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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique: l'exemple de l'élection présidentielle française 2012

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par Antoine GAMAIN
Université Nanterre Paris X -  Master 1 économie et société 0000
  

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TROISIEME PARTIE :

De nouvelles formes de mobilisation

politique

1. L'e-militantisme

a. Tentative de définition

Internet est aujourd'hui un nouvel espace social sans frontière, les partis politiques et les réseaux militants (syndicats, écologistes, sympathisants,...) intègrent peu à peu cette nouvelle sphère pour y transmettre leurs idées et les répandre librement44.

Certes les politiques utilisent internet pour promouvoir leur image, cependant cet outil a également permis la création d'un véritable espace de mobilisation. Cet espace, bien que virtuel, sert également de contre-pouvoir citoyen (parti pirate, les anonymous, les hacktivistes).

L'e-militantisme représente toutes les stratégies misent en place par les équipes de campagnes et militants indépendants sur les réseaux sociaux pour séduire et rassembler le plus d'électeurs.

Facebook et Twitter deviennent-ils des outils symbolisant le renouveau du militantisme ?

b. Un outil au service de la mobilisation

La dynamique de mobilisation n'est possible que s'il existe préalablement des réseaux de solidarité entre les militants. Les liens sociaux connectant les groupes et permettant l'éclosion d'un réseau social de mobilisation sont dit « faibles » (Granovetter, 1973).

L'action collective dépend donc de l'existence de réseaux sociaux, plus ils sont importants et structurés plus ils possèderont une légitimité et auront une emprise sur le système : Marx parlait de conscience collective.

44 Keck Margaret et Sikkink Kathryn, activists beyond borders, Ithaca-London, Cornel University Press, 1998 http://www.gppi.net/fileadmin/gppi/Thorsten/Rezsikkinkmillennium.pdf

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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique : l'exemple de l'élection présidentielle Française 2012

La communication ainsi que les outils qui s'y rapportent conditionne la survie et la force d'un groupe.

Selon une étude quantitative faite aux Etats-Unis sur les processus de recrutement effectués par divers mouvements sociaux politiques et religieux, la puissance des réseaux sociaux est plus importante que les campagnes médiatiques ou les apparitions en public (Snow, Zurcher Jr. Ekland-Olson, 1980). La sollicitation des institutions poussent l'individu à rejoindre une cause, il le fait rarement de lui-même. Il est donc dans l'intérêt des partis politiques de créer des stratégies pour développer leur cellule militantiste.

L'éclosion de Facebook facilite donc grandement le fonctionnement des groupes de mobilisation. D'un point de vue purement technique, Facebook est un outil au service du militantisme et de l'information dans la mesure où il permet, par internet, de toucher directement et massivement l'électorat.

· Facilité à créer des événements pour mobiliser les électeurs

· Le fonctionnement de Facebook est calqué sur la théorie des liens faibles

· Absence de frontières

· Coût moindre pour les organisations

· Instantanée, gratuit, disponible

· Echange d'information (articles, sondages) facilité

Le fondateur de Linkfluence (site de stratégie de communication sur le web social) Guilhem Fouetillou pense que l'e-militantisme est adapté aux réseaux sociaux virtuels45.

Selon lui, ils poussent les partis à vouloir gagner la « bataille des chiffres ».

La rapidité et le grand nombre d'utilisateurs de ces plateformes permettent de créer un effet de masse tandis que le blog diffuse une idée à un niveau inférieur d'audience sur internet.

Pour Fouetillou, le plus important dans le web social n'est pas l'idée mais le nombre d'individus qui vont consulter et partager l'idée.

