Impact de la politique fiscale sur le développement local des zones forestières en République Centrafricaine( Télécharger le fichier original )par Jude Alex César SONGUET Université de Bangui - Maà®trise en sciences économiques option économie rurale 2010 |
1.2- Préoccupation théorique.Plusieurs théories du développement régional, parmi lesquelles la théorie de la dépendance, du développement local (DL) et celle des interventionnistes par le bas, ont relativement proposé des cadres théoriques pour remplacer en tout ou en partie les anciennes théories du développement au développement local. Les différentes idées avancées par ces courants de pensées11(*) peuvent être centralisées autour d'une idée, celle du développement équilibré des régions. Elle met en évidence le lien entre les effets néfastes de la politique fiscale relatifs à la redistribution inégale des revenus sur la croissance et le DL. Les fortes inégalités des revenus sont préjudiciables à la croissance par taxation de l'investissement, par des activités de promotion à la croissance et peuvent faire apparaitre deux situations alternatives : soit une croissance forte qui produit une certaine égalisation des revenus primaires, soit, sous l'effet de chocs spécifiques et de politiques inadaptées favorisant une croissance faible, suivi d'un creusement des inégalités des revenus primaires. Cette politique vue sous le seul angle de l'équité de la politique fiscale (PF) se heurte à l'objectif d'accroissement du niveau d'activité, conditionne le redressement de la croissance. Elle dégage par la suite, une conséquence néfaste en faveur du développement local suite aux déséquilibres qu'elle engendre sur le plan national. L'inscription au niveau local de ces déséquilibres entraîne la dissociation entre les lieux de production, les lieux de vie et de consommation des populations défavorisées. En effet, les capacités de développement seront concentrées géographiquement tandis que certaines zones entrent dans un processus cumulatif de sous développement. L'enjeu est alors de renforcer la PF nationale, selon la vision économique d'un pays sur le plan de la fiscalité directe, comme au niveau de certaines taxes sur les transactions qui ne touchent pas de manière disproportionnée les pauvres. Puisque la PF a une répercussion directe sur la répartition des revenus entre les classes, les régions, les groupes sociaux et les sexes. Répercussion qu'il convient de garder à l'esprit lors de l'élaboration des politiques adéquates.
En résumé, pour que le développement local (DL) soit équilibré dans un environnement donné, les inégalités des revenus ne sont pas nécessairement souhaitables en termes de performance économique et de bien-être global. Car, elles sont susceptibles de reproduire au niveau local des dysfonctionnements, capables de constituer un avantage comparatif sur les autres régions et sur le territoire national. Par ailleurs, la voie du DL consiste donc à cultiver et à exploiter de manière équilibrée toutes les ressources telles que les facteurs internes aux collectivités, les apprentissages, les créativités et les liens de solidarité, qui constituent les éléments essentiels d'un territoire donné. Cependant, l'impact de la PF, qui désigne les effets attendus des différentes décisions prises par l'Etat en matière de mobilisation et de dépenses fiscales sur le processus du DL des ZF en RCA peut être mis en évidence par les différentes idées avancées par deux théories explicatives du développement liées au DL12(*). Principalement, celle développée par la théorie du développement de bas vers le haut, et celle du haut vers le bas, qui suppose que l'intervention de l'Etat est indispensable pour la planification et l'aménagement du territoire. La première cherche à promouvoir les capitaux internes à travers l'allocation optimale des ressources pour la maximisation du bien-être collectif en d'autre terme, la satisfaction des besoins de la population locale. Cette approche13(*) s'inscrit sur ce sujet par sa vision de libre initiative locale. Elle suppose la jouissance des acteurs locaux de leurs propres initiatives et des mécanismes fondamentaux aux régions tout en acceptant l'intervention de l'Etat que par ces subventions et non son rôle promoteur de croissance et du développement local. Par là, apparait le principe de subsidiarité, sous l'angle selon lequel les décisions en matière de la gestion de PF, sont assurées au niveau des petites collectivités locales.
Le principe de subsidiarité fait appel au concept de décentralisation, beaucoup plus appliqué ailleurs qu'en RCA. La politique de décentralisation cherche à promouvoir l'efficacité dans la prévision des services financiers, le développement durable, la croissance économique et la réduction de la pauvreté dans les petites collectivités locales en déclin. Bien qu'elle soit difficilement applicable en RCA, mais peut être à l'origine d'une croissance cumulative. En effet, à court terme, elle peut être défavorable à l'économie nationale du fait de la dépendance totale des sources de recettes fiscales de l'Etat dans les zones concernées. Mais, à long terme, elle est favorable au développement local de ces dernières et à l'économie nationale du fait des externalités positives imputées par celle-ci. Cette politique se renforce à travers une approche participative, impliquant toutes les couches socio-économiques locales dans la prise de décision afin d'asseoir l'équilibre et la démocratie dans la gestion des biens collectifs. Ces partages égalitaires feront naître une amélioration majeure qui entraine des économies d'échelles réalisées tant au niveau interne à la région et externe à l'Etat. D'ou le principe du développement de bas vers le haut14(*).
La théorie du développement de bas vers le haut confirme la nouvelle redéfinition de la régionalisation marquant le début des années 1990 selon laquelle, les instances locales reçoivent des budgets et des responsabilités nouvelles. Il s'agit de la réforme pilote pour les régions, de la réforme côté pour la santé et de formation pour la main d'oeuvre. Cette politique fait naître la volonté de la notion du DL à toutes les collectivités locales (et non seulement aux seules collectivités en déclin) à partir par exemple, des Fonds locaux d'investissement (FLI) mis à leur disposition. La stratégie avait permis également aux membres des Conseils régionaux de s'intéresser au développement local (DL) et à la création d'entreprises (ce qui ne va pas sans tensions entre les villes et les banlieues au sein d'autres communautés et entre les villes moyennes et les petites municipalités).
