I.4 Le taux d'intérêt comme canal de
transmission
Depuis la libéralisation, l'importance du marché
monétaire a augmenté dans le dispositif de conduite de la
politique monétaire de la BCEAO. Les impulsions données aux taux
directeurs devraient donc se transmettre au marché monétaire en
modulant le système des taux d'intérêt dans le sens
souhaité par la banque centrale, i.e. un relèvement du taux
directeur devrait s'accompagner d'un mouvement à la hausse des taux
interbancaires et aussi des taux débiteurs des banques secondaires. Le
graphique n03 tente de capter la dynamique du taux de pension et
celle de l'écart de production calculé à l'aide du filtre
Hodrick-Prescott (GapHP). L'écart de production est censé
traduire des perspectives inflationnistes ou déflationnistes. En effet,
si la production tend à dépasser son niveau potentiel,
l'économie tombe dans un cycle de surchauffe, investissement et
consommation s'emballent entrainant ceteris paribus une tendance
haussière des prix ; l'effet inverse est obtenu lorsque la production
s'écarte négativement et significativement de son niveau
potentiel.
Règles de politique monétaire : essai de
modélisation pour la BCEAO DEA/Master de recherche
18
Graphique n0 3 : Dynamiques
comparées du taux de pension et de l'écart de
production
en %
14
12
10
-2
-4
4
8
0
6
2
T1-93 T4-93 T3-94 T2-95 T1-96 T4-96 T3-97 T2-98 T1-99 T4-99 T3-00
T2-01 T1-02 T4-02 T3-03 T2-04 T1-05 T4-05 T3-06 T2-07 T1-08 T4-08 T3-09
T2-10
TPE GapHp
Source : construction de l'auteur sur base de
données de la BCEAO et du FMI
Depuis le premier trimestre 1994, le taux de pension a
commencé une décrue pour permettre la relance de la production,
après que celle-ci soit tombée en déprime dès la
fin du troisième trimestre 1993. Cette détente du taux s'est
poursuivi jusqu'au quatrième trimestre 1998, même si
l'écart de production en ce moment s'affichait à la hausse. En
effet, la modération de l'inflation succédant aux hausses de prix
initiales et l'apparition d'un substantiel excédent de liquidité
des banques, ont conduit les autorités monétaires à
procéder à une détente progressive des taux plus en accord
avec l'évolution souhaitée de l'investissement. Aussi, les
mesures de libéralisation financière ont permis la persistance de
cette détente du taux directeur de la banque centrale. A partir du
quatrième trimestre 2009, la synchronisation entre TPE et gap de
production est quelque difficile à décrire. En effet,
après s'être maintenu à 6% durant la période 2000 T2
- 2003 T2, le TPE a connu une baisse pour finalement se stabiliser pratiquement
à 4%. Dans le même temps, l'écart de production a
fluctué faiblement autour de 0%. Ce constat peut traduire une faible ou
quasi-inexistence de transmission entre taux de prise en pension et
écarts de production, lesquels écarts sont censés contenir
des tendances inflationnistes ou déflationnistes.
Règles de politique monétaire : essai de
modélisation pour la BCEAO DEA/Master de recherche
19
Néanmoins, l'examen des décisions de la banque
centrale ces dernières années laisse présager que la
fixation des taux tient compte des conditions de l'économie notamment
des tensions inflationnistes, résultants aussi bien de l'abondance des
liquidités que de l'expansion de la production. En effet, les
résultats de la politique monétaire tels que rapportés
dans la Note d'Information du quatrième trimestre 2010 précisent
qu'en mars 2004, les évolutions favorables constatées au niveau
de l'orientation de l'activité économique, de la maîtrise
de l'inflation et de la consolidation des réserves de change ont conduit
la banque centrale à poursuivre l'assouplissement de ses conditions
monétaires en réduisant ses taux directeurs. Ainsi, le TES est
passé de 5% à 4,5% et le TPE de 4,5% à 4%. Cette nouvelle
détente de la politique monétaire, après les baisses de
150 pdb des taux directeurs en 2003, traduisait la confiance de l'institut
d'émission dans la capacité du système financier à
soutenir la reprise économique constatée dans les Etats membres
de l'union, par un financement à moindre coût.
