Le déni de grossesse Mémoire 2012
Université Nice Sophia Antipolis - École de
Sages-femmes de Nice page 48/89
Le déni de grossesse Mémoire 2012
Le déni de grossesse Mémoire 2012
Le déni de grossesse Mémoire 2012
3.4 LA GROSSESSE, RESURGENCE D'UN EVENEMENT TRAUMATIQUE
A CARACTERE SEXUEL
Pour certains spécialistes dont Catherine Bonnet, le
déni de grossesse peut avoir pour origine des histoires de maltraitance
récentes ou anciennes, subies dans l'enfance ou à l'adolescence.
Les violences sexuelles, quels que soient leur contexte et leurs formes
cliniques (agressions sexuelles physiques ou verbales ; émotionnelles
à propos du corps sexué, de la sexualité ou de la
maternité ; grossesse issue d'un viol ; inceste ; etc...) n'ont pu
être dévoilées ou ont été minimisées,
voire niées ou même ignorées par l'entourage : la
réalité traumatique et les émotions négatives qui y
étaient liées ont alors été
réprimées, enfouies au plus profond de l'inconscient dans
l'espoir d'étouffer la souffrance indicible qu'elles causaient [4].
Contrainte au silence, la victime n'a pas eu d'autre choix que ne plus y
penser, de « vivre sans » et non d'en faire son deuil, ce qui aurait
permis d'accepter et de dépasser le traumatisme.
C'est un véritable clivage qui s'est ainsi
réalisé dans la psyché de la femme, parenthèse
latente dans son fonctionnement psychique qui a persisté des
années durant. Lorsqu'une grossesse s'annonce, la transparence psychique
qu'elle engendre réactive ce vécu traumatique et veut le faire
remonter à la conscience : pour éviter cette souffrance
indicible, la psyché n'a pas d'autre choix que « d'annuler »
l'élément activateur, soit la grossesse et tous les signes qui
pourraient la révéler. [4]
Le témoignage d'Isabelle Moulin [29] corrobore cette
hypothèse : victime des attouchements sexuels de son frère
ainé, elle aurait été surprise par une tante qui non
seulement n'était pas intervenue, mais aurait de plus reporté la
faute sur elle, âgée alors d'à peine sept ans. Presque
trente ans après son déni partiel, Mme Moulin reconnaîtra
au cours d'une thérapie le terrible impact qu'avait eu un tel
évènement sur la perception de son corps et de sa
féminité. Se sentant trahie par son entourage, mortifiée
par son propre corps qu'elle percevait comme honteux et souillé, elle
aurait dès cet instant préféré ignorer tout ce qui
pouvait s'y rapporter... dont l'existence de sa première grossesse,
déniée jusqu'à près de huit mois.
Dans ces traumatismes à connotation sexuelle, ce n'est
pas seulement la grossesse et ce qu'elle symbolise qui est renié : la
femme est en pleine négation de son être et de sa capacité
à procréer, ce qui peut expliquer le déni, mais aussi une
absence de
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contraception - et souvent même de préoccupations
à ce sujet - cela malgré une vie sexuelle active.
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