Procédure d'octroi de crédit et gestion du risque dans la micro finance : cas de la gestion du risque de crédit de PAMECAS (Partenariat pour la Mobilisation de l'Epargne et le Crédit Au Sénégal).( Télécharger le fichier original )par Abdoulaye SANOGO Institut supérieur de management de Dakar ( Sénégal) - Master 2 en banque 2011 |
Section 5 : REVUE CRITIQUE DE LITTÉRATURELa partie de la recherche que constitue la revue critique de littérature est indispensable en ce sens qu'elle établit non seulement la pertinence de notre étude mais aussi elle nous permet de faire l'état des lieux et les critiques des ouvrages et documents consultés. En effet, elle consiste en une étude analytique et synthétique de la documentation existante. L'Afrique est une région du monde qui est depuis plusieurs décennies l'objet d'investigations, de discours et d'intervention visant à identifier et à solutionner toute une panoplie de problèmes, définie notamment en termes de « développement » et plus récemment de « lutte contre la pauvreté ». Cette stratégie de lutte contre la pauvreté s'articule autour du DSRP (Document Stratégique de Réduction de la Pauvreté), document stratégique qui organise les formes et méthodes d'intervention au Sénégal et qui a pour stratégies : - Création de richesses et croissance pro pauvre - accélération de la promotion de l'accès aux services sociaux de base ; - protection sociale, prévention et gestion des risques de catastrophes ; - et surtout bonne gouvernance et développement décentralisé et participatif. Il a été mis à jour depuis 2006. En effet, l'entreprenariat féminin, particulièrement dans le commerce est une réalité ancienne au Sénégal, qui y prend de l'expansion sous de nouvelles formes. De même, les femmes s'organisent en grand nombre sous forme de groupes d'entraide et de solidarité et c'est souvent par ces objectifs, appelés « groupement de femmes », « groupement de promotion féminine » ou encore groupement d'intérêt économique », qu'elles tentent d'avoir accès à des programmes et projets de micro crédit. Ces formes d'organisation sont devenues aujourd'hui des acteurs stratégiques pour toute intervention au niveau local. Les milieux urbains africains sont des espaces ou s'opèrent des changements sociaux, notamment en ce qui a trait à trait aux hiérarchies sociales et familiales, aux rôles sociaux de sexe et aux pratiques associatives. Dans son ouvrage l'entreprenariat féminin au Sénégal. La transformation des rapports de pouvoir4(*), Fatou Sarr montre que les femmes du milieu urbain sont au coeur d'une dynamique de changement social : d'une part la structure familiale est en mutation, ce qui permet aux femmes de négocier de nouveaux espaces de pouvoir et de liberté par rapport à leur rôle traditionnel. D'autre part, des femmes se retrouvent dans une situation de plus grande précarité économique, notamment à cause des politiques macros économiques défavorables telles les programmes d'ajustement structurel (PAS). Cette situation encourage les femmes à trouver des moyens innovateurs pour assurer leur subsistance et celle de leur famille ; elles investissent des secteurs de l'économie informelle, notamment avec l'aide des systèmes informels d'épargne et de crédit. Les femmes se sont donc servies de leurs réseaux traditionnels de solidarité pour répondre à leurs nouveaux besoins sociaux et monétaires, amenés par l'effritement de la structure familiale et par la crise économique. Parallèlement, depuis une quinzaine d'années les populations, notamment, des banlieues dakaroises se sont progressivement organisées en de nouvelles formes associatives, notamment en Groupement d'Intérêt économique (GIE) et en association, souvent dans le but non seulement d'obtenir l'aide financier d'ONG ou de bailleurs de fonds, mais aussi pour s'assurer une présence collective renforcée sur la scène sociopolitique. Par exemple, des commerçants et/ou des artisans se regroupent en GIE dans le but de s'entraider, souvent sur une base territoriale (une commune ou un quartier). Certains de ces groupements sont masculins, certains sont féminins, d'autres sont mixtes. Il est à noter que d'une part, les femmes s'organisent à l'intérieur de leurs réseaux de solidarité pour tenter d'investir certaines activités dans le