Le principe du droit de la responsabilite environnementale en droit europeen( Télécharger le fichier original )par Amaury Teillard Université de Cergy-Pontoise - Master 2 Recherche 2006 |
2.2 Section 2 : Le système juridique mis en placeLe régime de protection de l'environnement par la mise en cause de la responsabilité des entreprises est constitué de plusieurs lois, mais le texte principal est celui de la Comprehensive Environnemental Response Compensation and Liability Act (CERCLA), plus communément appelé du nom de « Loi superfund » de 1980. Ce superfund est financé par tous les responsables d'une pollution, de manière solidaire, pour rembourser les frais avancés par l'Environmental Protection Agency pour la restauration de l'environnement, et la réparation des dommages subis par les ressources naturelles. La loi permet de trouver ce qu'elle appelle les « parties potentiellement pollueuses ». Au milieu des années 1990, ce fonds était de 1,7 milliard de dollars. Le régime qu'il met en place est plutôt original sur le point de la mise en cause de la responsabilité des exploitants et propriétaires, et du lien de causalité. Ces deux points sont compris de manière très large par la loi. §1 Quel dommage pris en compteLes dommages pris en compte sont tous les dommages quels qu'ils soient causés à l'environnement et aux ressources naturelles, causés par l'activité d'un site émettant des substances dangereuses. §2 Quels responsablesLe système avait principalement pour but de trouver des payeurs, plus que des responsables. Aussi la loi a-t-elle élargi l'acceptation de responsable d'un site, et remis en question par ce biais l'idée même du pollueur payeur. La loi C.E.R.C.L.A. reprend comme responsable les « propriétaires et les exploitants d'un site » origine de la pollution résultant de l'émission de substances dangereuses s'y trouvant. Cependant la notion d'exploitant est à géométrie variable, et au final, certaines personnes physiques ou morales assez éloignées de toutes activités d'exploitations ont pu être qualifiées d'exploitants par la loi. Un facteur qui a beaucoup contribué à l'étendue de la responsabilité au-delà du propriétaire ou de l'exploitant au sens strict est celui de la recherche de la levée de la limitation de responsabilité de l'actionnaire au montant de ses apports, recherche assez fréquente aux Etats-Unis, contrairement aux pays européens15(*). A. La société mèreLes Etats ont eu pour but de mettre en cause la responsabilité de la société mère, celle-ci étant en général largement plus solvable que sa filiale. La théorie sur laquelle est fondée cette mise en cause est celle de l'absence de réelle autonomie. La loi superfund a ramené la responsabilité sur le propriétaire, implicitement sur la tête de la société-mère, que celle-ci soit ou non le réel pollueur. Il faut reconnaître que la mise en cause de la responsabilité de la société mère n'a été que rarement reconnue en pratique. On peut en trouver un exemple dans un arrêt US vs. Kayser-Roth Corporation. 16(*) Dans cette espèce, un fabricant de matières textiles, filiale d'une société-mère, avait causé la pollution d'une rivière de Rhodes Island par des fuites d'un produit chimique (du trichloréthylène) et par un entreposage de produits industriels de ce produit. L'Environnemental Protection Agency avait dû dépenser près d'un million de dollars pour la remise en état du site, et avait intenté une action contre la société mère. Celle-ci avait été déclarée le vrai exploitant, au regard de l'absence totale d'indépendance de la filiale par rapport à la société mère, ce qui autorisait donc la mise en cause de sa responsabilité. Cependant cette décision reste assez exceptionnelle, et même si en théorie la loi superfund permet la mise en cause de la société mère, alors même que celle-ci n'a eu aucune influence dans les décisions ayant provoqué la pollution d'un site, la pratique montre que le risque de distorsion du principe pollueur-payeur au détriment de la mère est limité. Il peut être précisé que le régime de responsabilité européen ne risque pas non plus d'être touché par ce genre de distorsion, puisque ce n'est pas vraiment dans l'esprit européen que de rechercher la responsabilité de la société-mère pour des faits d'une filiale. * 15 Patrick Thieffry, l'opportunité d'une responsabilité communautaire du pollueur ; les distorsions entre les Etats membres et les enseignements de l'expérience américaine, RIDC, 1-1994, p.103, spéc. p.116. * 16 US v. Kayser-Roth Corp. 724 F. Supp. 15 (D.R.I. 1989). |
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