso par l'article 62 de la constitution nigérienne du 12 mai 1996 prévoit que la pension n'est octroyée qu'aux anciens Présidents de la République jouissant de leurs droits civiques. Ce qui exclut ceux qui auront fait l'objet de condamnations privatives des droits civiques. L'article 35 de la constitution centrafricaine n'accorde la pension qu' « aux anciens Présidents de la République, démocratiquement élus, et jouissant de leurs droits civiques ». Quant au législateur gabonais, il subordonne le bénéfice continu du statut au respect d'un certain nombre de devoirs.174 Ainsi, il est spécifié que les anciens Présidents devraient observer ces devoirs sous peine d'être déchus de leur statut.175 Il est remarquable que dans la nouvelle constitution nigérienne de 1999, l'article 58 ne fait plus mention de cette précision. Il se borne à indiquer que la loi fixe les avantages accordés aux anciens Présidents de la République et organise les modalités d'octroi d'une pension aux anciens Présidents de la République et Chefs d'Etat. En ce qui concerne la RDC, ce principe est déterminé dans la loi portant statut des anciens Présidents de la République élus en son article 2 point 1 qui stipule qu'au sens de la 174 Des devoirs des anciens Présidents de la République (texte des accords de Paris, précité.) 175 Devoir de réserver sur toutes questions touchant à la souveraineté de l'Etat gabonais, devoir de s'abstenir de tout acte ou manoeuvre tendant à porter atteinte à la sureté intérieure et extérieure de l'Etat... 72 présente loi, on entend par : Ancien Président de la République élu : tout citoyen congolais qui a accédé par élection aux fonctions de Président de la République, les a exercées et les a acquittées conformément à la Constitution. In abstracto, cette définition met des bases pour écarter tout individu qui ne remplit pas loyalement ses obligations vis-à-vis de l'Etat (article 65 alinéa 1 de la constitution congolaise) et qui ne respecte pas son serment prêté et énoncé dans l'article 74 de la même constitution, là, le peuple congolais aura le devoir d'appliquer la disposition de l'article 64 et faire perdre à un ancien Chef d'Etat son statut de sénateur à vie. Finalement, mis à part la constitution centrafricaine et la constitution béninoise qui exigent de l'ancien Président qu'il fut démocratiquement élu pour bénéficier de la pension, les dispositions constitutionnelles et législatives des autres Etats sont assez libérales en ne posant aucune condition ou en exigeant simplement des anciens Présidents qu'ils jouissent de leurs droits civiques pour bénéficier du statut. Pourtant, il parait nécessaire, à notre sens, d'utiliser le statut des anciens Chefs d'Etat comme instrument de normalisation des régimes africains. Dans ce sens, l'on pourrait rationaliser les conditions d'octroi du statut en déterminant dans les textes constitutionnels et législatifs un minimum de critères d'essence démocratique qu'un Chef d'Etat doit remplir pour bénéficier du statut. b. La portée des restrictions En réduisant au minimum les conditions pour bénéficier du statut accordé aux anciens Chefs d'Etat, les nouvelles constitutions on fait montre d'un grand réalisme car maximaliser les conditions en posant par exemple que seuls les Chefs d'Etat démocratiquement élus peuvent bénéficier de la pension consisterait à instituer un droit inadapté au fait. Car le fait est que la plupart des anciens Chefs d'Etat de la période antérieur ne parvenaient pas toujours au pouvoir par la voie démocratique. Seulement, le bannissement des coups d'état et l'institutionnalisation de la compétition pour le pouvoir doivent amener les constituants à envisager d'intégrer dans les lois fondamentales un certain nombre de conditions d'octroi du statut. Ainsi, ne devraient à terme bénéficier du statut d'ancien Chef d'Etat que ceux qui sont parvenus au pouvoir, l'ont exercé et l'ont quitté démocratiquement. L'exigence d'un comportement démocratique standard pendant l'exercice des fonctions fait que le statut ne devrait être accordé qu'à ceux qui le méritent, c'est-à-dire à ceux qui respectaient des principes démocratiques. Par ailleurs, l'application