3-1-2- Présentation des résultats
qualitatifs
La présentation des résultats qualitatifs va
consister à faire une analyse de contenu des différents
entretiens que nous avons eu avec les populations, les responsables de
communication des collectivités territoriales et les élus. Il
s'agira, dans cette analyse de contenu, de regrouper les questions de
façon thématique afin de les présenter.
Tous les entretiens que nous avons eu à faire est
disponible dans l'annexe 5,6 et 7.
Connaissance des collectivités
territoriales
De façon générale, les populations ont
une vague connaissance des collectivités territoriales et de leur
rôle:
Cour royale de Bonoua : « oui, je
connais le conseil général, mais son rôle, personnellement,
je n'ai aucune idée. »
Fédération des femmes : « oh,
vaguement »
Plate forme des ONG : « nous connaissons
plus ou moins le conseil général. »
Par contre le rôle de la maire est un peu plus connu
surement par sa proximité avec les populations :
Plate forme des ONG : « la mairie nous
connaissons mieux car avec elle, nous avons mené des activités.
»
Le véritable problème se pose dans la confusion
au niveau des compétences dévolues à chaque entité
décentralisée. Les populations n'arrivent pas à
établir une ligne de démarcation entre les compétences du
conseil général et celles de la mairie.
Royauté de Moossou : « Nous en
avons entendu parlé, il y a eu des élections, mais quand il
s'agit de réaliser des projets, on nous dit que Moossou n'est pas sous
la compétence du conseil général, cela fait que nous
n'avons pas trop de rapport avec le conseil général. »
Association des jeunes : « ils ont
pratiquement le même rôle, la mairie pour la ville et le conseil
général pour les villages. »
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Sensibilisation et formation des populations, des
responsables de communication et des élus
La sensibilisation et la formation de tous les acteurs
(populations, responsables de communication, élus) aux principes du
développement local et da la décentralisation est un
élément important pour la réussite du développement
local. Les entretiens que nous avons menés montrent que la
sensibilisation et la formation des acteurs sont le maillon faible dans la
chaine de mise en oeuvre du développement local.
Les populations ne sont pas assez sensibilisées sur la
politique de décentralisation. Les énoncées suivants nous
le montre :
Royauté de Moossou : Nous avons
été conviés aux assemblées générales
annuelles du conseil général mais à part ça nous
n'avons jamais assisté à une réunion ou une
conférence sur le développement local.
Association des jeunes : Oui, une
réunion sur la décentralisation au ministère de la
jeunesse. Le thème était ... (hésitation) je pense que les
collectivités locales et jeunesse : quel rôle quelque chose comme
ça.
Plate forme des ONG : De façon
générale non, nous n'avons jamais assisté à une
conférence, un séminaire qui avait pour objet la
décentralisation ou le développement local.
La question de la formation se pose également au niveau
des responsables de communication des collectivités territoriales et des
élus du département de Grand-Bassam.
Responsable communication Conseil
général : Malheureusement nous n'avons pas eu de
formation depuis que nous sommes là, nous avons participé
à des rencontres mais pas de formation.
Responsable communication Mairie de Grand-Bassam
: Nous avons fait des demandes dans ce sens mais les décisions
n'ont pas encore été prises.
Maire de Bonoua : Nous avons eu une
séance de formation à la demande du conseil municipal et pendant
deux (2) jours. Les gens nous ont entretenus sur les attributions du conseil
municipal. Nous avons eu une seule formation.
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Les outils de communication utilisés par les
collectivités territoriales
Les entretiens montrent que les collectivités
territoriales du département de Grand-Bassam utilisent une gamme
variée d'outil de communication. Selon les populations nous avons les
courriers, le téléphone, le bouche à oreille, les radios
de proximité.
Les élus et les responsables de communication ajoutent
à cette liste internet et les journaux édités par les
collectivités elles même.
Prise en compte des besoins des
populations
L'un des principes du développement local, c'est
permettre aux populations de définir ses besoins et d'y apporter des
solutions. Cela passe nécessairement par la mise en place d'une bonne
politique de communication. Les populations à travers les entretiens
montrent que ce grand principe du développement local n'est pas mis en
pratique. En effet, les projets prioritaires des populations n'ont quasiment
pas été pris en compte par les gouvernants locaux :
Royauté Moossou : C'est l'ouverture de
l'embouchure. Si l'embouchure est ouverte vraiment... maintenant on nous parle
de l'autoroute Abidjan-Bassam. On ne nous a jamais invités à
parler de l'ouverture de l'embouchure. C'est une fois il y a eu une
enquête environnementale sur l'autoroute organisée par une
structure mais pas la mairie ou le conseil général.
Royauté des N'zima Kôtôkô
: Le gros projet qui nous tiennent à coeur c'est l'ouverture de
l'embouchure. Mais il faut bien ouvrir pour ne pas qu'il ait des
dégâts. Le ministre de l'environnement nous a annoncé le
début des travaux. Donc on pense que si s'est bien fait avec des
granites et autre, cela peut faire reculer la mer, parce que si ça
continue de ronger la terre nous pouvons être délogés
d'ici. Nous avons discuté de cela avec la mairie mais pas le conseil
général.
Fédération des femmes : Nous
avons un projet qui nous tient à coeur. C'est un projet sur
l'alphabétisation. Puisque une étude montre que 80 % des femmes
de Grand-Bassam sont analphabètes. Notre souhait serait d'avoir un
centre d'écoute pour les femmes où sera logé un centre
d'alphabétisation.
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Nous avons discuté de cela avec la mairie, nous avons
fait une stratégie de communication que nous avons déposée
à la mairie. D'entrée de jeu, ils sont partants. Mais comme on
connait les problèmes des mairies et des collectivités de Cote
d'Ivoire, c'est un problème de moyens, on nous oppose toujours les
moyens.
