L'assemblée nationale comme pouvoir constituant dérivé au Cameroun entre 1990 et 2008( Télécharger le fichier original )par Jules Bertrand TAMO Université de Dschang Cameroun - Master de droit public 2011 |
2 - L'inaction des pouvoirs publics quant aux opérations matérielles indispensables au fonctionnement concret du SénatL'ineffectivité du bicaméralisme ne tient pas seulement à l'ineffectivité des opérations juridiques incombant aux autorités chargées de la mise en place progressive du Sénat, mais aussi et surtout à l'inaction voire au silence des mêmes autorités en ce qui concernent les opérations matérielles indispensables au fonctionnement concret du Sénat. En effet, plus d'une décennie après la promulgation de la loi constitutionnelle de 1996 instituant le bicaméralisme au Cameroun, le Sénat n'a reçu l'existence physique qui conditionne son fonctionnement réel. Pourtant il ne fait aucun doute que, comme l'Assemblée nationale, le Sénat lui-même nécessite pour ses activités une installation physique par l'affectation ou la construction de locaux, la mise à sa disposition du matériel, ou pour le cas spécifique des régions, l'organisation des consultations électorales destinées à les pourvoir en personnels. Sur tous ces aspects matériels, aucun début d'exécution n'est perceptible, tant le silence à leur égard est complet. La mise en place du Sénat tout comme les autres nouvelles institutions créées par la Constitution devient incertaine et les explications oscillent entre les difficultés d'exécution et la mauvaise foi des autorités. Cette dernière est d'autant plus présumée que la Constitution en cause est porteuse de principes démocratiques qui leur auraient été imposés et auxquels ils résisteraient encore au moyen de l'inaction354(*). On sait en effet que c'est grâce aux effets conjugués de la conditionnalité de l'aide financière par les bailleurs de fonds internationaux355(*) et les revendications populaires en faveur de l'instauration d'un régime libéral et démocratique que les pouvoirs publics camerounais avaient entrepris de démanteler le dispositif législatif ultra répressif en vigueur jusqu'en 1990. Les opérations juridiques (législative et réglementaire) et matérielles des pouvoirs publics chargés de la mise en place du Sénat viendront donc parfaire l'oeuvre de novation institutionnelle engagée par le pouvoir constituant dérivé en 1996. Mais, les autorités impliquées dans cette entreprise de mise en place effective du bicaméralisme sont jusqu'ici caractérisées par une lenteur dans l'accomplissement de leur sujétion constitutionnelle, lenteur dont les conséquences sur le pouvoir constituant dérivé méritent d'être analysées. * 354 Cf. ONDOA (M.), « La Constitution duale : recherches sur les dispositions constitutionnelles transitoires au Cameroun », op. cit., p. 40. * 355 Cf. ONDOA (M.), « Ajustement structurel et réforme du fondement théorique des droits africains post-coloniaux : l'exemple du Cameroun », RASJ, Vol. 2, n° 1, 2001, pp. 75-118, notamment pp. 80 et suiv. |
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