La diplomatie camerounaise et la crise irakienne de 2003. Essai d'analyse historiquepar Didier BALIABA Université de Yaoundé I - Master en histoire des relations internationales 2018 |
CONCLUSION DE CHAPITRELa gestion de la crise du Golfe dans un contexte de disparition de la confrontation bipolairea ouvert de nouvelles perspectives pour le droit international et les institutions chargées de l'appliqué. C'est dans ce contexte que, le gouvernement irakien fut mis en demeure par l'ONU afin de respecterses engagements internationaux conformément au droit et traités en vigueur. Cependant,après plusieurs annéesde rapports peu concluants en raison d'un défaut de collaboration et de manoeuvresdilatoiresdes autorités irakiennes à l'égard de l'ONU, les inspections en désarmementsont suspendues, sans pour autant mettre fin à la menace d'une action militaire Américaine.En2002, la résolution1441 adoptée à l'unanimité, par les membres du Conseil de Sécurité, laisse présager un règlement consensuel et pacifique du conflit.A l'issue de ce vote, le gouvernement irakien accepte, sans conditions les termes de la résolutionainsi que le retour des inspections de l'ONU sur son territoire. Malgré, la reprise des inspections,les Etats-Unis, en février 2003, à l'absence de découverte de toute preuve probante d'ADM proposent au Conseil de Sécurité des sanctions militaires contre l'Irak.Devant cette proposition qu'il juge prématuré, le Conseil de Sécurité exprime son désaccord.S'en suit alors entre les membres du Conseil de Sécurité, une controverse diplomatique qui conduit à l'impasse des négociations et provoque l'entrée en guerre unilatérale des Etats-Unis, contre l'Irak. CHAPITRE IIILA DIPLOMATIE CAMEROUNAISE DANS LA CRISEIRAKIENNE DE 2003 Le Cameroun dispose comme tout autre Etat, d'un systèmede pensées qui formel'ossature de son principe de vision du monde et le référentiel de sa logique de projection et d'action sur la scène internationale. Aussi bien, ce principe de vision que la logique de projection qui en découlent sont influencés par des structurants divers. Il s'agitd'une logique de projection ou d'action visant à atteindre, à court, moyen ou long termes, desobjectifsspécifiquesqui visent de manière substantielle la promotionet la préservation de l'intérêtnational. Cette quêtede l'intérêt nationalexplique en partie, le combat que mènent les plus hautes autoritésdu payspour une meilleure prise en compte de la voixdu Camerounau sein des instances internationales.L'implicationde la diplomatie camerounaisedansla crise irakiennede 2003 au Conseil de Sécurité de l'ONUparticipede ce truisme.Le chapitreque nous abordons,analyse laposition diplomatiquedu Cameroun dans ce conflit.Avant de nousappesantir sur ce qu'il en ait, il estloisiblede présenterd'bord les circonstances del'implication du Cameroundans ce conflit. 61 A- LE CAMEROUN PROTAGONISTE INVOLONTAIRE DE LA CRISE IRAKIENNE L'implication du Cameroundans la crise irakienne de 2003 relève d'un concoursfortuit de circonstance. Même si, la candidaturecamerounaiseau Conseil deSécuritéde l'ONU, ne saurait être de cet avis. L'étude que, nousprocédonsci-dessous analyse l'enjeuet le prestige diplomatiqueque représentepour un pays une place demembre au Conseil de Sécuritéfut-il,permanent ou nonet, lerôledecetteinstance dans le maintien de la paix et la sécurité internationales. 1- Le Cameroun : membre non-permanent du Conseil de Sécurité ToutEtat qui aspire à faire partie d'une structure, d'un organe ou d'une organisation, se doit au préalable et suivant la procédureclassique de faire acte de candidature. Autrement dit, c'est montrer comment une telle décision de la part d'un Etat souverain est loin d'être une aventure sans réflexion. Dans le cadre de l'ONU et suivant les dispositions de la Charte, tout Etat intéressé par un quelconque poste au sein des diverses instances de l'organisationse doit de parvenir sa ou ses candidatures au secrétariat général. Le Secrétaire général s'en charge alors de compiler l'ensemble des dossiers de candidatures reçus et les transmet à l'Assemblée Générale, qui est l'organe législatif de l'organisation au titre du point d'« élection des membres postulant aux divers organes ouinstitutionsspécialisées » sollicités.Le Camerounpour sa part a manifesté son intention de faire acte de candidatureau Conseil de Sécuritéen 2000, dès lors que des raisons qui luiétaient propres sous-tendaient cette volonté. L'élection au Conseil de Sécuritéde l'ONU en qualité de membre non-permanent tient compte de deux principaux critères: la contribution au maintien de la paix et de la sécurité internationaleset la répartitiongéographique. Si à la lumière du premier critère, la contribution du Cameroun à la promotion de la paixmondiale aussi bien à travers son investissementdans certaines OMP119(*) que par son implication dansla mise sur-piedde mécanismes sous régionaux de « sécuritécollective »120(*)semble constituer un atout non négligeable, il y a cependant lieu de reconnaitre que le second principe représentait un enjeu et une opportunité pour le Cameroun. 62 En effet,le mandat de deux pays du Groupe des Etats de l'Afrique à l'ONU arrivait àexpiration le 31 décembre 2001. Les sièges que devaient laisser vacants la Tunisie et le Mali constituaient assurément à la fois un enjeu et une opportunité pour le Cameroun qui, dès lors prit la décision de faire acte de candidature au Conseil de Sécurité. De plus, ladiplomatiecamerounaisea dans une certaine mesure également puisé sa motivation dans le principe de rotation en vigueur au sein de l'OUA/UA qui prône l'alternance entre la sousregionAfrique du nord et celle de l'Afrique centrale121(*). Par cette décision, le Cameroun voulait d'une part témoigner sa foi et sa confiance à l'organisation mondiale et d'autre part manifester sa totale adhésion aux valeurs de référence que sont : la paix et la sécurité. Ainsi, qu'il voulait réitérer son attachement et sa fidélité aux principes énoncés par la Charte. Bien que, participant déjà depuis son admissionen 1960 de façon active aux activités et à la vie de l'organisation, le Cameroun voulait accroître son prestige diplomatique notamment en renfermissant sa présence, ne fut-ce que de manière symbolique, au sein d'un cercle de décision d'importanceconsidérable comme le Conseil de Sécurité.Ensollicitant un siège de membre non-permanent au Conseil de Sécurité, le Cameroun souhaitait aussi apporter sa contribution à la recherche des solutions aux problèmescruciaux de la planète. Bref, aider modestement à faire de l'ONU un « centre ou s'harmonisent les efforts des Nations vers (leurs) fins communes »122(*). C'est dans cette perspective que, le 8octobre 2001123(*),lors de la 56èmesession ordinairede l'Assemblée Générale des NationsUnies, à New York que, le Cameroun futélu, comme membre non-permanent du Conseil de Sécurité pour une période de deux ans. Cependant, force est de reconnaitreque c'est la deuxième fois