Association des jeunes : Nous avons de
multiples projets qui nous tiennent à coeur. Avec le président du
conseil général nous avons parlé d'une grande ferme
où les jeunes pourraient se prendre en charge. Avec la mairie aussi nous
parlons aussi de nos projets, mais vous savez ici tout est politisé donc
c'est difficile. Par exemple dégagé 10 à 15 million pour
la jeunesse afin de se prendre en charge, ça parait un gros chiffre,
mais pour moi ce n'est rien. Pour la jeunesse on peut le faire.
Les élus estiment qu'ils prennent en compte les besoins
des populations, le problème se situe au niveau des priorités et
des fonds disponibles :
Maire de Bonoua : Au fait, à la fin de
l'année nous allons vers les villageois, nous avons trois quartiers et
dans les échanges ils nous font part de leurs besoins. Après
ça, nous rencontrons les jeunes. Nous avons plusieurs sous quartiers
où nous avons mis les jeunes et nous les rencontrons sur leur base et
là également ils peuvent nous faire des doléances. Les
conseillers également vont dans les différents quartiers
où ils habitent, ils reçoivent des besoins exprimés par la
population. Après ça le conseil se réunit, on met ensemble
les besoins exprimés par les uns et les autres et on choisit les projets
par priorité.
Participation à l'identification des projets
de développement
Les populations dans leur ensemble, sinon celles que nous
avons interrogé estiment qu'elles ne sont pas associées à
la phase d'identification des projets de développement et elles
l'expriment clairement :
Royauté de Moossou : ça
vraiment, ils ne nous ont jamais consultés, mais les projets qu'ils
réalisent sont dans l'intérêt des populations donc nous
n'avons pas à discuter.
Royauté de Bonoua : S'ils nous
invitent, nous venons mais généralement les programmes de
développement ne sont pas soumis à l'appréciation de la
notabilité. Ni au niveau de la mairie ni au niveau du conseil
général. Chaque
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année, le conseil général fait un projet
de développement de la région alors ils invitent la
notabilité pour demander leur avis, mais le plus souvent notre avis
n'est pas pris en compte. Même quand le travail est mal fait qu'on les
interpelle ils ne reprennent pas. Cela fait que les projets ne durent pas. Donc
généralement après cinq ans on ne peut pas faire le bilan
parce que toutes les réalisations sont abimées.
Royauté des N'zima Kôtôkô
: au choix des projets ? Nous n'avons jamais été
associé à quelque chose, que ce soit la mairie ou le conseil
général. La preuve c'est qu'aucun jeune du quartier France n'a eu
à bénéficier de quoi que ce soit.
Fédération des femmes : Je peux
dire oui, surtout au niveau de la mairie, la mairie décline tout ce
qu'elle veut faire, donc on peut dire que nous sommes associés.
Association des jeunes : Du coup je dis non,
ils arrivent avec leur programme, vous aussi, vous avez vos projets et à
un moment donné vos idées divergent. Quand vous insistez trop ils
pensent que vous les combattez donc nous sommes moins associés. Les
élus nous donnent des projets tout faits. Non, il ne faut pas penser
à la place des jeunes, c'est ça qui fait la collectivité
territoriale [....] Aujourd'hui il y a des jeunes qui font des projets de
savons et autres, mais ce ne sont pas leur projet de coeur, c'est la mairie qui
l'a initié et a choisi des jeunes à installer. Comme chacun
cherche un peu de pain, des jeunes l'ont accepté, donc dire que nous
sommes associés, je dis non. C'est vrai, avant on donnait de l'argent
aux jeunes et certains fuyaient avec. Mais aujourd'hui, qu'on laisse les jeunes
concevoir leur projet et ils suivent. C'est ce qu'il faut faire au lieu de
penser à la place des jeunes.
Mais les élus et les responsables de communication
énoncent un avis contraire. En effet, pour eux, les populations sont
parfaitement associées à toutes les phases des cycles de projet
:
Maire de Bonoua : Comme je l'ai dit, chaque
quartier exprime ses besoins, les jeunes aussi. Nous organisons
également des réunions à la mairie où la population
est invitée, là également, ils nous font des propositions
de projet que nous prenons en compte par rapport à nos moyens
financiers.
Responsable communication du Conseil
Général : Cela dénote d'une vision, ailleurs
ça ne se fait pas mais de plus en plus ça devient important. Ce
sont les
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populations qui savent ce qu'il faut pour elles. Je vous
explique un cas, nous sommes allés dans un village où
l'accès est difficile, l'accès se fait par pirogue. Tout de suite
quand nous sommes arrivés, nous avons projeté fait un pont pour
désenclaver le village, le dossier était avancé mais
après les populations nous ont approché pour dire que le pont est
bon mais leur besoin réel n'était pas un pont mais
l'électrification.
Responsable communication de la Mairie de Grand-Bassam
: Comme je le disais, je me souviens qu'il y a un groupe de femmes qui
voulaient être formées à la fabrication de savons, c'est
leur besoin qu'elles ont fait monter au niveau du conseil municipal et c'est le
conseil qui a trouvé des formateurs. D'une façon ou d'une autre
les populations sont impliquées dans l'identification des projets. Le
maire met en oeuvre les projets en fonction des priorités des
populations. Si les gens disent qu'ils veulent une école alors que le
conseil a prévu l'électrification, tout de suite on
réalise l'école. Le maire reçoit les demandes des
populations.
Les positions totalement antagonistes exprimées par les
populations et les gouvernants locaux montrent si besoin en était qu'il
se pose un véritable problème de communication.
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