II.2. La mondialisation financière : mode de
régulation, avantages et inconvénients
Etant donné que la mondialisation
financière exacerbe les défaillances et les faiblesses de
l'intermédiation financière comme l'ont montré les crises
en Thaïlande et en Indonésie, il faut essayer d'attirer l'attention
de l'Etat sur la nécessité de mettre en place des structures de
régulation, de contrôle et de supervision pour accompagner une
telle politique. Nous essayons de donner ici les dispositifs de
régulation et les avantages et inconvénients de la mondialisation
financière.
II.2.1. La régulation de la mondialisation
financière
La régulation du système financier vise
à assurer la protection des agents opérant au sein du
système, à fixer et à faire respecter les règles de
la concurrence. La spécificité des activités
financières y ajoute deux motifs supplémentaires : les
risques systémiques qu'engendrent le volume des échanges et la
place stratégique de ce secteur dans l'économie. Les principales
raisons de la régulation financière sont liées d'une part
à l'asymétrie d'information dont souffrent les petits
déposants et d'autre part, aux externalités négatives.
Cette régulation se fait selon trois approches qu'il convient
d'analyser.
II.2.1.1. Approche privée de la
régulation financière
Les tenants de ce courant prônent la
nécessité du laisser-faire et croient aux vertus du marché
et aux bienfaits de la « main invisible ». Le gouvernement,
selon cette approche, n'a pas un rôle à jouer dans la
régulation du système financier et les marchés se
substituent à l'Etat pour assurer la supervision et instaurer la
discipline aux institutions financières (Demirgüç-Kunt et
Levine, 2008). Cette approche était critiquée par rapport au fait
que les petits déposants trouvent que le coût du contrôle
des institutions dans lesquelles ils ont placé leur épargne est
élevé, ce qui les décourage à exercer ce
contrôle et incite les banques à adopter une attitude
risquée du fait de l'absence de supervision (Jégourel et
Teïletche, 2001). Ainsi, le gouvernement peut s'ériger comme
superviseur délégué de la part des déposants ou des
exploitants dans la réalisation des économies d'échelles
pour atténuer les coûts élevés de recherche
d'informations. C'est donc l'objet de l'approche interventionniste de la
régulation financière.
II.2.1.2. Approche interventionniste de la
régulation financière
L'approche interventionniste n'a pas pour origine les
critiques faites à Demirgüç-Kunt et Levine (2008) mais,
tient ses racines du point de vue de Pigou (1938) qui stipule que l'existence
des externalités négatives et d'asymétrie informationnelle
légitiment l'intervention gouvernementale pour atténuer ces
anomalies liées au fonctionnement des systèmes financiers.
Continuant les analyses de Pigou (1938), Gerschenkron (1962) défend
l'idée que l'Etat peut intervenir à bout des défaillances
des marchés financiers et bancaires en exploitant les
externalités positives et en investissant dans les projets socialement
profitables et stratégiquement importants. Selon cette optique, les
gouvernements disposent d'une information plus fiable que les autres acteurs
économiques, ainsi que des incitations à promouvoir des
investissements sociaux-économiques bénéfiques. Stigler
(1971) est également de cet avis car, pour lui, le gouvernement doit
jouer le rôle d'une « main aidante » puisqu'il est
plus informé que les marchés et qu'il agit pour le seul
intérêt général de l'économie contrairement
aux marchés donc, plus efficace pour assurer le contrôle des
institutions financières.
Néanmoins, Becker et Stigler (1974) ainsi que Haber et
al. (2003) considèrent que ces hypothèses ne sont pas
viables puisque les agences étatiques de régulation ne disposent
ni des connaissances nécessaires, ni de l'expertise requise pour guider
les décisions et les choix des banques par la régulation. C'est
ce qui explique l'émergence d'une troisième approche qui est un
mélange des deux précédentes : l'approche de
l'indépendance des agences de supervisions.
II.2.1.3. Approche de l'indépendance des
agences de supervision
L'approche de l'indépendance des agences de
supervision reconnaît les défaillances du marché qui
légitiment l'intervention de l'Etat. Elle a aussi une connaissance de
l'insuffisance de cette intervention du fait qu'elle risque de détourner
la régulation bancaire étatique de l'objectif de remédier
aux imperfections du marché. Les stratégies de cette approche
suggèrent d'inciter et d'améliorer la capacité des agents
privés à surmonter les problèmes d'asymétrie
d'information et les coûts de transaction pour exercer un contrôle
effectif et efficace sur les banques ; de limiter le pouvoir absolu des
agences de supervision étatiques lors de la régulation (Plihon et
al., 2006). Cette approche, également appelée
théorie de l'autonomisation des agences de supervisions (Barth et
al., 2007), prône la limitation du pouvoir des agences de
supervision et de régulation afin que les politiciens ne soient pas
tentés d'utiliser le contrôle bancaire comme instrument à
des fins purement politiques, qui n'obéissent pas à la
rationalité économique (Hay et Schleifer, 1998). Cependant,
malgré les multiples tentatives d'adoption des systèmes de
régulation, la mondialisation financière a des incidences
négatives qu'il convient d'élucider en faisant également
un point sur ses avantages.
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