L'arbitrage en droit marocain et ses évolutions.( Télécharger le fichier original )par Mohammed Amine Sourhami Faculté de droit - Droit Privé 2015 |
A- L'appelL'appel consiste à porter l'ensemble du litige devant la Cour d'appel dans le ressort de laquelle la sentence a été rendue, qui en réexamine tous les éléments, en droit comme en fait. L'appel est recevable quel que soit le montant du litige. A moins que les parties n'aient renoncé à l'appel dans la convention d'arbitrage et à moins que l'arbitre n'ait reçu mission de statuer comme amiable compositeur. Pourtant les parties peuvent se réserver le droit d'interjeter appel contre la sentence rendue en amiable composition. Elles doivent le faire expressément et sans équivoque dans la convention d'arbitrage. En outre, l'appel n'est pas recevable contre les sentences rendues au Maroc en matière d'arbitrage international175(*). L'exclusion de l'appel a des conséquences graves puisque le perdent ne pourra que difficilement contester une sentence qui lui est défavorable, même si elle comporte des erreurs de fait ou de droit. L'appel peut tendre soit à la réformation de la sentence, par exemple une modification des dommages-intérêts alloués à l'un des plaideurs, soit à son annulation. Par conséquent, l'appel peut être interjeté non seulement par le perdant, mais aussi par le plaideur qui n'a obtenu qu'une satisfaction partielle176(*). Le recours est recevable dès le prononcé de la sentence et non pas seulement sa signification, car le perdent a intérêt à faire infirmer sans délai la sentence qui lui est défavorable177(*). Si la sentence revêtue de l'exequatur a été signifiée au perdent, celui-ci doit faire appel dans le délai de quinze jours. Dans le cas contraire aucun délai n'est prévu, ce qui est regrettable178(*). Le délai d'appel et l'appel interjeté ont un effet suspensif, sauf, si l'exécution provisoire a été ordonnée. La procédure est celle de droit commun, c'est-à-dire qu'elle nécessite le recours à un avoué. La Cour d'appel rend un arrêt qui tranche le fond du litige, un pourvoi en cassation peut être formé contre l'arrêt d'appel179(*). B- Le recours en annulationLorsque les parties ont renoncé à l'appel ou qu'elles ne se sont pas réservées cette faculté dans la convention d'arbitrage, un recours en annulation180(*) contre les sentences peut être exercé dans les formes ordinaires devant la cour d'appel dans le ressort de laquelle elles ont été rendues. Ce recours est recevable dès le prononcé de la sentence ; il cesse de l'être s'il n'a pas été exercé dans les quinze jours de la notification de la sentence revêtue de l'exequatur. Bien que l'appel soit une voie de droit commun, le recours en annulation qui lui est assimilé se différencie tant par les causes de sa recevabilité que par les règles particulières de procédure et de ses effets sous toutes leurs facettes181(*). La loi a fixé sept cas où les parties peuvent former ce recours contre l'acte qualifié de sentence arbitrale. Ces cas sont les suivants182(*) : 1. S'il a été statué en l'absence de convention d'arbitrage, sur convention nulle ou après expiration du délai d'arbitrage ; 2. Si le tribunal arbitral a été irrégulièrement composé, l'arbitre unique irrégulièrement désigné ou la convention des parties non respectée ; 3. Si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée, a statué sur des questions n'entrant pas dans le cadre de l'arbitrage ou a méconnu les limites de la convention. Cependant, s'il est possible de distinguer les parties de la sentence concernant les questions soumises à l'arbitrage de celles qui ne lui sont pas soumises, l'annulation ne porte que sur ces dernières ; 4. Lorsque les dispositions des articles 327-23 alinéa 2, 327-24 en ce qui concerne les noms des arbitres et la date de la sentence et 327-25 n'ont pas été observées ; 5. Lorsque l'une des parties n'a pas été en mesure d'assurer sa défense du fait qu'elle n'a pas été valablement informée de la désignation d'un arbitre, des procédures d'arbitrage ou pour toute autre raison relative au devoir du respect des droits de la défense ; 6. Si la sentence arbitrale est rendue en violation d'une règle d'ordre public. 7. Dans le cas de non respect des formalités de procédure convenues entre les parties ou de non application d'une loi devant être appliquée d'un commun accord entre elles à l'objet du litige. Par ailleurs, la CA qui examine le recours en annulation prononce d'office l'annulation de la sentence arbitrale lorsqu'elle est contraire à l'ordre public du pays ou si elle constate que l'objet du litige concerne une question qui ne peut être soumise à l'arbitrage ; ce qui diffère du sixième cas afférent à une simple violation d'une règle d'ordre public par la décision arbitrale contestée. La cour d'appel statue selon la procédure d'urgence. Le délai pour exercer le recours en annulation suspend l'exécution de la sentence arbitrale. Le recours exercé dans le délai est également suspensif. Il faut noter enfin que les procédures d'appel et d'annulation sont contentieuses et que le rejet de l'appel ou du recours en annulation confère l'exequatur à la sentence183(*). Lorsque la Cour d'appel annule la sentence arbitrale, elle statue sur le fond dans les limites de la mission du tribunal arbitral sauf si l'annulation est prononcée pour absence de convention d'arbitrage ou pour nullité de cette convention184(*). Lorsque la Cour d'appel prononce l'irrecevabilité du recours en annulation, elle doit ordonner l'exécution de la sentence arbitrale. Son arrêt est définitif185(*). Paragraphe II/ les voies de recours extraordinairesCes voies de recours, qui sont au nombre de trois, ont des caractéristiques communes. Elles ne sont ouvertes que dans les cas prévus par la loi. Elles n'ont pas d'effet suspensif et constituent des garanties particulière, tant pour les parties que pour les tiers. Nous examinerons successivement le recours en révision (A), la tierce opposition (B), et enfin le pourvoi en cassation (C). * 175 BOUDAHRAIN, Abdellah. L'arbitrage commercial interne et international au regard du Maroc. Op.cit. p128. * 176 Yves, GUYON. L'arbitrage. Op.cit. p83. * 177 B. Goldman et B.OPPETIT, « Justice arbitrale et justice étatique ». Op.cit. p94. * 178 VIDAL Dominique, Droit français de l'arbitrage commercial international. Op.cit. p118. * 179 Conformément au droit commun, la Cour de Cassation juge seulement en droit et non en fait. Elle ne connaît pas le fond de l'affaire. * 180 La plus grande nouveauté de la loi sur l'arbitrage réside, selon plusieurs spécialistes, dans la force exécutoire de la sentence arbitrale. Dans l'ancien texte, celle-ci n'était pas susceptible d'appel. * 181 BOUDAHRAIN, Abdellah. DROIT JUDICIAIRE PRIVE AU MAROC. Op.cit. p355. * 182 Article 327-36 du Code de Procédure Civile. * 183 Alain REDFERN et Martin HUNTER. « Droit et pratique de l'arbitrage commercial international ».Op.cit. p237. * 184 Article 327-37 du CPC. * 185 Article 327-38 al 1 du CPC. |
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