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De la determination de l'intérêt supérieur de l'enfant en matière de filiation: réflexion à  la lumière de la jurisprudence


par Basila PANISSE GABRIELLA
Université Officielle de Bukavu - Graduat 2019
  

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C. La filiation dans le code de la famille de 1987 et 2016

En République Démocratique du Congo, le législateur est intervenu pour la première fois en 1987 après l'indépendance dans le domaine familial40(*) ; il s'est aligné sur cette logique de la protection égalitaire des enfants et a voulu mettre fin à la discrimination41(*) en matière de filiation. Affirmant l'égalité des droits et devoirs de tous les enfants dans leurs rapports avec leurs père et mère, il a consacré une option dite « politique fondamentale » selon laquelle « tout enfant congolais (zaïrois) doit avoir un père », avec comme conséquences :

Ø La suppression du vocable « enfant naturel » et son remplacement par « enfant né hors mariage » ;

Ø Le changement de l'expression « reconnaissance d'enfants naturels » en « affiliation d'enfants nés hors mariage » ;

Ø La création de la « paternité juridique » pour les enfants dont les pères géniteurs sont inconnus ;

Ø L'attribution à l'adoption de l'objectif principal qui est de « donner à l'enfant un cadre familial d'accueil ».

Précisons qu'avant la Loi n° 87-010 de l'août 1987 portant code de la famille, il y a eu au Congo deux périodes non négligeables : avant et après l'indépendance. En effet, pour Paul Van Den Wiele42(*), avant l'indépendance, les colonisateurs s'efforcèrent de ne pas bouleverser le cadre traditionnel de la vie sociale et organisèrent une justice sociale pour les indigènes.

Ainsi, selon Verstraete, les autochtones congolais restaient régis par leurs coutumes locales, alors qu'une législation écrite, tel que le décret du 4 mai 1895 portant code civil livre 143(*) régissait les rapports des Belges, des autres étrangers de contrées non voisines, des apatrides et individus sans nationalité connue et de certains Congolais immatriculés.

La matière de la filiation, elle, était réglementée dans les titres VIII et IX de ce décret portant code civil livre 1.44(*) Aux termes de l'ordonnance du 14 mai 1886 de l'administrateur général du Congo, quand la matière n'est pas prévue par un décret, un Arrêté ou une ordonnance déjà promulgué, les contestations qui sont de la compétence des tribunaux du Congo seront jugées d'après les coutumes locales, les principes généraux du droit et l'équité.

Ce texte consacrait le dualisme juridique qui a marqué toute la période d'avant la loi de 1987 portant code de la famille, une loi qui est intervenue avant l'adoption, au niveau international, de la Convention relative aux droits de l'enfant du 20 novembre 1989 et, au niveau régional, de la charte africaine des droits et du bien- être de l'enfant du 2 juillet 1990.

L'article 593 du Code de la famille interdit toute discrimination, quelles que soient les circonstances dans lesquelles la filiation a été établie, alors que l'article 646 du même Code fait produire à la filiation ses effets, quel que soit son mode d'établissement, dès la conception de l'enfant.

1. En matière d'établissement de filiation

Il a interdit expressément toute discrimination entre Congolais, basée sur les circonstances dans lesquelles leur filiation a été établie, et a reconnu les droits prévus par le Code de la famille à tous les enfants congolais sans exception aucune;

Il a rendu obligatoire l'établissement de la filiation paternelle des enfants nés hors mariage, en prévoyant des peines d'amende et de servitude pénale en cas d'affiliation tardive ou de refus d'affiliation45(*); il a accordé à la filiation juridique (civile) le caractère permanent, à l'instar de la filiation par le sang, en consacrant l'irrévocabilité de l'adoption.46(*)

2. En matière de droit alimentaire

Il a accordé à tous les enfants les mêmes droits et leur a imposé les mêmes devoirs dans leurs rapports avec leurs père et mère47(*); il a placé aussi parmi les débiteurs de l'obligation alimentaire, les descendants, frères et soeurs et les autres parents, et précisé que la parenté résulte de la filiation d'origine (biologique), dans et hors mariage, et de la filiation civile (juridique et adoptive).48(*)

Le législateur colonial favorisait l'application des coutumes locales dans la résolution des litiges des autochtones tant que celles-ci n'étaient pas contraires à la loi, instituant ainsi un dualisme avec prédominance de la coutume pour les Congolais.

