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La bête du Gévaudan, l'animal pluriel.

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par Laurent Mourlat
Université d'Oslo - Maitrise 2016
  

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Conclusion de la deuxième partie de ce mémoire

Au cours de la deuxième partie de cette étude, nous avons été les témoins de la création d'un nouvel objet de la croyance 267. La culture régionale, la présence de « signes anomaliques » 268, l'arrivée de la presse qui peut alors décrire les « caractères d'un événement » 269 ainsi que d'autres éléments présents dans la théorie de Meurger se retrouvent tout au long d'un processus qui semble être très approchant de celui qui a vu la construction de l'objet de la Bête du Gévaudan. Cependant, la réalité paradigmatique de l'Ancien régime n'ayant rien à voir avec celle de la société actuelle, la conséquence en est que la teneur du récit attaché la nouvelle Bête est différente. Ainsi, bien qu'elle soit elle aussi sujette aux conjectures quant à sa nature véritable, bien qu'elle ne laisse dans son sillage que quelques griffures et des blessures sur un cheval, la nouvelle Bête n'est pas un animal extraordinaire. Qu'elle soit un puma, un puma imaginaire ou tout autre chose, son identification ne verse ni dans la mythologie ni dans la religion. Elle n'est en sorte que ce qu'elle est supposée être : un animal. La croyance est donc là circonscrite au domaine de l'existence ou de la non-existence d'une bête en bonne et due forme.

Revenons maintenant au XVIIIè siècle et intéressons-nous au cadre dans lequel se construisent les croyances liées à la Bête du Gévaudan. Issus de cadres sociétaux distincts, la noblesse et le Tiers-Etat devraient, du fait de la dichotomie culturelle qui les caractérise, être à l'origine de deux réflexions différenciées. Dans la prochaine partie de ce mémoire nous verrons si l'évolution asymétrique des idées qui définit le Tiers-Etat et la Noblesse au XVIIIè siècle induit l'apparition de croyances spécifiques et si ces dernières sont le fruit du cadre référentiel dont elles procèdent.

267 Il n'est pas ici mon propos de tirer des conclusions sur l'existence ou la non-existence d'un puma en Gévaudan. Animal imaginaire ou non le puma dont il est question a été selon moi, l'objet d'un processus qui a mené à l'élaboration d'une croyance.

268 MEURGER Michel, Loc. cit., p 177.

269 MEURGER Michel, Loc. cit., p 178.

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PARTIE III

LA BÊTE, UNE ENTITE MULTIPLE

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Introduction de la troisième partie de cette étude

Dans la troisième partie de ce mémoire, je vais tenter d'effectuer une analyse sectorielle. En premier lieu, je vais m'intéresser aux croyances développées par la noblesse et les gens éduqués. Pour ce faire, je vais isoler les cinq acteurs de cette histoire qui, à mon sens, sont les plus représentatifs de leur classe. Ainsi, François Antoine 270, les Dennevals 271 (père et fils), le comte de Morangiès 272, Mr de la Barthe 273 et le capitaine Du Hamel 274 feront l'objet d'une analyse comparée ceci au regard de leurs rôles et de leurs intérêts possibles à l'éradication de la Bête du Gévaudan. De cet examen, j'espère pouvoir tirer des informations sur les motivations personnelles de ces personnes et de ce fait pouvoir me prononcer sur l'existence ou la non-existence de croyances dans ce groupe social. Enfin, je m'efforcerai de réintégrer ces dernières dans la théorie de Meurger, ceci dans le but de lier le processus qui les génère au cadre dont elles sont issues. En second lieu, je m'attacherai à l'étude des croyances du Tiers-Etat. Je me concentrerai premièrement sur le rôle des prêtres dans la vie des habitants du Gévaudan au XVIIIe siècle. La raison de ce choix est que les ministres du culte ont, en tant que représentants de la croyance officielle, exercé une influence non négligeable sur la culture du lieu et conséquemment sur l'interprétation populaire des événements par les habitants. De plus, en tant que trait d'union entre l'institution et les autochtones ils ont fait office de traducteurs des documents religieux et sont de ce fait un maillon essentiel de l'histoire. Enfin, après avoir mis en évidence quelles étaient les superstitions les plus communes en Gévaudan à l'époque de la Bête, je procéderai à l'analyse des icônes et des extraits d'archives qui s'y rapportent. Cette analyse sera faite en fonction de l'évolution du cadre historique, ceci principalement du point de vue du développement de l'histoire de la théologie. C'est en comparant les croyances anciennes à celles qui ont pu naître au cours de ces événements qu'il sera possible d'établir si la Bête du Gévaudan est à l'origine d'un récit qui lui est propre.

270 François Antoine fait partie de la noblesse. Il était à l'époque des faits le porte-arquebuse de Louis XV. Il aurait, selon la couronne, tué la Bête du Gévaudan. Les faits montrent que cette version est discutable car l'animal a continué de faire des ravages après que sa mort ait été annoncée

271 Les Dennevals (père et fils), sont deux nobles. Chasseurs normands spécialisés dans la chasse au loup, ils vont très vite faire l'objet de vives critiques car ils montrent le dédain le plus profond pour les populations paysannes. Surpris par l'âpreté du climat ainsi que par le relief du Gévaudan, ils seront incapable de remplir la mission qui leur était assignée (occire la bête du Gévaudan). « D'Enneval » était le véritable orthographe du nom. Il sera remplacé par les Dennevals.

272 Noble local, Jean François Charles de La Molette, comte de Morangiès est un personnage intéressant car il chasse lui aussi la Bête et est en concurrence directe avec le capitaine Du Hamel. De plus, Jean François Charles de La Molette, est dans une situation inconfortable car son père fut, quelques années auparavant banni de la cour.

273 Mr de la Barthe est un gentilhomme campagnard. Noble lui aussi, il est l'auteur de lettres qui furent reprises par la presse de l'époque. Commentateur ironique des croyances et des superstitions il est un observateur qui rapporte avec zèle la réalité du Gévaudan dans la période qui nous intéresse.

274 Le capitaine Du Hamel est le premier chasseur de la Bête du Gévaudan. Organisateur de nombreuses battues infructueuses, il sera désavoué et remplacé par les Dennevals. En charge du régiment des volontaires de Clermont-Prince, Du Hamel est un témoin oculaire. Il est l'auteur de nombreuses descriptions de l'animal.

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CHAPITRE XI

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"L'ignorant affirme, le savant doute, le sage réfléchit"   Aristote