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Règles de politique monétaire: essai de modélisation pour la BCEAO ( banque centrale des états de l'Afrique de l'ouest )

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par Teega-wende Hervé ZEIDA
Université Ouaga II - Burkina Faso - Diplôme d'études approfondies (DEA)/ Master de recherche option: macroéconomie appliquée 2011
  

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II.2 Aspects empiriques

L'estimation empirique des règles de politique monétaire ou fonctions de réaction a trouvé une large attention dans la sphère des économistes que des praticiens de la politique monétaire. Les conclusions quant à leur robustesse et leur pouvoir descriptif, dépendent pour beaucoup du modèle de l'économie et des méthodes économétriques d'estimation considérés.

? Dans les pays développés

La littérature abonde fortement dans les pays développés tellement les auteurs dans leurs diversités théoriques ont testé ces réactions des banques centrales dans toutes les facettes

31 Cette perspective est la restriction que la banque centrale s'impose de ne considérer que des règles qui ne dépendent pas de la date où l'engagement est pris.

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possibles. McCallum (1987) sur base d'estimation sur données américaines prétend que sa règle de revenu nominal aurait permis de réduire la variabilité du revenu nominal sur la période 1954-1985 et maintenir l'inflation à zéro. Cette vision est soutenue par Durand et Payelle (1998). Ces derniers ont en effet simulé les données françaises avec une modélisation Vecteur Auto Régressif (VAR) entre 1978 et 1996 et concluent que cette règle aurait donné des résultats plus probants que ceux de la politique monétaire effectivement menée.

Taylor (1993) montre que sa règle initiale décrit assez bien la politique monétaire de la Fed pendant la période 1987-1992, avec des coefficients de réaction à l'écart d'inflation et à l'output gap de 0,5. Utilisant des simulations dynamiques stochastiques sur plusieurs pays de l'euro système, les Etats-Unis et le Japon, Taylor(1999) montre que les règles simples (à la Taylor) sont robustes et efficaces que les règles optimales. Même s'il reconnait que les règles de prévisions d'inflation à la Rudebusch and Svensson (1999) présentent l'avantage d'incorporer d'autres variables pertinentes pour la prévision dans un horizon temporel bien donné.

Pour la zone Euro, Verdelhand (1999) estime une règle simple de Taylor avec la méthode des généralisée des moments. Il trouve un coefficient de 1.3 pour l'inflation et 0,6 pour la production. Ces coefficients sont assez proches de ceux de Taylor (1993). Dans le même ordre d'idées, Sibi (2001) estime cette règle avec la même méthode en faisant varier la technique d'évaluation de la production potentielle. Il utilise pour se faire le gap par ajustement linéaire, le gap à tendance quadratique et le gap par filtre d'Hodrick-Prescott. Il ressort de ses estimations que les deux dernières méthodes retracent assez bien la politique de la BCE au sens de Taylor.

Toujours pour la zone euro, Mesonnier et Renne (2004) à la recherche d'une règle monétaire robuste estiment premièrement une règle forward-looking sur la période 1979-2003 par la MGM en supposant la stationnarité des séries utilisées, ensuite cette hypothèse est levée pour conduire l'estimation sur la période 1985-2003. L'utilisation du filtre de Kalman a été l'innovation dans cette étude empirique. Toutefois, ces auteurs concluent que la non stationnarité apparente n'a pas modifié conséquemment la robustesse de la règle trouvée en première estimation.

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Clarida et al. (1998,1999, 2000) en utilisant une règle de Taylor version forward-looking trouvent une adéquation avec les politiques monétaires menées par la Fed et les banques centrales européennes pour stabiliser l'inflation. Aussi, Clarida (2001) recourt à un modèle structurel VAR pour identifier d'autres éléments pertinents que les banques centrales pourraient intégrer dans leur règle forward-looking. Il identifie le taux de change comme un élément clé. Cette approche pourrait d'après lui permettre de décomposer les effets des chocs pour chacun des pays formant une union monétaire.

