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La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires )

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par Emmanuel TSAGMO TAMEKO
Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2011
  

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CHAPITRE II : LES RECOURS DES CRÉANCIERS DE

L'ENTREPRISE EN DIFFICULTÉ MISE EN LOCATION-GÉRANCE

Pour  se prémunir contre la défaillance du gérant et par conséquent « éviter que la location-gérance ne soit l'occasion pour des repreneurs malhonnêtes de dépouiller l'entreprise en difficulté de ses éléments productifs »195(*), les auteurs de l'Acte uniforme relatif aux procédures collectives d'apurement du passif l'ont subordonné à un régime restrictif. Le dispositif le plus protecteur, parmi tant d'autres, est l'article 115, al. 3, de l'AUPCAP aux termes duquel, la juridiction compétente doit refuser son autorisation si elle n'estime pas suffisantes les garanties offertes par le locataire-gérant ou si celui-ci ne présente pas une indépendance suffisante à l'égard du débiteur.

Ces garanties peuvent être réelles ou personnelles196(*). Parmi les garanties personnelles, figure en bonne place la caution. Elle constitue avec le gérant libre, les débiteurs de la redevance contre lesquels les créanciers doivent faire recours en cas d'insolvabilité de celui-ci (Section I).

Par ailleurs, il ressort des dispositions de l'article 116 de l'AUPCAP que le contrôleur, le syndic, le représentant du Ministère Public et le Juge-commissaire disposent d'énormes pouvoirs lorsque l'entreprise en difficulté est mise en location-gérance. Or, qui dit pouvoir, dit responsabilité car comme le faisait comprendre le professeur Maurice KAMTO, « Il n'y a pas de pouvoir sans responsabilité : ce sont deux faces d'une même médaille »197(*). C'est dire qu'en cas de défaillance, ces organes peuvent, tout comme le gérant libre, voir leur responsabilité engagée (Section II).

Section I : Le recours contre les débiteurs de la redevance

En cas de défaillance de gestion et par conséquent de l'insolvabilité prouvée du locataire-gérant198(*), les créanciers, à travers le syndic, exerceront leur recours contre d'une part la caution s'il en a eu (Paragraphe I), et d'autre part contre le locataire-gérant (Paragraphe II).

Paragraphe 2- Le recours contre la caution

Pour garantir l'exécution de ses obligations et la réparation des dégâts qu'il pourrait causer pendant la location-gérance, le bailleur exige le plus souvent du gérant libre le versement d'une « caution »199(*). Les mots caution ou cautionnement sont souvent utilisés dans le langage courant pour désigner un dépôt de garantie, c'est-à-dire une certaine somme qu'une personne dépose entre les mains de son contractant en garantie d'une éventuelle responsabilité200(*). Juridiquement, le mécanisme constitue un dispositif sécuritaire pour le débiteur bailleur de l'entreprise en difficulté mise en location en ce sens qu'il permet de récupérer les redevances non payées par le locataire-gérant insolvable (A) même au cas où la caution viendrait à décéder (B).

A- Le paiement de la dette par la caution

La portée de l'obligation au paiement de la dette du locataire-gérant par la caution diffère selon que le cautionnement est solidaire (1) ou simple (2).

1- Le cautionnement solidaire

L'une des caractéristiques fondamentales du cautionnement réside dans le principe de la solidarité consacré par le législateur OHADA pour renforcer la garantie représentée par le cautionnement. C'est ce qui ressort de l'article 10 de l'Acte uniforme OHADA sur les sûretés qui dispose que la caution est réputée solidaire, sauf stipulation ou disposition contraire expresse du contrat ou de la loi201(*). La solidarité, loin de changer la nature du cautionnement, modifie seulement certains de ses effets202(*). Schématiquement, la caution solidaire est celle qui renonce à exiger que le débiteur principal soit poursuivi avant elle et, en cas de pluralité de cautions, à ne pas imposer au créancier de diviser ses poursuites.