3. En matière de succession

Il a placé dans la première catégorie des héritiers tous les enfants du decujus49(*): les enfants nés dans le mariage, hors mariage mais affiliés du vivant du decujus, et adoptifs. Il a également imposé le partage de la part héréditaire des héritiers de la première catégorie entre eux par portions égales.50(*)

Déjà à son temps,Meulders-Kleinfait savoir « Lelégislateur belge a rompu avec le droit antérieur qui, depuis 1804 et malgré de faibles retouches en 1908 et 1958, fondait sur le mariage ou le non-mariage des parents un système d'inégalités fortement hiérarchisées selon la gravité de la faute commise ». D'autres auteurs belges51(*) affirment que le législateur a marqué comme une des lignes de force essentielles, le principe d'égalité ou de non-discrimination entre les enfants, qu'ils soient ou non issus du mariage et a aboli le privilège de légitimité en matière de la filiation.

L'on note par ailleurs qu'avant ces réformes, le traitement discriminatoire des enfants en Belgique comme en République Démocratique du Congo avait comme critère le mariage monogamique52(*). Et les diverses catégories de filiation étaient évaluées selon que l'enfant était conçu dans le mariage, hors mariage ou contre la loi du mariage. Ceux-ci n'existent plus aujourd'hui en RDC.

Il y avait plusieurs insuffisances et contradictions en matière d'établissement de la filiation, des droits alimentaires et successoraux des enfants. Ces insuffisances et contradictions existaient, malgré la détermination du législateur de mettre fin à la discrimination entre les enfants et la ratification par le Congo des instruments internationaux53(*) relatifs aux droits de l'homme en général et aux droits de l'enfant en particulier. On peut se frotter les mains car avec l'avènement de la Loi portant protection de l'enfant et le nouveau code de la famille, les droits de l'enfant et surtout en matière de la filiation se voit matérialiser.

Il importe alors d'examiner la manière dont s'établit et se conteste la filiation en droit congolais de la famille.

Section II. De l'établissement et de la contestation de la filiation

Dans cette présente section, serons examinés de manière séparée, l'établissement de la filiation (§1), ensuite, il sera question d'examiner la contestation de la filiation (§2).

§1. De l'établissement de la filiation

Dans un premier temps nous ferons allusion à l'établissement de la filiation paternelle (A) et en second lieu interviendra l'établissement de la filiation maternelle(B).

A. De l'établissement de la filiation paternelle

D'entrée de jeu, la filiation paternelles'établit soit parla présomption légale en cas de mariage, soit par une déclaration, soit par une action en recherche de paternité.

Pour marquer l'importance de la prédominance de l'établissement de la paternité dans presque toutes les cultures congolaises, le législateur a décidé que : « tout enfant Congolais doit avoir un père. Nul n'a le droit d'ignorer son enfant, qu'il soit né dans le mariage ou hors mariage... ».54(*)

En vertu de cette conception qui consacre l'importance de la filiation paternelle et pour arriver à concrétiser sa détermination de donner un père à chaque enfant, le droit congolais organise trois modes d'établissement de cette filiation :

Ø La présomption légale en cas de mariage ;

Ø La déclaration de paternité ;

Ø La recherche de paternité en cas de naissance hors mariage.

Malgré la distance souhaitée par rapport à l'ancien droit traditionnel et colonial, le législateur du Code de la famille n'est pas arrivé à unifier les modes d'établissement de filiation à l'égard de tous les enfants. Pour expliquer cette différenciation qui persiste également en droit belge, Meulders-Kleinécrit : « parce que la paternité est plus difficile à prouver que la maternité et parce que le mariage facilite cette preuve, une ligne de clivage horizontale continue à séparer, sous l'empire de la nouvelle législation, les règles applicables selon que l'enfant est né dans le mariage ou hors mariage ».55(*)

Cependant, à la différence du droit beige, le droit congolais préconise l'emploi du terme "déclaration" en lieu et place de celui de "reconnaissance" lorsqu'il est question de la filiation de l'enfant né hors mariage. Ce choix d'une nouvelle terminologie semble se justifier, selon les explications de la Commission de réforme par «le souci de permettre aux Juristes Congolais de prendre leur distance à l'égard du droit occidental, et de faciliter la traduction des textes en diverses langues africaines ».56(*)

La filiation paternelle peut être établie à la suite d'une action judiciaire de recherche de paternité appelée « action en recherche de paternité ». Dans cette action, l'enfant réclame son père mais il le fait sous la représentation de sa mère ou d'un membre de sa famille maternelle ou enfin d'un magistrat du parquet.57(*) Nous y reviendrons dans notre deuxième chapitre.