45 Untersinger Martin, « RIP, le blog politique en état de mort clinique », Rue 89, le 8 mars 2012 http://www.rue89.com/rue89-presidentielle/2012/03/08/rip-le-blog-politique-en-etat-de-mort-clinique-229967

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c. Entretien avec Pierre des MJS

Pour mesurer l'impact d'internet chez les militants, j'ai décidé de me confronter directement au terrain en interviewant Pierre en décembre 2011. Il milite au sein du mouvement des jeunesses socialistes (MJS) et est en charge de la question économique au siège du PS rue Solferino à Paris (Annexe E).

Pierre a 25 ans, il a toujours été de gauche, ses parents aussi. Après un an d'étude dans le cinéma, il décide de devenir militant et de s'inscrire au MJS en 2007. Il est aujourd'hui étudiant-salarié-militant en quatrième année de droit à l'université Paris-Descartes.

Selon lui internet et les réseaux sociaux font partis du quotidien d'un militant, « c'est partager tel article sur Facebook, tweeter tel événement » (ligne 228).

Cependant, il reste mesurer sur le pouvoir de ces nouvelles techniques « c'est un facteur intéressant, après ce n'est qu'un facteur, il ne va pas y avoir de recette miracle » (ligne 99). Pierre admet que ce moyen de communication est désormais important dans une campagne électorale, « on active tous les leviers [...] c'est évident qu'il y a des gens qui seront touchés par internet » (ligne 100).

Pour lui, internet est « un nouvel espace de socialisation » « des informations circulent et des opinions s'y forment » (ligne 109). Un « travail politique » (ligne 111) est donc nécessaire.

Pierre revient ensuite sur le rôle du militant et de l'e-militantiste : il doit être celui qui « tape » (ligne 162) sur l'opposition ce qui permet, par exemple, au candidat François Hollande de se dédouaner de cette tâche et de garder une image propre.

Internet permet également la constitution de base de données pour cibler un large panel de classes sociales : les «étudiants » (ligne 167), les « écologistes » (ligne 170) voir les « geeks ».

Il est nécessaire d'établir « une stratégie propre à ces gens là » (ligne 177).

Autre communication numérique très peu abordée lors de cette campagne électorale, l'envoie de chaîne de SMS « à destination du public, à des gens qu'on a rencontré, à des gens militants, [...], à votre cercle proche » (ligne 191).

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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique : l'exemple de l'élection présidentielle Française 2012

Ces différentes techniques de communication tels que l'envoie massif de message via des newsletters et des SMS permet aux militants trois choses essentielles qui sont la base de l'e-militantisme « développer notre communication et ne pas être dépendant des médias dominants » (ligne 207) et « mobiliser les gens » (ligne 206).

Lors de cet entretien, Pierre a insisté sur le besoin de proximité que le militant devait créer avec l'électorat.

Pour lui, les techniques traditionnelles comme par exemple le porte à porte sont la base du militantisme « on peut y revenir, on y trouve les mêmes personnes et donc on commence à tisser un lien avec elle ».

Dans l'ensemble, Pierre a un avis tempéré sur le pouvoir d'internet : internet ne révolutionnera pas le militantisme mais il s'agit aujourd'hui d'une variable à prendre en compte.

d. Ethnographie d'un débat entre internautes au lendemain du premier tour

Au lendemain du premier tour de l'élection présidentielle 2012, énormément de messages commentant les résultats étaient présents sur Facebook. Ils contenaient l'humeur de l'internaute, parfois critique, parfois euphorique sur le résultat du scrutin.

Il m'a semblé intéressant de procéder à une rapide ethnographie (Annexe D) de ce type de discussion : les utilisateurs interagissent en donnant tour à tour leur point de vue donnant lieu à des joutes politiques tantôt pro-Sarkozy, tantôt pro-Hollande par rapport à un statut (commentaire) posté sur Facebook.

Il en est ressorti trois constatations :

La première demeure dans l'échange d'information : les internautes donnent tour à tour leur point de vue en s'appuyant sur des articles tirés d'internet pour confirmer leur dire.

Le second est que, globalement, les cybernautes ont conscience que les articles venant de sources n'émanant pas de sites internet médias traditionnels (Figaro.fr, rue89.fr) sont souvent remis en cause dans leur authenticité.