secteur « informel » afin de subvenir à leurs besoins « monétaires ». D'autre part, nous observons un mouvement de formalisation ou plus exactement de canalisation progressive de ces activités économiques et ces réseaux de solidarité dans des formes associatives dont les structures officielles correspondent à un mode de fonctionnement qui diffère de celui des réseaux traditionnels d'entraide et de redistribution des ressources matérielles. De plus, leur subordination les rend plus facilement contrôlables et isolables. Cette analyse présente des similitudes et des compatibilités avec les constats les plus généraux sur les PAS dans un ensemble de pays en développement ou en ajustement : la force du travail se féminise, et de plus en plus de femmes sont à la recherche des sources de revenus, qu'elles trouvent souvent ; particulièrement dans les pays du sud, dans les secteurs les plus précaires et les moins payés, tandis que leurs tâches domestiques augmentent en résultat du désengagement de l'Etat et de la dégradation environnementale. A partir de ces éléments, les femmes sont définies à la fois comme des travailleuses de seconde classe mais très productive et dont la force de travail peut être utilisée à un coût très faible et à la fois comme celles qui sont responsables du travail de soins et de reproduction. De plus, elles sont représentées comme celles qui sont le plus susceptibles d'utiliser leurs revenus en totalité pour répondre aux besoins de leur famille et de leurs enfants. « L'accumulation des biens destinés aux cérémonies familiales se faisait dans le cadre de la structure familiale et lignagère (...) l'accumulation collective, non seulement a été renforcée, mais a dépassé le cadre familial pour être pris en charge aussi par les voisins, les amis et les relations en milieu urbain »5(*) . Cependant le reproche qui peut être fait à Fatou Sarr ainsi qu'à beaucoup d'autres chercheurs africains ayant travaillé sur la micro finance, c'est de ne pas avoir montré comment l'introduction du microcrédit, en tant que changement social, dans les milieux ruraux et urbains a été perçue. Bien avant que les femmes n'assimilent et ne fassent appel au microcrédit pour financer leurs activités, quelle était leur posture, position, leur avis sur l'introduction dans leur univers économique de cette nouvelle donne ? L'ouvrage n'a pas apporté la réponse à cette question. On note aussi le fait que certaines thématiques importantes soient éludées car, par exemple la confrontation d'approches aurait permis une mise en perspective des principaux débats concernant la micro finance au Sénégal, celui entre épargne et crédit, celui des liens entre l'informel endogène et la micro finance hybride appuyée par l'extérieur. En effet, ces réseaux traditionnels d'entraide dont parle Fatou Sarr, fonctionnaient en « clubs d'épargne ou tontines » selon Stuart Rutherford dans comment les pauvres gèrent-ils leur argent6(*) ? Stuart Rutherford s'est attelé à démontrer que les clubs d'épargne ou tontines sont constitués de personnes qui se regroupent pour mettre en place et gérer leurs propres services d'intermédiation financière et individuelle de base. Les clubs d'épargne se composent de personnes qui décident de se regrouper pour épargner en commun, de différentes manières. Ces clubs sont la priorité de leurs membres et sont gérés par eux. L'auteur identifie aussi les activités associatives des femmes, dont il relève quatre types : Les groupements économiques, les associations d'entraide, les associations religieuses, les associations politiques. Par groupement économique, il entend les tontines. Par association d'entraide, il entend les associations entre femmes d'un même quartier qui se cotisent pour constituer un fonds commun qui sera versé à celle d'entre elles qui en aura besoin pour une cérémonie familiale. Toujours selon lui, il est essentiel de considérer ces deux types d'activités comme économiques, dans la catégorie « activité de redistribution ». Ces activités existent toujours aujourd'hui. Rutherford présentera ensuite ces pratiques redistributives. La première en importance est probablement celle des cérémonies familiales. Celles-ci sont organisées lors des événements importants du cycle de vie que sont les naissances, les