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La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires )

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par Emmanuel TSAGMO TAMEKO
Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2011
  

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Paragraphe 2- Le désintéressement des créanciers opéré par le biais de la compensation

On entend par compensation, un mécanisme d'extinction simultanée de deux obligations, de même nature, existant entre deux personnes simultanément créancière et débitrice l'une de l'autre. Outre l'extinction des obligations réciproques, la compensation a une véritable fonction de garantie permettant à chaque partie d'opposer à l'autre l'exception de compensation afin de s'exonérer de son paiement.

Traditionnellement, pour que la compensation puisse jouer, il n'est pas nécessaire que les deux dettes soient connexes c'est-à-dire qu'elles soient nées d'un même rapport de droit. Même si elles ont des causes différentes, elles peuvent se compenser. Ce principe de droit commun des obligations trouve-t-il application dans les procédures collectives ? La réponse est négative. Que ce soit en période suspecte169(*) ou après le jugement d'ouverture, la compensation n'est possible qu'en ce qui concerne les dettes ayant un lien de connexité170(*). Les relations entre locataire-gérant et débiteur bailleur n'échappent nullement à cette règle dans le cadre des procédures collectives d'apurement du passif. Aussi convient-il d'envisager ses diverses modalités (A) et ses conditions de mise en oeuvre (B) ?

A- Les modalités de la compensation

Pour être compensables, les dettes réciproques existant entre les deux parties doivent être connexes. La question de la connexité évoque une idée d'interdépendance, de lien étroit qui unit les deux obligations réciproques existant entre deux personnes. Elle peut s'opérer de deux manières : d'abord sur la base d'une connexité naturelle, celle qui naît de la commune origine des obligations en présence, puis sur la base d'une connexité conventionnelle, celle qui résulte de leur commune affectation par la volonté des parties.

La connexité naturelle a toujours trouvé son terrain d'élection dans les contrats synallagmatiques171(*). Mais, au fil des temps, elle s'est beaucoup élargie. Elle a été admise d'abord en présence de dettes provenant de la bonne exécution du contrat172(*). Puis elle a été reconnue en présence de dettes provenant tant de la bonne que de la mauvaise exécution du contrat. Cette solution s'applique aux dettes de restitution et de dommages intérêts qui naissent entre les parties de la résolution ou de la résiliation de l'accord contractuel. C'est une hypothèse de ce genre que vise l'article 109, al. 2, in fine, de l'AUPCAP.

La jurisprudence ne s'en est pas tenue là. Elle a déclaré connexes et donc compensables deux obligations de nature différente : la première née d'un contrat, la seconde née d'un délit commis dans l'exécution de ce contrat173(*). Et pour couronner le tout, la Cour de cassation française n'a pas hésité à accepter la connexité entre deux dettes apparues respectivement avant et après le jugement d'ouverture de la procédure collective174(*). En plus de la connexité naturelle au premier degré, la jurisprudence a également fait place à une connexité naturelle au second degré. Elle a admis à se compenser des dettes procédant de contrats distincts mais économiquement liés175(*). La connexité de la dette entre le locataire-gérant et le débiteur bailleur se situerait dans ce sillage.

En effet, tant l'Acte uniforme OHADA relatif au droit commercial général que celui portant sur les procédures collectives sont muets en ce qui concerne les conditions à remplir pour prendre en location-gérance une entreprise. La voie est ainsi ouverte à toute personne physique ou morale, même aux créanciers dans la masse, à condition qu'elle ne soit ni entreprenante, ni frappée d'aucune interdiction, incapacité ou incompatibilité d'exercer le commerce176(*). Ceci dit, tant un tiers à la procédure collective qu'un créancier dans la masse peut prendre en location-gérance l'entreprise en difficulté. Lorsque le locataire-gérant est alors l'un des créanciers dans la masse, ou l'est devenu par la force des choses177(*), n'est-il pas possible pour lui d'invoquer la compensation pour éteindre son obligation envers le débiteur bailleur ? Rien ne l'interdit surtout lorsque les contrats en présence sont réunis, dans la commune intention des parties, en une opération économique globale malgré la pluralité d'actes instrumentaires178(*).

La compensation entre le locataire-gérant et le débiteur bailleur implique non seulement que les dettes soient connexes mais qu'elles soient aussi compensables.

* 169 C'est-à-dire la période qui va de la cessation des paiements jusqu'au jour du prononcé du jugement d'ouverture du redressement judiciaire ou de la liquidation de bien (article 67, In finé, de l'AUPCAP).

* 170 Il y a connexité entre deux dettes lorsqu'elles sont nées d'un même rapport de droit. L'article 68-4° de l'Acte uniforme OHADA relatif aux procédures collectives déclare inopposable de droit, s'il est fait pendant la période suspecte, « tout paiement de dettes échues, fait autrement qu'en espèces, effet de commerce, virement, prélèvement, carte de paiement ou de crédit ou compensation légale, judiciaire ou conventionnelle de dettes ayant un lien de connexité entre elles ou tout autre mode normal de paiement ».

De plus, il ressort des dispositions des articles 68, 102, 103 et 109 de l'AUPCAP, qu'après le jugement d'ouverture, la compensation doit être largement admise dès qu'il y a connexité.

* 171 C'est parce que les obligations réciproques prennent leur source dans un tel contrat qu'elles sont considérées comme connexes.

* 172 On cite toujours l'exemple de l'assureur qui peut compenser l'indemnité d'assurance dont il est tenu avec les primes que l'assuré reste à lui devoir (Civ. 25 mai 1943, D.C. 1944. 25 ; note A. Besson ; Com. 15 janv. 1968, Bull. civ. IV, n° 20, p. 16; Civ. 13 fèvrier 1979, Bull. civ. 1, n° 58, p. 48).

* 173 Com. 2 juillet 1973, D. 1974. 427, note J. Ghestin.

* 174 Com. 10 mars 1987, Bull. civ. IV, n° 66, p. 50.

* 175 Com. 9 nov. 1982, Bull. civ. Iv, n° 343, p. 290; D. 1983. 466, note A. Honorat; Rev. trim. Dr. Civ. 1983. 356, obs. Ph. Rémy.

* 176 Articles 6 à 12 et 138, al.3, in fine du nouvel AUDCG ; 194 à 215 de l'AUPCAP.

* 177 Par héritage ou par délégation.

* 178 On entend par acte instrumentaire, un écrit destiné à prouver l'existence d'une situation juridique, cette situation pouvant résulter d'un acte ou d'un fait juridique.

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"Qui vit sans folie n'est pas si sage qu'il croit."   La Rochefoucault