L'utilisateur prend les informations avec des pincettes car très souvent la source n'est pas fiable et l'information qu'elle contient soutient une cause politique (phénomène des boules puantes de groupes d'e-militant).

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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique : l'exemple de l'élection présidentielle Française 2012

La dernière, plus générale et sociologique, met en avant la structure même de la discussion. Un parallèle doit être fait avec les conversations de café du commerce d'antan.

Cette position rejoint une théorie naissante : aujourd'hui les médias de masse seraient à la fin d'un cycle du à l'avènement du web participatif46.

Le point d'origine en serait la conversation de café où l'échange d'information et de rumeur faisaient légions à l'époque de pré-industrialisation des médias au 19ème siècle.

L'apparition des médias de masse auraient agis de façon néfaste empêchant le débat entre les individus et contribuant en partie à un contrôle social47.

Les réseaux sociaux sont donc un moyen de communication d'expression libre pour l'internaute permettant un renouveau de la discussion politique.

e. Les effets de l'e-militantisme sur l'abstention

L'objectif premier du militant virtuel est de séduire le plus possible l'électorat.

Cet électorat vise, non seulement les internautes votants et abstentionnistes, mais également les jeunes présents en nombre sur les réseaux sociaux. En France, l'électorat national est constitué de 43 millions d'individus.

L'abstentionnisme, est souvent mis en avant, notamment depuis le premier tour de l'élection présidentielle 2002 en raison de son record historique (28,4%) et des conséquences directes sur le second tour (présence du Front National). Depuis, plusieurs campagnes de sensibilisation sont mises en place pour lutter contre ce phénomène anti-démocratique.

Pour les élections présidentielles 2012, différentes polémiques ont vu le jour, le gouvernement soutiendrait l'abstention pour conserver l'écart de voies qui le maintiendrait au pouvoir48. Il est donc dans l'intérêt de l'opposition d'inciter au vote49 50.

46 « The end of mass media : Coming full circle », The economist, 7 juillet 2011 http://www.economist.com/node/18904158?story_id=18904158&fsrc=rss

47 Herman Edward , Chomsky Noam , La Fabrication du consentement. De la propagande médiatique en démocratie, Agone, 2008

48 Hermelin Ariane, « débat : le gouvernement encourage-t-il l'abstention », newring, décembre 2011

49 Gross Estelle, « L'inscription sur les listes électorales, un enjeu pour les partis », Le nouvel observateur, le 16 décembre 2011

50 Le nouvel observateur, « Bayrou appelle à l'inscription sur les listes électorales sur Twitter », Le nouvel observateur, le 29 décembre 2011

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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique : l'exemple de l'élection présidentielle Française 2012

Les réseaux sociaux, bien que facilitant la mobilisation n'ont pas permis de faire baisser le taux d'abstention, il a même augmenté par rapport à 2007 (Tableau 1).

Années

Premier tour

Second tour

200751

16,22

%

16,03

%

2012

19,66

%

20,52

%

Tableau 1 : Abstention au premier et second tour des élections présidentielles 2007 et 2012

Les équipes de campagnes avaient également l'ambition, via les réseaux sociaux, de toucher les jeunes qui sont souvent stigmatisés par la société comme abstentionnistes.

Les chiffres du Tableau B montrent ce constat : la génération 1980, qui représente grosso-modo les 20-30 ans, place les jeunes largement en dessus de la moyenne nationale.