du principe conduira, à l'évidence, à écarter systématiquement les anciens Présidents parvenus au pouvoir par des voies non constitutionnelles. Ainsi, l'on peut se poser la question de savoir si le principe d'écarter les anciens auteurs de coups de force de bénéfice du statut devrait être appliqué de façon absolue. Autrement dit, n'y a-t-il pas lieu, à la lumière de l'expérience et au-delà de l'exigence de condamnation de principe des coups d'état, de faire la distinction entre les coups d'état qui ont eu pour fonction manifeste de stopper le processus démocratique et pour fonction latente de préserver les intérêts du parti, d'un individu ou groupe d'individu et ceux qui ont pour unique dessein de mettre ou de remettre le processus démocratique bloqué en marche ou de mettre fin à une grave crise politique. Evidemment, toute entreprise de distinction entre les coups d'état en la matière devrait faire montre de prudence et de circonspection avec un phénomène en face duquel le juriste mais aussi tout démocrate doit avoir une attitude d'hostilité. Cependant, l'attitude d'hostilité et de condamnation des coups d'état ne devrait pas amener les Etats africains à ne pas avoir une attitude nuancée et critique vis-à-vis des pratiques de coups d'état enregistrés sur le continent. Même s'il est admissible que le coup d'état doit être banni par l'ordre constitutionnel, les auteurs de coups d'état, devenus Chefs d'Etat pour une période transitoire aux termes de laquelle ils ont accepté de garantir l'organisation d'élections transparentes et retourne dans les casernes de leur plein gré, méritent peut être plus de considération statutaire que 73 les auteurs de coups d'état ayant instauré la pérennisation d'un régime anti-démocratique contraint à prendre fin. Enfin, l'octroi d'un statut aux anciens Chefs d'Etat leur confère une certaine immunité qui les dote d'une protection juridique spéciale. Toutefois, cette immunité ne saurait s'assimiler systématiquement à l'impunité. Ainsi, les anciens Chefs d'Etat devront répondre des crimes et délits de droit commun qu'ils auraient commis lors de l'exercice de leurs fonctions. Comme le déclarait le Président malien Alpha OUMAR KONARE au cours du forum de la coalition mondiale pour l'Afrique tenu à Dakar du lundi 1er au mardi 2 novembre 1999 : « Aucun ancien Chef d'Etat ne devrait prétendre bénéficier de l'impunité. La grande quête actuelle de la vie politique en Afrique, c'est l'acceptation par tous les dignitaires, d'une sanction positive ou négative au terme de leurs fonctions à la tête de l'Etat. Nous ne devrions pas généraliser le processus qui a consisté à accorder l'amnistie à certains Chefs d'Etat à l'issue de certaines conférences nationales tenues dans plusieurs pays africains. Doivent être considérée comme des exceptions. »176 Ainsi que le met en exergue le Président KONARE, l'amnistie ne saurait être ni absolue, ni générale, ni permanente, mais exceptionnelle. Après l'ère des transitions démocratiques les régimes post-transitionnels doivent prévoir des mécanismes juridiques visant à reconnaitre et à engager la responsabilité d'anciens Présidents. Au surplus, même si les législations nationales rechignent à le faire, l'engagement de la responsabilité des anciens Présidents de la République est de plus en plus enclenché par le droit international textuel177 et jurisprudentiel178 et connait un début d'effectivité sur le continent africain. L'affaire Hissène HABRE est illustrative à ce propos. Le 3 février 2000, l'ancien Président tchadien fut inculpé par la justice sénégalaise pour complicité d'actes de torture et de barbarie.179 La non-programmation de la fin de la fonction présidentielle participait à l'absence de règles stabilisées destinées à maintenir la paix et l'intégrité nationale. §2. ELAGUER LES ANCIENS CHEFS DE CORPS CONSTITUES L'Assemblée nationale avait adopté en plénière la proposition de loi sur le statut des anciens Présidents de la République Démocratique du Congo. Le texte comporte également plusieurs dispositions controversées y compris celles des anciens chefs des corps constitués. Des avantages à vie accordés aux « anciens chefs de corps constitués » est une prédation qui paraît inaperçue aussi une gabegie financière. La proposition de loi portant statut des anciens Présidents de la République élus, oeuvre du sénateur Modeste MUTINGA MUTUISHAYI, abandonné au Sénat pendant plusieurs années, a ainsi été sortie précipitamment, en 2018, des tiroirs du Bureau de ladite chambre pour être soumise au débat et être élargi aux anciens chefs de corps constitués. 