que le pays remplit cette mission. En effet,entre 1974 et 1976, le Cameroun a siégé au sein de cette instance onusienne. Le Conseil de Sécuritéest l'organe des Nations Unies chargé de veiller sur la paix et la sécurité internationales. Il compte quinze membres, dont cinq permanents, dotés du droit de veto. Les dix autres membres non-permanents sont élus pour un mandat de deux ans, renouvelable, chaque année. L'Afrique qui ne bénéficie pas d'un siège permanent,à trois représentants au sein du Conseil de Sécurité. Ainsi,entre le 1er janvier 2002 et le 31 décembre 2003, le Cameroun et un autre pays africain, en occurrence la république de Guinée,effectuèrent leur mandature, en remplacement de la Tunisie et du Mali ;etrejoignirent l'Ile Maurice qui y siégeait déjà, un an auparavant. Au cours de cette mandature, le Camerounaeu à assurer la présidence du Conseil de Sécurité de l'ONU, entre le 1er etle 31 octobre 2003.Conformément à la règle de rotation qui veut que chaque membre du Conseil de Sécurité assure la présidence du Conseil pour un mois. A la fin de celle-ci, le jeudi 31 octobre, c'est à la Chine qu'est revenu pendant le mois de novembre,l'honneurde remplacer le Cameroun auquel,les caprices et hasards de la rotation ont imposé une mandature « explosive »124(*). En effet, la diplomatie secrète mais efficace du Cameroun menée par son représentant permanent auprès de la mission des Nations Unies, Martin Belinga Eboutou, et pour la circonstance président du Conseil de Sécurité, amenépasmal de dossiers importants et délicats. Le dossier sur le désarmement de l'Irak a été de loin, celui que tout le monde qualifia de « brûlant ». Car, la paix du monde était suspendue à un fil et en dépendait. Bâclé et même tout simplement non traité depuis la fin de la guerre du Golfe, le dossier irakien aurait pu engager une intervention américaine dans ce pays dès le mois d'octobre 2002. Mais,le Cameroun s'étant promis de marquer de façon indélébile son mandat au Conseil de Sécurité ; sa diplomatie a coulissé dans l'ombre,afin de minimiserles risques d'un affrontement militaire entre l'Irak et les Etats-Unis. Le passagediplomatique de notre pays à la présidence du Conseil de Sécurité a permis de mettre en évidence la capacité suggestive de sa diplomatie. Bien qu'il n'aitpas pu bloquer projet de résolution américano-britanniquequi prévoyait une intervention militaire en l'Irak, ilexigea néanmoins de revoir sa copie etveilla entre autre que les termes utilisés dans ce projet de résolution, garantissent l'indépendance de la Commission d'inspection en désarmement vis-à-vis des Etats et que,Américains et Britanniques ne brandissent pas ipso facto la guerre comme réponse automatique à un éventuel constat de manquement des engagements pris par l'Irak125(*). En dehors de la question du désarmement de l'Irak, la présidence camerounaise a aussi inscrit trois thèmes dans l'agenda mensuel du Conseil de Sécurité. Les thèmesinscrits étaient entre-autres : la circulation des armes légères et de petitscalibres, la coopération entre l'ONU et l'Afrique centrale en matière de maintien de la paix, et lerôle de la femme dans la promotion de la paix et la sécurité. Ces thèmes ont étédébattu en plénière, les8,22 et 25 octobre 2002. A côté de ces trois dossiers, la présidence camerounaise aégalement été de tous les contacts diplomatiques quotidiens. Des instances formelles et informelles,autant qu'aux nouveaux évènements protocolaires ou non. Elle a accordé par exemple, une attention particulière, le 10 octobre 2002 à la déclaration de Gilbert Guillaume, Président de la Cour Internationale de Justice de La Haye, portant sur le verdict du différend frontalier entre le Cameroun et le Nigeria, au sujet de la presqu'île de Bakassi. En somme, jadisétiqueté comme un Etat du tiers monde,on constate que, le Cameroun n'en manque pas une certaine libertéd'actionface à la diplomatie internationale.De ce fait,protagoniste à part entière des relations internationales depuis 1960,le pays valorisetant bien que mal ses compétences externes acquises dans l'ordreinstitutionnel mondial. 2- Le rôle du Conseil de Sécurité dans l'architecture paix de l'Ordre international La paix mondiale dépend d'un organe des Nations Unies, parfois assez mal connu, le Conseil de Sécurité. Créé par la Charte en 1945, le Conseil de Sécurité occupe une position centrale dans la gouvernance de lapaix et la sécurité internationales.En tant qu'organe exécutif des Nations Unies, il travaille sans discontinuer. En plus des cinq membres permanents dotés du droit de veto, que sont : les Etats-Unis, le Royaume-Uni de Grande Bretagne et d'Irlande du nord, la France, la Russie et la Chine, le Conseil de Sécurité comprenait initialement six membres non permanents, élus tous les deux ans par l'Assemblé Générale, selon leur contribution au maintien de la paix. Un amendement proposa d'élargir sa composition à quatre nouveaux membres non permanents. Il fut adopté en 1963. Les dix membres non - permanents sont élus pour un mandat de deux ans, non renouvelable immédiatement, selon un critère géographique prédéfini : trois Etats africains, trois Etats asiatiques, deux Etats latino-américains, un Etat d'Europe orientale et un Etat d'Europe occidentale ou autre. 66 La mission du Conseil de Sécurité selon, le chapitre VII de la Charte de Nations Unies est de préserver et de restaurer la paix et la sécurité internationales. Il s'agit concrètement, au nom des Etats membres qui sont tenus « d'accepter et d'appliquer »126(*) ses décisions et s'engagent à mettre à sa disposition « les forces armées, l'assistance et les facilités »nécessaires, en cas de menace contre la paix, de rupture de la paix et d'actes d'agressions. Le Conseil de Sécurité est le seul organe habilité à prévenir ou arrêter les hostilités en cas d'agression internationale. La procédure mise en place se déroule généralement de manière suivante : le Conseil de Sécurité constate dans un premier temps l'agression, il peut ensuite faire des recommandations, enfin, il peut décider des sanctions en vue, allant jusqu'à une action militaire avec l'appui des forces mises à sa disposition par les Etats membres. Le Secrétariat général, ne peut fonctionner que dans le cadre des missions qui lui sont fixées par le ConseilSécurité. Celui-ci est organisé pour exercer ses fonctions en permanence, et chacun de ses membres doit avoir à tout moment un représentant au siège de l'organisation, à New-York qui, lui confère une « voix »127(*). Depuis sa mise en exécution, le Conseil de Sécurité a adopté une multitude de résolutions sur une multitude de problèmes compromettant la paix et la sécurité internationales.Cependant, le contraste le plus saisissant dans le fonctionnement du Conseil de Sécurité n'est ni sa présidence tournante de mois en mois ou encore moins sa composition. L'important, c'est que les membres non-permanents ne pèsent pas lourds dans les votes et les processus de prise