La conception de l'éducation chez les betsimisaraka: analyse à travers les proverbes. Cas du village de Rantolava( Télécharger le fichier original )par Anonyme Université de Rouen - Master 2 en Sciences de l'éducation 2014 |
CHAPITRE III- LES PROVERBES : UN GENRE LITTERAIRE A VOCATIONPEDAGOGIQUE POUR LES BETSIMISARAKA 46 III.1. L'art oratoire au quotidien 46 III.2. Société betsimisaraka : une école de la vie par les proverbes 51 CHAPITRE IV - APPROCHES PEDAGOGIQUES D'UNE ECOLE SANS MURS ENPAYS BETSIMISARAKA 68 IV.1. Une pédagogie de deux ordres 68 IV.2.Les proverbes au quotidien en pays betsimisaraka 72 TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET PERSPECTIVES 75 CHAPITRE V - LA PLACE DES TRADITIONS ORALES ET DES VALEURSMALAGASY DANS LE PROGRAMME SCOLAIRE 76
CHAPITRE VI - LES LIMITES DU CHAMP D'APPLICATION 86
CONCLUSION 96 REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES 99 GLOSSAIRE 101 3 LISTES DES CARTES, GRAPHIQUES, PHOTOS ET TABLEAUX Liste des cartes Carte 1 - Localisation de la Commune Rurale d'Ampasina Maningory par rapport à la Région Analanjirofo 29 Rantolava 30 Liste des graphiques Graphique 1 - Taux de réussite aux examens du C.E.P.E au cours des cinq dernières années 32 Graphique 2 - Taux de réussite par sexe de 2009-2010
à 2013-2014 33 Photo n°1 : Centre de Formation Pédagogique de Rantolava...................... 31 Photo n°2 : Ecole Primaire Publique de Rantolava
................................... 31 Tableau 1- Synthèse du programme lié à la culture et aux valeurs traditionnelles au niveau du CP1 et CP2 77 niveau du CE 78 valeurs traditionnelles malagasy au niveau du lycée 85 4 INTRODUCTIONCombien de fois les parents d'aujourd'hui se plaignent du comportement de leurs enfants, que l'éducation ne cesse de se dégrader par rapport à celle d'avant. Pourtant, nous savons très bien d'une part que le taux de scolarisation, même dans les pays en voie de développement, comme le nôtre, s'améliore d'une année à l'autre et, d'autre part, que le nombre des diplômés d'universités et des grandes écoles augmente constamment. D'un autre côté, nous constatons que la reconnaissance de ces diplômes varie souvent selon l'établissement ou les centres de formation. Par ailleurs, cette reconnaissance varie également d'une époque à l'autre et/ou d'un pays à un autre. A Madagascar par exemple, on accorde parfois une reconnaissance plus importante aux diplômés des pays étrangers que ceux des universités nationales. Il se peut même qu'on juge la compétence d'un individu par rapport à ses capacités d'expression ou à sa facilité à s'exprimer en langue étrangère. En fait, toute chose a son histoire. Par exemple, l'éducation de type occidental implantée dans le pays au début du XXème siècle avait comme objectif de préparer les cadres indigènes à occuper des fonctions au sein de l'administration coloniale française. Et, l'orientation éducative de l'époque a été choisie afin de répondre à cet objectif. Aujourd'hui encore, il existe des valeurs différentes accordées aux diplômes et aux diplômés. Par ailleurs, on sait également qu'avant l'éducation de type occidental, la population malgache disposait aussi de ses propres orientations en matière éducative. Ces orientations, sans aucun doute, répondaient aux besoins de la société malgache, à sa structure ainsi qu'à son fonctionnement. Même de nos jours, malgré l'existence d'une structure administrative gouvernementale, la structure traditionnelle résiste et reste présente, aussi bien à l'échelle locale que nationale. Les Sojabe, les Tangalamena, entre autres, continuent à assurer leur rôle dans la société actuelle. Nous nous trouvons alors dans une société se plaçant entre modernité occidentale et tradition ancestrale. Or, si l'« éducation signifie socialisation de l'individu, 5 préparation d'un membre semblable aux autres et utile à la communauté »1, naturellement, la famille est le premier lieu de cette socialisation. « Elle a cependant perdu certaines de ses fonctions en ce sens, au profit de l'école et des médias, notamment.2» Ces derniers qui sont le fruit de l'évolution de la connaissance de l'humanité deviennent indispensables et participent pleinement non seulement à l'éducation de l'individu, mais aussi au développement de la société dans son ensemble. Désormais, « Les parents, de nos jours, sont loin d'être les seuls agents de la socialisation de leurs enfants, bien qu'ils continuent généralement d'assumer la surveillance et la synthèse de ces multiples influences»3. Cette situation rend leurs tâches plus complexes que jamais. Si à un moment donné le silence-apprentissage du cadet vis-à-vis de l'aîné suffisait pour que l'enfant se socialise, le décollage technologique, notamment dans le domaine de la communication tel que les médias obligent l'aîné à se situer dans une position à la fois d'éducateur et d'apprenant. Il en est de même pour les maîtres d'écoles modernes. Se baser uniquement sur le concept d'éducation moderne de type occidental s'avère un échec éducatif si elle n'obtient pas l'approbation de la société locale. De