Jondeau et al. (2004), dans leurs exercices de détermination de la fonction de réaction de la Fed par la Méthode des Moments Généralisée (MMG) et celle du Maximum de Vraisemblance (MV), ont montré que sur la période 1987-2000 les évaluations des paramètres sont stables et que la réaction à l'inflation prévue est assez proche de la valeur 1,5 de Taylor (1993) car comprise entre 1,58 et 1,90.

? Dans les pays émergents

Parsley et Popper (2009) proposent une application à une petite économie ouverte telle que la Corée du Sud. En effet, ils définissent un modèle basé sur la nouvelle courbe de Phillips keynésienne et une courbe IS avec anticipation. Leur objectif est de déterminer si l'autorité monétaire cible le taux de change ou simplement si elle répond au taux de change dans le but d'atteindre ses autres objectifs. Les résultats (par la MMG) de leur modèle forward-looking sur la période janvier 1999 - Avril 2008, avec la prise en compte du taux de change révèlent que la banque de Corée suit une politique de ciblage d'inflation et le taux de change apparait comme un objectif indirect. Le taux de change est apparu comme une variable ayant une influence sur l'output et l'inflation

Une application pour le cas de la Turquie a été faite par Ertugrul et al. (2005). Ces auteurs sur la base de données hebdomadaires couvrant la période 1997-2002 mettent au point une fonction de réaction type Taylor en tenant compte des contraintes du programme stabilisation par le change imposé par le FMI à la suite de la crise de change qu'a connue ce pays. Ils prennent en compte le taux de change nominal, l'agrégat monétaire M2, les réserves de change, le prix des actifs financiers, les dépôts en devises et le stock de la dette publique. Il ressort de leurs estimations (doubles moindres carrés et moments généralisés) que l'attention des autorités monétaires a été beaucoup plus focalisée sur les variables relatives à l'équilibre

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externe (taux de change, dépôts en devises) au détriment de celles relatives à l'équilibre interne. Une telle fonction de réaction est justifiable dans un contexte d'une Turquie en cure de sortie de crise financière (1999-2000).

? Dans les pays africains

Une faiblesse de la littérature empirique marque la sphère des recherches économiques appliquées. Une première évaluation d'une règle monétaire à la Taylor a été faite pour l'Ouganda. Abdalla et al.32 (2000) trouvent une divergence entre les taux pratiqués par la banque centrale d'Ouganda et ceux issus de la règle de Taylor. En effet, en considérant comme variables explicatives les gaps mensuels de production et d'inflation sur la période 1990 à 1998, en plus de la constante, ils obtiennent un coefficient de 0,11 pour le gap d'inflation, soit une valeur relativement faible. S'agissant du gap de production, son coefficient est négatif (-1,16), ce qui est contraire à la théorie. En réestimant l'équation avec la prise en compte de variables du secteur extérieur (la variation des réserves internationales, le taux de change réel), les résultats obtenus apparaissent relativement meilleurs, mais ils ne permettent pas une bonne description de l'historique des taux d'intérêt.

Aussi, Okot (2008) avec un modèle forward-looking aboutit à la même conclusion d'inadéquation avec faits de la période 1988-200633.

Rageh (2010) étudie le cas de la Banque Centrale d'Egypte sur la période 1997-2007, ses estimations par la méthode MMG révèlent que cette banque a usé beaucoup plus d'une politique discrétionnaire que d'une règle de taux d'intérêt (backward ou forward). Elle analyse aussi à travers un model VAR non structurel, les effets des chocs monétaires sur la production et sur l'inflation. Ses conclusions ne sont guerre satisfaisantes et elle attribue cela en partie au fait que durant la période d'étude, la banque centrale égyptienne a du géré des objectifs conflictuels notamment la stabilisation des prix, la stabilisation du taux de change et la promotion de la croissance.

En Afrique du Sud, Ruthira et Paya (2010) ne rejettent pas l'hypothèse de la pertinence des prix des actifs financiers dans la modulation du taux d'intérêt et aussi la non linéarité de cette règle de Taylor-augmentée sur la période 1986-2008.

