2.5.2 Le milieu médical tout aussi
désarmé
Les professionnels de santé eux-mêmes sont
régulièrement pris en défaut par le déni de
grossesse : selon l'étude de Denain et Valenciennes [32], un
médecin généraliste sur trois face à ces patientes
en déni a évoqué des troubles urinaires, intestinaux ou
encore une tumeur, parfois même un début de grossesse alors
qu'elles étaient pour certaines d'entre elles presque à terme.
Le cas de « Julie » relaté dans
l'enquête de Gaelle Guernalec-Levy [14] est emblématique de ces
confusions : jeune femme de 18 ans sous contraception orale, Julie consulte
deux fois à un mois d'intervalle pour des douleurs abdominales, mais
n'obtient pour toute explication qu'une suspicion de gastro-entérite.
Deux semaines plus tard elle est hospitalisée en urgence pour ce qu'on
croit être une crise de colique néphrétique,
Université Nice Sophia Antipolis - École de
Sages-femmes de Nice page 42/89
puis une fausse-couche. Ce n'est qu'après une nuit
marquée de douleurs abdominales réfractaires à tout
traitement, qu'elle apprendra d'un troisième médecin
consulté qu'elle est sur le point d'accoucher : naitra une petite fille
à terme, en bonne santé et de 3300g [14].
S. Marinopoulos considère ces diagnostics
erronés comme excusables, car basés sur des symptômes
décrits par une patiente dans l'incapacité de penser sa
grossesse, altérant ainsi par ses rationalisations le jugement du
professionnel [23]. L'impensé des mères devient l'impensable
médical.
Ces erreurs ont un double impact car non seulement elles
peuvent conduire une femme à rentrer chez elle, empêchant une
nouvelle fois toute prise en charge effective de sa grossesse, mais elle
conforte aussi dans leur déni la patiente et son entourage,
rassurés par la parole d'un professionnel.
2.5.3 Facteurs favorisants observés dans la
littérature
A défaut d'obtenir un profil type de la patiente
à risque de faire un déni de grossesse, les études
récemment conduites ont permis d'établir une liste de facteurs
renforçant ce phénomène.
2.5.3.1 Persistance de saignements vaginaux
Comme il a été dit précédemment,
la survenue pendant la grossesse déniée de saignements
réguliers, ou irréguliers mais perçus comme similaires aux
menstruations, peut retarder voire empêcher la prise de conscience d'une
grossesse en cours.
Comme cela a déjà été dit, le
phénomène peut être entretenu notamment par une
contraception oestroprogestative orale à l'origine d'hémorragies
de privation assimilées aux menstruations.
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