nos jours, il est vrai que cette éducation par l'écrit est indispensable car elle constitue notre porte d'entrée dans le monde du travail. Elle permet également (par le biais des certificats, brevets et diplômes divers) d'évaluer nos connaissances et nos compétences. C'est notre référence contemporaine. Il n'est alors pas étonnant de voir les jeunes qui ne se soucient que d'obtenir des diplômes. Cependant, on observe que plus notre société devient une « société d'intellectuels », plus elle se dégrade. Le mal, l'insécurité et divers actes de banditisme règnent presque totalement sur l'ensemble du territoire malgache. On se pose des questions. Comment se fait-il que 1 LEIF, RUSTIN, Philosophie de l'éducation. Tome 1, Pédagogie générale, Delagrave, 1970, p.27. 2 PRONOVOST Gilles, Famille, temps et culture, dans Comprendre la famille, 1991, p. 99-100. 3 DANDURAND Renée, DULAC Germain, Les nouvelles familles et l'école : répercussions des changements familiaux en milieu scolaire, dans Comprendre la famille, 1991, p.136 6 plus le nombre des chrétiens augmente, plus le mal se multiplie dans notre société ? Comment se fait-il que plus le nombre des instruits augmente, plus la pauvreté règne ? Les églises comme les écoles ne sont pas capables d'assurer, à elles toutes seules, toutes les responsabilités éducatives: ni le christianisme, ni l'école telle qu'elle est conçue actuellement ne sont de la culture malgache. Parfois même, on constate une confrontation de valeurs. Si nous disions plus haut que l'éducation signifie socialisation, la notion de valeur joue alors un rôle important dans le système éducatif car, généralement, les valeurs d'une société « sont les principes fondamentaux qui guident la vie [...] et les comportements de chacun des hommes et des femmes qui la composent4». Chaque société dispose de ses propres valeurs qui conditionnent son fonctionnement et régissent la vie de ses membres. Mener une action éducative dans une société donnée, nécessite une prise en considération de ses valeurs, de sa structure, de sa culture. Etant une société de l'oralité, la valeur et la culture de la société malgache se transmettent alors, généralement, à travers de la parole, du lövan-tsofiñy (héritage de l'oreille). Cependant, il nous semble difficile d'étudier l'ensemble de la culture des Malagasy parce que le territoire est très immense. Nous avons choisi alors un terrain d'étude spécifique : l'ethnie betsimisaraka. Nous analysons à cet effet, et à travers des öhabölaña ou proverbes, la conception éducative de la société betsimisaraka. Quelle relation y-a-t-il entre l'éducation et les proverbes ? Cette question comporte des sous-questions étroitement liées, l'une par rapport à l'autre : - Les proverbes contribuent-ils à l'éducation des betsimisaraka ? - En quoi peut-on dire qu'ils constituent un moyen d'éducation ? 4 Groupe La Poste, disponible sur http://stagelaposte.2010.free.fr/wp- content/documents/synthese valeurs.pdf 7 Le mémoire qui rapporte la recherche effectuée comprend trois grandes parties, chacune subdivisée en deux chapitres. La première partie présente la problématique et la justification du choix du thème en analysant le contexte de la société étudiée, mettant ainsi en exergue la place de l'éducation. Elle annonce également les différentes approches méthodologiques adoptées pour faire la collecte des données en rapport avec les trois objectifs spécifiques de recherche : analyser et décrire les dimensions pédagogiques des proverbes betsimisaraka ; expliquer en faisant référence aux proverbes, les orientations de l'éducation dans la structure et l'organisation sociale des Betsimisaraka ; et présenter les enjeux de ces orientations traditionnelles de l'éducation face à l'évolution de la société et à l'éducation de type occidental. La seconde partie, quant à elle, révèle les résultats de la recherche et les interprétations qui en découlent en analysant le sens des proverbes par rapport à leur fin éducative. Enfin, la dernière partie de notre travail tente de signaler les enjeux de cette éducation de type traditionnel à base des proverbes face à l'évolution de la société actuelle. 8 PREMIERE PARTIE - THEMATIQUE, TERRAIN D'ETUDES ET APPROCHES METHODOLOGIQUES 9 CHAPITRE I -JUSTIFICATION DU THEME ET METHODOLOGIE DE TRAVAIL Généralement, l'étude de la culture et des valeurs traditionnelles s'effectue dans le domaine de l'anthropologie, de l'ethnologie, de la sociologie ou de l'histoire. L' öhabölaña qui est le sujet principal de la recherche que nous avons entreprise est l'une des traditions orales malagasy dans son ensemble. Le traiter dans la science de l'éducation, bien que ce ne soit pas vraiment nouveau, mérite une explication particulière. I.1. La présentation de la rechercheDans cette première section, nous présentons un aperçu général sur le choix du thème de recherche ainsi que des justifications à ce sujet. Nous aborderons successivement le contexte de la société étudiée, la problématique et les objectifs de la recherche. |
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