32 Cités par Tenou (2002)

33 Cités par N'Guenang et al, op.cit.

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N'Guenang et al. (2009) estiment par la MMG une règle active qui pourrait crédibiliser la politique monétaire de la BEAC au sein de la zone CEMAC. Après une première estimation d'une règle forward de base (avec uniquement les gaps d'inflation et d'output), ils intègrent ensuite la croissance de la masse monétaire M2 et enfin, ils ajoutent en plus de M2 le différentiel d'inflation avec le principal partenaire économique qu'est la France. De ces trois modèles, il ressort que le dernier est beaucoup plus concluant en considération de l'erreur absolue moyenne et du coefficient de Theil34.

Pour la zone UEMOA, une des rares applications de la règle simple de Taylor a été faite par Tenou (2002). Il adapte la règle initiale de Taylor en y ajoutant des variables comme le taux d'intérêt retardé d'une période , le différentiel d'inflation et le différentiel de taux d'intérêt entre la zone et la France ; et procède ensuite à des estimations sur données annuelles (19701999) et sur données trimestrielles (1991-1999) par la méthode des moindres carrés ordinaires. Ses résultats d'estimations lui permettent de conclurent que la règle estimée sur données annuelles retrace assez bien l'historique du taux du marché monétaire (surtout sur la période 1987-1999). L'estimation sur données trimestrielles donne aussi des résultats satisfaisants. Le coefficient de lissage du taux d'intérêt montre que la BCEAO fixe ses taux en fonction de ses taux passés : le coefficient du taux d'intérêt retardé est de 0,82. Ce coefficient vaut 0,76 sur la base des données trimestrielles. Il trouve aussi que le taux d'intérêt du marché monétaire est relativement plus sensible à l'écart de production qu'au différentiel du taux d'intérêt. De façon générale, la BCEAO semble tenir compte des variables économiques fondamentales que sont l'inflation et l'écart de production dans la fixation de ses taux d'intérêt. La prise en compte des différentiels d'inflation et de taux d'intérêt a certes un sens économique car traduisant la réalité des relations économiques avec la France et/ou la zone euro, mais cela pourrait conduire a une non robustesse des estimateurs des MCO. En effet, la règle prend déjà en compte l'inflation et le taux d'intérêt retardé comme variables explicatives, or les différentiels résultent de différences entre niveaux d'inflation (et entre niveaux de taux d'intérêt). Un problème de multicolinéarité se poserait ainsi.

Le dispositif du ciblage d'inflation semble conduire à une maitrise de plus en plus accrue de l'inflation par les pays l'ayant adopté. Ainsi, la Nouvelle-Zélande, un des premiers pays a

avoir adopté ce dispositif en 1990, est passée de 3,3% d'inflation à l'adoption à 0,8% en 2009

34Le coefficient d'inégalité de Theil ou le critère U de Theil est utilisé pour juger de la qualité de la méthode de prévision et est tel que 0= U= 1. Plus U est proche de 0, plus les prévisions sont assez bonnes.

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avec une cible de [1 ; 3]. Le tableau n03 indique la tendance pour certains pays comme le Canada, le Royaume-Uni, l'Australie.

Tableau n03 : Bilan du ciblage d'inflation dans quelques pays industrialisés

Pays

Date d'adoption du
ciblage

Taux d'inflation

cible

A l'adoption

En 2009

Nouvelle-Zélande

1990

[1 ; 3]

3.3

0.8

Canada

1991

[1 ; 3]

6.9

0.3

Royaume-Unis

1992

[1 ; 3]

4.0

2.2

Suède

1993

[1 ; 3]

1.8

-0.3

Australie

1993

[2 ; 3]

2.0

1.9

Source : finance et développement, mars 2010

Ce relatif succès de ces pays a incité certains pays émergents et en développement à s'inscrire dans le dispositif de ciblage d'inflation. Ainsi, La Corée du Sud (1998), le Brésil (1999), la Colombie (2000) et la Thaïlande (2000) entre autres pratiquent une politique de ciblage de l'inflation avec plus ou moins de succès. En Afrique subsaharienne, la politique de ciblage d'inflation a été adoptée par l'Afrique du Sud (en 2000) et le Ghana (2007).

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"Ceux qui vivent sont ceux qui luttent"   Victor Hugo