La BCEAO a relevé ses taux directeurs de 0,25 point de
pourcentage à partir d'août 2006. Le TPE est donc passé de
4% à 4,25% et le TES de 4,5% à 4,75%. Cette décision qui
vise à conforter la contribution de la politique monétaire
à la stabilisation macroéconomique, s'inscrit dans un contexte
marqué par les inquiétudes suscitées notamment par
l'évolution prévisibles des prix au sein de l'Union, de nature
à entraver la réalisation de l'objectif de stabilité des
prix et par conséquent, d'une croissance économique saine et
durable.
Au cours du troisième trimestre 2008, la banque
centrale tenant compte des risques pesant sur la stabilité des prix, a
haussé d'un demi (
12/)
point de pourcentage le TPE pour le porter de 4,25% à 4,75%, le TES a
été fixé à 6,75%.
La conjoncture économique et financière de
l'Union durant le deuxième trimestre 2009 a été
marquée par la détérioration des perspectives de
croissance et l'apparition de tensions sur les finances publiques, dans un
contexte d'atténuation des pressions inflationnistes et de
ralentissement de la progression de l'encours des crédits à
l'économie. La BCEAO a donc procédé à une baisse de
50 pdb ses taux directeurs. Ainsi, le TPE a été ramené de
4,75% à 4,25% et le TES, de 6,75% à 6,25%. Cette baisse des taux
devrait donner aux banques une marge de réduction de leurs taux
débiteurs. Par ailleurs, dans le souci de renforcer le signal
envoyé au marché à travers la baisse des taux directeurs
et d'accroître la capacité des banques à financer
l'économie, la BCEAO a revu à la baisse les coefficients de
réserves obligatoires dans quatre Etats de l'Union : Bénin, Mali,
Niger et Sénégal (cf. Tableau 1).
Règles de politique monétaire : essai de
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20
Le graphique n04 vient aussi en appui à la
présomption d'une synchronisation du TPE et des prévisions
inflationnistes décrites par infgap4 (l'anticipation d'inflation sur
quatre trimestres). Comme indiqué déjà plus haut, le taux
directeur connait une tendance baissière lorsque les prévisions
d'inflations sont faibles et un relèvement si la banque centrale estime
que l'inflation s'écarte positivement de son niveau cible.
Graphique n0 4 : Dynamiques
comparées du taux pension et de l'écart d'inflation
anticipée
en % pour le taux directeur
14
12
10
4
8
0
6
2
11-93 14-93 13-94 12-95 11-96 14-96 13-97 12-98 11-99 14-99 13-00
12-01 11-02 14-02 13-03 12-04 11-05 14-05 13-06 12-07 11-08 14-08 13-09
TPE infgap4
40
0
35
30
25
20
5
-5
-10
15
10
en % pour l'inflation
Source : construction de l'auteur sur base de
données de la BCEAO et du FMI
Le graphique corrobore la vigilance de la BCEAO pour ce qui
est du maintien de la stabilité des prix. L'inflation et le taux
directeur ont pratiquement des mouvements en phase de 1993
jusqu'approximativement en 2007. A partir de cette date, les dynamiques de ces
deux variables ne sont plus communes, la banque centrale ayant jugé
nécessaire de calibrer le taux directeur entre 4% et 4,75%, dans le
souci de juguler les effets de la crise alimentaire et financière de ces
dernières années. Le déphasage qui se lit souvent dans les
évolutions de ces deux variables peut s'expliquer par le fait que la
banque centrale en plus du taux directeur, utilise aussi les réserves
obligatoires et la programmation monétaire pour stabiliser l'inflation
dans la zone.
Règles de politique monétaire : essai
de modélisation pour la BCEAO DEA/Master de recherche
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