Paragraphe 2 : Les principaux écueils et
limites juridiques
Parmi les principaux écueils et limites juridiques, il
convient de relever ceux inhérents aux principes et enjeux juridiques
adoptés dans le cadre de l'OUA et de l'UA, considérés ici
comme étant multilatéraux (A) puis ceux qui relèvent des
principes et enjeux juridiques découlant des rapports bilatéraux
des Etats (B).
A. Les principes et enjeux juridiques
multilatéraux
D'abord, les principes posés par l'article 4 (a), (b)
et (g), qui se résument généralement, et respectivement,
de façon confondante, complexe et quasi-contradictoire (que sont
respectivement, l'égalité souveraine, le respect de la
souveraineté nationale et l'interdépendance entre les Etats
membres ; l'uti possidetis juris, l'intangibilité ou le
respect des frontières héritées de la
colonisation ; la non-ingérence dans les affaires
intérieures des Etats), ne favorisent pas, en eux-mêmes, la
cohérence de la mécanique de l'architecture de paix et de
sécurité de l'UA. Il est difficile, en effet, de concevoir,
à cet égard, l'intervention des troupes de la FAA dans des Etats
d'Afrique centrale blottis sous les différents principes ci-dessus
évoqués (particulièrement, le respect de la
souveraineté, la non-ingérence, l'intangibilité ou le
respect des frontières héritées de la colonisation).
En outre, lorsque cet article laisse planer, en son point (h),
la possibilité ou le « droit de l'Union d'intervenir dans
les Etats membres », il va jusqu'à limiter cette
intervention « dans certaines circonstances
graves » qui se réfèrent aux crimes contre
l'humanité. Il reste à savoir comment imaginer l'hypothèse
d'une intervention dans un ou plusieurs Etats membres en conflit, sous l'alibi
que les belligérants se rendent coupables de crimes de guerre ou de
génocide, alors même que ces Etats sont couverts par les principes
opposés, soit de non-ingérence, soit du respect de la
souveraineté, entre autres.
En somme, ces principes demeurent, non seulement, de
véritables limites à l'action cohérente de l'APSA et de
ses démembrements, mais ils traduisent aussi, en réalité,
une contradiction ou un dilemme. En fait, les Etats de l'UA et des CER sont
partagés entre deux théories des Relations internationales :
le réalisme (d'où la défense et la préservation de
la souveraineté des Etats membres ; mais aussi la volonté
d'assurer la paix par la force - cas de la MINUAD au Soudan, de l'AMISOM en
Somalie, de l'intervention aux Comores en 2008, de l'intervention
envisagée au Mali et en Guinée Bissau à la suite des coups
d'Etat successifs, entre le 21 mars et fin avril 2012, entre autres) et le
libéralisme (d'où l'article 4 (h), l'interventionnisme dans le
cadre de la responsabilité de protéger ou la volonté
d'assurer la stabilité interne, meilleur gage de préservation des
droits de l'homme et du développement).
Par ailleurs, il ne nous semble pas sans intérêt
de nous interroger sur la complexité et la lourdeur du mécanisme
juridique existant. La dualité persistante des textes qui organisent les
deux architectures de paix et de sécurité mérite
d'être résorbée, au profit d'une architecture juridique
unique ou homogène, combinant les textes des CER et ceux de la CEA,
quitte à établir des mécanismes clairs de coercition et de
sanction en cas de violation de ceux-ci, par la conclusion d'accords
bilatéraux divergents par exemple.
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