176 Propos rapportés par le quotidien sénégalais sud quotidien du mardi 2 novembre 2000. 177 Il est fait allusion ici à la convention internationale contre la torture et autres peines ou traitement cruels, inhumains ou dégradants du 10 décembre 1984. 178 On vise par-là l'esprit de la « jurisprudence PINOCHET » issue de la décision des Juridictions britanniques d'extrader l'ancien Président chilien en Espagne pour son jugement. L'ex-président PINOCHET fut arrêté à Londres en 1998 sur plainte de Juge espagnol Baltasar GARZON. Renvoyé après de nombreuses péripéties au Chili en mars 2000, il a été inculpé par le Juge GUZMAN, et finalement relâché à cause de son état de santé. Plusieurs cas de poursuite d'anciens Dirigeants pour crimes de guerre contre l'humanité ont suivi l'affaire PINOCHET (Voir : le Monde Diplomatique du mois d'août 2001). L'actualité du droit pénal international montre que d'autres cas de poursuites similaires ne vont pas tarder à être mis en oeuvre. 179 Sur les péripéties de l'inculpation, V. la presse sénégalaise de la première semaine de février 2000. Voir aussi J.A. L'intelligent, du 15 au 21 février 2000 (Hissène HABRE : un dictateur face à la justice. Sur les déclarations du Président sénégalais. Voir : Le quotidien sénégalais Wal Fadjri des samedi 16 et dimanche 17 juin 2001. 74 Cette proposition a été détournée de son esprit initial en deuxième lecture à l'Assemblée nationale pour en étendre frauduleusement aux prétendus chefs de corps constitués. Dans cette catégorie, il y a lieu de citer les Présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale qui, en tant que parlementaires, ont droit à une indemnité de sortie équivalente à six mois de leurs émoluments de fonctions. L'article 109 alinéa 3 stipule « qu'ils ont droit à une indemnité de sortie égale à six mois de leurs émoluments. » Etant, en effet, élus pour un mandat déterminé de cinq ans, rien ne peut politiquement, moralement et juridiquement justifier qu'ils doivent bénéficier des avantages et privilèges viagères. Qui ignore également qu'une pratique vieille de la deuxième République est toujours en vigueur, accordant des indemnités de sortie de six mois à tous les membres du gouvernement ? Comme si le Congo était un butin de guerre que seuls les vainqueurs devaient se partager, les parlementaires ont même oublié qu'il y a plusieurs lois qui accordent déjà plusieurs avantages dont les indemnités de sorti à ces anciens chefs de corps constitués chacun selon son titre et son échelon du pouvoir. La loi portant statut des magistrats accorde déjà des avantages à vie à tous ceux qui ont servi la nation pendant une longue période. En plus de la pension de retraite prévue à l'article 71 de cette loi,180 l'article 63 dispose ce qui suit : y' L'honorariat est le droit pour un ancien magistrat de porter, après la cessation définitive de ses fonctions, le titre de son dernier grade au moment où intervient la fin de sa carrière. y' L'éméritat est le droit pour un ancien magistrat de continuer à bénéficier de son dernier traitement d'activité. Bénéficie de l'honorariat et de l'éméritat, le magistrat qui, âgé d'au moins soixante ans d'âge, obtient sa retraite anticipée, s'il a accompli au moins trente ans de service ininterrompu. Si le Premier président de la Cour de cassation, du Conseil d'État et les Procureurs généraux près ces juridictions cessent d'exercer leurs fonctions, ils sont d'office admis à l'éméritat. Les autres magistrats de la Cour de cassation, du Conseil d'État et des parquets généraux près ces juridictions dont l'exercice des fonctions prend fin après vingt-cinq ans au moins de services ininterrompus bénéficient également de l'éméritat et de l'honorariat si, avant leur nomination à d'autres