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La résistance au marketing dans le secteur agro-alimentaire.

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par Aliénor Miroudot
INSEEC Lyon - Master 2 Marketing, Communication et Stratégies commerciales 2016
  

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Partie 1 / Cadre théorique

CHAPITRE 1 : LE MOUVEMENT DE RÉSISTANCE

La résistance est une réaction observée depuis des siècles dans le comportement de l'individu. C'est une réaction commune et naturelle, déjà identifiée dans de nombreux contextes historiques et sociologiques (E. Remy, 2004). Dans notre société où les firmes détiennent une place prédominante et « croient encore possible, bien à tort, de gouverner le consommateur » (Y. Gabriel et T. Lang, 1995), elles continuent de développer des offres et des outils encore plus précis à travers des stratégies de fidélisation pour satisfaire le consommateur et l'inciter à rester. Pourtant, à force d'être noyé dans cette multitude d'offres, le consommateur ne distingue plus les différences entre les marques, la valeur ajoutée et l'innovation des nouveaux produits. De plus, avec l'évolution de la société et l'apparition de nouveaux enjeux éthiques, il y a de nouveaux facteurs qui interfèrent dans la relation consommateur-entreprise. D'autant plus dans une société d'information de masse, ultra-connectée, avec des rythmes toujours plus rapides, le consommateur se sent de plus en plus dépassé et lassé par les représentations envers qui il manifeste légitimement son mécontentement. On remarque un changement notoire dans le comportement de consommation, le consommateur « traditionnel » recherchait par tous les moyens à consommer les offres présentées sur le marché pour satisfaire ses besoins et appartenir aux représentations établies, tandis qu'aujourd'hui, il est beaucoup plus informé et à même de décrypter les marques pour consommer en fonction de lui et de ses valeurs. Malgré tout, les firmes continuent de développer des outils de fidélisation pour séduire, mais ces derniers mobilisent différentes ressources pour exprimer leur résistance, car s'il y a résistance, c'est qu'il n'y a pas de satisfaction. L'intérêt pour le marketing aujourd'hui est de réussir à comprendre et à percevoir les raisons et les ressorts de la résistance, pour ne pas remettre en question son rôle dans notre société, car la résistance semble être la conséquence de besoins non traduits dans les offres proposées. Dans les années 90, la résistance à la consommation a commencé à être étudiée par les sciences du marketing, mais c'est un concept difficile à cadrer en raison de la complexité des informations à interpréter, des variables impliquées à l'origine de la résistance et la diversité des actions traduisant cette résistance. Dans cette première partie, je vais tenter d'apporter un cadre d'analyse au mouvement de résistance, de définir les ressorts de la résistance à travers les moyens utilisés par les consommateurs. Afin d'illustrer les nouveaux profils de consommation, je définirai dans un dernier temps le « nouveau consommateur » (D. Roux, 2007) à travers le « consom'acteur ».

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1 - Les fondements théoriques du mouvement de résistance

Ce mouvement a d'abord été conceptualisé par M. Poster en 1992 comme la capacité des consommateurs à employer des « stratégies d'appropriation » en réponse « à des structures dominantes », puis reprit par Penazola et Price en 1993. Dès lors de nombreuses recherches se sont multipliées essentiellement fondées sur des approches comportementales permettant d'analyser principalement les actes de résistance.

Le terme résister vient du latin « resistere » qui signifie « s'arrêter et faire face ». Dans ses recherches, D. Roux (2007) a définit la résistance à la consommation comme une forme d'opposition, émanant d'un sentiment de rejet envers une représentation donnée, et s'exprime au travers de stratégies d'appropriation, puis, dans la capacité à manifester sa contestation. Dès lors, pour qu'il y ait résistance, il faut qu'il y est une relation déjà établite entre la représentation (firmes, marchés, institutions) et le consommateur. Il est nécessaire de comprendre cette double conceptualisation, car dans un premier temps, il faut que le consommateur ressente une pression s'exercer sur lui en identifiant les éléments dissonants, et qu'il manifeste son insatisfaction. La résistance nécessite que le consommateur mobilise différents mécanismes de défense pour se protéger dans le but d'atteindre sa cible. La résistance est donc un acte plus ou moins volontaire de la part du consommateur dans le but de s'opposer à une force jugée oppressive (Roux D., 2009), mais pas nécessairement conscient. Dans ce sens Dominique Roux (2004) a établit un cadre d'analyse de résistance du consommateur et a définit la résistance comme un ensemble de formes variables d'opposition face à des situations de pression et d'influence, dans lesquels les « pratiques et discours marchands sont jugés comme dissonants. »