de décision. En effet, pour avoir force de loi, les résolutions du Conseil de Sécurité doivent être adoptées par au moins neufs (9) voix sur quinze (15), dont celle des membres permanents, qui disposent d'un droit de veto et que, le refus d'un seul d'entre eux, peut bloquer toute initiative collective et paralysée l'action de l'ONU. Ils ne s'en sont d'ailleurs pas privés d'en user au cours des cinquante dernières années. « Le champion du « non » est la Russie, autrefois l'URSS avec 118 vetos. Suivie des Etats-Unis, 70 (dont 31 au sujet des résolutions concernant la Palestine) ; du Royaume-Uni, 30 ; et de la France, 6 »128(*). Autant dire que pendant toute la période de la Guerre Froide, le Conseil de Sécurité s'est trouvé incapable de maintenir la paix quand le dossier étudié concernait un membre permanent. Aucun, des conflits impliquant les deux Super-puissancesn'ontététraités. C'est le cas, de la crise des missiles de Cuba en 1962 ou de la guerre du Vietnam,en 1968 etc. Face à l'incapacité d'assumer la paix mondiale à eux confiés, par la Charte, lesmembres du Conseil de Sécuritéprivilégient des regroupements d'alliancesdéfensifs. Ce moyen est sans conteste privilégié par les Etats-Unis et l'URSS qui,entreprennentainsi de régionaliser leur défenseautour d'organisations militaires et de pactes défensifsfonctionnant également comme des alliancespolitiques. C'est le cas notamment, de l'organisation des Etatsaméricains (OEA) sur le continent Américain qui, créé en 1948reprend les engagements édictés par le pacte de Rio de Janeiroen 1947 sur l'alignement sans faille des EtatsSud-américains derrière la politique étrangère des Etats-Unis ; de l'OTAN en Europeoccidentale ou du pacte de Varsovie de 1955,le système Est-européen de défenseet rivaldu système Euro-atlantique. Cetterégionalisation de la « sécuritécollective » est complétée par de nombreux traités d'assistance mutuelle. C'est ce que l'on aappelé la « pactomanie »129(*)du Secrétaire d'Etat américain à la Défense, Foster Dulles ou traitésde sécuritéet de défenseentre l'Australie, la Nouvelle-Zélande et les Etats-Unis (ANZUS), signé en 1951 ;les traités bilatéraux avec la Corée du Sud,le Pakistan, la Chine de Formose, en 1951 et 1952 ; l'Organisation du traité de l'Asie du Sud-est (OTASE) en 1954,etc. Tous ces projetsdéfensifsrégionaux ont connu des fortunes diverses. Certains ont disparu avec la fin de la Guerre Froide, à l'instar du pacte de Varsovie, officiellement dissout en 1991. Quant à l'OTAN,elle s'est étendue. De douzemembres à sa création en 1949,elle encompte vingt-huit aujourd'hui, et est engagé dans plusieursthéâtresd'opérations de paix et d'interventionsarméesà travers le monde(Bosnie, Kosovo, Afghanistan, Lybie). Au demeurant, le Conseil de Sécurité n'a donné son aval qu'uneseule fois àune opération militaire. En effet, en 1951,le drapeau des Nations Uniesfutconfié aux Etats-Unis pour contrer l'offensive communiste Nord-coréenne,en Corée du sud130(*). Les Soviétiques avaient commis l'erreur de s'abstenir à participer aux délibérations du Conseil de Sécurité pour protester contre le fait que, le siège de la république populaire de Chine était occupé par le représentant de Taiwan.« La pratique onusienne a donné naissanceà une règlecoutumière, confirmé par la Cour Internationale de justice selon,laquelle l'abstention d'un membrepermanent n'est pas équivalenteà un veto »131(*). Depuis lors, l'URSS n'a plus jamais commis l'erreur d'être absente des délibérations, et l'ONU s'est trouvée paralysée à cause de l'utilisation permanente du droit de veto, sauf quand il s'est trouvé une majorité qualifiée de l'Assemblé Générale (pour les opérations de paix de Suez et de Hongrie, en 1956) pour passer outre blocage. Aujourd'hui que le nombre des Etats membres est de 193, depuis l'admission du Soudan du Sud, en 2011, de plus en plus des voix se font entendre pour réclamer une reforme ou une abrogation du droit de veto. Lefrançais, Hubert Védrine, alors ministre des Affaires étrangères,en 1999, proposa que les « Grands »renoncent (le droit veto) à s'en servir « quand leurs intérêts vitaux ne sont pasenjeu »132(*). Toutefois, les contestations les plus virulentes viennent de nouvelles puissances qui désirent modifier la composition du Conseil de Sécurité et réclament une reforme leur accordant, un siège de permanent au sein du Conseil. Des projets de réforme, le rapport Carrington entre autres, proposent son élargissement mais pour aboutir, une révision de la Charte s'impose. Or, s'agissant d'une décision aussi majeure, elle requiert l'accord unanime des cinq membres permanents qui ne sont pas pressés de partager leurs privilèges avec d'autresEtats. Le Conseil de Sécurité n'est donc pas représentatif,et sa réformeest sans cesse envisagée, puisrepoussée. Si les cinq membrespermanents se satisfont du statu quo actuel, l'institution ne pourra le justifier indéfiniment au risque de perdre tout ou partie de sa crédibilité.L'objectif d'accroitre le nombre de membresde quinze àvingt-cinqest partagé par la plupart des protagonistes. Mais, lesblocages apparaissentlorsque l'on évoquele problème des membrespermanents. La France et la Grande Bretagne, peu soucieuses de laisser leurs siègesà l'Union européenne proposent d'élargirle cercle à l'Allemagne, au Japon, auBrésil et à un grand Etat africain. Leur altruisme est, semble-t-il proportionnel à l'opposition d'une quarantaine de pays, réunis dans le « Coffee group » et menés par l'Italie, le Pakistan, l'Indonésie, l'Argentine, et le Mexique, au projet d'élargissement franco-britannique. De plus, les Etats-Unis, la Russie et la Chine, pour des raisons diverses, ne montrent aucun empressement à modifier la donne.Les Américains, parce qu'ils contrôlent mieux le système ;les Russes parce que leur statut de grande puissance est moins dilué ; et les Chinois parce qu'ils se méfient des japonais. Afin de surmonter toutes ces oppositions,certains ont envisagé une remise en cause complète de la règle de veto,en prévoyant la désignation denouveaux membres permanents privés de cedroit de veto ou la désignation rotative de ses membres. L'initiativea été fermement repoussée par tous les intervenants. Le Conseil de Sécurité est également critiqué pourdes raisons d'équité, notamment pour des différences de traitement faceà des situations similaires.Mais son impuissance est plus la conséquence d'un désintérêtflagrant de la part de ses membres les pluséminents. Conscient de cette faiblesse structurelle interne de l'organe,le Cameroun,considéré comme« pupille des Nations Unies », adhère à toutes ses propositions, notammentcelle, d'unéventuel élargissementde ses membres. En attendantla mise sur pied d'une telle initiative,examinons d'abord, sonpositionnement diplomatique dans ce conflit. B- LECAMEROUN FACE A LA CRISE IRAKIENNE Entre 2002 et 2003, durantla « crise irakienne »,le Cameroun a fait partie avec l'Angola133(*) et la république de Guinée, l'un destrois pays africains membresnon-permanent du Conseil de Sécurité de l'ONU. Lapositiondéfendue par le Cameroundans cette crisedécoulait desprincipestraditionnelsde sa politique étrangère en matière de résolution des conflits. Parmi ces principes, figurententre autres:le non recours à la force etl'arbitragedes institutions internationales. 