baptêmes, mariages et les décès. Celles-ci sont sous le contrôle effectif des femmes et sont l'occasion d'une redistribution des biens au sein de la communauté. Allant plus loin dans l'analyse de ces formes d'association, il explique qu'une tontine est une association de crédit rotatif qui fonctionne généralement comme suit : un nombre déterminé de femmes en sont membres et elles conviennent à l'avance d'un montant fixe que chacune devra cotiser à une fréquence déterminée. Il existe des tontines journalières, hebdomadaires, mensuelles, etc. Chaque ronde de cotisation constitue un « tour ». Le nombre de tours, donc la durée de la tontine, correspond, au nombre de cotisantes afin que chacune ait son tour (littéralement). Pour chaque tour, une réunion est organisée, qui prend souvent la forme d'une petite fête. A cette occasion, on verse la totalité des cotisations du mois à l'une des participantes, qui dispose ainsi d'un seul coup du montant total des cotisations qu'elle versera pour toute la durée de la tontine. Ce système est donc une forme de crédit mutuel dans lequel la totalité de l'épargne des participants est toujours en circulation. Les tontines, nous explique Rutherford, ont graduellement subi des transformations, passant de la tontine de consommation à la tontine d'investissement. Mais, même si Rutherford a le mérite d'expliquer un peu le passage d'une forme de tontine dite consommation à celle d'investissement, il n'a pas situé la position de ce secteur financier informel par rapport à la tendance actuelle à l'institutionnalisation, à la commercialisation, autrement dit à la formalisation des systèmes financiers décentralisés. Il a montré que les montants perçus lors de ces redistributions servent de plus en plus à financer des activités productives ou commerciales ayant pout but de générer des revenus. Mais les tontines traditionnelles ne permettent pas aux femmes de procéder à de grands investissements. Cette idée est d'autant plus vrai qu'elle est soutenue par Michel Lelart7(*) dans son ouvrage La tontine, pratique informelle d'épargne et de crédit dans les pays en voie de développement. Lelart commence par faire un constat : la plupart des pays en développement se sont endettés au-delà de toute mesure et les systèmes bancaires africains sont en pleine décomposition. D'après l'auteur, la prise de conscience qui s'impose aujourd'hui confère un intérêt grandissant à la tontine. Les tontines existent dans la plupart des pays en développement, surtout africains, elles sont pratiquées par toute la population, sont d'une souplesse extraordinaire et elles drainent des sommes qui sont parfois considérables. C'est à ces pratiques qu'est consacré cet ouvrage. Lelart a axé sa réflexion sur trois aspects : - la première partie décrit le phénomène tontinier et permet d'élaborer une typologie des tontines, en partant de monographies effectuées. - la deuxième partie mesure le phénomène et s'efforce de le quantifier, grâce à des enquêtes plus larges menées dans quelques pays africains : Niger et Togo notamment; - la troisième partie analyse le phénomène sous certains de ses aspects, à la fois micro- et macro-économiques, avant d'amorcer une réflexion sur ce que pourrait être le rôle des tontines dans le financement du développement. Refaisant un peu l'histoire, l'auteur nous fait savoir que la mobilisation de l'épargne dans les pays en voie de développement a suscité des travaux d'une ampleur peu commune depuis la guerre. Lelart fait ce constat : les institutions internationales, les autorités nationales de nombreux pays, les banques elles-mêmes, étrangères ou banques locales, des chercheurs se sont penchés sur ce problème pour comparer ce qui était fait à ce qui aurait dû l'être. Malgré l'énergie déployée pour trouver des solutions, notamment en Afrique, le bilan est globalement désastreux. Les banques n'ont jamais réussi à attirer l'épargne populaire. Il retrace l'évolution du phénomène tontinier qui a pris sa source en Europe. Dans l'espace ensuite, il montre bien la diversité des approches liée à la variété de ces pratiques qui s'étendent désormais à l'Afrique entière. Et il distingue nettement les deux fonctions que remplissent les tontines : par leur fonction de crédit, elles sont proches du crédit