2.3 EPIDEMIOLOGIE DU DENI DE GROSSESSE AU COURS DES
DERNIERES DECENNIES
Parce que le déni de grossesse est encore un
phénomène peu connu et reconnu, il est difficile d'avoir des
chiffres exacts quant à sa prévalence dans une population. Les
enquêtes épidémiologiques réalisées au cours
des dernières décennies donnent des résultats jugés
approximatifs par leurs investigateurs car probablement sous-estimés du
fait de leurs biais de sélection :
? Un déni partiel peut ne pas être pris en compte
si la grossesse est découverte dans des circonstances jugées
normales ou à un terme considéré comme assez
précoce [12] ;
? Toutes les enquêtes n'usent pas des mêmes
critères de sélection quant au terme minimal pour un déni
de grossesse, bien que de plus en plus d'études posent leur terme de
sélection à 20 semaines d'aménorrhée [43] ;
? Il est très probable que chaque année, des
dénis massifs suivis d'accouchement clandestin se soldent d'un
infanticide sans que jamais rien ne soit découvert [11] ;
Cela étant, malgré ces biais probables, les
différentes études menées en France comme à
l'étranger ont révélé au fil des années des
chiffres très similaires concernant l'incidence des dénis
partiels et massifs.
2.3.1 Deux études prospectives en Europe
Les maternités françaises de Denain et
Valencienne [32] ont procédé pendant 7 ans au recensement de cas
de méconnaissance plus ou moins active de grossesse après le
début du 5e mois, cas s'étant ou non poursuivis
jusqu'à l'accouchement voire au-delà. Sur un pool total de 28 066
naissances, 2550 femmes ont été sélectionnées et
rencontrées lors d'entretiens psychothérapeutiques : 56 cas de
déni de grossesse ont été ainsi retrouvés, ce qui
fait une prévalence de 2/1000, soit de 1/500 tous types de dénis
confondus - prévalence probablement sous-estimée d'après
les auteurs en raison des biais mentionnés auparavant :
? parmi ces 56 patientes, 27 femmes présentaient un
déni partiel, levé entre cinq et huit mois de grossesse ;
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Université Nice Sophia Antipolis - École de
Sages-femmes de Nice page 32/89
les 29 autres cas étaient des dénis massifs, ce
qui donne une prévalence de 1/1000 : 12 d'entre eux se sont
soldés d'un accouchement à domicile, dont 4 ayant conduit au
décès de l'enfant.
Une autre étude prospective dans 19 cliniques
berlinoises [43] a été conduite sur une période d'un an en
usant de critères similaires (sauf pour le terme du premier diagnostic
médical de grossesse porté après la 20e SA). 62
cas de déni ont été ainsi recensés sur un total de
29462 naissances, ce qui donne une prévalence de 1 sur 475 tous types de
déni confondus (soit 2,1/1000). Les dénis massifs ont
été estimés à une prévalence d'1/2455.
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