1- « Bâtir la paix dans la paix » « Pupille de l'ONU »,l'attachement du Cameroun à oeuvrer pour préserveret promouvoir la paix,selon les principesvéhiculés parla Charte des Nations Uniesvise à apportersamodeste contribution pour l'édification de la paix mondiale et le respect du droit international. Eneffet,le non-recours à la force dans les relations internationales provient d'une extensiondu principe de la politiqueintérieuredes Etats selon lequel,les acteurs de la société civile renoncent au recours à la force entre-eux et confient l'arbitrage des conflits aux institutions134(*). Le non-recours àl'utilisation de la force constitueainsi une norme impérative du droit international tout comme son corollaire, l'obligation de résoudre les différends internationaux par les moyens pacifiques, auxquels a souscrit le Cameroun. Ils sont affirmés par l'article 2 « paragraphes 3 et 33 de la Charte des Nations Unies » et avec encore plus de vigueur par la déclaration relative aux principes du droit international touchant les relations amicales et la coopérationentre Etats qui, viseàpréserver l'ordre,le droit international et la paix dans le système mondial. Il s'agit, concrètement d'un principe servant à régir les relations inter et intra-Etatiques sur la base du respect de la souveraineté des Etats et des populations. La ferme adhésion de Yaoundéà ce principe cardinal des relations internationales est matérialisée sur le terrain diplomatique par la condamnation de toutrecoursà la force dans les différends entre Etats. L'invasion du Koweït par l'Irak de SaddamHussein en 1990,fut dénoncée par la diplomatie camerounaise. JacquesBoohBooh, alors ministre des relationsextérieuresdans une allocutionà la tribune des Nations Unies avait condamné l'agressionirakienneet demandé leretrait immédiat et sans condition des troupes irakiennes du Koweït et le rétablissement du gouvernement légitime de ce pays135(*).La position de principe de la diplomatie camerounaise à ce sujet se fondait sur le fait que l'usage de la force dans les relations internationales et en particulier l'annexion d'un pays par un autre est inadmissible, car susceptible d'aiguiser les ambitions hégémoniquesdes Etats plus puissants vis-à-vis des plus faibles. Yaoundé a fait du non-recours à la force un précepte fondamental de sa diplomatie de construction de la paix. Mise à part quelques frictionspolitiques, souvent observéesavec la Guinée Equatoriale136(*) ou lorsqu'il s'agissait d'apporter un soutien, aux Mouvements de libération nationale,en Afriqueaustraledans les années 1970, lequel soutien était d'ailleurs, une recommandation de l'OUA ;le Cameroun s'est toujours refusé de soutenir lerecoursà la force comme mode de résolutiondesconflits. Pas plus qu'il n'aeu à faire usage de la force contre l'intégritéterritoriale d'un autre pays. Le moins qu'on puisse dire c'est que l'adhésion du Cameroun à ce principe a étéréaffirmédans la résolution de la crise de Bakassiavec son voisin, le Nigeria. Car, comme aimaità lerappeler,leprésidentAhmadouAhidjo à ce sujet, « si un jour il devraity avoir des hostilitésentre les deux Etats se ne sera aucunement à l'initiative du Cameroun »137(*). LeCamerouna rarementété mis en cause par quelques pays que ce se soit d'entretenir de la subversion ou d'apporter une assistance logistique ou autre à des forces rebellesopposées au gouvernement légal d'un autre pays. Cette diplomatie de paix se reflèteconcrètement dans les fonctions tribuniciennesassignées aux agents diplomatiques du Cameroun qui, dans les différentes instances internationales n'ont de cesse de rappeler face aux convulsions et turbulences du système international que la force du droit doit prévaloir sur le droit de la force. Le conflitirakiende 2003 en est une illustrationparfaite de cette vertu affirmative de la diplomatie camerounaise. LeCameroun comme deuxautres pays africains, l'Angola et la république de Guinée, enoccurrence,membres non-permanent du Conseilde Sécuritédes Nations Unies, au printemps de l'année 2003 se trouvaient sous les feux de l'actualité internationale et avaient la possibilité de voter « pour »ou « contre »la guerre en Irak. Le vote de ces paysdont, les postures ambigües pouvaient faire pencher la balance dans un sens comme dans un autre a fait l'objet de fortes pressionsde la part des deux Camps. Pour comprendre l'intérêtsubitdes puissancesFrançaise et Américaine pour ses Etats, somme tous modestes sur le plan diplomatique, il convient de rappeler que, pour être adoptée, une résolution du Conseil de Sécurité doit réunir au moins neuf voix sur quinze et ne doit pas faire l'objet de veto de la part d'un membre permanent. La voix d'un Etat, si petit soit-il devient alors un enjeu déterminant. Les ballets diplomatiques incessants de Paris, Washington et Londres d'une part en direction de Yaoundé, Conakry et Luanda d'autre part, les derniers jours précédent le conflit illustre de cet intérêt. La querelle diplomatique qui a opposé la France et les Etats-Unis pendant cette période a fait du Camerounun pays courtisé.En effet, le dilemme auquel fut confrontée la diplomatie camerounaise, écartelée entre les positions Française et Américaine138(*)ce, apriori sans grand rapport avec la crise irakienne mérite qu'on s'y attarde.Même si, par principele Cameroun semblait plus proche de Paris que de Washington et, s'était même prononcé comme bon nombre d'Etats africains réunis dans la capitale française en février 2003, lors du XXIIesommet des Chefs d'Etat et de Gouvernements, Afrique - France, pour une alternative à la guerre139(*). Cependant, il serait erroné d'appréhender le Cameroun comme un acteur des relations internationales dont l'influence diplomatique est assuméeau même titre que les puissances Française ou Américaine. La France et les Etats-Unis en effet, disposent de moyens de pression importants sur le Cameroun. Ce qui place ce pays dans une situation de dépendance vis-à-vis de ces puissances. Pendant, la période qui aimmédiatement précédée l'intervention des Etats-Unis en Irak, des trois Etats africainsprésents au Conseil de Sécurité seul, le Cameroun apparaît comme le plus réceptif de tous au discours des autorités françaises et américaines, ce pour bon nombre de raisons. Au plan politique,la France est sans aucun doute le pays occidental qui a le plus d'influence au Cameroun. Cette influence se justifie par le fait que, la France fut le premier pays occidental à avoir signé des accords de coopération avec le Cameroun en 1959 alorsque, le pays n'était pas encore indépendant. Ces accords prennent leur envol, le 13 novembre 1960 et permettent