La location-gérance de l'entreprise en difficulté en droit des procédures collectives OHADA (Organisation pour l'Harmonisation en Afrique du Droit des Affaires )( Télécharger le fichier original )par Emmanuel TSAGMO TAMEKO Université de Dschang Cameroun - Master en droit option : droit des affaires et de l'entreprise 2011 |
B- Les conditions de la compensation
Pour être compensables, les dettes en présence doivent satisfaire en principe aux conditions qu'énumèrent les articles 1289 et 1291 du Code Civil. Elles doivent être fongibles, réciproques, liquides et exigibles. La fongibilité ne soulève aucune difficulté. Il est admis de nos jours que des dettes libellés en monnaies différentes peuvent se compenser179(*). La réciprocité suppose que ces dettes existent en sens inverse entre le locataire-gérant et le débiteur bailleur, chacune de ces personnes étant à la fois créancière et débitrice. Le locataire-gérant est à la fois créancier dans la masse et débiteur de la redevance. Le bailleur, débiteur en difficulté et créancier assisté de la redevance. Quant à l'exigibilité, il faudra attendre l'échéance des différentes dettes en présence. S'agissant du locataire-gérant, créancier dans la masse, il faut noter que sa créance, bien qu'étant antérieure au jugement d'ouverture, ne deviendra exigible qu'à la déchéance du terme prévu car la décision d'ouverture ne rend exigibles les dettes non échues qu'en cas de liquidation de biens180(*). Si une telle exigence avait été étendue au redressement judiciaire, elle diminuerait les chances de sauvetage de l'entreprise en difficulté. En ce qui concerne la liquidité, on dit d'une créance qu'elle est liquide lorsque son montant est précisément connu, déterminé dans sa quotité, en d'autres termes, chiffré181(*). Elle est affectée, tout comme l'exigibilité, par les dispositions de l'Acte uniforme sur les procédures collectives relatives aux effets de la décision d'ouverture à l'égard des créanciers. S'il est vrai que les dettes non échues du débiteur ne sont pas exigibles en cas de redressement judiciaire, elles sont néanmoins chiffrées ou déterminées182(*). Ainsi, dès l'ouverture de la procédure collective, le montant de la créance du locataire-gérant est connu. Celle du débiteur bailleur l'est également car il s'agit de la redevance fixée dans le contrat. Dès lors que les dettes en présence seront connexes et compensables, le locataire-gérant, créancier dans la masse pourra bénéficier de la compensation sans qu'il y ait atteinte au principe de l'égalité qui demeure vivace dans les procédures collectives. Le professeur MESTRE ne résumait-il pas à ce titre parfaitement la situation en affirmant : « Le plus sûr moyen d'être payé, lorsqu'on est créancier d'un insolvable, reste bien d'être également son débiteur »183(*). En effet, comment pourrait-il comprendre d'avoir toujours à payer ce qu'il doit, sans jamais être admis à se soustraire à « la loi du malheur » ? * 179 Cf. MATTOUT (J-L.): « Le netting », in Rev. jur. Com., nov. 1989, n° special: La trésorerie et le financement des entreprises, p. 75. * 180 Article 76 de l'AUPCAP. * 181 Cf. GUILLIEN (R.) et VINCENT (J.), op. cit., p. 400. * 182 L'article 77 de l'AUPCAP énonce que « Quelle que soit la procédure, la décision d'ouverture arrête, à l'égard de la masse seulement, le cours des intérêts légaux et conventionnels, de tous intérêts et majorations de retard de toutes les créances, qu'elles soient ou non garanties par une sûreté. Toutefois, s'agissant d'intérêts résultant de contrats de prêt conclus pour une durée égale ou supérieure à un an ou de contrats assortis d'un paiement différé d'un an ou plus, le cours des intérêts se poursuit si la décision a ouvert une procédure de redressement judiciaire ». * 183 RTD Civ., 1988, p. 138. |
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