CHAPITRE V : LA MUFOPRA : UNE ORGANISATION AUX
INITIATIVES LIMITÉES ?
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Dans ce chapitre, nous traitons exclusivement des
conséquences de la faible prise en compte des intérêts de
la mutuelle sur le fonctionnement normal de la MUFOPRA. Nous mettrons
également un point d'honneur sur ce qui concrètement a pu
provoquer cette situation. Ainsi, nous abordons en première analyse la
question de la rareté des assemblées générales et
du non renouvellement de l'équipe dirigeante. Ensuite, nous interrogeons
l'état de la communication et l'appropriation des statuts de la mutuelle
pour enfin terminer sur la faible mobilisation des adhérents comme autre
incidence de ces facteurs bloquants.
V-I. LA RARETE DE LA TENUE DES ASSEMBLEES GENERALES ET
DU RENOUVELLEMENT DE L'EQUIPE DIRIGEANTE : POURQUOI CA COINCE ?
Lorsque nous avons présenté la monographie de la
mutuelle, nous avons vu que l'assemblée générale constitue
l'instance souveraine où les membres prennent les décisions
importantes concernant la vie de la mutuelle. D'après les statuts, elle
se tient chaque année au siège de la mutuelle. Aucun texte
n'impose l'obligation périodique de consultation des membres, sauf pour
certaines associations réglementées et pour l'approbation de
certaines décisions telles que notamment :
? l'approbation des comptes ;
? la décision de solliciter la
reconnaissance d'utilité publique ;
? la nécessité d'apporter la
preuve de la gestion démocratique ;
? la dévolution des biens de
l'association en cas de dissolution volontaire, en l'absence de
précision dans les statuts.143
« Il est important que les statuts déterminent
précisément le domaine de compétence, les modalités
de convocation, de quorum, de majorité et, d'une manière
générale, de tenue des assemblées générales.
Il s'agit de l organe délibérant et souverain
représentatif des membres de l'association qui doit pouvoir prendre ses
décisions de manière démocratique dans le respect de
règles prédéterminées. Le respect d'un certain
formalisme (tel que la tenue d'un registre ou d'une feuille de présence
qui seront signés par les membres assistant à l'assemblée
et par les mandataires ayant reçu pouvoir à cet effet) permettra
de ménager des éléments de preuve dans
l'éventualité d'une contestation ultérieure. Ces
dispositions s'appliquent également pour les séances du conseil
d'administration. Il est important de noter qu'en cas d'incidence sur
l'orientation des votes, les délibérations de l'assemblée
générale prises de manière irrégulière sont
annulables.144 »
143 La revue Associations, mai 2013, Dossier rédigé
par Frédérique Sidrat, in extenso P.9
144 Ibid.
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« L'opportunité, pour une association, de se
doter d'un conseil d'administration réside notamment dans sa
volonté de voir adopter certaines décisions de manière
collégiale. Le fonctionnement du conseil est également librement
déterminé par les statuts ou le règlement intérieur
et il est essentiel que les fondateurs se soient attachés, lors de la
rédaction du contrat d'association, à établir de
manière précise son mode de fonctionnement en prévoyant
notamment le nombre d'administrateurs, leur mode de désignation ou de
renouvellement, la durée de leurs fonctions, son domaine de
compétence, ses modalités de convocation, de quorum, de
majorité et d'une manière générale de tenue de ses
séances. Toute décision adoptée par le
conseil dans des conditions irrégulières est
également annulable » 145
Lors de notre enquête, les membres, interrogés
sur la question de la tenue des assemblées générales,
disent ne plus se souvenir de la dernière date où l'on l'a
convoquée. A la suite de nos entretiens menés avec certaines
personnes ressources :
« Le défaut de la convocation de
l'assemblée générale et même de la tenue du conseil
d'administration ne peut pas s'expliquer et cela ralentit à souhait la
marche de notre organisation qui est pourtant grâce à sa
création un sérieux renfort au service de l'action
sociale146 trop procédurière.» Un autre
membre d'ajouter que « c'est grâce à la tenue des
assemblées générales et du conseil d'administration que
nous pouvons juger de la vitalité et de la bonne gouvernance de notre
association. Elle est un instrument de mesure du fonctionnement optimal ou non
de cette organisation sociale. Depuis l'opération du recrutement de
25000 jeunes en 2011, nous avons l'impression que nous naviguons a vue et sans
cap .Pas d'assemblée générale depuis lors, C'est le
désespoir qui s'installe.»
