2.9.3.-Intégrer les
valeurs et connaissances des citoyens dans l'EIE
Non seulement la participation citoyenne dans l'EIE sert
à démocratiser le processus décisionnel et à
renforcer le pouvoir d'agir des communautés, mais elle vise
également à prendre des décisions plus
éclairées en intégrant dans l'EIE les valeurs et les
connaissances des citoyens. Greig et ses collègues (2004, p. 265)
avancent même que « si l'EIE souhaite faire une différence,
en terme de prise de décisions plus éclairées, une
approche participative est essentielle » (traduction libre).
Les promoteurs d'une approche participative de l'EIE
soutiennent que la participation permettrait d'approfondir les connaissances
à l'égard des déterminants de la santé, et ce, en
favorisant le croisement des savoirs experts et citoyens (Joffe,
2003). Il y a d'ailleurs une reconnaissance croissante de l'expertise ou
de l'«intelligence civique » des citoyens, qui peut
grandement contribuer à l'EIE (Elliott et Williams, 2004; Elliott et
Williams, 2007). Les citoyens connaissent mieux que quiconque leurs
valeurs, leurs besoins, leurs préférences et les dynamiques
animant leur communauté. Leurs connaissances sont ancrées dans
les réalités locales et sont tout aussi valides et
légitimes que les connaissances scientifiques pour éclairer le
processus décisionnel (Wright et al., 2005; Parry et Kemm, 2005;
Dora, 2003). Les citoyens pourraient donc apporter un éclairage
nouveau sur les impacts potentiels des politiques, des programmes ou des
projets que les décideurs envisagent d'adopter (Gillis, 1999;
Kearney, 2004; Kosa, 2007).
Plusieurs auteurs soutiennent également qu'une approche
participative permettrait à l'EIE d'être plus robuste sur le plan
scientifique (Kjellstrom, van et al., 2003, p. 455). Elliott et
Williams (2008, p. 1113) abondent dans le même sens et
déclarent que « La co-création d'une expertise citoyenne et
scientifique ne permet pas seulement une forme de science plus inclusive et
démocratique, mais aussi une science plus fiable, valide et efficace,
qui a une conception plus riche de la connaissance et qui peut informer
l'action sociale » (traduction libre).
Une approche participative apparaît d'autant plus
pertinente que les praticiens et décideurs doivent souvent travailler
dans des zones grises où subsistent bien des incertitudes. Les
données probantes issues de la recherche scientifique concernant les
impacts potentiels d'une politique, sont souvent insuffisantes, non
concluantes, ou sujettes à la controverse scientifique. Les
décideurs ne peuvent donc pas appuyer leurs décisions strictement
sur des considérations scientifiques et sont confrontés à
des dilemmes sociaux et éthiques complexes (Elliott et Williams,
2004, p. 233). Une EIE participative permettrait ainsi aux
décideurs d'avoir un éclairage citoyen sur les dilemmes auxquels
la science ne peut apporter que des réponses partielles.
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