3-2- ANALYSES ET INTERPRETATIONS DES RESULTATS
L'analyse et l'interprétation des résultats vont
se structurer autour de nos objectifs et de nos hypothèses de recherche.
Nous nous appuierons sur nos deux études de terrain pour apporter les
justificatifs nécessaires, mais nous nous appuierons également
sur nos recherches documentaires.
3-2-1- Identification des stratégies de
communication des collectivités territoriales.
La communication des territoires est multiforme et
variée. Elle se décline en communication interne et externe mais
aussi en marketing politique et en communication participative au
développement. C'est cette dernière approche qui nous
intéresse dans notre travail de recherche car elle permet de mobiliser
les populations autour d'un idéal commun : le développement
socio-économique du territoire.
Identifions ensemble les outils et les approches
communicationnelles utilisés par les collectivités territoriales
du département de Grand-Bassam afin de mobiliser les populations autour
du développement. Le tableau ci-dessous fait un état
récapitulatif des outils de communication utilisés. Les
données qui nous permettent d'élaborer ce tableau proviennent des
résultats de nos études quantitatives et qualitatives.
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Etude quantitative
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Etude qualitative
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Medias de masse
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Radio, Presse écrite
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Radio, Presse écrite,
internet
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Medias interpersonnels
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Téléphone, courrier,
bouche à oreille
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Courrier, téléphone,
réunion
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Médias traditionnels
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Néant
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Néant
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Au vu du tableau, presque tous les outils de communication
sont utilisés. Mais la question c'est de savoir, malgré cette
gamme variée d'outils de communication utilisés par les
collectivités territoriales, pourquoi les populations ne se sentent pas
associées au développement de leur territoire ?
La réponse se trouve dans ce résultat :
42 % (Graphique1,p.41) au niveau du conseil
général et 51 % (Graphique 2, p.41) au niveau de
la mairie des personnes qui ont été informées et ont
assisté à une réunion convoquée par les
collectivités territoriales du département de Grand-Bassam l'ont
été par courrier. L'interprétation que nous pouvons donner
à cela est que les collectivités s'intéressent beaucoup
plus aux structures formelles. En effet, on n'adresse des courriers qu'à
des groupes bien organisés. Que fait-on alors des autres membres de la
population. Pourtant, l'objectif du développement local est d'associer
le plus grand nombre de citoyens à l'identification et à la
résolution des problèmes locaux de développement. Il
serait donc intéressant de trouver des outils de communication plus
mobilisateurs.
La deuxième analyse que nous voulons faire concerne la
stratégie de communication déployée avant l'identification
des projets. Les résultats de l'étude montre clairement que les
collectivités ne sondent pas et ne sensibilisent pas les populations
avant la réalisation des projets.
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Le résultat suivant nous interpelle : seulement
06.33 % (Tableau 6, p44) des personnes interrogées ont
une fois participé à une enquête d'opinion pour la
réalisation d'un projet de développement, et 07.00 %
(Tableau 5, p44) ont assisté à une séance de
sensibilisation dans le même but.
Les propos du responsable de communication du conseil
général viennent confirmer notre analyse. En effet il dit ceci :
« Je vous explique un cas, nous sommes allés dans un
village où l'accès est difficile, l'accès se fait par
pirogue. Tout de suite quand nous sommes arrivés, nous avons
projeté faire un pont pour désenclaver le village, le dossier
était avancé. Mais après les populations nous ont
approché pour dire que le pont est bon mais leur besoin réel
n'était pas un pont mais l'électrification.
»
En voulant nous expliquer que les populations participent
effectivement à la phase d'identification des projets, il montre que les
collectivités n'ont aucune stratégie de communication afin de
connaitre les vrais besoins des populations. Si un travail préalable
avait été fait, le conseil général saurait que le
vrai besoin des populations de cette contré était
l'électrification et non un pont. Le conseil général s'est
basé sur un simple à priori et un constat simpliste. Parce que la
zone est difficile d'accès, on arrive à la conclusion qu'il faut
un pont. Vous débarquez chez un citoyen, il est assis à
même le sol la tête entre les mains, automatiquement, sans rien lui
demander vous allez lui prendre des chaises. Qu'est ce qui va vous permettre de
savoir que le monsieur a besoin d'une chaise ou autre chose. Le plus facile,
c'est de lui demander. C'est ce qu'on appelle une enquête.
En matière de stratégie de communication pour le
développement, l'enquête est très importante. En effet,
pour Silvia BALIT (2004) l'enquête ou la recherche :
« ...permet à la communauté d'exprimer ses
problèmes et
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d'apprendre sur elle-même. Cela garantit que
le processus de développement initié reflètera les
perceptions et les réalités de la communauté rurale,
encourageant ainsi la durabilité de l'innovation en matière de
développement. »
La troisième analyse que nous faisons, c'est que les
collectivités territoriales font plus d'activité de marketing
politique que d'élaborer des stratégies de communication dans le
but de connaitre les besoins des populations et de les associer à la
réalisation. Notre analyse se fonde sur les résultats de notre
étude de terrain. Les graphiques 3 et 4 respectivement
à la p42 et 43 le montre clairement.
Lorsque nous analysons de très près l'objet des
communiqués des collectivités territoriales du département
de Grand-Bassam, nous constatons que ce sont des communiqués qui
appellent à des manifestations où seront étalées
les réalisations des gouvernants locaux afin de dire aux populations
voyez-vous nous travaillons pour vous. Cette stratégie est porteuse car
54 % (tableau 12, p.47) des enquêtés identifient
clairement les projets réalisés par les collectivités
territoriales. Est-ce que les réalisations pour lesquelles les
populations sont appelées à assister à leur inauguration
reflètent leurs besoins ? C'est cela la question fondamentale. C'est
pourquoi nous parlons de marketing politique. En effet le marketing politique
est vu comme une variante de la communication marketing qui consiste à
promouvoir un homme ou un projet politique. Il joue plus sur l'aspect
émotionnel. De ce point de vue il rejoint parfois la manipulation. Nous
ne condamnons pas les activités de marketing politique mises en place
par les collectivités. Les gouvernants locaux sont élus à
partir du suffrage des populations. Il est donc indiqué qu'elles
déploient des stratégies de marketing politique afin de
séduire le peuple et bénéficier de ses voix le moment
venu. Ce que nous déplorons, c'est le fait que les activités de
marketing
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politique soient l'essentielle des stratégies de
communication des collectivités du département de
Grand-Bassam.
La dernière analyse que nous voulons faire, consiste
à reconnaitre les efforts des collectivités à s'entourer
de professionnels dans le domaine de la communication. Nos deux
enquêtés à savoir le responsable communication du conseil
général de Grand-Bassam et celui de la mairie sont sortis
d'école de formation en communication (Annexe 6,
p89).
Mais la fausse note réside dans le fait que les
collectivités territoriales n'assurent la formation continue de leurs
agents (Annexe 6, p89).
Pourtant, en matière de communication les choses
évoluent, surtout au niveau des méthodes d'élaboration des
stratégies de communication.
En conclusion nous pouvons dire que nos
collectivités territoriales élaborent certainement des
stratégies de communication mais dans des domaines autres que celles qui
ont pour objet d'associer et de mobiliser les populations autour du
développement. Ce qui vient confirmer malheureusement notre
hypothèse de départ qui se décline de la façon
suivante : Les populations ne sont pas mobilisées autour du
développement parce que les collectivités territoriales n'ont pas
de stratégies cohérentes de communication.
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