La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires )( Télécharger le fichier original )par Emmanuel TSAGMO TAMEKO Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2011 |
2- La question de la révision de la redevance
Il se pose la question de savoir si après la signature du contrat, l'une des parties peut demander la révision du loyer. La mise en location-gérance ayant pour objectif le sauvetage et l'apurement du passif de l'entreprise en difficulté, l'on se demande qui des parties au contrat est fondé à demander la révision de la redevance ? Le locataire-gérant pour la réduction ou le loueur pour la hausse ? Le droit OHADA est muet sur la question. Comme tout loyer, il est sans doute possible de réviser le prix de la redevance de l'entreprise en difficulté mise en location-gérance. Les parties peuvent prévoir dans le contrat que le prix sera modifié en cas de variation de l'indice166(*) qu'elles auront préalablement choisi. L'indice à choisir doit nécessairement être en relation directe avec l'activité exercée dans le fonds. On prendra, par exemple, en considération le dernier indice connu à la veille de chaque trimestre. Á ce moment, un compte sera dressé par le syndic : si ce compte fait apparaître un solde en faveur de ce dernier, la somme correspondante sera immédiatement exigible ; si le solde est en faveur du locataire-gérant, il s'imputera sur la mensualité suivante. Cette analyse atténue l'idée selon laquelle, obnubilé par la protection de l'entreprise et des créanciers, le législateur OHADA aurait, semble-t-il, sacrifié le locataire-gérant qui participe pourtant à l'opération de sauvetage de l'entreprise167(*). Tout au long de son exploitation, le gérant libre se doit de payer régulièrement la redevance pour éviter une éventuelle condamnation au paiement des intérêts moratoires. En effet, les parties peuvent prévoir dans le contrat qu'en cas de non-paiement à une ou plusieurs échéances, les sommes produiront de plein droit intérêt au taux légal, à compter du jour où elles seront dues, sans qu'il soit besoin d'une mise en demeure168(*). Le paiement de la redevance constitue le mode normal d'extinction de son obligation par le gérant libre. Toutefois l'on se demande s'il peut bénéficier d'autres modes d'extinction de l'obligation à l'instar de la compensation. * 166 Il est défini comme le chiffre utilisé en économie pour mesurer les variations d'une quantité. Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit., p. 352. * 167 V. dans ce sens ALILI (S. M.), op. cit., p. 4 pour qui, « le locataire-gérant à qui est confié la gestion d'une entreprise en redressement judiciaire a en principe deux ans pour s'accommoder à l'entreprise et pour opérer les investissements propices à la rentabilité de l'affaire. Il doit donc pouvoir jouir au terme du contrat du fruit de ses efforts. Or il se trouve que ce contrat est conclu lorsque le loueur est en redressement judiciaire. Dans ce cas, il est généralement prévu que la location-gérance est conclue pour la durée du redressement judiciaire. Or celui-ci prend généralement fin, soit du fait de sa conversion en liquidation des biens, soit en raison de l'homologation du concordat par le tribunal, soit par le paiement du passif. Cette dernière hypothèse est toutefois rare. Si le débiteur ne présente pas un concordat sérieux, ou ne l'obtient pas, ou si le concordat est annulé ou résolu, le redressement judiciaire est converti en liquidation des biens (Article 145 de l'AUPC). La location-gérance prend alors fin et le syndic est tenu de liquider l'entreprise pour procéder à la répartition entre les créanciers. Bien que des aménagements de courte durée soient possibles, il ne reste au repreneur, qui veut continuer d'exploiter qu'une solution : le rachat du fonds. Ce qui présente forcement un coût important qu'il ne s'attendait à investir de sitôt. Dans la seconde hypothèse, à savoir celle où le jugement d'homologation du concordat est passé en force de chose jugée, le débiteur recouvre la libre administration et disposition de ses biens. Á défaut d'accord préalable avec ce même débiteur, le locataire-gérant peut alors être évincé. On peut toutefois penser que cette possibilité d'éviction reste théorique puisque tout se fait sous le contrôle du tribunal. Ce qui n'exclut, malheureusement, pas les risques financiers qui pèsent sur le locataire-gérant. Á cet effet, le repreneur se doit d'évaluer les sommes qu'il pourrait être amené à perdre, tant en ce qui concerne par exemple le personnel repris que pour les fournisseurs de l'entreprise désormais méfiants ». * 168 Ces intérêts doivent être payés en même temps que le principal. |
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