au régimed'AhmadouAhidjo de bénéficier de l'aide militaire française pour venir à bout de la rébellionupeciste140(*). Paris vient en aide à Yaoundé pour sauvegarder ses intérêts à travers le président qui a son estime et à mêmed'assurer ses intérêts. En retour, Yaoundé, ne peutque bon le vouloiren donnant, l'accès facileaux entreprises françaises au marché camerounais. Ainsi, laFranceest le premier fournisseur du Cameroun et son deuxième client. Les échanges commerciaux entre les deux pays étaient évalués à plus d'un milliard d'euros au début de la décennie 2000141(*). Malgré, l'irruption de nouveaux acteurs concurrents comme la Chine, le Japon ou les Etats-Unis ; la France absorbe 12% des exportations camerounaises142(*) notamment, les matières premières minières (pétrole, aluminium) et agricoles (caoutchouc banane, bois). Au plan stratégique, la coopération militaire entre la France et le Cameroun repose sur un accord militaire et un accord de défense signés, le 21 février 1974 et revisité le 21 mai 2009. Cette coopération est juridiquement encadrée par deux instruments : la convention fixant les règles et modalités d'un soutien logistique aux forces armées camerounaises et l'accord de coopération militaire.Ce qui a fait dire à certains analystes que, en cas de conflit ouvert avec le Nigeriapour la souveraineté de Bakassi, cet instrument ne serait pas inutile143(*). Cependant, les Américains disposaient aussidesmoyens de pressions notamment, leurcapacité à influer dans le processus de recherche d'une solution négociéeavec le Nigeria dans l'épineux dossier de Bakassi. Encore moins, celle de suspendre le Cameroun des pays bénéficiaires de l'AGOA.En effet, cette législationpréférentielleaméricaine à l'égard des pays africains, interdit à tout Etat signataire de s'engager dans les activités qui mineraient la sécuriténationale desEtats-Unis dans le domaine de la politique étrangère. Acôté de cesmoyens de pression, on pourraitaccoler aussi un soutien de l'opposition par leDépartementd'Etat notamment,celui de son leader, Ni JohnFruNdi comme, ce fut le cas en 1992144(*). Au demeurant,le lobbying diplomatique auquel, s'est livréla France et l'Angleterre,auxiliaire de la diplomatie américainesur le continent au lendemain du projet de vote de la seconde résolution145(*) du Conseil de Sécurité sur ce dossier,explique la position du président PaulBiya qui, a dû pendant cettepériode se livrer àun dangereux exercice de funambulisme diplomatique146(*). La visite et à deux reprises à Yaoundé, de la Sous-secrétaire britannique au « Foreign office » chargée des Affaires africaines, Valery Amos les 3 et 12 mars 2003147(*) et de Dominique de Villepin, le ministre français des Affaires étrangères et de la coopération, le 11 marstémoigne de ce momentcornélien. Le ministre françaisaainsi, pour l'occasion déclaré devant la presse « qu'il était venu dire au président Biya à quel point la France était soucieuse de trouvé une solution négociée à la crise que connait en ce moment la communauté internationale au sujet de l'Irak (...).Il s'agit d'un choix à faire entre la guerre et la paix »148(*). Les deux émissaires, du Président Chirac et du Premier Ministre Tony Blair étaientvenus à Yaoundé pour « faire pression » sur le président camerounais. En fait, il fallait amener Paul Biya à s'aligner derrière l'une ou l'autre position. Mais pour Yaoundé, il n'y avait l'ombre d'aucun doute.Le Cameroun avait déjà tranché de se prononcer contre la guerre tant qu'on pouvait par une autre alternative parvenir au désarmement de l'Irak. Le Cameroun ne peut pas apporter son support aux ambitions hégémoniques américaines de dominer le monde. Nous sommes contre la guerre et souhaitons que l'Irak soit désarmé de façon pacifique. Aujourd'hui l'Irak coopère avec les inspecteurs de l'ONU et détruit ses armes. Il faut donc donner une chance à la paix et plus de temps aux inspecteurs pour leur travail149(*). La suitede ce sillage révèle en effet que, le 5 février 2003, le ministre des relations exterieures, François Xavier Ngoubeyou,représentantdu Cameroun dans ce dossier fit savoir la positionofficielle du gouvernementcamerounais: Le désarmement de l'Irak ne doit pas apparaitre comme un face à face entre ce pays et les Etats-Unis. Le désarmement de l'Irak intéresse et préoccupe la communauté internationale tout entière. C'est par conséquent une affaire entre le Conseil de Sécurité, donc l'ONU et l'Irak. Il faut faire prévaloir le droit international, la diplomatie multilatérale et l'action collective au sein et dans le cadre de l'ONU150(*). L'attachement du Cameroun à oeuvrer pour la paix et le respect du droit international soumis à un cadre multilatéral préalable - avait laissé entendrele président Biyaà l'émissaire britannique, Valery Amos151(*) -qu'il ne peut et ne doit être sous-estimé par des pays amis et partenaires du Cameroun152(*). Cette posture de la plus haute autorité de l'Etat à l'endroit de son hôte peut être appréhendée comme une affirmation de la personnalité camerounaise et la volonté d'exercer pleinement son libre arbitre dans les affaires internationales. La position des autorités camerounaise sur la question irakienne s'inscrivait donc dans la logique des principes de la politique étrangère duCameroun à savoir : le règlement pacifique des différends et le recours à l'arbitrage de l'ONU en cas de conflit comme, illustré dans le règlement du conflit frontalier qui, plusieurs années durant l'avait opposé au Nigeria. En effet, le verdict de la Cour Internationale de Justice, rendu le 10 octobre 2002 sur ce conflit, connu sous l'appellation de « l'Affaire de Bakassi », favorable au Cameroun confortait la position de la diplomatiecamerounaise dans la question irakienne sur le rôle impartial de l'ONU dans le règlement des conflits internationaux. La diplomatie camerounaise qui se singularise par une attitude de prudence reflèteau mieux le souci des autorités de ce pays, à veiller au respect des engagements internationaux auxquels, le Cameroun a souscrit. Avant toute initiative diplomatique, le Cameroun évalue au mieux ses intérêts, et par anticipation les réactions éventuelles de ses partenaires stratégiques153(*). Chaque fois que, les intérêts du Cameroun se justifient, le pays a refusé d'agir par suivisme.Il refusa de soutenir la sécession du Biafra (1967-1970) contre le gouvernement central de Lagos, en s'opposant au Général,De Gaules et à certains Chefs d'Etats africains comme, Omar Bongo Ondimba du Gabon et Felix Houphouët Boigny de Côte d'ivoire qui, avaient choisi de suivre Paris dans son aventure de « break up Nigéria ». Ce légalisme de Yaoundé demeure encore aujourd'hui un des vecteurs directeurs de sa politique étrangère, et est traduit depuis l'accession du Cameroun à la souveraineté politique par une adhésion sans réserve des différents instruments normatifs internationaux proclamant ou réaffirmant la sacralité du principe de non-ingérence et du