Section II - La lutte contre les rigueurs
carcérales au Sénégal
L'appréciation de la politique pénitentiaire
aboutit au constat selon lequel le Sénégal a mal avec ses
prisons. Grave, la maladie est également honteuse. Déjà
indécentes, les conditions continuent de se dégrader - l'univers
carcéral sénégalais se signale par son caractère de
gardiennage immonde, la modicité ou l'insuffisance des moyens
financiers, matériels, logistiques et le non-respect des plus
élémentaires droits de l'homme.
Il paraît alors autorisé de voir quel type
d'actions prioritaires faudrait-il engager pour renforcer la protection des
détenus et lutter contre ces rigueurs carcérales ?
Les problèmes auxquels sont confrontés les
détenus au Sénégal touchent tous les établissements
du pays. L'expérience montre qu'une amélioration décisive
de la situation pénitentiaire du Sénégal pourrait
être obtenue au moyen des deux trains de mesures suivantes :
- l'amélioration de la politique pénitentiaires
(parag.1) ;
- l'humanisation de l'univers carcéral (parag.2).
Parag.1 - L'amélioration de la politique
pénitentiaire
Les recommandations pourraient s'articuler autour de deux axes
que sont :
- l'amélioration des conditions d'incarcération
(A) ;
- l'amélioration des conditions de travail des
personnels judiciaires et pénitentiaires (B).
A - L'amélioration des conditions
d'incarcération
L'amélioration des conditions d'incarcérations
passe principalement par la lutte contre l'engorgement carcéral mais
aussi par l'encouragement de la communication entre détenus et
administration pénitentiaire.
1 - La lutte contre l'engorgement
carcéral
Aucune nouvelle prison n'a été construite au
Sénégal depuis l'indépendance. Les normes internationales
de détention prévoient un écroué pour une surface
de 3,5 m² et un volume de 5 m 3. Dans l'ensemble, les lieux de
détention sont estimés en volume à 3503,1 m3 et en surface
à 10 562,3 m². Au 31 décembre 2001, un nombre de 16 993
personnes ont été écroués dans l'ensemble des
établissements pénitentiaires pour diverses infractions à
la loi. Ainsi, en tenant compte de la surface d'occupation, il y aurait une
non-conformité avec les normes internationales. Cette situation traduit
l'engorgement des prisons. Il est évident que l'un des problèmes
de fond majeurs reste celui de la surpopulation, l'engorgement carcéral.
Pour le combattre ou le réduire significativement, il
serait souhaitable de recouvrer davantage à la formule des peines
alternatives, des mesures non privatives de liberté, de
libérations conditionnelles. Mais la recommandation la plus fondamentale
pour lutter contre l'engorgement carcéral reste la construction de
nouvelles prisons. Cette dernière emporte l'adhésion du plus
grand nombre.
Au-delà de la lutte contre l'engorgement
carcéral, il convient d'encourager aussi la communication entre les
détenus et l'administration pénitentiaire.
2 - L'encouragement de la communication entre les
détenus et l'Administration pénitentiaire
L'ensemble des dispositions réglementaires relatives
à la vie carcérale doivent être portées à la
connaissance des détenus, spécialement celles relatives à
la discipline, aux possibilités de communication avec la famille, avec
l'avocat et avec les autorités administratives ou judiciaires. Tout
détenus peut solliciter de prendre connaissance des textes. Mais il y a
souvent un écart assez important entre les dispositions textuelles, et
la communication réelle qu'ont les détenus de la
réglementation les concernant. Les manquements à la discipline
étant, le plus souvent enfouis dans d'obscurs règlements auxquels
les détenus n'ont pas toujours accès, ceux-ci doivent leur
être clairement expliqués, surtout aux illettrés qui
foisonnent dans les prisons sénégalaises. Ainsi, la communication
entre les détenus et l'administration pénitentiaire doit
être encouragée pour ne pas donner lieu au désarroi et
à la frustration. Mieux, cette communication trouve son importance sur
le fait qu'elle peut permettre dans une certaine mesure, de
« neutraliser l'étau dangereux » de certains
détenus qui n'hésitent pas à semer la terreur en prison.
Elle peut permettre aussi à modifier les « dispositions
criminelles » d'autres détenus car « la prison n'a
pas seulement pour mission de punir, elle a aussi une mission de
rédemption ».
La réalisation pratique de ces idées
généreuse est parfois entravée par la faiblesse des
conditions de travail du personnel. D'où la nécessaire
amélioration des conditions de travail du personnel
pénitentiaires.
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