La présomption de paternité, avons-nous dit, ne joue que s'il y a un lien de mariage, c'est-à-dire lorsqu'une dot a été versée à l'ayant droit de la mère par le groupe familial du père. En l'absence de la dot, la situation de l'enfant se révèle différente selon qu'il s'agit d'une femme libre ou d'une fille encore sous la garde de ses parents.

B. De l'établissement de la filiation maternelle

Il sied de noter que la filiation maternelle résulte du seul fait de la naissance ; elle s'établie soit par l'acte de naissance soit par une déclaration volontaire de maternité soit par une action en recherche de maternité58(*).

En effet, si le nom de la mère est indiqué sur l'acte de naissance de l'enfant, cela suffit à établir la filiation maternelle59(*). Cependant, lorsque le nom de la mère de l'enfant n'est pas indiqué sur l'acte de naissance de l'enfant, la mère peut faire une déclaration de maternité devant l'officier de l'état-civil de sa commune qui l'inscrit dans l'acte de naissance ou en dresse un autre acte.

Le code de la famille a prévu aussi la filiation maternelle d'un enfant après son décès60(*). Un enfant a aussi le droit d'intenter une action en recherche de maternité.

La filiation maternelle hors mariage s'analyse, en droits traditionnels congolais, comme tout lien de parenté entre un enfant et sa mère pour qui l'union matrimoniale manque de légitimité fondée sur le versement de la dot61(*). L'établissement de la filiation maternelle s'opère par le seul fait de l'accouchement du nouveau-né ; mais, la considération de cet enfant varie selon les systèmes juridiques qui régissent ses père et mère.

§2. De la contestation de la filiation

Dans ce paragraphe, il sera question d'examiner d'un côté la contestation de la filiation paternelle (A) et de l'autre, nous prendrons soinsd'examiner la contestation de la filiation maternelle (B).

A. La contestation de la filiation paternelle

La paternité peut être contestée s'il estprouvé que pendant le temps qui a couru depuis le trois centième jour jusqu'au cent quatre-vingtième jour inclusivement avant la naissance de l'enfant, le père était soit pour cause d'éloignement, soit pour toute autre cause établie de façon certaine, dans l'impossibilité physique de procréer.62(*)

En effet, la loi dispose que l'action en contestation de paternité peut être intentée par les personnes suivantes :

Ø Celui auquel la loi attribue la paternité de l'enfant ;

Ø L'enfant majeur ;

Ø La mère de l'enfant ;

Ø Les cohéritiers de l'enfant ou ceux qu'il exclut d'une succession, lorsque celui auquel la loi attribue la paternité est mort.63(*) Sauf pour l'enfant, le délai en contestation de la paternité est d'un an.64(*)

Au regard de ce qui précède, toute action qui sera introduite se fera dans l'intérêt supérieur de l'enfant. Aussi, il se remarque qu'il n'ya pas de délai endéans lequel son action ne peut plus être recevable et ce qui traduit le principe phare qui gouverne le droit de l'enfant notamment l'intérêt supérieur de l'enfant.

B. La contestation de la filiation maternelle

En droit congolais de la famille, la filiation maternelle résulte du seul fait de naissance.65(*) La contestation de la filiation maternelle est vraiment difficile à établir des lorsque la maternité est certaine.

La contestation dans d'autres droits notamment le droit français de la famille est possible à cause bien entendu de l'évolution scientifique qui fait qu'on est introduit dans leur droit la notion de la mère porteuse.

Cependant, en droit congolais, la déclaration de la maternité peut être contestée du fait de l'incapacité résultant de l'incapacité judiciaire par le tuteur de l'interdit et après la mainlevée de l'interdiction, par l'auteur de la déclaration.66(*) Aussi, la déclaration de maternité peut être révoquée. Elle peut être contestée par toute personne intéressée ainsi que le ministère public, s'il prouve que celle à qui la maternité a été attribuée n'est pas la mère conformément à l'article 598 du code de la famille.

