La compétence des juridictions militaires congolaises face aux civils.( Télécharger le fichier original )par Joel BONGOLONGONDO Université de Kinshasa - Licence en Droit 2013 |
§2ème : État de la question.En France, la loi 82-261 du 21 juillet 1982 relative à l'instruction et du jugement des infractions en matière militaire et de sûreté de l'État et modifiant les codes de procédure pénale et de justice militaire a supprimé, en temps de paix, les tribunaux permanents des forces armées ainsi que le Haut tribunal permanent des Forces armées. Depuis l'entrée en vigueur de cette loi, les infractions au code de justice militaire ainsi que les crimes et délits de droit commun commis par les militaires dans l'exécution du service ne relèvent donc plus de la compétence des juridictions militaires, mais de celle des juridictions de droit commun.259(*) L'on constate alors que le système judiciaire français s'oppose à celui du Congo qui non seulement qu'il maintien ces juridictions en temps de paix tout comme en temps de guerre, mais aussi les civils y sont jugés avec tous les risques et violations flagrantes de la Constitution et des instruments juridiques supérieurs à celle-ci selon la hiérarchie des normes. L'Allemagne a comme la France supprimé les juridictions militaires en temps de paix et les auteurs des infractions pénales militaires sont jugés, en temps de paix par les juridictions pénales de droit commun. Toutefois, la loi fondamentale prévoit l'institution des tribunaux pénaux militaires en temps de guerre. Elle précise que les juges qui y siègent doivent satisfaire aux conditions requises pour l'exercice des fonctions de juges, et que la Cour Fédérale de Justice fait fonction de Cour militaire suprême.260(*) Il s'agit là non seulement de la suppression de cette justice des bavures en temps de paix, mais que le système ne connaît pas les juges assesseurs non juristes comme le cas de la République démocratique du Congo, même si cette justice est prévue pendant la guerre. En outre la juridiction de cassation et même d'appel à certain degré demeure une juridiction de droit commun. Les justices militaires anglaise, espagnole et italienne précise ce document de travail du Sénat français, sont plus ou moins intégrées à la Justice ordinaire, mais ne fonctionnent pas nécessairement selon les mêmes principes que la suisse. Au Royaume-Uni, la Justice militaire est, à partir du deuxième degré, rendue par des magistrats professionnels issus des Juridictions ordinaires. En Italie, il n'existe pas de code de procédure pénale militaire, c'est le Code de procédure pénale qui s'applique. En particulier, toutes les procédures simplifiées de la procédure pénale ordinaire s'appliquent devant les juridictions militaires.261(*) Il est à noter enfin que malgré leur diversité, les différents systèmes étudiés se caractérisent à la fois par leur intégration croissante à la Justice pénale ordinaire et par leur fonctionnement de plus en plus proche de celui de la Justice pénale ordinaire, ainsi que par la professionnalisation de leurs acteurs. C'est par exemple le cas du Conseil de guerre d'appel anglais qui présente très grandes similitudes la chambre criminelle de la Cour d'appel ordinaire et n'est composé que de magistrats professionnels très expérimentés. Ils sont en nombre impair et sont au moins trois. C'est le Président de la chambre criminelle de la Cour d'appel, en accord avec le Ministre de la Justice, qui les choisit. Le Président de la Cour d'appel peut en faire partie. En principe, cette juridiction siège à Londres, mais le Président de la Cour d'appel peut choisir un autre lieu262(*). L'on comprend dès lors que les arguments poussés en République démocratique du Congo pour justifier que le recours aux assesseurs, est motivé en raison de l'expertise et de la maitrise de l'art militaire. A ce que l'on dit, le juge civil ne saura pas établir la culpabilité de l'auteur d'une infraction commise au moyen d'armes de guerre et qu'il lui faut l'assistance de quelqu'un qui saura dire comment l'arme a été manié ces assesseurs ou pas. Et l'on voit ces assesseurs en grand nombre même dans les juridictions de haut rang comme les Cours militaires et la Haute Cour militaire siégeant même au degré d'appel. Pourquoi ne pas suivre l'exemple anglais? En Centrafrique, lors d'un atelier de validation du Code justice militaire le 11 juillet 2007, Madame Laura LINARES qui représentait le général Lamine CISSE, Représentant du Secrétaire général de l'ONU, a souligné que le projet de Code de justice militaire, qui prend en compte l'ensemble des infractions militaires, permet d'affermir la discipline au sein de l'armée quasiment désorganisée où les désertions, les infractions contre l'honneur ou le devoir et le non-respect de la discipline sont fréquents. Il faut noter que le projet du Code de justice militaire prend en compte certaines dispositions des conventions internationales protégeant les droits de l'Homme et le droit international humanitaire.263(*) La justice militaire, sauf peut-être pour le cas de la République démocratique du Congo, elle n'a jamais été conçue pour réprimer les civils qui du reste ne sont nullement responsables de l'indiscipline au sein de l'Armée. Il est temps pour que dans ce pays, il soit fait application du principe de limitation des compétences des Juridictions des Forces armées comme en a décidé le constituant en 2006 en application des Directives de la Commission africaine de droits de l'Homme datant de 1992. Si l'incompétence des Juridictions militaires congolaises a été démontrée en référence aux sources normatives, il en va tout de même pour l'intérêt de la protection des droits de l'Homme suite à un vide juridique en la matière, vide occasionné par le fait que, depuis l'avènement de la Troisième République congolaise instituée par la Constitution de 2006, la loi organique qui devait présider à l'action répressive des Juridictions militaires n'a pas encore été adoptée, et que celle qui existe ne peut pas dans la logique du Droit produire des effets légaux. C'est ce que se propose d'aborder le chapitre deux de la partie et dernier de la présente étude. * 259 SENAT FRANÇAIS, op.cit., p. 1. * 260 In idem loco p. 2. * 261 SENAT FRANÇAIS, op.cit., pp. 3-4. * 262 In idem loco p. 22. * 263 http://acap-cf-info/centrafrique-société, consulté le 09/11/2013, 14 heures 52'. |
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