non recours à la force. L'engagement pour la paix et la coopération internationale, principes auxquels, leCameroun a souscrit commeundogme desa politique étrangère constitue un motif d'espoir pour l'humanité et le progrès. Le président Paul Biya ne cesse d'ailleurs de le rappeler : « seule la paix peut fournir à tous les moyens de la démocratie et du développement »154(*). Les diverses sollicitations dont, a fait le Cameroun de la part du partenaire anglo-américainne pouvait raisonnablement espérer que ce pays puisse opter pour une stratégie de désarmement de l'Irak qui, remettent en question sa mentalité de « mendiant de la paix ». Au demeurant, les initiatives de paix du Cameroun, aussi bien dans les instances multilatérales que bilatérales se manifestent sous plusieurs angles. D'abord, dans la perspective de la contribution qu'il apporte à l'affirmation, à la permanence et au renforcement de celui-ci en matière de règlement pacifique de différends dans l'ordre juridique et institutionnel international. Ensuite, de sa détermination à oeuvrer pour inviter d'autres Etats à son respect dès lors que la paix et la sécurité internationales sont compromises. Enfin, cet attachement peut être aussi envisagé dans le sens de l'implication, modeste certes mais néanmoins symbolique de la diplomatie camerounaise dans la résolution pacifique des différends et son action en faveur du relâchement ou de l'apaisement des tensions internationales. L'adhésion à ces principes se manifestent également à travers les diverses clauses contentieuses contenues dans les accords et traités du Cameroun. Toutes, sans exception préconisent la recherche des solutions adéquates par la voie pacifique en cas de différends nés de l'interprétation ou de l'exécution d'instruments conventionnels. Comme, le démontre la démarche conciliatoire et arbitrale auprès des institutions internationales autour du différend frontalier qui, longtemps l'a opposé à son voisin, le Nigéria, à propos de la presqu'île de Bakassi. 2- OEuvrer pour la conciliation et le respect de l'arbitrage des institutions internationales Lasuite àces initiatives depaix renseignentque, leCameroun a choisi d'agir autour dedeux axes complémentaires:la conciliation et l'arbitrage des institutions internationales.A cet effet, la gestion du différend frontalier de Bakassi avec son voisin, le Nigeriapeut être considérer comme un cas d'école. En effet, faceà l'agression nigériane le 21 décembre 1993et le refus de s'exécuter à l'arrêtdu 10 octobre 2002, de la Cour Internationale de Justice, au motif qu'elledénie à la presqu'île de Bakassi sa nigerianité ; Yaoundé a opté pourrésoudre de cette crise avec son voisin,en articulant sa démarche autour de deux axes conciliatoires à savoir:diplomatique etjuridictionnel. Sur le plan diplomatique, devant l'agression nigériane, les forces armées camerounaises sont intervenues d'abord pour défendre l'intégritédu territoirenational. Elles ont ainsi pu arrêterla progression des forces arméesennemies et stabiliser le front. Cependant, le Cameroun a perdu « son autorité sur la péninsule tout en conservant sa souveraineté »155(*).A la suite de cetteagression, le pays requît, une réunion d'urgence du Conseil de Sécurité des Nations Unies, avant de saisir tout aussi, l'Organe central de mécanisme de l'OUA pour la prévention, la gestion et le règlement des conflits. Ainsi que, la médiation de certains Chefs d'Etats africains comme, le président togolais, Ngnassimbé Eyadema, qui initia les rencontres de Kara (Kara I et Kara II) entre les deux pays.L'action diplomatique conjuguée des différents acteurs internationaux a permis indubitablement de stabiliser la crise. Toutefois, il faut relever que, l'ONU à travers son organe juridictionnel avaiteu à rendre pareille décision en 1963. Décision, à l'époque,qualifiée denavrante par les autorités camerounaises dans l'affaire dite du NorthernCameroons,née autour du plébiscite des 11 et 12 février 1961entre le Cameroun etle Nigeria. Au centre du contentieux, il y avait la perte par le Cameroun de sa partie septentrionale rattachée au Nigeria, autrefois administrée par la Grande Bretagne, en vertu des accords de mandat et de tutelle156(*). En dépitde ce quine faisait point de doute du territoireanciennement allemanddu Kamerun, la Cour statua en défaveur de la république fédérale du Camerounau motif, de l'incompétence qui est sienne à décider avec autorité de la chose juger sur cette affaire, et reconnût implicitement, lerattachement du NorthernCameroons à la républiquefédérale du Nigeria. Yaoundé mis devant lefait accompli s'inclina avec regret devant cette instance d'arbitrage international et mis fin à sa coopération avec l'organe onusien. Afin de trouver une issue définitive à la crise de 1993, le Cameroun renoua sa coopérationavec l'organe judiciaire onusien,et lui déferaà nouveau l' « Affaire »dite de Bakassi,en 1994. Le recours introduit par les autoritéscamerounaises sur l' « Affaire de Bakassi » contre le Nigeriaà la CIJportait au départ, sur la question de souveraineté de la presqu'île. Mais par la suite, d'autres requêtes furent introduites notamment, celle sur la demande de réparationfinancière et dela démarcationcomplète de la frontière entre les deux pays. Il faut préciser que, les deux pays ont en commun une frontièreterrestre et maritime deprès de 2000 km.Frontière qui vadu lac Tchad àl'océan Atlantique. En prélude au verdict qui était pendant à la CIJ, se tîntà Saint-Cloud, une banlieue de la ville de Paris, en France, le 5 septembre 2002, la rencontre réunissant les Chefs d'Etats camerounais et nigérian autour du Secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan. Le président français, jacques Chirac avait offert ses bons offices pour un aboutissement fructueux des négociations entre les parties nigériane et camerounaise, une fois le verdict de la Cour, rendu. Au cours de l'entretien que le Chef de l'Etat camerounais a accordé à la presse, Paul Biya visiblement satisfait des pourparlers déclara : En attendant ce verdict,il était nécessaire que les autorités politiques se rencontrent pour créer les conditions de l'application du verdict. La réunion de Saint-Cloud a été utile,dans la mesure où elle a permis de réaffirmer la volonté des deux Etats de respecter le verdict de La Haye et d'y introduire les Nations Unies pour la mise en oeuvre des mécanismesappropriés. Je pense aussi qu'il était question de promouvoir des conditions de confiance pour rendre applicable le verdict de La Haye.157(*) Le 10 octobre 2002, la CJI rendu son verdict.Ce verdictstatueet reconnaît lacamerounité de Bakassi. Cependant, l'applicationde ce verdictmalgré, l'engagement pris par le président OlessegunObassandjo, à Saint-Cloud serévéla mal aisé face aux réticences d'une certaine classe politiquenigériane. Les autorités camerounaisesse trouvèrentainsidans un dilemme : saisir de nouveau, le Conseil de Sécurité aux fins d'application de l'arrêt, ceci