mutuel déjà implanté dans quelques pays africains; par leur fonction de prévoyance, elles tiennent lieu de sociétés de secours mutuel. Lelart, dans ses analyses tend à montrer que l'épargne tontinière est une épargne à la fois volontaire et forcée. Elle ne permet qu'une accumulation limitée (l'espace d'un cycle pour reprendre ses termes) pour l'adhérent. Ces limites de la tontine sont également notables au plan collectif. Là encore, selon lui l'accumulation est faible (l'espace d'un tout). L'épargne tontinière est courte et devrait favoriser en principe davantage la consommation que l'investissement, en tout cas se limiter aux micros réalisations. L'auteur a souligné l'originalité des attitudes et des comportements dans ces pays ou les banques n'ont pas cherché à s'adapter à la population. En fait, les individus s'organisent entre eux pour faire face collectivement à leurs besoins, pour se prêter et s'emprunter les uns les autres au sein d'associations qu'ils constituent eux-mêmes. De même, Lelart révèle que l'épargne dans ces pays en développement était essentiellement informelle. Elle circule et tout particulièrement au sein des tontines, encore appelées associations rotatives d'épargne et de crédit, où l'argent est mis à la disposition des uns et des autres. Il constate que ce phénomène tontinier a pris une importance considérable depuis quelques années, bien qu'il ait des origines lointaines. On parle désormais de finance informelle, par analogie avec l'économie informelle. On se trouve ici en présence d'un véritable système, parfaitement organisé. Cette notion de finance informelle, Michel Lelart la définit comme un ensemble de mécanismes originaux qui permettent en effet de faire circuler la monnaie en contrepartie d'une accumulation temporaire des créances et des dettes. Ainsi, la finance informelle engloberait selon lui tout mécanisme non officiel qui permet de faire circuler temporairement des créances et des dettes. La finance informelle regroupe donc l'ensemble des transactions effectuées, en marge des règles établies, par des intermédiaires. Mais, on peut signaler que ces mécanismes ne sont pas dans la majeure partie des cas illégaux car bien souvent les autorités publiques les tolèrent. Lelart a beaucoup de mérites en ce sens qu'il a délaissé le système très rationalisé des grandes firmes et institutions de micro finance pour s'intéresser à un système de micro fiance typiquement africain : la tontine. C'est le penseur par excellence du système tontinier. Mais aujourd'hui il est clair que cette forme de finance a cédé la place à un système beaucoup plus moderne. Dans cette perspective, il aurait dû donner un aperçu global et assez complet de l'état actuel du débat sur la micro finance. Cependant, certains sujets, non moins importants, sont peu ou pas du tout abordés par l'auteur. Ainsi, il ne parle pas de la commercialisation des Institutions de Micro Finance (IMF). En ce qui concerne l'investissement socialement responsable ou l'épargne solidaire, aucune allusion n'est faite à ces fonds, qui sont en forte expansion aujourd'hui en Occident, et qui sont en partie consacrés au financement de la micro finance. Des questions aussi importantes pour l'univers de la micro finance ne peuvent plus être ignorées dans l'avenir, surtout dans un livre se voulant aussi complet. Ainsi les femmes sénégalaises ont de plus en plus recours aux institutions de microcrédit qui leur octroient des microcrédits leur permettant de passer de la micro à la macro réalisation. Et aussi parce qu'elles trouvent les revenus additionnels dont elles ont cruellement besoin pour assurer la survie de leur famille et de leurs enfants. Reste à savoir si ces micros crédits bénéficient réellement aux femmes. C'est ainsi que Jean Michel Servet dans son ouvrage Banquiers aux pieds nus : la micro finance8(*) soutient que les résultats des études socio économiques d'impact du microcrédit apparaissent contradictoires. Ils ne permettent pas d'affirmer que le microcrédit joue un rôle positif pour les fractions les plus pauvres de la planète : le rôle des femmes de l'émancipation des femmes dans en matière de crédit est très ambigu. Servet propose quelques pistes de réflexion à travers certaines interrogations : est ce le microcrédit