Les dispositions de l'article 596 n'assurent pas l'égalité entre le père et la mère puisque cette disposition ne concerne que la mère : l'indication du nom du père dans l'acte de naissance de l'enfant ne permettra pas d'établir sa filiation à son égard. C'est relativement critiquable à l'heure où l'égalité est le maître mot de toute réforme du droit de la famille. Toutefois, on peut encore y voir le simple rappel que biologiquement, c'est la mère qui porte l'enfant.

Par ailleurs, il n'est pas interdit à la mère de réaliser une reconnaissance prénatale, notamment pour la question du nom de l'enfant67(*). L'accouchement sous le secret dit accouchement sous X (traditionnellement définicomme la possibilité pour une femme de laisser son nouveau-né aux services de l'Etat et le droit de demeurer anonyme aux yeux de la société) n'est pas remis en cause. Selon le nouveau régime français, les actions en recherche de maternité et de paternité obéissent aux mêmes règles. L'exigence de présomptions ou d'indices graves est supprimée (grande place pour l'expertise biologique)69(*). Les effets de la filiation sont les décisions dont les juges prononcent en matière de la filiation.

* 40 BAYONA-BA-MEYA M. K. ; « Protection juridique de l'enfant dans le projet du code de la famille », R.J.Z., Numéro Spécial, Société d'études juridiques du Zaïre (S.E.J.Z.), 1980, p.33.

* 41 Ibidem

* 42 VAN DEN WIELE, Le droit coutumier privé et son évolution au sein des sociétés négro-africaines ». T.1 Les personnes, éd. ENDA, Léo., 1961 p. 3.

* 43 VERSTRAETE, Droit civil du Congo belge, T. 1, Larder, Léo, 1956, p.35. Et E. Lamy affirme que ces Congolais immatriculés étaient moins nombreux - de l'ordre de 1/1000 Congolais Voy. E. LAMY « Le problème de l'intégration du droit congolais, son origine, son évolution et son avenir », in R.J.C., n° spécial, 41 année, 1964 p. 138.

* 44 P. PIRON et J. DEVOS, Codes et lois du Congo belge, Larder, Léo, 1960, p.49.

* 45 Article 645 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 46 Ibidem, Articles 728 et 695.

* 47 Ibidem, Article 593.

* 48Ibidem, Article 614.

* 49Ibidem, Article 758.

* 50 Ibidem, Article 759.

* 51 A. SOHIER, op.cit, p.23.

* 52 M. Th. MEULDERS-KLEIN, « L'établissement et les effets personnels de la filiation selon la loi belge du 31 mars 1987 », in Le nouveau droit de la filiation, Ann de Louvain, n° 3-4/1987, p. 220.

* 53 F. RIGAUX, « Le nouveau droit de la filiation à l'épreuve des droits de l'homme », Ann. Dr 1987, p. 381.

* 54 L'article 591 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 55 M. T. MEULDERS KLEIN, op.cit, p.34.

* 56 ONESIME KANGOMBA, Guide pratique des droits des enfants et élèves, Kinshasa, 2017, p.21.

* 57 Ibidem.

* 58 F. RIGAUX, « Le nouveau droit de la filiation à l'épreuve des droits de l'homme », Ann. Dr 1987, p. 381.

* 59 Art 600 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 60 Art 599 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 61 F. RIGAUX, Op.cit, p. 381.

* 62 Article 606 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 63 Article 610 de la Loi n0 073/84 du 17 Octobre 1984 portant Code de la famille, in JORDC, n0 spécial tel que révisé en 2016, in http//www.legatnet, cd, CDF,2017, PDF, Consulté le 30 décembre 2020.

* 64 Ibidem, article 611.

* 65 Ibidem, article 595.

* 66 Ibidem, article 597 alinéa 4.

* 67 SOSSON, « Actions en contestation de paternité : la Cour constitutionnelle ne sou?e-t-telle pas le chaud et le froid ? », Rev. trim. dr. fam., 2013, p. 556.

68 D. PIRE, « Filiation : la Cour constitutionnelle, seul tribunal de la famille du Royaume ? », note sous C. const., 3 février 2016, J.L.M.B., 2016, p. 415.

* 69 Ibidem.

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