4.3. La période
contemporaine des finances publiques
4.3.1. L'ordonnance du 2
janvier 1959
Cette ordonnance a régi le droit budgétaire
français jusqu'à la loi organique relative aux finances publiques
(LOLF). Elle a été élaborée avec le même
esprit que tous les textes adoptés sous l'impulsion du
général de Gaulle dans la 5e république
naissante.
Ainsi, cette ordonnance fait la part belle au gouvernement en
matière de finances publiques, il est donc fait d'application au droit
budgétaire de la même logique que celle qui gouverne la
répartition des pouvoirs entre législatif et exécutif sous
la 5e république.
Du point de vue du contenu de ce droit budgétaire,
l'orientation consistait principalement à faire du budget un budget de
moyens. Mais l'importance actuelle des déficits publics et la
nécessaire réforme de l'Etat ont eu pour conséquence de
mettre en avant la nécessaire performance de la dépense publique.
Partant de ce constat, l'ordonnance de 1959 était inadaptée. La
voie était donc ouverte pour l'adoption d'une nouvelle constitution
financière.
4.3.2. La LOLF, le pacte de
stabilité et de croissance
De nombreux changements sont intervenus en matière de
gouvernance et de gestion des finances publiques : la LOLF, le Pacte de
stabilité et de croissance (PSC) au niveau européen, les lois de
financement de la sécurité sociale, le volet financier de l'acte
II de la décentralisation.
Alors que l'ordonnance de 1959 paraissait intouchable, c'est
dans le cadre d'un consensus politique étonnant que la LOLF a
été adoptée ; l'objectif est de lier performance et
dépenses physiques. En d'autres termes, là où l'ordonnance
de 1959 prévoyait un budget de moyens, la LOLF prévoit la
répartition des crédits par missions et programme
c'est-à-dire en fonction de grands objectifs. La conséquence est
double. D'abord, les gestionnaires publics jouissent d'une plus grande
liberté, notamment grâce à la fongibilité
asymétrique. La contrepartie est un accroissement des pouvoirs du
parlement ; notamment en matière de contrôle de la
performance de la gestion publique.
Au niveau international, différentes normes sont
revenues réglementer les finances publiques françaises. Jusqu' au
PSC aucune norme de ne s'imposer au gouvernement français. Depuis les
objectifs posés par le Pacte sont : un déficit
inférieur à 3% du PIB et une dette inférieure à 60%
cette norme a eu pour conséquence une approche consolidée des
finances publiques.
En effet, les règles communautaires s'appliquent
à l'ensemble du secteur public : l'Etat, les collectivités
locales et les organismes de sécurité sociale. Ainsi, la
nécessaire maîtrise des déficits publics imposée par
ces règles a conduit la France à mieux encadrer les finances
sociales et locales, mais aussi à mettre en place une certaine
pluri-annualité budgétaire.
S'agissant d'abord des finances sociales, c'est en 1996
qu'ont été créées les Lois de Financements de la
Sécurité Sociales (LFSS), marquant ainsi le rôle croissant
du parlement. C'est, comme cela était dit, étroitement lié
au PSC et à la volonté de maîtriser les dépenses.
Notons aussi que les finances sociales ont été marquées
par une fiscalisation croissante des recettes ; instauration de la prise
en charge par l'Etat des exonérations de charges sociales sur les bas
salaires.
En ce qui concerne les collectivités locales, la
réforme constitutionnelle de 2003 a donné naissance à
l'acte II de la décentralisation : la réforme des finances
locales. Cette réforme avait deux directions. Il s'agissait en premier
lieu de garantir les ressources propres des collectivités. En effet, la
suppression de ces derniers met les collectivités dans une
dépendance accrue vis-à-vis des transferts de l'Etat. Il fut
ainsi décidé que les ressources propres doivent
représenter une part déterminante du financement des
dépenses locales. La loi organique du 29 juillet 2004 avait retenu comme
seuil minimum, le niveau historique des ressources propres atteint en 2003.
