2.11.-Le capital social
La principale difficulté avec le capital social, c'est
que l'on peut parler de plusieurs choses. Néanmoins, l'idée
générale est assez simple : la participation à des groupes
peut avoir des effets bénéfiques pour les individus et pour la
collectivité. Comme le remarque Portes (1998), l'idée est
basique, et en traquer les origines reviendrait à passer en revue
presque toute la sociologie depuis le 19ème siècle
(et même, peut-on ajouter, une bonne part de la philosophie politique
et de l'histoire des idées depuis Aristote). La plupart des
acceptations du concept s'appuient sur celle de Coleman, bien qu'il n'ait pas
contribué à la promotion du concept.
Dans l'approche de Coleman, le contexte social est
caractérisé par l'organisation des relations entre acteurs,
c'est-à-dire les structures sociales. Ces structures procurent les
ressources qui constituent le capital social, et Coleman définit
celui-ci, dans une logique résolument fonctionnelle, comme les
caractéristiques de la structure qui facilitent les actions des
individus :
« Social capital is defined by its function. It is
not a single entity, but a variety of different entities having two
characteristics in common: They all consist of some aspect of a social
structure, and they facilitate certain actions of individuals who are within
the structure. Like other forms of capital, social capital is productive,
making possible the achievement of certain ends that in its absence would not
be possible. » (1988, p. S98).
La définition peut apparaître obscure : certains
aspects de la structure, qui facilitent certaines actions dans la structure, le
moins que l'on puisse dire, c'est que cela ne dessine pas un objet aux contours
très nets ; d'ailleurs, le capital social, s'il ressemble (en tout cas
selon Coleman) aux autres « capitaux », s'en différencie en
même temps par son mode de formation : « Unlike other forms of
capital, social capital inheres in the structure of relations between persons
and among persons. » (id.).
C'est effectivement une différence importante par
rapport à la notion de capital physique ou de capital humain, entre
lesquels Coleman veut établir l'analogie ; car l'approche
économique usuelle du capital n'en fait pas une chose inhérente
à un environnement, mais une chose résultant de la
décision de renoncer au présent dans le but précis
d'obtenir un bénéfice dans le futur.
Or chez Coleman, le capital social ne résulte pas d'une
telle décision : « most forms of social capital are created or
destroyed as by-products of other activities » (p. S118) ; le capital
social n'est donc pas produit : c'est plutôt qu'il se produit, à
l'occasion d'autres activités. Au sens économique, il s'agit donc
non d'un capital, mais d'une externalité. Et le fait que cette
externalité, en facilitant les actions des individus, puisse avoir des
effets bénéfiques n'en fait pas pour autant un capital
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