L'enseignement de la lecture en Afrique noire. Cas de quelques collèges de Brazzaville( Télécharger le fichier original )par Martin GUIMFAC Université Marien Ngouabi - Diplôme d'études approfondies 1999 |
4. Nécessité d'un nouveau profil des enseignantsLoin d'être des éternels manoeuvres d'application de pratiques et d'outils conçus par d'autres à leur place, ces enseignants auraient un comportement de construction vivante et autonome de leur classe. Une telle approche nous semble raisonnable car Apprendre c'est construire son savoir et le seul outil qui puisse aider à cette construction, c'est le cerveau de celui qui apprend125(*). Comme cette construction n'est ni spontanée ni facile, elle requiert l'intervention de l'enseignant dont la tâche n'est point uniquement de transmettre le savoir, mais de réunir les conditions nécessaires à sa construction par l'apprenant lui-même. Ces enseignants auraient comme options fondamentales : - une exigence de formation théorique qui leur permette de maîtriser parfaitement ce qu'ils ont à enseigner ; - une volonté de travailler en équipes, pour échanger et confronter observations, résultats et expériences ; - une conception de l'apprentissage qui prenne réellement en compte les apprenants, ce qu'ils sont et ce qu'ils savent, en relation avec les connaissances actuelles sur le fonctionnement de l'apprentissage et de la construction des connaissances ; - une volonté de lutter contre l'échec scolaire, à la lumière d'une analyse rigoureuse et scientifique des causes de celui-ci. - une volonté de concevoir leur matériel didactique et autres supports d'enseignement-apprentissage ; - une idée assez haute de leur métier et la conviction qu'il est difficile d'espérer développer l'autonomie des apprenants si les enseignants ne sont pas autonomes eux-mêmes. Les professeurs de ce profil pourraient contribuer à faire varier les pratiques de lecture des apprenants de la classe de 3ème. Ils pourraient imaginer de nouvelles approches du texte littéraire. Le recours au conte, à la poésie, à la chanson et au support iconographique pourrait faire aimer la lecture par les apprenants et contribuer à leur faire changer de comportement vis-à-vis de la lecture afin de vaincre la désaffection qu'ils éprouvent pour l'écrit en général. En définitive, la refondation de l'école africaine en général et congolaise en particulier passe par le renouvellement du profil des enseignants et le recours à l'approche par compétences. Seuls, le renouvellement du profil des enseignants et le recours à l'approche par compétences permettront à l'école de jouer son véritable rôle de moteur de la société. 5. Nécessité du recours à l'approche par compétencesDans le cas de la République du Congo, dont les programmes d'étude sont écrits selon l'approche par objectifs, il s'agit tout simplement de les transformer en programmes écrits selon l'approche par compétences. Les objectifs généraux seront transformés en compétences générales et les objectifs spécifiques en compétences situées. L'objectif général n° 3 relatif à la lecture intitulé « comprendre des supports écrits » deviendrait par exemple « comprendre des supports écrits à l'occasion de l'exploitation des textes et des iconographies ». Aux compétences situées, on ajouterait des compétences transversales. Ces dernières ne sont pas des finalités mais des opérateurs de compétences, c'est-à-dire des moyens pour arriver à traiter des situations décrites dans le profil de l'apprenant. Le profil devant être écrit en termes de description de situations que l'apprenant, au terme de sa formation, doit être capable de traiter. Le profil de l'apprenant ne doit être écrit ni en termes de compétences ni en termes d'objectifs. Ce type de profil génère ordinairement de très forts taux d'échec scolaires car il permet de réaliser des objectifs pour des objectifs ou des compétences pour des compétences. Dans l'approche par compétences, les profils décrivent les situations et les classes de situations que les apprenants doivent être capables de traiter au terme de leur formation. Nous avons indiqué que l'approche par compétences a le mérite d'introduire dans le dispositif d'enseignement-apprentissage le principe de situation. La prise en compte de la situation dans laquelle doit s'exercer la compétence permet de donner du sens aux apprentissages. Dans la perspective d'une mise en oeuvre heureuse de l'approche par compétences, le déroulement d'une séance d'enseignement-apprentissage pourrait être le suivant : a)- la préparation : la prise de contact avec l'objet d'apprentissage Cette phase vise à motiver l'apprenant à construire ses savoirs. L'apprenant s'apprête à réaliser des nouveaux apprentissages et le professeur joue le rôle de catalyseur. Les actions de ces deux partenaires concernent principalement les buts poursuivis, la motivation, les savoirs internes (cognitifs et affectifs), la tâche, les conditions, les critères d'évaluation et la planification du travail (anticipation des stratégies). b)- la réalisation : l'appropriation de l'objet de l'apprentissage Cette phase vise à guider l'apprenant dans la construction de ses savoirs (concepts, processus, stratégies, etc.). L'apprenant construit activement ses savoirs. Le professeur a un rôle d'agent facilitateur. Les actions de l'apprenant et du professeur concernent principalement les apprentissages, l'organisation et la gestion des ressources, les stratégies cognitives et métacognitives, la verbalisation des difficultés et des besoins. c)- l'intégration : la prise de conscience des apprentissages réalisés Cette phase vise à conduire l'apprenant à intégrer et transférer ses savoirs. Elle est destinée à amener l'apprenant à prendre conscience des apprentissages réalisés dans le but d'un transfert. La capacité à transférer témoigne du niveau du développement d'une compétence. L'apprenant fait le point sur ses nouveaux savoirs. Le professeur a le rôle d'agent intégrateur. Dans cette phase, les actions de l'apprenant et du professeur concernent essentiellement les progrès réalisés, la reconnaissance et la justesse des démarches et des stratégies utilisées, les activités de réinvestissement ou de transfert. En définitive, aujourd'hui plus qu'hier, la priorité de l'école est d'apprendre aux enfants à parler et à lire juste en vue de la résolution de leurs problèmes de la vie scolaire et parascolaire. Parler juste, c'est s'exprimer avec la volonté d'affirmer son pouvoir de parole mais aussi avec l'infinie considération que l'on doit à autrui. Lire juste, c'est parcourir tout texte avec le respect que l'on doit au texte et, partant, à son auteur. Des trois fonctions de l'école, instruire, former, éduquer, c'est donc bien la 3ème qui devient aujourd'hui prioritaire. * 125. Eveline, CHARMEUX (1987), op.cit, p. 23. |
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