Enfin, il faut souligner que le principe d'autonomie financière est
porteur d'inégalités fiscales.
Le constituant de 2003 a donc rajouté un principe de
péréquation : la répartition des dotations de l'Etat
doit tenir compte de la richesse relative et des besoins des
collectivités territoriales. En second lieu, il fallait garantir le
financement des compétences transférées. C'est pourquoi le
principe de compensation intégrale des transferts de charges a
été constitutionnalisé. Mais, la victoire de la gauche aux
régionales de 2004 a changé la donnée. Un moratoire des
transferts de compétence a, alors, été
décidé en janvier 2006.
Enfin, au fur et à mesure de l'accroissement des
déficits publics, s'est faite jour, l'idée selon laquelle le
retour à l'équilibre budgétaire ne pourrait être
obtenu sans une vision pluriannuelles des finances publiques. Un premier pas
est franchi avec la loi d'orientation quinquennale du 24 Janvier 1994 relative
à la maîtrise des finances publiques, mais cette dernière
ne prévoyait que des objectifs globaux en matière de
dépenses et de recettes. Mais l'événement décisif
vint de l'Union Européenne. En effet, du fait de la mise en place de la
monnaie unique et du Pacte de stabilité et de croissance qui en a
découlé, l'Europe imposa aux Etats-membres de présenter
chaque année à la commission européenne un programme
triennal de stabilité décrivant la stratégie
budgétaire de l'ensemble des administrations publiques.
Ces exigences vont être traduites au plan national par
la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008. Cette réforme
vient consacrer la pluri annualité budgétaire, avec pour objectif
d'assurer une meilleure gouvernance des finances publiques, tant en ce qui
concerne la maîtrise des dépenses publiques, que la
prévisibilité des recettes. Ainsi, un nouvel alinéa de
l'article 34 de la constitution prévoit l'existence des lois de
programmations pluriannuelles des finances publiques : il s'ait de lois
ordinaires dont le but est de déterminer les objectifs de l'action de
l'Etat et les orientations pluriannuelles des finances publiques avec pour
objectif, l'équilibre des comptes publics. Elles prennent en compte la
situation globale des finances publiques, à savoir les dépenses
et les recettes. De plus, c'est l'ensemble du secteur public qui est
concerné. Concrètement, ces lois prévoient un plafond de
dépenses pour chaque mission, en autorisations d'engagement et en
crédits de paiement, et ce, sur trois années. Ces plafonds sont
impératifs les deux premières années et ajustables la
troisième dans le cadre du plafond global de dépense et de
l'économie générale de la programmation.
L'ensemble de ces évolutions est de nature à
renforcer la démocratie. D'abord la transparence est devenue une
exigence forte et généralisés sous l'influence du conseil
constitutionnelle et de l'Union Européenne.
Dans cette optique, la LOLF a affirmé un principe de
sincérité budgétaire. De plus, il y a eu un renforcement
du rôle du parlement par l'instauration de LFSS et le pouvoir
d'initiative en matière de dépense qui lui est
conféré. Le législateur voit d'ailleurs, son droit
à l'information et ses pouvoirs de contrôle accrus.
Pour terminer, il faut noter que les débats actuels
est sur l'adoption d'une règle d'or budgétaire en France. Mais,
les textes envisagés s'écartent des ambitions initiales. C'est
pourquoi, le projet ne retient pas d'objectifs chiffrés, mais pose
seulement l'obligation de s'engager sur une date d'atteinte de
l'équilibre. En d'autres termes, les gouvernements seraient libres de
mener la politique budgétaire qu'ils souhaitent, ils n'auraient
qu'à s'engager sur une date, fut-elle lointaine, de retour, la
réforme prévoit l'adoption des lois-cadres déterminant
l'évolution pluriannuelles des finances publiques, ces lois ayant une
autorité supra-législative et s'imposant en conséquence
aux lois de finances annuelles. Voilà au moins l'historique des finances
publiques dès ses origines jusqu'aujourd'hui.
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