Cadre d'analyse de la résistance du consommateur1

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La résistance du consommateur : proposition d'un cadre d'analyse - D. Roux, 2007

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La résistance dépend de plusieurs dimensions variables. Ils peuvent être externes au consommateur, alors intégrés à la « dimension situationnelle » (D. Roux, 2007), en effet, les consommateurs s'opposent à des conditions de marché jugées inacceptables (R.J Moisio et S. Askegaard, 2002), le consommateur n'a aucune emprise sur ces éléments. A travers le concept du « coping » (Lazarus, Folkman, 1984), on remarque que le consommateur a le sentiment de faire constamment des efforts de compréhension et d'adaptation, ce qui le place dans une situation de rejet. L'interprétation cognitive de la situation est propre à chacun, mais dans une société mondialisée où les informations abondent dans tous les sens, le consommateur a le pouvoir de prendre du recul sur la situation, s'informer, de comparer les offres et acteurs pour mieux analyser les discours, ce qui représente autant d'éléments qui peuvent interférer entre les firmes et le consommateur. Les firmes, à travers leurs outils ont d'une certaine manière poussé le consommateur à agir comme tel. L'essor des Marques de Distributeurs en constitue un exemple pertinent, puisque les consommateurs se sont retrouvés au coeur d'une bataille des prix entre marques de distributeurs et marques industrielles. Ainsi, le consommateur a aujourd'hui une image du rapport qualité/prix qui va le pousser à regarder et comparer dans chaque situation. En effet, le consommateur mémorise une série d'expériences plus ou moins positives, qui sont propres à lui ou à son entourage pour se faire un jugement. Ce « concept de métacognition » (Friestad et Wright, 1994) influence significativement sa réaction face à une représentation négative supplémentaire. Le consommateur compare, associe et recoupe des faits avant de déterminer sa réaction. Si le consommateur enregistre une accumulation de rejets pour une même représentation dans différentes situations, il va alors s'opposer (C. Ficher, 2001).

La résistance varie donc en fonction de facteurs personnels traduits par la capacité du consommateur à réagir dans une situation en fonction de sa perception, de ses émotions et de son état. Sa capacité à décrypter l'information dépend aussi de facteurs sociaux comme le niveau d'éducation de l'individu. Si un individu grandit dans une famille qui est sensible aux enjeux du développement durable, le consommateur adulte fera plus attention à ces éléments. Le profil socio-démographique du consommateur détermine également son niveau d'exigence face aux firmes, sa sensibilité face à leurs pratiques et à sa position dans la construction de la société. Dans ce sens, si le consommateur a une situation plus aisée, il pourra plus facilement s'opposer ou trouver d'autres solutions. Enfin, le facteur émotionnel joue un rôle essentiel, auquel on accorde une double dimension, (Knowles et Linn 2004) : d'une part « l'état motivationnel » du consommateur qui représente l'état d'un individu à se contrôler face à des éléments dissonants; d'autre part « les manifestations de résistance » qui s'apparentent à des forces puisées favorisant l'action de résistance. Enfin, le consommateur a acquit avec le temps une liberté précieuse qui lui est très précieuse comme le droit à l'information, la liberté d'expression, qu'il cherche à protéger au maximum. Si cette notion de liberté est remise en question ou bafouée par les représentations proposées par les firmes, le

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consommateur va naturellement remettre en question sa relation avec le produit ou son besoin de consommer voire de s'opposer (J. Brehm, 1966).

De manière générale la résistance peut être classifiée sur trois niveaux, le premier niveau correspond à une résistance face au contenu de l'offre. Aujourd'hui, uniformisé et standardisé par la mondialisation, il est de plus en plus critiqué par le consumérisme. Le second niveau de résistance porte sur les techniques et actions utilisées par le marketing dans leurs stratégies d'influence perçues comme abusives. Enfin, le troisième niveau de résistance interroge le rôle des acteurs marchands et leur responsabilité face aux nouveaux enjeux de la mondialisation (D. Roux 2007). Ces différents niveaux de résistance vont déterminer les changements de comportement et les profils de consommateurs résistants.

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"Je ne pense pas qu'un écrivain puisse avoir de profondes assises s'il n'a pas ressenti avec amertume les injustices de la société ou il vit"   Thomas Lanier dit Tennessie Williams