Les insuffisances de la constitution burkinabè du 02 juin 1991.( Télécharger le fichier original )par Guetwendé Gilles SAWADOGO Université Privée de Ouagadougou - Licence ès Sciences Juridiques et Politiques 2014 |
B. Le mimétisme constitutionnelLa Constitution du 02 juin 1991 a été fortement inspirée de celle de la France adoptée en 1958. La transposition automatique de la démocratie française (1) au Burkina Faso s'est soldée par un échec (2) du constitutionnalisme burkinabè. 1. La transposition des systèmes et institutions françaisSi l'on définit le mimétisme comme « la transposition d'une Constitution d'un Etat vers un autre Etat, une exportation plus ou moins consciente et plus ou moins complète »,9(*) l'on peut se rendre compte que la constitution du 02 juin 1991 n'échappe pas à la catégorie des constitutions mimées. En effet, la constitution burkinabè reproduit exactement les règles et les institutions françaises issues de la constitution de 1958 « à la virgule près ». De l'organisation de l'institution présidentielle au modèle de justice constitutionnelle en passant par l'organisation du Parlement, l'aménagement des rapports entre parlement et gouvernement, le système de parti, le titulaire de la souveraineté, ainsi que pour bien d'autres institutions, le Burkina Faso a copié la France. Le constituant burkinabè (et celui africain en général) a fait de la constitution et de la pratique françaises un modèle. Il a trouvé en la France leur modèle de démocratie, or de la déclaration de Bamako signée le 3 novembre 2000 par les Ministres et chefs de délégation des États et gouvernements des pays ayant le français en partage lors du Symposium international sur le bilan des pratiques de la démocratie, des droits et des libertés dans l'espace francophone, il ressort qu'« il n'y a pas de mode d'organisation unique de la démocratie et que, dans le respect des principes universels, les formes d'expression de la démocratie doivent s'inscrire dans les réalités et spécificités historiques, culturelles et sociales de chaque peuple ». Le constituant burkinabè n'ayant pas pris cette considération en compte, il en résulte un échec du constitutionnalisme. 2. L'échec du au mimétismeDe manière contradictoire, on pourrait reprocher aux constituants africains d'avoir importé intégralement la Constitution de 1958 ou dans l'autre sens, de n'avoir pas préservé sa cohérence en la transposant de manière incomplète. La transposition intégrale est ce qui nous parait être un handicap à la réussite du constitutionnalisme burkinabè. S'il faut reconnaitre que « toute l'histoire des constitutions, à partir de quelques rares prototypes originaux, est faîte d'imitations »10(*), une Constitution ne peut être transposée entièrement et doit nécessairement se plier au contexte politique et social de l'Etat concerné. Le constituant doit alors procéder à un double mouvement. Il doit d'abord « dépoussiérer » la Constitution qu'il souhaite transposer dans son Etat et ensuite sélectionner les dispositions qui lui seront utiles11(*). En effet, une Constitution étant faite sur mesure, elle contient des dispositions qui ne sont pas transposables, notamment parce qu'elles sont obsolètes. Dans le cas du Burkina, le constituant a transposé systématiquement les institutions françaises dans la constitution sans tenir compte du contexte sociopolitique et économique du pays. L'exemple le plus frappant est l'institution en 1991 du bicamérisme alors que les autres pays à l'instar de la Côte d'Ivoire avaient par réalisme institué un monocamérisme. Les différentes révisions controversées de la constitution se rapportant sur ces mêmes dispositions sont une preuve de l'échec du mimétisme constitutionnel au Burkina Faso. Mais les modalités peu démocratiques dans l'adoption ont aussi joué sur la qualité de la Constitution burkinabè. * 9 F. DARGENT, Les échecs du mimétisme constitutionnel en Afrique noire francophone, atelier n°4 ( www.droitconstitutionnel.org/congresNancy/comN4/dargentT4.pdf), 09 septembre 2014. * 10J. RIVERO, « Les phénomènes d'imitation des modèles étrangers en droit administratif », in Mélanges W. J. Ganshof Van Der Meersch, tome III, Bruxelles, Bruylant, Paris, LGDJ, 1972, p. 620. * 11 F. DARGENT, Les échecs du mimétisme constitutionnel en Afrique noire francophone (www.droitconstitutionnel.org/congresNancy/comN4/dargentT4.pdf) |
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