fonctions en dehors du Pouvoir judiciaire, ils avaient accompli au moins vingt-cinq ans de carrière et qu'ils ne veulent plus réintégrer la magistrature ou qu'il y a impossibilité de les replacer en activité de leur nomination à d'autres fonctions en dehors du Pouvoir judiciaire, ils avaient accompli au moins vingt-cinq ans de carrière et qu'ils ne veulent pas réintégrer la magistrature ou qu'il y a impossibilité de les replacer en activité de service. Le magistrat honoraire conserve le privilège de juridiction tel que prévu par le Code de l'organisation et de la compétence judiciaires. Oubliant qu'en tant qu'institution, le Pouvoir judiciaire est un tout, un corps composé des membres oeuvrant dans les Cours et tribunaux (civiles et militaires) ainsi que dans les parquets qui y sont attachés, les parlementaires en ont fait, pour les besoins de la cause, un monstre à plusieurs têtes ayant plusieurs chefs de corps constitués, tous bénéficiaires des avantages à vie, en plus de ceux déjà prévus statutairement. Il s'agit : des anciens Présidents du Conseil supérieur de la magistrature, anciens Procureurs généraux près la Cour constitutionnelle, anciens Présidents de la 180 Loi organique N° 06/020 du 10 octobre 2006 portant statut des magistrats 75 Cour suprême de Justice, de la Cour de Cassation, du Conseil d'État, de la Haute Cour militaire, anciens Procureurs généraux de la République, Procureurs généraux et Auditeurs généraux près ces juridictions. Non seulement que dans cette énumération, « le législateur » n'a pas respecté la préséance de grades et de fonctions, il a surtout ignoré qu'au moment de l'adoption de cette loi, la Cour suprême de justice était déjà muée en Cour de Cassation. De plus, même si c'est le Président de la Cour constitutionnelle qui préside le Conseil supérieur de la magistrature, il n'a pas été cité en tant que tel dans cette énumération. Dans le même souci de distribuer à tous ceux qui ont contribué « à la conquête du butin de guerre », la mangeoire a été élargie aux anciens Présidents du Conseil économique et social, de la Commission Electorale Nationale Indépendante, du Conseil Supérieur de l'Audiovisuel et de la Communication, de la Commission Nationale des Droits de l'Homme, anciens Chefs d'Etat-major général de Forces Armées et des anciens Commissaires généraux de la Police Nationale Congolaise, anciens Administrateurs généraux de l'Agence Nationale de Renseignements et anciens Directeurs généraux de Migration et aux anciens Chefs d'État-major des forces terrestre, aérienne et navale. S'agissant des forces armées, de la police et des autres services de sécurité, loin d'être des corps au sens que leur donne l'article 2 de cette loi, ils sont tous constitutionnellement mis à la disposition du Gouvernement, ayant à sa tête un chef de corps qu'est le Premier Ministre.181 Comment dès lors expliquer que des responsables des services relevant de la tutelle gouvernementale soient considérés comme des chefs de corps au même titre que le Premier Ministre, les Présidents du Sénat et de l'Assemblée nationale ? C'est dans cette foulée que, préoccupé à assurer ses arrières et celle de ses compagnons du Gouvernement, le Premier Ministre s'était écarté de l'esprit même de la loi pour créer une autre catégorie de bénéficiaires des avantages et privilèges à vie, toujours à charge du contribuable congolais. Alors qu'en Droit un adage latin dit « Fraus omina corrumpit » la fraude corrompt tout. Des deux décrets signés par le Premier Ministre précipitamment le 24 novembre 2018 et publiés au Journal officiel le 15 décembre, avant qu'il ne soit trop tard, l'un concernait les anciens Premiers Ministres et l'autre, les membres du Gouvernement. Ce que bénéficient les anciens Premiers Ministres et les autres membres du Gouvernement selon ces décrets : ? Aux anciens Premiers Ministres, l'indemnité mensuelle de logement fixée à 5 000 dollars, et s'adjoint aux avantages précédent la mise à disposition d'un véhicule - prêt renouvelable tous les cinq ans, un titre de voyage par an - toujours en business class - sur le réseau international pour lui-même ainsi que son conjoint et ses enfants