Image photographique, expression, communication et interactions orales en classe de français enseigné comme langue seconde d'hôte. Un atelier photographique réalisé au sein de l'association pour la solidarité avec les travailleurs immigrés d'Aix- en- Provence( Télécharger le fichier original )par Pablo Carreras Université Aix- Marseille ( IUFM ) - Master métiers de l'enseignement, de l'éducation et de la formation 2012 |
1.2.2. La prégnance de l'oral dans les interactions communicatives entre apprenants en classe de langueL'interaction se définit comme « un ensemble d'actions sociales orientées vers la réalisation par les partenaires de buts interdépendants, qui constitue un épisode social » (Bange, 1992a). L'écrit et l'oral permettent ces activités communicationnelles entre individus. Néanmoins, l'acte de parole apparaît comme un moyen premier et privilégié pour communiquer avec l'autre, pour interagir avec lui et apprendre à produire verbalement, notamment dans le cadre d'une classe de langue où la langue cible de l'apprentissage est en même temps « langue de communication de la classe et support de l'interaction » (Champion, 2009, p. 41), « l'objet d'apprentissage et l'outil » (Moore & Simon, 2002). VIGNER (2009) souligne également que l'oral est « aussi une façon d'entrer en relation avec les autres » (p. 62). En effet, de telles interactions horizontales permettent une communication directe entre les apprenants (Vasseur, 2007, p. 28). Par l'échange oral et l'alternance des tours de parole (Kerbrat-Orecchioni, 2005, p. 112), ils doivent « adapter sans cesse leur message et coopérer mutuellement pour pouvoir se comprendre » (Champion, Ibid.), ils peuvent s'exprimer et prêter attention aux propos des autres (Muller, 2012), ils peuvent collaborer ou négocier en cas de désaccords, de malentendus (Kerbrat-Orecchioni, Ibid., chap. 2)4(*). Les interactions communicatives et l'oral se trouvent, de ce fait, intrinsèquement liés à une dynamique de co-locution, de co-construction et d'actions conjointes (Champion, Ibid. ; Traverso, 2005 ; Vigner, Ibid.). En ce sens, CHAMPION (Ibid.) préconise de favoriser et de valoriser la production de tels actes oraux en classe. 1.2.3. L'implication des apprenants dans la communicationL'existence d'un enjeu contextuel, auquel se réfère le message, est une condition sine qua non à toute situation de communication. Le contexte tend, en effet, à impliquer le message dans une réalité à laquelle le destinateur doit ou veut rattacher ses propos (Jakobson, 1963/1981). BANGE (1992b) souligne « qu'une stratégie de réalisation des buts de communication ne peut apparaître qu'en relation avec un but de communication préexistant, un but social substantiel ». L'implication effective des apprenants procède, dès lors, de l'existence d'un enjeu communicationnel que ces derniers désirent réaliser et ce en dépit des risques afférents à toute prise de parole en langue étrangère pour des locuteurs non-natifs (Ibid.). Nous notons l'existence de situations où l'apprenant, guidé par une initiative et un engagement discursif propres, s'inscrit sciemment dans la réalisation d'un objectif de communication, individuel et individualisant, « non planifié par le professeur » (Muller, 2012). MOORE et SIMON (2002) qualifient de « déritualisation » ce phénomène qui inscrit son initiateur dans une « prise de pouvoir discursive », dans une « reconfiguration de [son] territoire », dans un réengagement de son identité au-delà de son statut d'élève. Par cet acte, il redéfinit le « scénario engagé par l'enseignant », il change de manière délibérée les normes classiquement établies en cours de langue (Moore & Simon, Ibid.). Le recours à l'humour par les apprenants, de par sa « vertu relationnelle », relève également de cette même intention de « suspendre momentanément la relation déterminée par les statuts des participants », de s'impliquer en tant que sujet-personne dans la situation de communication (Bigot, 2005). Cependant, s'exprimer, communiquer et interagir oralement renvoient invariablement à « un cadre (contrat) psycho-socio-pragmatique » (Bromberg, 2007, p. 31), soit à des contraintes sociales qui peuvent se définir en termes de « vouloir dire » et de « pouvoir dire » (Charaudeau, 1995, cité par Bromberg, Ibid., p. 30). Tout individu peut, dès lors, pour des raisons inhérentes à sa personnalité (Traverso, 2005), « refuser de rendre effective la situation potentiellement communicative » (Bromberg, Ibid., p. 31), refuser la prise de risque langagière qu'elle sous-tend (Bange, 1992b). * 4 L'auteur définit les « négociations conversationnelles » en termes de « procédures visant à résorber le désaccord », « de mécanismes d'ajustement des comportements mutuels » opérés par les participants de la situation d'interaction (p. 94). En ce sens, elles s'opposent, au-delà de leur caractère commun de coopération, à la collaboration, qui fait fi de tout conflit (p. 96). |
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