§2. La faiblesse de la
justice constitutionnelle
La faiblesse de la justice constitutionnelle burkinabè
se perçoit dans la faiblesse du contrôle de
constitutionnalité (A) et dans les défaillances du contentieux
des droits de l'Homme (B).
A. La faiblesse du contrôle de
constitutionnalité
Le contrôle de constitutionnalité est un
élément important, voire indispensable pour l'aboutissement d'un
constitutionnalisme réussi. C'est en effet, un mécanisme de
« sanction garantissant la suprématie de la
constitution » qui permet au juge constitutionnel de censurer les
normes juridiques contraires aux normes fondamentales de valeur
constitutionnelle. Le contrôle de constitutionnalité au Burkina
Faso est faible et cela s'explique par l'indépendance douteuse de la
juridiction constitutionnelle (1) ainsi que le pouvoir limité de cette
institution (2).
1. Le doute sur l'indépendance du
conseil constitutionnel
Dans de nombreux pays, on trouve un minimum de règles
destinées à assurer aux juges constitutionnels une
indépendance vis-à-vis du pouvoir politique. Ces règles
sont relatives à la durée du mandat, à la nomination,
à l'inamovibilité des fonctions, au non renouvellement de mandat
et aux incompatibilités. Au Burkina Faso, c'est plutôt la
modalité de nomination qui suscite la question de l'indépendance
du Conseil constitutionnel. Aux termes de l'article 153, « le
Conseil constitutionnel comprend : les anciens chefs de l'Etat du Burkina Faso
; trois magistrats nommés par le Président du Faso sur
proposition du ministre de la justice ; trois personnalités
nommées par le Président du Faso dont au moins un juriste ; trois
personnalités nommées par le Président de
l'Assemblée nationale dont au moins un juriste ; trois
personnalités nommées par le Président du Sénat
dont au moins un juriste ». C'est donc l'exécutif et le
législatif, deux pouvoirs constitués, qui interviennent dans ces
nominations. Les nominations sont toujours sujettes à polémique
car toute nomination est politique parce que faite par une autorité
politique. Mais l'important réside dans la capacité des personnes
nommées à rendre la justice constitutionnelle en toute
indépendance et impartialité sans tenir compte des
autorités de nomination, en d'autres termes à assumer le devoir
d'ingratitude à l'égard desdites autorités de nomination,
comme disait maître Robert Badinter dans son interview au journal le
Monde en 1986. Dans le cas du Burkina Faso, le Conseil constitutionnel n'est
pas encore parvenu à ce stade surtout que les nominations se font
plutôt par affinité politique. Le juge Burkinabè est
toujours allé dans le sens de la volonté du politique même
quand l'inconstitutionnalité de la mesure est perceptible même par
l'étudiant en première année de droit : c'est
l'influence du politique sur le juriste. A ce « devoir de
reconnaissance » dont vouent les juges constitutionnels à
l'égard leur autorité de nomination s'ajoute le caractère
limité de leur pouvoir, rendant ainsi le contrôle de
constitutionnalité inefficace.
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