Génération

Élections présidentielles

2007

Élections présidentielles

2002

Taux de

participation au 1er tour

Taux de

participation au 2e tour

Taux de

participation au 1er tour

Taux de

participation au 2e tour

Génération 1920

76,8

78,2

73,0

79,8

Génération 1930

87,5

87,9

81,0

86,3

Génération 1940

91,0

90,8

79,7

86,4

Génération 1950

89,9

89,6

76,5

85,3

Génération 1960

87,4

88,1

72,3

81,6

Génération 1970

84,5

84,0

63,7

73,9

Génération 1980

80,9

79,8

68,4

78,1

Moyenne nationale

85,4

85,5

73,5

81,6

Tableau 2 : Participation en pourcentages aux élections présidentielles de 2002 et 2007 par

génération52

Les e-militants et les équipes de campagnes ont donc intérêt à cibler les jeunes.

Cette volonté de séduire les jeunes s'expliquent également par la présence en masse des jeunes Français sur internet53 (annexe C - Tableau 1) et sur les réseaux sociaux54 (annexe C - Tableau 2).

51 Insee, « abstention aux élections présidentielles depuis 1965 », Insee, le 1er janvier 2012 http://www.tns-sofres.com/points-de-vue/7EB7E45F23E545629454F8FDF2A44E3F.aspx

52 Insee, enquête participation électorale 2007, enquête participation électorale 2002-2004, mars 2008 http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATSOS05525

53 Etude France Info.fr, « la France en chiffre : internet », FranceInfo.fr, décembre 2011

54 Socialbakers.com, «France Facebook statistics», socialbakers.com, juillet 2011 http://www.socialbakers.com/facebook-statistics/france

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Utilisation des réseaux sociaux dans la sphère politique et médiatique : l'exemple de l'élection présidentielle Française 2012

Aux Etats-Unis, internet est devenu le principal média utilisé par les 18-29 ans, en 2010, 65% des moins de 30 ans ont cité le web comme première source d'information55 (annexe C - Tableau 3).La génération Y a grandi avec l'avènement des médias de masse, de l'internet, des blogs puis plus récemment des réseaux sociaux56.

Le changement en communication politique apporté par ces nouveaux outils technologiques rappelle l'arrivée de la télévision qui avait marqué la génération baby-boom (après guerre). La naissance du marketing politique mis en place par le média télévision lors de la campagne électorale Française de 1974 avait, en partie, influencée le résultat final de l'élection57.

Cette nouvelle technique de communication avait permis à Valéry Giscard d'Estaing de l'emporter de peu car plus efficace à l'écran notamment lors du premier débat télévisé d'entre- deux tours et le célèbre « vous n'avez pas le monopole du coeur »58.

Les partis politiques ont un double objectif justifiant les efforts consentis dans leur stratégie de communication politique. Ils souhaitent séduire les jeunes en rentrant dans leur foyer via internet et les intéresser à la politique.

Malgré une présence accrue sur les réseaux sociaux (Facebook, Twitter, Youtube, Dailymotion, Flickr) des candidats pour les élections présidentielles 2012, un sondage IFOP du 21 mars 2012 met exergue que l'abstention chez les jeunes demeurera tout de même élevée et supérieure à la moyenne nationale (Tableau 3). Le taux de participation est également en baisse par rapport à 2007 et est semblable aux élections de 2002, il est donc possible de penser que les réseaux sociaux n'influencent pas directement le taux d'abstention des jeunes.

Age de

l'interviewée

Indice de

participation

Indice d'abstention

18 à 24 ans

53%

47%

25 à 34 ans

65%

35%

18 à 34 ans

60%

40%

Moyenne Nationale

71%

29%

Tableau 3 : Estimation de l'abstention des 18-34 ans au 1er tour des élections
présidentielles 201259

55 Etude Pew Research center, « internet gains on television as public's main news source », Mashable, janvier 2011

56 Rollot Olivier, « la génération Y », PUF Paris, 2012

80),

57 Agnès Chauveau « L'homme politique et la télévision », Vingtième Siècle. Revue d'histoire, avril2003 (no

p. 89-100.

58 Azéma Jean-Pierre, « La campagne présidentielle », François Mitterrand. Les années de changement 19811984 in Paris, Perrin, 2001, p. 48-49

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