III LA PRATIQUE DE LA CHASSE DANS L'INTERZONE.
III.1. Quelques moyens de prélèvement
interdits par la législation camerounaise. Les moyens captures de la
faune prohibés par la loi faunique au Cameroun sont les suivants :
· Les collets ;
· Les animaux vivants utilisés comme appelants
aveuglés ou mutilés ;
· Les appareils électriques capables de tuer ou
d'assommer ;
· Les sources lumineuses artificielles ;
· Les miroirs et autres objets aveuglants ;
· Des dispositifs pour éclairer les cibles ;
· Des dispositifs de visée comportant un
convertisseur d'image ou un amplificateur d'image électronique pour tir
de nuit ;
100
· Des explosifs ;
· Le feu ;
· Les filets modernes ;
· Les pièges-trappes ;
· Le poison et appâts empoisonnés ou
tranquillisants ;
· Gazage et enfumage ;
· Les armes semi-automatiques dont le chargeur peut
contenir plus de deux cartouches ;
· Les véhicules automobiles en
déplacement.
De plus, il existe une période de fermeture de chasse
qui va du 1er décembre au 30 juin dans les régions du Centre, du
Sud, du Littoral et de l'Est (Provot L.,2007)
III.2. Une chasse avec des techniques dominées par
le piégeage.
La chasse est une activité très
pratiquée dans l'interzone. Elle permet aux populations de satisfaire
leurs besoins en protéines animales ; de plus en plus, elle devient une
source de revenus. Le matériel utilisé est très
diversifié. Il est composé des pièges, du câble
d'acier, des fusils, des chiens et des lances. Ce matériel varie en
fonction du niveau financier des personnes qui exercent la chasse ; mais il
reste presque identique dans toutes les localités
enquêtées. Ces différentes techniques permettent aux
populations de capturer le gibier.
D'après notre enquête de terrain, les outils de
chasse utilisés par les populations de l'interzone sont
représentés dans le tableau suivant :
Tableau N°16: Les outils de chasse utilisés
par les populations dans l'interzone.
Outils de
chasse
Localité
|
Piège
|
Fusil
|
Câble
|
Autres outils
|
Messok
|
15
|
14
|
17
|
7
|
Ngoyla
|
15
|
9
|
17
|
4
|
Nkondong2
|
2
|
1
|
2
|
1
|
Zoulabot1
|
5
|
4
|
5
|
3
|
Nkondong1
|
3
|
2
|
3
|
1
|
Djadom
|
3
|
3
|
3
|
3
|
Etékessang
|
7
|
7
|
7
|
3
|
Zoulabot2
|
4
|
1
|
3
|
1
|
|
101
Bareko
|
0
|
1
|
1
|
0
|
Totaux
|
54
|
42
|
58
|
23
|
|
Source : Enquête de terrain, 2011
Ce tableau se traduit par le graphique suivant :
50
Effectifs
40
30
20
10
0
42
58
23
70
60
54
Piège Fusil Câble d'acier
Autres
Source : Enquête de terrain, 2011 Figure
N°15: Les différentes techniques de chasse utilisées par les
populations.
Il ressort de ce graphique que la technique la plus
utilisée est le câble métallique. En effet, 58 personnes
sur 64, soit 91 % utilisent le câble comme outil de chasse. Les lignes de
câbles sont rencontrées autour des cultures, dans les
jachères et même dans la forêt. Nous constatons ensuite que
54 personnes soit 84 % des personnes enquêtées utilisent des
pièges. Il existe plusieurs types de pièges : les pièges
à pattes, les pièges à cou... Le câble d'acier et le
piège sont les techniques les plus utilisées par les populations
de notre zone d'étude. Le nombre de pièges et de ligne de
câble par chasseur sont très nombreux. Ils sont utilisés en
saison de pluie. La chasse au piège est pratiquée dans tous les
villages, en majorité par les hommes. Ceux qui utilisent le fusil
représentent 60 % des personnes enquêtées. On les rencontre
plus dans la localité de Messok. L'utilisation du fusil dépend du
niveau financier du chasseur. La majorité des ménages de
l'interzone dispose d'un fusil de chasse, même si par manque de munitions
on ne l'utilise pas à tout moment. Ces fusils sont
généralement ceux à canons lisses de calibre 12 et ceux de
fabrication locale. Bien qu'il soit en marge de la législation il est
plus solliciter car il permet de vite abattre l'animal. Il est très
utilisé surtout en saison sèche. Ceux qui utilisent les autres
techniques représentent quant à eux 36 % . Ces techniques sont
constituées de la chasse aves les chiens, la chasse à courre, la
chasse à la lance...