qui par lui-même est émancipateur ? Ou bien l'évolution du statut des femmes explique t-il que leurs capacités en matière de production, d'échange et de financement (dont celle d'emprunter) augmentent? Selon lui, le soutien à la micro financement contribué à une précarisation généralisée des droits au travail. Si elle est présentée, comme la principale alternative, voire la seule. Sur un tout autre plan, ZWAHLEN Anne et EGGER Ruth, dans Femme, épargne et crédit 9(*)(1991), mettent en relief l'importance du micro crédit et l'épargne dans l'amélioration des conditions de vie des femmes, à partir d'une étude basée sur : - les difficultés et les potentialités pour les femmes dans l'épargne et le crédit ; - les mécanismes de l'épargne dans le cas général des tontines ; - les diverses expériences dans les pays développés, notamment la description. En faisant certaines propositions, ces auteurs ont évoqué comme difficultés, la monétarisation des échanges et la pénétration de l'économie domestique par l'économie marchande, ce qui fait que les femmes éprouvent un besoin de financement pour jouer pleinement leur rôle dans la cité. Malheureusement, les réseaux de financement existant ne leur sont pas accessibles. Ils notent aussi de nombreux obstacles socioculturels, juridiques, économique comme l'analphabétisme, la mobilisation restreinte, la crainte de ne pas pouvoir rembourser, le droit moderne inadapté aux femmes, la nécessité de fournir une autorisation légale. Ces auteurs nous permettent d'appréhender un certain nombre de facteurs liés à l'épargne et au crédit ainsi que certaines contraintes liées à l'inaccessibilité des femmes au service financiers. Elles mettent également en exergue le rôle de la formation dans la conduite des opérations de crédit en direction des femmes. Cependant, les auteurs n'ont pas pris en compte les problèmes de gestion rencontrés par les femmes dans le cadre de leurs activités. Au cours de nos lectures, un rapport a retenu notre attention, celui du PNUD sur le développement humain10(*). Le PNUD souligne dans ce document le fait que les crédits sont indispensables à la création et à l'expansion des activités productives. Les femmes, malgré leurs considérables apports économiques n'ont pas accès au crédit faute de pouvoir donner des garanties voulues. Les obstacles socio culturels ainsi que l'ignorance des démarches limitent beaucoup les rapports entre les femmes et les banques. Selon ce rapport, les établissements officiels estiment que le petit prêt leur revient cher, car l'opération et son suivi leurs prennent beaucoup de temps ; bien que les femmes qui empruntent pour une petite entreprise se soient pourtant montées bonnes débitrices, malgré les intérêts supérieurs à la moyenne qu'on leur demande. Pour cela, le PNUD à travers ce rapport sur le développement humain propose quelques mesures : - Examiner les moyens de financement normalement accessibles aux femmes (patrimoine, plan d'épargne, prêteurs locaux), les possibilités de recours aux établissements officiels de crédit et les raisons qui empêchent les femmes d'y accéder `absence de garantie, principes socio culturels ; - Prévoir les mesures spéciales de vulgarisation et de formation pour faciliter le contact entre les banques et les emprunteuses. Le PNUD a eu le mérite de souligner l'importance des crédits en ce sens qu'ils créent des activités et favorisent leur expansion. Le rapport a également souligné le difficile accès des femmes au crédit. Il nous aidé à comprendre dans un certain contexte, les contraintes des femmes face aux grandes banques et à jeter les bases d'une nouvelle réflexion. Cependant, il est resté muet sur les banques formelles qui sous estiment les petits crédits alors qu'on sait que les femmes ayant des revenus limités s'orientent vers les banques. Dès lors, le micro crédit apparaît comme un outil d'émancipation et de promotion de la condition féminine dont les objectifs visés sont multiples : augmenter le revenu et faciliter leur indépendance financière, stabiliser et professionnaliser leurs activités entrepreneuriales, améliorer leur statut au sein de la famille et enfin favoriser leurs capacités d'auto organisation, donc d'expression et de revendication. De plus, le microcrédit a un effet multiplicateur