L'agriculture pratiquée dans l'interzone
Réserve du Dja-parc national de Nki est une agriculture
itinérante sur brûlis. Les productions sont destinées
à la satisfaction des besoins des ménages tant en besoins
alimentaires que financier. Les rendements sont relativement importants suivant
l'âge de jachère mis en culture. Les populations tirent des
revenus assez considérables de cette agriculture. Cependant,
l'agriculture dans l'interzone fait face à de nombreux problèmes.
Nous pouvons citer entre autres : l'outillage rudimentaire et la technique
agricole, le manque de débouchés et les prix trop bas, les
problèmes de conservation des récoltes, la destruction des
cultures par les animaux, et le manque de route dans la région.
Dans notre zone d'étude, l'outillage utilisé
est constitué des houes, des plantoirs, des machettes, des haches, des
pioches...Ces outils rendent le travail difficile lors de la création
des champs. Il leur manque les matériels agricoles comme les
tronçonneuses pour vite abattre les arbres. Un manque d'outils ou des
outils de mauvaise qualité rendent le travail plus pénible. Dans
la région on ne laboure pas les champs. Le feu est le moyen le plus
utilisé pour nettoyer les champs. Les cendres issues de ce feu
constituent les seuls engrais utilisés pour les
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cultures. Après quelques années qu'un espace
ait été mis en culture, il n'est plus fertile, il faut le mettre
en jachère pour créer un autre champ. Une situation avec un
manque de matériel permanent (des bonnes haches, machettes et limes)
provoque un raccourcissement des jachères et a un effet négatif
sur le maintien de la fertilité des parcelles dans le cycle agricole.
Les populations de l'interzone ont trop de difficultés
pour vendre les produits agricoles. Les faibles densités des
populations, l'enclavement de la zone, et le manque de routes sont autant de
raisons qui font que les agriculteurs de notre zone d'étude manquent de
débouchés. Ceux qui achètent les produits agricoles sont
les étrangers. Ces produits sont vendus à des prix
dérisoires car ce sont souvent les acheteurs qui fixent les prix. Les
produits pourrissent parfois sur les claies parce qu'il n'y a pas de clients. A
cause de l'enclavement, la pratique des bas prix par les acheteurs est
très récurrente dans la zone. Par exemple, pendant la campagne
cacaoyère 2011-2012 au mois de décembre 2011, le kilogramme de
fèves de cacao séché était acheté à
Ngoyla à 700 Fcfa ; ce qui avait poussé les populations à
la révolte. Les autorités administratives, en accord avec les
populations ont signé des accords saisissant le stock qui était
dans les magasins des acheteurs et interdisant tout achat du cacao par ces
anciens acheteurs en attendant que les prix soient revus à la hausse.
Un autre problème auquel sont confrontées les
populations de l'interzone est la pourriture des cabosses de cacao. Ces
populations utilisent très peu les fongicides pour la culture du cacao.
Cette dernière est donc exposée aux différentes attaques
des microbes. A ce problème de pourriture des cultures il faut ajouter
la conservation des récoltes. Les populations de notre zone
d'étude ne savent pas stocker et conserver les récoltes pendant
longtemps. Les produits récoltés dans les champs sont directement
consommés ou vendus après la récolte car il n'y a pas de
moyen permettant de conserver les récoltes pendant quelques mois.
Plusieurs agriculteurs disent qu'ils ne produisent pas beaucoup parce qu'il n'y
a pas de possibilité ni d'endroit approprié pour conserver la
production après la récolte.
Tous les agriculteurs de notre zone d'étude sont
confrontés à la destruction des cultures par les animaux
sauvages. Des petits rongeurs aux grands fauves de la forêt, tous les
animaux causent des dégâts considérables sur les cultures.
Dans toutes les localités retenues pour l'enquête, la
totalité des personnes enquêtées soit 100 % disent
être victime des dégâts causés par les animaux sur
les cultures. Parmi ces animaux on retrouve ceux de la «classe C»
(hérissons, singes, porc-épic, écureuils...) et ceux de la
«classe A et B» (éléphants, gorilles, sanglier,
chimpanzé...). Les rongeurs sont un problème sérieux pour
presque toutes les
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cultures. Ils sont présents dans toutes les
localités. Les jachères forment un habitat pour ces rongeurs
(surtout les aulacodes, les athérures et les rats d'emin). Pour
réduire parfois ces dégâts, les populations tendent les
pièges dans les champs ou parfois ils font des clôtures. Les
animaux des autres classes sont les plus dangereux car non seulement ils sont
protégés par la loi mais aussi certains sont très gros
pour être capturé par les pièges. Les dégâts
causés par ces animaux deviennent de plus en plus considérables
lorsqu'on va vers le coeur de ce massif forestier. En d'autre termes, sur le
terrain, les populations de la localité de Messok affirment être
rarement victimes de la destruction des cultures par les animaux de la
«classe A et B», mais lorsqu'on arrive à Etékessang
jusqu'à Djadom les populations affirment qu'ils causent trop de
dégâts sur leurs cultures. « Il arrive parfois que ces
animaux s'approchent de nos maisons » affirment certains. Au cas
où les dégâts causés par ces animaux sont
très considérables, l'intéressé peut se plaindre
auprès des autorités compétentes. Ces conflits
hommes/animaux sont appelés à s'intensifier dans l'interzone car
la mise en conservation de la zone permet aux animaux de se multiplier et
d'être plus nombreux.
.
Dans un cadre général, l'agriculture dans
l'interzone se caractérise par des surfaces agricoles en extension mais
concentrées autour des zones habitées. Elle est dominée
par la pratique de la jachère, la conservation des arbres dans les
champs et la rotation des champs dans les jachères. Sur la base des
critères de qualification de la compatibilité des
activités que nous avons établies, nous pouvons dire que cette
agriculture est compatible avec la conservation car son impact est peu
significatif.