mineurs, un passeport pour chaque membre de sa famille, des soins médicaux au pays et à l'étranger, des funérailles officielles et une garde sécuritaire de deux à trois policiers. »182 ? Aux anciens membres du gouvernement, les avantages ci-après «à charge du Trésor public» sont reconnus: une indemnité mensuelle estimée à 30% des émoluments de ceux en fonction, une indemnité mensuelle de logement estimée à mille dollars américains et un titre 181 Article 91, alinéa 4 « Le Gouvernement dispose de l'administration publique, des Forces armées, de la Police nationale et des services de sécurité. » 182 Jeune Afrique, 01 février 2019, In https://www.jeuneafrique.com/729132/politique/rdc-avant-de-quitter-la-primature-bruno-tshibala-signe-un-decret-saccordant-des-avantages-a-vie/. 76 de voyage par an, en business class, sur le réseau international», lit-on dans ces documents. Ces avantages concernent les 47 ministres, 11 vice-ministres et 2 secrétaires généraux ainsi que «des personnalités exerçant les fonctions équivalentes au rang des membres du gouvernement au cabinet du président de la République et au cabinet du Premier ministre». »183 Mais la mouture initiale du texte, lors de son passage au Sénat, ne prévoyait pas de s'intéresser à leur cas. Il y a eu une rédaction extensive de la loi lors de son passage en commission PAJ [Politique, administrative et juridique], qui dénature son objectif. Comme nous l'avons précédemment évoqué, les pays que nous considérons comme modèles ayant bien organisé le statut des anciens Chefs d'Etat (le Sénégal, la Mauritanie, le Mali, le Benin et le Nigéria) n'ont pas intégré dans leurs lois organiques ce que la loi portant statut des anciens Chefs d'Etat en RDC, appelle anciens chefs de corps constitués, en ne laissant la place qu'aux anciens Chefs d'Etat, leurs conjoints et leurs enfants mineurs. Dans son cours de Droit économique, le Professeur KUMBU en citant monsieur SAVY, qui dit selon lui que le droit économique est l'ensemble des règles tandant à assumer un équilibre entre intérêts particuliers des agents économiques privés ou publics et l'intérêt économique général.184 En ce sens, à cause du péril économique que génère ladite loi, nous estimons raisonnable et avantageux d'écarter les anciens chefs de corps constitués, car, au lieu de leur prise en charge à vie par le trésor public (l'Etat), il serait plus juste de leur accorder des indemnités de sortie, selon un principe universellement admis. Parce qu'au sens actuel de la loi, les finances publiques connaîtront une saignée continue avec l'élargissement, sans fin, du cercle de ces privilégiés. §3. LES PROPOSITIONS POUR UNE LOI DIGNE DES ANCIENS CHEF D'ETAT QUI PRESERVE ET GARANTIT LE DEVELOPPEMENT DE LA REPUBLIQUE L'Afrique en général et la République Démocratique du Congo en particulier, connaît un déficit économique notoire, mais hélas, la loi portant statut des anciens Chefs d'Etat vient empirer ce déficit. Après la promulgation de ladite loi en juillet 2018, le Gouvernement de la RDC s'est engagé à améliorer le cadre de vie des personnes bénéficiaires des avantages et privilèges viagères consacrer dans ladite loi, signant ainsi deux décrets le 24 novembre 2018 et publiés au Journal Officiel le 15 décembre, l'un concernait les anciens Premiers Ministres et l'autre, les membres du Gouvernement mettant ainsi en péril le développement et la croissance économique de la population vu les sommes allouées à ces bénéficiaires. Les principaux défis pour le développement tant économique que social résident dans le respect de la constitution notamment dans ses articles 56, 57 et 58. Dans cette perspective, la présente étude propose quelques idées majeures pour donner à la population congolaise en général et aux anciens Chefs d'Etat en particulier une loi digne et conforme à la constitution, à cet effet, nous proposons : 183 News BENIN VTB, 01 février 2019, In https://beninwebtv.com/2019/02/rdc-indignation-suite-a-un-decret-octroyant-des-avantages-a-vie-aux-ministres-sortants/. 184 Savy R. cité par KUMBU ki NGIMBI Jean Michel, Droit économique, Manuel d'enseignement, Galimage, Kinshasa, 2013, p. 47. 77 1. Au Parlement de :