Les articles 15 de l'ancien AUS et 26 du nouvel AUS explicitent les conséquences de ce principe de la solidarité lorsqu'ils déclarent que « la caution solidaire est tenue de l'exécution de l'obligation principale dans les mêmes conditions qu'un débiteur solidaire ». En d'autres termes, ce principe de la solidarité permet au débiteur bailleur, assisté du syndic, de poursuivre, en cas de besoin, la caution en paiement de la totalité de la dette du locataire-gérant. La solidarité permet de ce fait au débiteur bailleur d'accroître l'efficacité de la garantie car, en cas de non paiement, celui-ci n'aura ni à multiplier les poursuites, ni à supporter l'insolvabilité de l'un de ses débiteurs203(*). La caution poursuivie est tenue d'assurer le paiement intégral de la dette aussi bien le principal que les accessoires. Elle est tenue de payer une somme inférieure ou égale au montant de la dette due par le locataire-gérant mais dans les termes de son engagement initial204(*), quitte à elle de se retourner contre le locataire-gérant ou les autres cautions pour ce qu'elle a payée205(*) si elle ne l'avait pas fait avant206(*).

Qu'en est-il du cautionnement simple ?

* 195 Cf. JEANTIN (M.) et LE CANNU (P.), op. cit., p. 415.

* 196 Les garanties réelles ont pour but l'affectation d'un bien à la garantie de la redevance. Elles consistent dans le droit du loueur de se faire payer, par préférence, sur le prix de réalisation du bien meuble ou immeuble à la garantie de ses obligations par le locataire-gérant. Les garanties personnelles permettent quant à elles au locataire-gérant d'offrir un second débiteur pour réduire les risques de sa défaillance, de son insolvabilité. Leur simplicité de constitution, leur souplesse de réalisation et leur faible coût de constitution jouent en faveur de leur grande utilisation. Cf. KALIEU ELONGO (Y.), Les sûretés personnelles dans l'espace OHADA, Collection Vademecum, PUA, 2006, p. 7 ; MARTOR (B.), « Comparaison de deux sûretés personnelles : le cautionnement et la lettre de garantie », in JCP, Cahiers de Droit de l'Entreprise n° 5, 2004, p. 21.

* 197 KAMTO (M.), préface de l'ouvrage des magistrats EYIKE-VIEUX et YOUSSOUFA (B.), Le contentieux pénal de la presse et de la communication audiovisuelle au Cameroun, PUA, Yaoundé, octobre 2004.

* 198 La défaillance prouvée du débiteur principal est un préalable à la poursuite de la caution. D'après l'article 13 de l'AUS, la caution n'est tenue de payer la dette qu'en cas de non paiement du débiteur. C'est la conséquence du caractère accessoire et subsidiaire du contrat de cautionnement. La constatation de cette défaillance résulte d'une mise en demeure de payer restée sans effet. La mise en demeure permet de constater officiellement et formellement, le défaut d'exécution de son obligation par le débiteur. En même temps, le débiteur bailleur, assisté du syndic, exprime par là sa volonté d'obtenir exécution. De ce fait, elle a été considérée comme une sommation, le dernier avertissement avant que ne soit mise en oeuvre une quelconque sanction. Lire à ce sujet KALIEU ELONGO (Y.), op. cit., p. 36.

* 199 Cf. NGUEBOU TOUKAM, op. cit., p. 178.

* 200 Cf. KALIEU ELONGO (Y.), op. cit., 2006, p. 9.

* 201 Article 20 du nouvel AUS.

* 202 Cf. KALIEU ELONGO (Y.), op. cit., p. 15.

* 203 Ibidem.

* 204 V. dans ce sens KALIEU (Y.), « La mention manuscrite dans le cautionnement OHADA », in Juridis périodique, juillet-août-septembre 2003, p. 109 et s. ; www.ohada.com, Ohadata D-03-02.

* 205 Article 21 de l'AUS et 32 du nouvel AUS.

* 206 Article 24 de l'AUS et 35 du nouvel AUS.

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