Didier Minot dans son ouvrage précité dans le
chapitre IV évoquant cette situation difficile qui occasionne un
fonctionnement atone dans les mouvements associatifs pense que les causes
internes des difficultés associatives que ces difficultés
tiennent aussi à des causes internes qu'il faut analyser. Les
difficultés de renouvellement de certaines associations. De nombreuses
associations rencontrent aujourd'hui des difficultés croissantes pour
renouveler leurs militants et leurs dirigeants, s'organiser au bon niveau
géographique, agir dans la continuité. Cette crise touche en
particulier les secteurs d'aide à la personne, les amicales
laïques, les bénévoles de MJC, le scoutisme les pratiques
sportives amateurs, etc. Certaines causes de ce problème sont internes
aux associations. Nous en soulignerons trois. Un certain nombre de dirigeants
associatifs inamovibles deviennent à la fois indispensables à la
survie de l'association et irremplaçables. Leur engagement et leur
dévouement ne sont pas en cause, car il n'est pas rare qu'ils mettent
toute leur énergie dans la vie de l'association. Mais quand les
activités se répètent à l'identique chaque
année sans faire l'objet de débats, le projet risque de se perdre
dans la routine, et l'association n'est plus mobilisatrice. Par ailleurs,
l'organisation antérieure reposait sur des adhérents et sur du
travail bénévole. Quand elle se transforme en une offre de
services réalisés par des salariés, elle crée des
comportements de consommateurs de la part des d'adhérents. Ceux-ci
n'adhèrent plus à un projet, mais viennent
145 Idem.
146 Le service de l'action sociale est un service de la direction
des affaires générales au MINFOPRA.
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chercher un service, voire simplement une assurance.
Lorsqu'une une association n'est plus qu'une entreprise de prestations,
l'animation d'un réseau de militants devient une charge.
Ainsi, l'évolution du contexte exige des choix
stratégiques qui ne sont pas toujours faits à temps. C'est ainsi
qu'on voit disparaître des associations qui disposaient d'un capital,
d'une image et de savoir faire très importants. L'exemple de l'Adels est
à cet égard emblématique. On voit mieux avec le recul que
la disparition de l'Adels est due à des éléments internes
à l'association : un modèle économique
dépassé, une revue au-dessus de ses moyens, une survie de contrat
en contrat grâce à des relations privilégiées avec
des financeurs. L'équipe salariée de l'association était
peu à peu devenue un bureau d'études à la recherche de
financements, alors que parallèlement son conseil d'administration
menait des réflexions très pertinentes 147
Le cas de notre mutuelle ne s'en éloigne pas, car les
contraintes internes qui pèsent sur le fonctionnement de la MUFOPRA et
dans le cas d'espèce l'absence jusqu'à ce jour au moment de notre
enquête de la convocation de l'assemblée générale
tiendrait, à des raisons financières et d'opportunité.
Ceci crée un ralentissement de la marche de l'organisation qui devient
inerte. Certaines sources disent que courant fin juillet l'assemblée
générale sera convoqué afin de mettre fin a cette
léthargie qu»on observe depuis quelques temps déjà.
Certains mutualistes ne se souviennent plus de la toute dernière
assemblée générale. Entre temps, la prochaine
assemblée générale prévue le 31 JUILLET 2015
à L'ENAM vers la mi - journée pour relancer les activités
reste attendu ; occasion rêvée pour débattre des questions
et contraintes internes de la MUFOPRA. La figure 11 ci-dessous est
illustrative.
Image de quelques membres du Bureau Exécutif
National de la MUFOPRA
Source : cliché V.P. DOBAH DJADJING,
Yaoundé, Juillet 2015
147 Voir son ouvrage intitulé Associations citoyennes
pour demain Éditions Charles Léopold Mayer, 2013.
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Concertation des mutualistes lors de l'Assemblée
Générale à l'ENAM
Source : cliché V.P. DOBAH DJADJING,
Yaoundé, Juillet 2015
Figure 11: Date de la tenue de la dernière
assemblée générale
Source : notre
enquête
La figure N° 11 ci-dessus n'est pas assez précis
sur la tenue de la dernière date de l'assemblée genérale.