79 fonctionnement régulier des pouvoirs publics et des Institutions ainsi que la continuité de l'Etat, il est le garant de l'indépendance nationale, de l'intégrité du territoire, de la souveraineté nationale et du respect des traités et accords internationaux, article 69 ; + Savoir que le Président de la République est élu au suffrage universel direct pour un mandat de cinq ans renouvelable une seule fois conformément à l'article 70 alinéa 1er de la constitution en s'inspirant des autres Chefs d'Etat comme John DRAMANI MAHAMA du Ghana, OLUSEGUN OBASANJO du Nigeria, GOODLUCK Jonathan du Nigeria, Abdou DIOUF du Sénégal et Amadou TOUMANI TOURE du Mali ; + Tout mettre en oeuvre pour que la CENI respecte le délai constitutionnel d'organisation des élections conformément à l'article 73 de la constitution et promouvoir l'alternance démocratique et garantir la passation pacifique au pouvoir ; + Savoir que le Président de la République est tenu conformément à l'article 74 de la constitution : > D'observer et de défendre la Constitution et les lois de la République ; > De maintenir l'indépendance et l'intégrité du territoire nationale ; > De sauvegarder l'unité nationale ; > De ne se laisser guider que par l'intérêt général et le respect des droits de la personne humaine ; > De consacrer toutes ses forces à la promotion du bien commun et de la paix ; > De remplir loyalement et en fidèle serviteur du peuple les hautes fonctions qui lui sont confiées. 5. Aux anciens Présidents de la République de : + Aimer son pays, la RDC et ne se laisser guider que par la volonté du développement intégral de la RDC et de sa population ; + Savoir que le fait d'être soumis à une obligation générale de réserve, de dignité, de patriotisme et de loyauté envers l'Etat implique aussi la libéralisation de l'appareil de l'Etat à tout le niveau sans interférence ; + Respecter scrupuleusement la constitution et les lois de la République ; + Savoir que lorsqu'on est sénateur à vie on devient apolitique ; + Savoir qu'il est strictement impossible pour un sénateur à vie qui a brigué ses deux mandats de revenir à la tête de l'Etat ; + Ne pas manipuler ni intimider la famille politique à laquelle il appartenait ainsi qu'à ses alliés ; + Savoir qu'en sa qualité de sénateur à vie, tout ancien Président de la République élu est soumis à toutes les incompatibilités prévues par l'article 108 de la Constitution. 80 CONCLUSION Promulguée le 26 juillet 2018, après son vote dans les deux chambres du Parlement, la loi portant statut des anciens Présidents de la République élus, va causer des problèmes tant financiers qu'économiques en RDC. Outre le fait que sur pied des articles 70 et 104 alinéa 7 de la constitution congolaise, la loi portant statut des anciens Chefs d'Etat fixe les droits et avantages qui leurs sont reconnus, elle entend consolider la démocratie, en l'occurrence par le mécanisme de l'alternance démocratique. Elle détermine également les droits et devoirs reconnus aux anciens chefs de corps constitués qui selon nous est inconstitutionnel. A cause de cet ajout, la RDC se trouve devant un fait accompli avec une loi taillée sur mesure juste pour plaire à un individu qui trouvait insuffisant le statut de sénateur à vie accordé à tout ancien Président de la République élu, mais dont le texte ne fait même plus allusion au statut de sénateur à vie qui leur est déjà accordé par la Constitution, celle-ci ayant primauté sur toutes les lois ordinaires. Ce n'est pas tout, la même loi crée de toutes pièces une autre catégorie de bénéficiaires, dénommés « Chefs de corps constitués », parmi lesquels certains bénéficient déjà, de par la Constitution, des indemnités de sortie et d'autres, des avantages à vie que leurs lois spécifiques leur accorde. Notre problématique a été attirée par l'inconstitutionnalité de la loi N° 18/021 du 26 juillet 2018 portant statut des anciens Présidents de la République élus compte tenu de la violation de l'article 58 de la constitution de la RDC sus évoqué. Il est impérieux dans une analyse scientifique comme celle-ci d'affirmer sur base des questions soulevées dans la problématique que : ? La loi portant