102
Ces différentes techniques sont utilisées de
manière complémentaire. Il est difficile de rencontrer dans la
zone une personne qui utilise une seule technique de chasse. Les techniques les
plus utilisées comme nous l'avons constaté sont le câble
d'acier et le piège ; d'autres utilisent le câble et le fusil.
Selon plusieurs personnes enquêtées, la technique utilisée
est souvent fonction des objectifs à atteindre par le chasseur. Par
exemple, si on a un enfant malade à la maison et qu'il faut trouver de
toute urgence de l'argent pour lui acheter des comprimés, il faut
utiliser le fusil car il permettra de vite avoir le gibier. Certains chasseurs
nous disent qu'ils utilisent toutes les techniques qui peuvent leur permettre
d'avoir le gibier.
Au niveau de l'impact que peut avoir ces techniques de chasse
sur la faune, nous pouvons dire qu'il est fonction de la quantité
d'animaux abattus par chaque chasseur que de la technique elle-même. Du
piège au fusil en passant par le câble, chacune des techniques
peut rendre la chasse non durable et compromettre les objectifs de
conservation. En effet, le piège et le câble ne font pas de
distinction entre les espèces capturées. Ils capturent aussi bien
les mâles que les jeunes animaux et les femelles (qu'elles soient en
gestation ou qu'elles soient en lactation) les espèces
protégées et même celles que la culture interdit la
consommation. L'intensification des captures par ces outils pourrait
réduire considérablement le potentiel faunique de la zone. Selon
Nkomo, (1989) « Le piégeage capture toutes les espèces
des petits rongeurs aux artiodactyles de la taille du Sitatunga voire le Buffle
en passant par les Potamochères et les Panthères » Le
fusil quant à lui permet d'abattre tous les animaux que l'on rencontre ;
qu'il soit de grande ou de petite taille, protégé ou non. Mais
cependant, il peut être différent dans la mesure où il
permet de sélectionner l'animal à abattre. L'enclavement,
l'intensification de la répression, les faibles densités des
populations réduisent les pressions de la chasse sur la faune. Il est
à noter qu'il existe dans la zone des braconniers de profession qui
pourraient par leur actes porter atteinte au potentiel faunique de l'interzone.
Seul le renforcement des capacités de contrôle par les
responsables du MINFOF et du projet de conservation tant au niveau local que
transfrontalier pourrait atténuer les impacts de la chasse sur la
faune.
La mise en place des projets de conservation,
l'intensification de la répression et la rareté du gibier autour
des zones habitées ont amené certaines populations à
changer de technique de chasse. En effet, 25 % des personnes
enquêtées disent qu'ils ont changé de technique de chasse.
Ces personnes se rencontrent plus à Messok, 37 % et à Ngoyla, 44
%. A Messok , la majorité des personnes qui ont changer de techniques
l'ont fait parce que le gibier devenait trop rare surtout en saison
sèche. Ils ont dû remplacer les pièges et le câble
par le fusil afin de pouvoir obtenir le gibier. C'est sans doute l'une des
raisons qui explique la forte
103
utilisation du fusil à Messok comme nous l'avons
constaté plus haut dans le tableau n°15. Dans la localité de
Ngoyla (siège de l'ONG de conservation : WWF), les personnes qui
affirment avoir changé de technique l'ont fait parce qu'il y a trop de
répressions, de
sensibilisations et des saisis. Ils affirment que les gardes
écologiques appuyés par les employés du WWF sillonnent
la forêt pour enlever les lignes de câble et les pièges ; et
s'ils vous surprennent en possession d'une espèce
protégée, ils vont vous inculpé pour braconnage. Ils
utilisent désormais les techniques qui sont conseillées par les
conservateurs. Les autres localités où on rencontre les personnes
qui ont changé de technique sont : Etékessang, Zoulabot 1et 2.
Toutes ces localités se trouvent dans le massif forestier en
conservation. Ceci nous permet de dire que les alternatives qui sont
très réclamées par les populations pourraient contribuer
à la réduction des pressions sur la faune dans la zone.
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