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L'assemblée nationale comme pouvoir constituant dérivé au Cameroun entre 1990 et 2008

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par Jules Bertrand TAMO
Université de Dschang Cameroun - Master de droit public 2011
  

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§2 : LA REVISION CONSTITUTIONNELLE DU 16 DECEMBRE 1991

Quelques mois seulement après la révision constitutionnelle du 23 avril 1991, l'Assemblée nationale va être à nouveau amenée à siéger. Convoquée en session extraordinaire en décembre 1991, l'Assemblée nationale avait en réalité adopté plusieurs textes qui seront tous promulgués par le président de la République le 16 décembre de la même année160(*). Un seul relève de sa compétence révisionniste, à savoir la loi n° 91/021 portant modification de l'article 2 de la Constitution. Ce dernier texte, qui nous intéresse ici, est important à plusieurs égards. Il intervient dans un contexte sociopolitique de libéralisation et de démocratisation progressive de la vie nationale qu'il tend à consolider. En plus, la loi n° 91/021 du 16 décembre est juridiquement intéressante en ce qu'elle porte sur une matière très sensible dans la vie juridique de tout Etat, à savoir l'expression de sa souveraineté.

Dès lors, deux points seront examinés ici : le premier est relatif à la procédure de révision constitutionnelle ayant abouti à la loi constitutionnelle du 16 décembre 1991 (A) tandis que le second concerne sa consistance (B).

A - La procédure de révision

A l'instar des textes de nature législative promulgués le 16 décembre 1991 par le président de la République, la loi constitutionnelle promulguée le même jour résultait d'une initiative présidentielle (1). De même, comme la révision du 23 avril précédemment analysée, celle du 16 décembre 1991 a été opérée par l'Assemblée nationale monolithique (2).

1 - L'initiative présidentielle

Comme nous l'avons noté ci-dessus, la révision constitutionnelle d'avril 1991 et celle du 16 décembre de la même année résultaient chacune d'une initiative du président de la République. Mais là s'arrête la similitude entre ces deux révisions. En effet, la loi constitutionnelle du 16 décembre 1991 est la concrétisation juridique de l'une des exigences de l'opposition politique camerounaise dans le cadre de la Tripartite. Il s'agissait d'une rencontre tripartite proposée par le président Paul BIYA comme substitut à l'idée d'une Conférence nationale souveraine et qui avait eu lieu du 30 octobre au 17 novembre 1991 sous la présidence du premier ministre, Monsieur Sadou AYATOU, en présence de représentants du Gouvernement, des partis politiques et quelques représentants de la société civile161(*). C'est au cours de cette réunion que fut posée la question de l'abaissement de l'âge de la majorité électorale. Aux arguments des partisans du statu quo s'opposaient les revendications pressantes de ceux qui militaient pour une réduction considérable de l'âge électoral à dix-huit (18) ans162(*). Considéré, à tort ou à raison, comme plus progressiste et généralement porteuse d'une forte aspiration au changement, à l'alternance voire à la subversion, la classe des moins jeunes étaient redoutée par les uns et courtisée par les autres, en raison de son orientation idéologique présumée moins conservatrice .

Il y eut donc initialement marchandage institutionnel au sujet de l'abaissement de l'âge électoral163(*). Ainsi, l'initiative de la révision du 16 décembre 1991, tout comme celle précédemment analysée, était en réalité, à quelques nuances près, provoquée par les représentants de la société civile et des partis politiques. Mais, il s'agissait d'une démarche qui ne s'imposait pas. Juridiquement en effet, le Chef de l'Etat n'était pas contraint de provoquer un tel marchandage avant de soumettre son projet de révision au pouvoir constituant dérivé (c'est-à-dire au Parlement ou au peuple par la voie référendaire). En plus, il revenait à l'Assemblée nationale d'adopter ou non la réforme projetée.

* 160 Les uns relèvent de sa compétence législative ordinaire : la loi n° 91/019 qui abrège le mandat de l'Assemblée nationale ; la loi n° 91/020 fixant les conditions d'élection des députés à l'Assemblée nationale; la loi n° 19/022 portant réhabilitation de certaines figures de l'histoire du Cameroun. Sur cette dernière loi, V. ANOUKAHA (F.), « Loi n° 91/022 du 16 décembre 1991 portant réhabilitation de certaines figures de l'histoire du Cameroun. Commentaire », Juridis Info, n° 9, janvier-février-mars 1992, pp. 5-9.

* 161 Nous y reviendrons plus amplement dans le chapitre 2 ci-dessous.

* 162 Cf. MOUELLE KOMBI (N.), « La condition juridique de l'électeur au Cameroun », AFSJP/UD, n° 1, Année académique 2002, janvier-juin 2002, pp. 57-79, notamment p. 36.

* 163 Cf. SINDJOUN (L.), « Le paradigme de la compétition électorale dans la vie politique : entre tradition de monopole politique, Etat parlementaire et Etat seigneurial », in SINDJOUN (L.), La révolution passive au Cameroun : Etat, société et changement, Dakar, CODESRIA, 1999, pp. 269-330, notamment p. 283.

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