L'échantillon réprésentatif constitué de cent
individus variés nous montre que 50% ne se rappellent plus de la
dernière assemblée générale.17% disent que elle a
eu lieu une seule fois en 2008 lors de sa date de creation ,20% des autres
indiquent l'an 2010 tandis que les 13% restant évoquent plutôt
2012.
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Cette situation est assez équivoque et ne nous permet
pas d'avoir une date exacte de la dernière tenue de l'assemblée
générale.Pourtant, et grâce a une analyse de contenue, nous
arrivons a comprendre d'après le documet joint en annexe que la mutuelle
a tenue deux assemblées générales ordinaires le18 Mars
2009 et le 09 Avril 2010148.
La convocation de l'assemblée générale et
la tenue du conseil d'administration projetés en 2013 n'ont pas
été agréés pour de raisons inavouées jusque
là ;alors que beaucoup évoquent les raisons financières ce
qui malheureusement entretien l'inertie pour ceratins.Mais un espoir reste
gardé sur la tenue prochaine en juillet 2015 de la fameuse
assemblée générale .
Lorsque nous observons la figure n°10 ci-dessous,
nombreux sont ceux qui pensent que la vie de l'association est plombée
à cause de son inactivité et beaucoup avouent qu'en même
qu'elle se dirige vers « une lente agonie » pourtant elle
porte un bon projet social qui promeut l'égalité,l'action et la
solidarité pour tous. Les résultats de notre enquête nous
montre que 70% avouent que la MUFOPRA est pour l'instant grippée
par les initiatives limitées tandis que les autres 30% pensent
plutôt le contraire. Parlant donc de cette inertie, le bureau
exécutif affirme dans son expose liminaire relatif à la relance
de la MUFOPRA qu'en guise de bilan de la mise en oeuvre de ces mesures,
nous pouvons dire qu'après approbation du MINFOPRA, des
consultations ont été organisées dans
les différentes structures en vue de la sensibilisation de personnels
pour la relance de la MUFOPRA Grippée depuis 2011... 149
Cette grippe qui ralentit la MUFOPRA n'est autre
chose que de l'inertie structurelle ou systémique qui est
accentuée par la faible communication structurelle que nous abordons
dans une articulation de ce chapitre comme facteur générant
l'inertie ou expliquant les initiatives limitées de la MUFOPRA . Lors de
notre enquête il nous a été donné de constater que
la liberté d'adhésion n'existe pas car tous sont d'office membre
de la mutuelle ; la participation est une obligation pour tous et le taux de
contribution est le même pour tous également.
« Et cette situation nous frustre tellement quand
nous ne pouvons plus jouir de notre liberté d'adhérer ou pas.
Nous savons qu'en matière associative, c'est la liberté qui est
le sacro-saint principe inviolable. Mais ici au MINFOPRA nous sommes contraints
et cela ne nous motive pas du tout » « Bien plus, on devrait gagner
plus à nous expliquer la situation en menant des actions
concrètes, visibles et
communiquer ou diffuser» affirme un mutualiste
cadre contractuel au MINFOPRA.
148 Voir document relatif au bilan de la MUFOPRA joint en
annexe.
149 Voir document relatif à la relance de la MUFOPRA joint
en annexe.
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Figure 5: Avis sur le degré d'initiatives
limitées au sein de la MUFOPRA
Source : notre
enquête
Figure 13 : Types d'adhésion : libre
?
Source : notre enquête
Sur cette question d'adhésion, 9% seulement pensent que
l'adhésion est libre tandis 91% sont dans le regret de faire savoir que
l'adhésion est d'office ou obligatoire ce qui déteint directement
sur le fonctionnement sous optimal de la MUFOPRA ou de baisse de performance
pourtant la liberté contractuelle dont bénéficie le
contrat d'association n'enlève rien aux obligations et contraintes en
termes de formalisme notamment juridique et fiscal auxquelles elles sont
assujetties. Il appartient aux dirigeants de les connaître et de les
respecter, leur non respect pouvant emporter des conséquences
fâcheuses non seulement pour l'association mais également à
leur égard150
150 Voir Jean Jacques Rousseau in Du contrat social 150
Voir code civil
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Les dirigeants de l'association gagneraient à faire
comprendre aux uns la nécessité d'adhérer librement pour
le bien commun et l'intérêt général car : «
L'obligation qu'on s'est prescrite est liberté » ou « les
conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux
qui les ont faites »151
Quid de la faible communication et appropriation des textes ?
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