statut des anciens Chefs d'Etat est inconstitutionnelle du fait qu'aucune disposition constitutionnelle n'autorise au pouvoir législatif de créer une loi en la matière, bien que la constitution dans son article 100 attribue une compétence au législateur de voter des lois, mais, toute loi organique est toujours expressément introduite et déclarée comme telle par la constitution, par exemple qu'une loi organique détermine telle ou telle autre matière.185 D'autant plus que la compétence est d'attribution, la constitution n'a nullement attribuée une compétence pareille aux parlementaires de voter une loi portant statut des anciens Chefs d'Etat plus grave encore intégrant les anciens chefs de corps constitués ; ? Il est possible pour un ancien Président de la République élu de revenir au pouvoir, seulement au pouvoir exécutif, cependant, il faut noter qu'après l'écoulement de son premier mandat tout sénateur à vie congolais est éligible toute élection présidentielle (en vertu de l'alinéa 1er de l'article 70 précité) jusqu'à ce qu'il exerce et épuise son second et dernier mandat ; ? Il est raisonnable et avantageux d'écarter les anciens chefs de corps constitués, car, au lieu de leur prise en charge à vie par le trésor public (l'Etat), il serait plus juste de leur accorder des indemnités de sortie, selon un principe universellement admis. Parce qu'au sens actuel de la loi, les finances publiques connaîtront une saignée continue avec l'élargissement, sans fin, du cercle de ces privilégiés. La présente étude a pour finalité de donner des réponses adéquates aux problèmes posés par la loi portant statut des anciens Chefs d'Etat depuis le début de son élaboration jusqu'à sa promulgation afin d'assurer le fonctionnement régulier de l'Etat. Dès lors, il ne s'agit pas de 185 Voici un échantillon des articles de la constitution qui déclarent les lois organiques : Art. 150 alinéa 3 fixant le statut des magistrats ; Art. 152 alinéa 5 portant organisation et fonctionnement du Conseil Supérieur de la Magistrature ; Art. 153 alinéa 5 portant l'organisation, le fonctionnement et les compétences des juridictions de l'ordre judiciaire ; Art. 155 alinéa 4 portant l'organisation, la compétence et le fonctionnement des juridictions de l'ordre administratif, etc. 81 discréditer les anciens Chefs d'Etat encore moins les chefs de corps constitués mais de procéder à un ajustement constitutionnel qui permettrait de redistribuer équitablement les richesses nationales. De quoi poser cette question aux nouvelles autorités nationales « Allez-vous cautionner la prédation économique installée par le régime précédent en laissant une aristocratie des privilégiés ? » A cet effet, l'urgence et l'impératif d'abroger, pour inconstitutionnalité, la loi portant statut des anciens Présidents de la République élus pour la reformuler dans le sens de nos observations précédentes, s'impose à tout le monde. L'unique solution, pour répondre à la précédente question et pour gouverner le Congo dans la paix et la tranquillité, consiste à neutraliser politiquement et judiciairement ce système de prédation avant qu'il ne soit trop tard. Ne pas le faire, équivaudrait à s'en rendre complice, car comme le disait un auteur186 « plus coupable que ceux qui font le mal, sont ceux qui ne le dénoncent ni le combattent ». 186 Mohandas KARANCHAND GANDHI, Philosophe, dirigeant politique et guide spirituel de l'inde, né le 02 octobre 1869, mort le 30 janvier 1948. 82 BIBLIOGRAPHIE I. TEXTES OFFICIELS 1. Les Constitutions
2. Les lois et autres textes officiels
II. OUVRAGES
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84
III. NOTES DES COURS
IV. ARTICLES ET REVUES
85 V. THESES, MEMOIRES ET TFC
VI. JURISPRUDENCES
VII. WEBOGRAPHIES
86 VIII. AUTRES REFERENCES
AFRIQUE 41 87 TABLE DES MATIERES EPIGRAPHE ii IN MEMORIAM iii DEDICACES iv REMERCIEMENTS v 0. INTRODUCTION 1
CHAPITRE I. 13 NOTIONS SUR LE STATUT DES ANCIENS CHEFS D'ETAT 13 SECTION I. DEFINITION DES CONCEPTS CLES 14
SECTION II. PRESENTATION DE L'AFRIQUE 17
SECTION III. PRESENTATION DE LA RDC 34
CHAPITRE II. 40 STATUT D'UN ANCIEN CHEF D'ETAT EN RDC 40 |
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