sur les petites et micro entreprises féminines sans ajouter de surcharge de travail ou même en la diminuant quand le crédit permet l'achat d'équipement adéquat. Les femmes rentabilisent mieux leurs activités grâce aux fonds de roulement et, éventuellement grâce à l'équipement qu'elles reçoivent. Cependant, ce n'est pas partout et toujours que le micro crédit est considéré comme un instrument efficace de lutte contre la pauvreté. L'insuffisance des moyens financiers est un handicap parmi tant d'autres. Ainsi l'impact de la micro finance, est souvent surestimé, et les échecs des entrepreneurs ou des institutions de micro finance (IMF) sont assez nombreux. Dans son étude, Financial services for women11(*) (les services financiers destinés aux femmes) Jean WEIDERMANN définit les principes fondamentaux du crédit destiné aux femmes pauvres ; accorder des crédits de trésorerie de faible montant et à court terme aux entreprises commerciales et aux entreprises de service ; supprimer les obstacles à la mobilité en allant au devant des femmes là où elles vivent et travaillent ; surmonter les obstacles d'ordre juridique grâce à la solidarité, à la garantie d'un groupe et aux références personnelles ; exiger des garanties solidaires plutôt que des documents écrits pour permettre la participation des femmes analphabètes ; enfin apprendre aux femmes à être de bonnes consommatrices de crédit. Selon WEIDERMANN, depuis peu, le secteur de la micro finance accorde une plus grande attention au besoin des services d'épargne exprimé de longue date par les femmes ainsi qu'à d'autres services financiers comme les prêts à la consommation, au logement, et à l'éducation. Le simple fait d'avoir des espèces en caisse et d'exercer un plus grand contrôle sur elles peut faire accéder les femmes à l'émancipation économique. Toujours dans sa perspective, l'accès à des services financiers viables permet aux pauvres d'accroître leurs revenus, de se doter d'actifs et de se protéger dans une certaine mesure de chocs extérieurs. En guise de critique, nous reprenons les propos du professeur Yunus lui-même, qui, de passage à Paris en novembre mettait en garde contre certaines dérives liées à la micro finance. `Aidez la micro finance, ne la tuez pas'12(*) avait il lancé ; Sous prétexte de protéger les pauvres, certains gouvernements ont plongé le secteur de la micro finance dans une crise grave. En énonçant que les remboursements devaient se faire en présence d'autorités élues et que le remboursement n'était pas obligatoire pour ceux qui avaient déjà remboursé plus de deux fois le capital emprunté, certaines autorités envoyaient le message clair que les emprunteurs ne devaient pas se sentir obligés de rembourser leurs emprunts. Cette annonce a entraîné une avalanche de défauts de paiement, jetant l'industrie de la micro finance dans une crise à laquelle elle aurait pu ne pas survivre. Cela aurait entraîné des répercussions importantes sur la micro finance dans le monde entier. En somme, ce parcours de la littérature existante nous a permis d'avoir une vue plus étendue sur la problématique de la micro finance et de ses institutions. Les approches dans ce domaine sont certes multiples et variées mais la revue que nous avons faite sur la littérature nous a permis de réaliser qu'il y a certains angles qui n'ont pas été abordés de façon approfondie. * 4 Sarr Fatou, l'entreprenariat féminin au Sénégal. La transformation des rapports de pouvoir. Paris, L'Harmattan, 1999, 301p * 5 F. Sarr, Op cit, p 48. * 6 S. Rutherford, comment les pauvres gèrent-ils leur argent ? Paris Khartala, 2002, 165 p * 7 Michel Lelart, La tontine, pratique informelle d'épargne et de crédit dans les pays en voie de développement, Montrouge, édition john Libbey, 1990, 356p. * 8 Servet J.M., banquiers aux pieds nus : la micro finance, Paris, Odile Jacob, 2006, 505 p. * 9 ZWAHLEN Anne et EGGER Ruth, dans Femme, épargne et crédit, Berne DEH, 1991 * 10 PNUD ; Rapport mondial sur le développement humain, 2006. * 11 J. WEIDERMANN, Financial services for women: Tools for Microenterprise Program, traduit en français par l'Unité Spéciale de Micro finance du Fonds d'Equipement des Nations Unies, 2002. * 12 Le Monde, mai 2006 |
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