en vertu de l'article 94158(*) de la Charte avec le risque de voir le dossier s'enliser dans les marécages de la politique internationale et le jeu des intérêts ou alors, poursuivre la recherche d'un règlement négocié sous les auspices de l'ONU. Le choix du Cameroun se porta pour la deuxième option. Yaoundé sollicitaainsi, le soutien de ses partenaires bilatéraux traditionnels: les Etats-Unis, la Grande Bretagne, la France et l'Allemagne.En plus, de l'ONU dont le Secrétaire général, Koffi Annan instituadèsle mois de novembre 2002,des rencontres tripartites etpériodiques au cours desquelles, ilmitles deux Chefs d'Etat devant leurs responsabilités - et face à l'histoire. C'est dans un tel esprit, que se tînt, le 15 novembre 2002, le sommet de Genève, en Suisse, qui réunit les deux dirigeants. Au cours de ce sommet, ilfut question d'examiner les modalités pratiques de la mise en oeuvre de l'arrêt de la Cour Internationale de Justice.Entre 2002 et 2005, se tinrentégalement des commissions mixteset dessommets tripartites (Yaoundé, Genève, New-York, et Abuja),maintenant certes une paix précairemais jamais sans parvenir à l'affrontement et à l'application intégrale de l'arrêt de la CIJ.Toutefois,au cours des différentes rencontres, les deux Chefs d'Etats, camerounais et nigérian s'engagèrent à accorder leur partition pour une normalisation des rapports entre leurs deux pays. Le respect par chaque Etat du verdict de la Cour Internationale de Justice fut l'une des mesures consensuelles contenues dans les différents communiqués signés à l'issue de chacune de ses rencontres. La primauté du droit devant prévaloir sur la logique des armes. Au demeurant, cesnégociationstrilatéralesont abouti, le 12 juin 2006 à la signature de l'accord de Greentree entre les présidentsPaul Biyaet OlessegunObassandjo, enprésence des quatre Etatstémoins dontles Etats-Unis, l'hôte du sommet. L'accord de Greentree marque ainsi une étapeimportante dans l'accomplissement par les deux pays deleurs obligations internationales en matière de paix et offre un exemple historique de relation de bon voisinage destiné àperdurer, où le règne du droit et de la thèse de règlement pacifique de conflits triomphent. Le respect par le Cameroundes idéauxet principes de l'ONU,confortaitainsi sa diplomatiedans la question irakienne.Le Camerounen segardant de répondre aux provocationsde son voisinnigérianqui, manifestement voulait en découdre à travers les armes, a choisi n'ont pas la voie de la confrontation mais plutôt celle de la compétitiondiplomatique pour faire face à l'adversité.Dans cette perspective, le paysrevisita tout l'arsenal juridique des accords et traités datant de la période coloniale ainsi que, ceux signés entre Yaoundé et Lagos depuis l'accession des deux pays à la souveraineté internationale. Du traité Germano-britanniquede juin 1885 àl'accordde Maroua-salak,du 1erjuin 1975,en passant par celui,signé entre l'Angleterre et l'Allemagne, le 13 mars 1913 ;toutes les pièces de l'armature juridiquefurent réunies et établirent de manière irréfutable la camerounité de Bakassi. Dans l'accordGermano-britanniquede 1885, il est stipuléque :la séparation des sphères des deux puissances est délimitée sur la côte par la rive droite du Rio delRey qui se jette dans lamer entre 9°8' de longitude Est,rapporté au méridien de Greenwich159(*). L'accordAnglo-allemand de 1913 lui, matérialise le tracé de la frontière entre le Cameroun et le Nigeria,de Yolaà la mer et la règlementation de la navigation sur le fleuve Cross River. Cedernier traité auquel, s'est appuyéprincipalement, la CIJ pour rendre son verdict stipule,en son article 20que, quand bien même :« le lit de la rivièreAkwayafe venait à se déplacer pour se jeter dans le fleuve Rio delRey, il est entendu que le territoire actuellement connu sous le nom de Bakassi reste, territoireallemand »160(*).L'accord Anglo-allemandrésouddonc toutes les ambiguïtés probables et sert de document de références,grâceà sa clarté sur le tracé de la frontière entre les deux pays. L'accord de Maroua-salaklui, rappelle que : les Chefs d'Etatscamerounais et nigérian conviennent de prolonger le tracé de la frontière maritime, de l'embouchure de l'Akwayafeau « point 12 », soit à environ 32 kilomètres descôtes. Cependant, cettedélimitationoff-shore de la péninsule fut infléchie au détriment du Cameroun « pour laisser dans les eauxterritoriales nigérianes le chenal d'accès àCalabar, par l'estuaire de la Cross River »161(*). Detout ce qui précède, il ressort que le Cameroun pour résoudre le différendterritorial de Bakassi avec le voisin nigérian a mobilisé à la fois des ressources juridiqueset diplomatiques.Ces référentiels, définis par les plus hautes autorités de l'Etatproclament la volonté du peuple camerounais d'entretenir avec les autres peuples du monde « des relations pacifiques et fraternelles conformément aux principes formulés par la Charte des Nations Unies ». * 119Comme ce fut le cas dans les missions de maintien de la paix suivantes : l'Autorité Provisoire des Nations Unies au Cambodge (APRONUC) de 1992 à 1993, pour laquelle le Cameroun a fourni 75 éléments de force de police. La Mission intérimaire de l'administration des Nations Unies au Kosovo (MINUK) où le pays fourni 21 Agents de police. * 120Tels : le COPAX, le comité consultatif permanent des Nations Unies chargés des questions de sécurité en Afrique centrale (CCPNU/AC). * 121Gerald, Djounang Nanga, « Le ministère des relations exterieures et la participation du Cameroun au Conseil de Sécurité des Nations Unies », Rapport de stage académique/diplomatie, Yaoundé, IRIC, 2002, pp.2-4 * 122Voir, chapitre I, article 1er, alinéa 4 de la Charte des Nations Unies. * 123 Gerald, Djounang Nanga, « Le ministère des relations extérieures et la participation du Cameroun au Conseil de Sécurité des Nations Unies », Rapport de stage /diplomatie, Yaoundé, IRIC, 2002, p.2. En effet, selon, G., Djounang Nanga, le Cameroun fut élu par une large majorité de voix : soit 172 sur 177 votants. * 124Patrice, Etoundi Mballa, « Conseil de Sécurité : le Cameroun passe le relais à la Chine », in Cameroon Tribune, N°7717, le 4 novembre, 2002, pp.6-7. * 125Ibid. * 126 Article 25 de la Charte des Nations Unies. * 127Charte des Nations Unies, article 27, alinéa 1. * 128Alain, Faujas, « A quoi sert le Conseil de Sécurité ? »,Jeune Afrique/L'intelligent, N°2182, du 4 au 10 novembre, 2002, p.88-89. * 129Guillaume, Devin et Marie Claude Smouts, p.161. * 130Pendant, la guerre de Corée (1950-1953), l'ONU ne put intervenir que, grâce à l'absence momentanée de l'URSS au Conseil de Sécurité. Les Etats-Unis, pris l'initiative de confier à l'Assemblée Générale les responsabilités jusque-là dévolues au Conseil de Sécurité, en faisant voter, en 1950, la résolution Acheson .Cette résolution prévoit, en effet : en cas de veto au Conseil de Sécurité, une majorité d'Etats membres peut susciter, une session extraordinaire d'urgence