L'assemblée nationale comme pouvoir constituant dérivé au Cameroun entre 1990 et 2008( Télécharger le fichier original )par Jules Bertrand TAMO Université de Dschang Cameroun - Master de droit public 2011 |
B - Le pouvoir d'adoptionLe pouvoir d'adoption définitive du texte de révision est le plus important dans la procédure de révision constitutionnelle, car c'est lui qui donne naissance à l'acte de révision constitutionnelle. Ainsi, un projet de révision ou une proposition de révision ne peut devenir une loi constitutionnelle que grâce à cette compétence reconnue au Parlement de les examiner (1) et de les voter (2). 1 - L'examen des projets et propositions de révision constitutionnelleAvant leur adoption définitive, les projets de textes soumis au Parlement doivent faire l'objet de discussions ou de débats. Ceux-ci se déroulent tant lors de leur examen en Commission des lois constitutionnelles (a) qu'en Assemblée plénière (b). a - En Commission des lois constitutionnellesL'examen d'un projet ou d'une proposition de révision en Commission des lois constitutionnelles constitue le début de l'oeuvre constituante. C'est la Conférence des présidents qui est compétente pour soumettre un projet ou une proposition de révision à l'examen de la Commission des lois constitutionnelles126(*). Elle le fera après avoir décidé de sa recevabilité, notamment si le projet ou la proposition de révision est conforme à l'article 37 de la Constitution ci-dessus analysé. Dans l'examen au fond, la Commission est compétente pour étudier, critiquer et amender le texte à elle soumis. Les travaux en Commission donnent lieu aux débats qui se déroulent en trois périodes. La première période est celle de la lecture des motifs du texte et de la discussion générale sur ce texte. Pendant cette période, la discussion ne porte que sur l'opportunité du texte, et éventuellement la politique générale de la matière sur laquelle il porte. La deuxième période est celle de l'examen des dispositions internes du texte. A ce stade, des corrections et amendements peuvent être proposés. Enfin, la discussion du texte se poursuit pendant l'adoption du texte par la Commission. En Commission, le texte est adopté à la majorité simple des suffrages exprimés127(*). A ce stade, le rapporteur désigné par la Commission résume les discussions auxquelles a donné lieu l'examen du texte. C'est ce rapporteur qui va conclure soit au rejet, soit à l'existence d'amendement, soit à la proposition d'adoption du texte examiné. Les projets et les propositions de révision étudiés en Commission et jugés recevables sont ensuite communiqués à l'Assemblée nationale au cours d'une séance plénière. b - En Assemblée plénièreEn Assemblée plénière, les textes faisant l'objet des débats sont ceux qui n'ont pas été rejetés, c'est-à-dire ceux qui ont reçu un avis favorable de la Commission des lois constitutionnelles et ont été inscrits à l'ordre du jour. La satisfaction de cette double condition entraîne l'ouverture des discussions publiques. A ce niveau, des exemplaires du texte sont distribués à tous les députés en français et en anglais. Le travail se fait de façon méthodique sous la supervision du président de l'Assemblée nationale qui est en même temps le modérateur et président de séance. Il dirige les débats avec rigueur et doit éviter tout dépassement du temps de parole accordé aux députés. L'étude d'un texte en Assemblée plénière commence par la discussion générale et se termine par la discussion sur les articles du texte. La discussion générale est organisée avec rigueur afin d'éviter les débordements du temps de parole par les députés et autres intervenants dans l'hémicycle. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle le temps de parole est strictement encadré par le règlement de l'Assemblée nationale. En dehors du président de séance, il existe d'autres catégories d'intervenants à savoir le représentant du Gouvernement, ceux des groupes parlementaires, les rapporteurs et les non apparentés128(*). En Assemblée plénière, l'intervention gouvernementale vise à éclairer les parlementaires sur les raisons qui ont conduit à l'élaboration du texte en discussion. Le Gouvernement va donc défendre son projet de révision en discussion devant les représentants de la nation. La Commission est ensuite appelée à donner lecture de son rapport en plénière. Les représentants de groupes parlementaires peuvent intervenir à ce niveau, à leur demande, pour donner leur point de vue sur le texte en discussion. Ces nombreuses interventions pourraient être interminables s'il n'y avait pas dans l'hémicycle un président de séance modérateur. C'est dans cette perspective que l'article 34 du règlement de l'Assemblée nationale dispose : « Le président ouvre la séance, dirige les débats, fait observer le Règlement et maintient l'ordre (...) ». Fort de ces attributions, le président de l'Assemblée nationale doit éviter que les débats ne s'enlisent ou ne deviennent ennuyeux et que certains orateurs n'utilisent leur temps de parole de manière dilatoire. Dans tous les cas, il appartient au président de la Chambre de diriger les débats et de faire régner la discipline. Cette phase est suivie des débats sur le texte article par article. La discussion du texte article par article commence après l'audition du gouvernement, de la lecture du rapport de la Commission des lois constitutionnelles et l'enregistrement des réactions suscitées des divers orateurs. C'est un travail très éprouvant, car le texte doit être étudié de manière détaillée. Certains textes contiennent un nombre impressionnant d'articles. Le président de séance doit s'arrêter et s'enquérir des réactions des députés sur chaque article du texte en discussion. Ce travail rigoureux des parlementaires en séance plénière se prolonge très souvent dans la nuit et s'achève parfois à l'aube le lendemain129(*). De ce qui précède, on peut penser qu'un projet de texte de révision constitutionnelle comme d'ailleurs tout projet de texte ordinaire, ne peut faire l'objet d'un examen sérieux et approfondi que s'il n'est pas déposé de manière tardive sur le Bureau de l'Assemblée nationale. Tel n'est pourtant pas toujours le cas dans la pratique, car le Gouvernement procède souvent au dépôt tardif des projets de loi sur le Bureau de l'Assemblée nationale, parfois même à quelques jours de la fin de la session130(*) alors que la Chambre ne dispose que d'un mois pour les adopter. * 126 En application de l'article 19 alinéa 1er du règlement intérieur de l'Assemblée nationale. * 127 Cf. article 22 alinéa 1er du règlement de l'Assemblée nationale. * 128 L'apparenté est un élu qui n'appartient à aucun parti politique ou est membre d'un parti n'ayant pas le nombre de députés indispensables à la constitution d'un groupe. L'article 15 alinéa 1 du règlement de l'Assemblée nationale prescrit en effet que aucun groupe parlementaire ne peut comprendre moins de 15 membres non compris les apparentés. * 129 Cf. OLINGA (A.-D.), La Constitution de la République du Cameroun, op. cit., pp. 43-45. * 130 Cf. NTONGA BOMBA (S. V.), « La procédure législative devant l'Assemblée nationale du Cameroun », Juridis Périodique, n° 49, janvier-février-mars 2002, pp. 57-66. |
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