6.2.2.2 Un accompagnement souhaité, au rythme
de la patiente
Il importe avant tout d'installer une relation de confiance,
et pour cela il ne faut pas hésiter à reconnaître les
tourments d'une patiente et à nommer sa détresse, cela avant
même de mentionner l'enfant qu'elle porte. Le but des premiers entretiens
est d'aider la femme à accepter la grossesse comme n'ayant pas d'autre
issue qu'un accouchement ; cela par anticipation d'éventuelles conduites
à risque, favorisées par l'état d'extrême
fragilité psychique dans lequel elle a été plongée
lors du lever du déni.
Dans cette même optique, il faut éviter de parler
trop tôt (dès le premier entretien) de l'enfant. Comme cela a
été traité en début de mémoire, le travail
psychique de la grossesse s'effectue d'abord dans l'acceptation de
l'état d'être enceinte, et seulement ensuite par la
représentation d'un enfant. Il est par conséquent logique
d'attendre d'une patiente jusque-là en déni de suivre le
même cheminement psychique.
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Il est fréquent que la patiente dans les premiers temps
de ce travail exprime des fantasmes négatifs voire violents à
l'encontre de l'enfant. Impulsifs, d'intensité variable, ils provoquent
en elle un profond sentiment de culpabilité, d'angoisse et voire
même un état de panique, dans la crainte qu'elle a de ne pas
pouvoir se contenir et de passer à l'acte. L'écoute de ces
fantasmes violents lui permet d'évacuer cette colère et ces
sentiments négatifs, qu'on pourrait envisager comme étant
intimement liés à la cause quelle qu'elle soit du déni de
grossesse. La question du compagnon et celle de l'environnement familial sont
également abordées lors de ces entretiens.
6.2.2.3 Garde ou abandon : envisager l'enfant
Une fois que les remaniements psychiques ont pu permettre
l'élaboration puis l'acceptation de l'idée de la grossesse, le
foetus cesse d'être assimilé au vécu traumatique, et peut
enfin être accepté, imaginé. Certaines femmes commencent
à bâtir un projet de vie avec leur enfant, tandis que d'autres
considèrent malgré tout comme impossible un lien avec lui.
La décision est évidente pour certaines, alors
que d'autres tergiverseront ou sembleront en apparence indifférentes -
c'est notamment le cas de mineures ou de très jeunes adultes encore
financièrement dépendantes de leur entourage : la famille peut
alors se sentir obligée de décider à leur place.
D'après C. Bonnet et quelle que puisse être la
situation, il semble primordial pour les professionnels de maintenir à
l'écart leurs propres mouvements émotionnels concernant la garde
de l'enfant, en particulier si la patiente reste ambivalente quant à sa
décision. Il n'est pas approprié, dans le cadre de la relation
soignant-patient, de forcer à créer un lien mère-enfant ou
au contraire de recommander une séparation.
Que les futures mères acceptent de garder l'enfant ou
qu'elles choisissent de le remettre en vue d'une adoption, elles
nécessitent toutes un accompagnement prénatal approprié en
vue de préparer au mieux le moment délicat de la naissance.
C. Bonnet et de nombreux autres spécialistes
recommandent la poursuite du travail psychique après la sortie de la
maternité, en particulier pour celles qui ont vécu un déni
total, qui ont été forcées par leur entourage à
garder l'enfant, ou encore qui s'en
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sont séparé avant de se rétracter. Le
travail en réseau avec la Protection Maternelle et Infantile (PMI) prend
tout son sens tant dans le suivi prénatal que dans le post-partum.
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