de l'Assemblée Générale, qui peut à la majorité des deux-tiers se substituer au Conseil de Sécurité dans ses décisions. La résolution Acheson a joué explicitement ou implicitement au moment des crises de Suez, Hongrie, en 1956, Liban, 1958, etc. Elle n'est plus utilisée, en raison de l'unamisme nouveau du Conseil de Sécurité, mais elle demeure un recours éventuel. * 131 Antoine, Gazano, Les relations internationales, Paris, Edition Gualino, 2001, p.85. * 132Alain, Faujas, jeune Afrique/L'intelligent, p.89. * 133L'Angola ayant remplacé entre-temps, l'Ile Maurice dont le mandat est arrivé à échéance, le 31 décembre 2002. * 134Dan, O'meara et Stéphane, Roussell, Théories des relations internationales : contestations et résistances, Montréal, Athéna, 2007, p.95. * 135Jaques,BoohBooh, Ministre des relations extérieures à la tribune des Nations Unies, le 26 septembre 1990, in Cameroon Tribune, N°4731, du 28 septembre, 1990. * 136Le Cameroun a été accusé, en 2003, par les autorités de Malabo, d'apporter, à partir de son territoire, un soutien au « subversif » Equato-guinéen, le colonel Cipriano Nguema Mba Mitoho. Celui-ci fut kidnappé au Cameroun, séquestré dans les locaux de l'ambassade de Guinée-Equatoriale, puis exfiltré du Cameroun à partir d'un véhicule diplomatique et assassiné en Guinée-Equatoriale. D'autres embrouillaminis notamment, frontaliers et sécuritaires rythment les plaidoiries équato-guinéennes contre le Cameroun, au quotidien. * 137Narcisse, Mouelle Kombi, La politique étrangère du Cameroun, Paris, L'Harmattan, p.60. * 138Dieudonné, Oyono, « La seconde guerre du golfe et la résurgence des « malentendus transatlantiques » : le dilemme camerounais », p.13 * 139Marc, Aicardi de Saint Paul, « La France, l'Afrique et le déclenchement de la guerre en Irak »,Géostratégique, N°15, Paris, 2003, disponible sur, www.academiedegeopolitiquedeparis.com * 140Dieudonné, Oyono, Avec ou sans la France ? La politique africaine du Cameroun depuis 1960, Paris,L'Harmattan, 1990, p.143. * 141Larissa, Kojoué Kamga, « Le président Sarkozy et les relations franco-camerounaises », Dynamiques internationales, N°4, mai, 2011, p.6. * 142Ibid. * 143Marc, Aicardi de Saint Paul, « La France, l'Afrique et déclenchement de la guerre en Irak », p.141. * 144En effet, pendant la campagne présidentielle de 1992, les Etats-Unis, à travers les actions de leur ambassadeur à Yaoundé, Francès Cook, se sont illustrés par une grande proximité avec le candidat de l'opposition, Ni John Fru Ndi. Cette proximité avérée ou non fut dénoncée par le pouvoir de Yaoundé. Par ailleurs, l'opposant Ni John Fru Ndi fut invité à prendre part à l'investiture du nouveau président américain, Bill Clinton, le 20 janvier 1993. Malgré, la polémique née autour de cette invitation, où certains proches du pouvoir ont prétendu que c'était un canular de l'opposition ; on y découvre néanmoins des photos de la cérémonie d'investiture du président américain montrant le leader de l'opposition camerounaise, en train d'échangé une poignée de main avec le nouveau locataire de la Maison Blanche, Bill Clinton. * 145Lire l'intégralité de ce projet de nouvelle résolution sur, http://www.annuairestrategique.info/donnees.asp, consulté le 30 novembre 2016.En effet,le24 février 2003,la coalition qui attaquera l'Irak quelques jours plus tard espérait encore le faire avec l'aval des Nations Unies. Pour cette raison,les USA,l'Angleterre et l'Espagne présentent au Conseil de Sécurité une nouvelle résolution. Celle-ci ne sera pas votée en dépit d'une intense activité diplomatique internationale des Etats-Unis qui désirent rallier le plus d'Etats possibles à leur cause. La France, l'Allemagne et la Russie vont s'opposer et lui substituer un autre texte,d'où son retrait. * 146Melvin,Akam, « La danse indansable du président Biya », Le Messager, N°645, 13 mars, 2003, p.6. * 147Cameroon Tribune, « Baroness Amos consults with president Paul Biya once again », N°7803/4092, 12 mars 2003, p.1. * 148Nicolas, Amayena, « Crise irakienne : le président Paul Biya reçoit Dominique de Villepin », Cameroon Tribune, N°7802/4091, 11 mars 2003, p.3. * 149Anonyme, 43 ans, Diplomate, en service au MINREX, Yaoundé, 19 décembre, 2017. * 150Cameroon Tribune, « Le monde peut-il éviter une nouvelle guerre ?/Le dossier de la rédaction : la position du Cameroun », N° 7789/4078, 14février, 2003, p.31. * 151La représente britannique, Valery Amos, était venue à Yaoundé dans le cadre d'un intense lobbying diplomatique, en faveur du vote de projet de résolution anglo-américaine au Conseil de Sécurité d'une action militaire contre l'Irak. * 152Christian, Edmond, Bepi Pout et Hugues Pauline Bend, « Guerre du Golfe, épisode 2 : une analyse de la réception de la couverture du conflit dans la presse camerounaise », Une lecture africaine de la guerre en Irak,..., pp.154-155. * 153Comme partenaires stratégiques, nous pouvons citer : la France, les Etats-Unis, l'Israël, la Chine, le japon, ses cinq voisins géographiques, l'Union africaine, l'Union européenne, les Institutions de Bretton woods, et le Monde islamique. * 154Marché Nouveaux, N°13, Paris, Gideppe, p.94. * 155Léon, Koungou, « Comment construire la paix dans un espace post-conflictuel ? Le cas de Bakassi », in Afrique contemporain, vol.234-2, 2010, p.14. * 156Pour mieux appréhender l'origine du problème, il faut avoir à l'esprit le processus historique de formation de l'Etat camerounais. A cet égard, une documentation nombreuse et variée aborde le sujet. Cependant, afin de cerner les contours à la fois juridique et historique du problème ; nous proposons de lire, le mémoire produit par l'Etat du Cameroun. Cette affaire, inscrite au hall général de la Cour Internationale de Justice sous le n°48, le 30 mai 1961, a fait l'objet d'un arrêt rendu le 2 décembre 1963. Elles'intitule, « Affaire du Cameroun septentrional (Cameroun contre Royaume-Uni) », disponible sur, https://www.icj-cij.org/public/files/cases-related/, consulté le 28 décembre 2019. * 157Cameroon Tribune, « Affaire Bakassi : Yaoundé et Abuja accordent leurs violons », N°7678/3967, 10 septembre, 2002, p.2. * 158 L'article 94, relatif au chapitre XIV, intitulé : Cour Internationale de Justice. Cet article dans son alinéa 2 stipule que « si une partie à un litige ne satisfait pas aux obligations qui lui incombent en vertu d'un arrêt rendu par la Cour, l'autre partie peut recourir au Conseil de Sécurité et celui-ci, s'il juge nécessaire, peut faire des recommandations ou décider des mesures à prendre pour faire exécuter l'arrêt ». * 159Cameroun : Histoire d'un nationalisme 1884-1961, Paris, Editions Clé, pp.91-92. * 160Guy Roger, Eba'a, Affaire de Bakassi : genèse, évolution et dénouement de l'affaire de la frontière terrestre et maritime Cameroun-Nigeria (1993-2002), Yaoundé, Presses de l'UCAC, 2013, p.71. * 161Narcisse, Mouelle Kombi, La politique étrangère du Cameroun, p.107. |
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