La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires )( Télécharger le fichier original )par Emmanuel TSAGMO TAMEKO Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2011 |
B- L'altération des prérogatives contractuellesUn ensemble de prérogatives que la loi ou la volonté des parties attache à la qualité de créancier conférée par la convention, rentre dans les attributs contractuels. En tendant à la défense des intérêts du cocontractant, ces prérogatives contreviennent à l'objectif de maintien de la relation contractuelle. Le bailleur, en tant que cocontractant et créancier au même titre que les créanciers dans la masse, est concerné par un certain nombre de restrictions les concernant75(*). Sa marge de manoeuvre est extrêmement réduite. « Il ne peut faire valoir la clause contractuelle qui lui permettait de se prémunir contre les inconvénients de la cessation des paiements, encore moins invoquer la résolution unilatérale que lui offre le droit commun des contrats »76(*). Le bailleur est contraint de remplir ses obligations, après l'ouverture de la procédure, malgré l'inexécution par le débiteur d'engagements antérieurs au jugement d'ouverture77(*). En outre, il se voit imposer un nouveau cocontractant : dès l'autorisation par le tribunal de la conclusion d'un contrat de location-gérance, le bailleur est appelé à accueillir le locataire-gérant comme nouveau locataire de ses immeubles. Il ne pourra retrouver son cocontractant initial, le débiteur en difficulté, qu'à la fin de la location. S'il est vrai que le bailleur sera considéré et traité comme les créanciers contre la masse en ce qui concerne les dettes nées régulièrement, après le jugement d'ouverture de la continuation de l'activité par le débiteur ou le syndic, il n'en est pas de même des dettes qui seront nées de l'exploitation du locataire-gérant. Celles-ci restent exclusivement à la charge de ce dernier sans solidarité avec le propriétaire du fonds, débiteur78(*). La manifestation la plus brutale et la plus générale des restrictions des droits du bailleur réside dans la paralysie de son action en règlement des loyers. Il en est de même de son action en résolution du contrat de bail pour défaut de paiement desdits loyers. Dans le cadre de la location-gérance de l'entreprise en difficulté, si le locataire-gérant s'avère insolvable peu après la conclusion du contrat, le bailleur n'aura plus aucun recours à l'encontre de son ancien locataire. Le droit des procédures collectives, droit d'ordre public, démontre par ce fait sa primauté sur le droit de bail commercial qui revêt aussi un caractère d'ordre public. La raison est la suivante : « La réglementation du bail commercial vise la protection des intérêts d'une partie au contrat alors qu'il semble que le droit des procédures collectives poursuit des fins apparemment supérieures : la protection de l'entreprise et la sauvegarde des intérêts des créanciers »79(*). Le bail n'est pas le seul contrat indispensable au redressement de l'entreprise en difficulté. Il existe aussi les contrats de fournitures et de louage d'objets mobiliers. * 75 Que ce soit l'absence de déchéance de terme, l'arrêt des poursuites individuelles et du cours des intérêts, l'interdiction des paiements antérieurs, la paralysie de l'exception d'inexécution, toutes ces dispositions touchent le bailleur comme les autres créanciers de l'entreprise. * 76 Cf. KEUGONG WATCHO (R.), op. cit., p. 143. * 77 Ces engagements n'ouvrant droit au profit du bailleur qu'après la déclaration au passif, il sera astreint comme les autres créanciers antérieurs à la déclaration de créances relatives aux échéances antérieures au jugement d'ouverture. * 78 Article 117 de l'AUPCAP. * 79 Cf. KEUGONG WATCHO (R.), op. cit., p. 147. |
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