Sur ce point, le DL peut être considéré selon cette théorie comme une approche volontariste, axée sur un territoire restreint et une démarche partant du bas, privilégiant les ressources endogènes et faisant appel aux traditions industrielles locales. Cet appel nécessite la prise en compte des valeurs culturelles et le recours à des modalités coopératives possédant une référence politique et économique qui prend son essor dans les politiques de décentralisation. En somme, il convient de souligner aussi que, la décentralisation passe parfois par une politique de soutien au niveau local et régional, en mettant en place des conseils régionaux de développement (CRD), des divers conseils spécialisés (CR de Loisir, CR de Culture et CR de l'Environnement, etc.) et des Centres locaux de développement (CLD) dont le territoire est en gros celui des collectivités gérée à toute fois du haut vers le bas. La seconde théorie fait appel à la théorie keynésienne15(*) fondée sur le rôle de l'Etat comme garant du bien-être collectif et du développement. L'Etat par ses interventions régulatrices en matière de la gestion des politiques économiques, des ressources naturelles notamment fiscales, réduit les insuffisances au niveau des petites collectivités marginalisées et prévoit la demande intérieure globale en liquidité. L'Etat a donc pour mission de promouvoir la justice sociale. Il doit réduire les inégalités excessives engendrées par le dysfonctionnement des marchés d'une part. D'autre part, il doit fixer les objectifs nécessaires à la réduction de la pauvreté au niveau des petites collectivités locales en fonction des ressources internes à elles- mêmes. Le DL demande une offre plus pertinente d'éducation, de santé et d'infrastructures publiques nécessaires à la croissance et au développement aux zones défavorisées.
Pour Keynes16(*) , il s'agit principalement du pouvoir de l'Etat à travers la mise en oeuvre d'une politique de baisse du taux d'intérêt et d'une politique fiscale adéquate, des impôts directes qui peuvent obliger les financiers, les entrepreneurs et les hommes d'affaires à mettre au service des petites collectivités, à des conditions raisonnables , leurs intelligences, leurs caractères et leurs capacités professionnelles. L'importance économique de son intervention à travers la politique fiscale (PF) dans le processus du développement local (DL) selon la figure ci-après se justifie par, l'acceptation et le financement des initiatives en provenance de petites collectivités locales. Celle-ci permet d'accroitre l'environnement économique local à travers le déploiement et la fourniture des infrastructures favorables à la croissance, au développement et à l'élaboration de nouvelles stratégies du développement. Elle s'inscrit aussi favorablement à la promotion des petites et moyennes entreprises et à l'entrée des nouveaux partenaires au développement grâce à la mise en oeuvre des mesures fiscales moins frappantes. Figure 2 : Les formes d'intervention Economique de l'Etat. Développement des capacités locales. Fournir les Intrants dans le processus de croissance. Instrument dirige vers le développement et l'interaction avec l'investissement. C) Développer des partenaires d'affaires. D) Soutien de réseautage de PME. B) Elaboration Proactif de stratégies de développement Instrument dirigé vers les initiatives individuelles (logiques organisationnelles). A) Mesures fiscales (Politique fiscale). Source : Jacob et Ouellet (2000), Capital et Développement : Instruction par le haut vers le bas, économie et solidarité, p.36.
En RCA, les ressources fiscales constituent les premières sources ou moyens nécessaires pour le financement des dépenses publiques en faveur du développement local. Par conséquent, l'intervention de l'Etat est indispensable en vue d'orienter l'emploi et les différentes actions attribuées à son utilisation.
La question de décentralisation de la PF se présente non comme une entrave à l'intervention de l'Etat. Celle-ci dans le sens large du terme peut s'inscrire dans le cadre d'un souci pour l'Etat, de promouvoir le développement des petites collectivités ; et dans le sens stricte, de renforcer le dynamisme de fonctionnement administratif de celles-ci. Mais, elle ne peut exister en aucun cas, sans une base formelle. Cependant, la structure Administrative locale de ces zones défavorisées en RCA reste trop précaire et beaucoup plus fragilisée par la corruption et autres malversations qui entravent le processus du DL17(*). Ces réalités limitent les actions et les projets de développement dans ses régions et par souci du développement, l'Etat ne peut qu'intervenir afin d'éviter les catastrophes et de planifier ces actions dépendant de ces prérogatives.
En somme l'analyse de ces deux théories, permet de déduire un cadre de gestion globale du DL, par les liens entre l'Etat à travers la politique fiscale et les collectivités avec leurs environnements économiques. Cette relation est beaucoup plus influencée par la politique fiscale qui selon la conception de Prévost18(*) est de dimension institutionnelle de l'Etat schématisé de la manière suivante : Figure 3 : Relation entre politique fiscale et gestion communale du Développement Local. Nouvelle richesse, Création Répartition Patrimoine de la collectivité. Source : Prévost (2002), les dimensions et processus du développement des collectivités locales, cahier de référence n° 01-05, p.5. Il ressort de ce schéma que, la relation entre les collectivités locales et l'Etat, est souvent reconnue par la politique fiscale de l'Etat à travers, le financement des initiatives locales et la prise en charge des mécanismes de gestion du patrimoine collectif favorable à la création des richesses nouvelles. En effet, le processus d'accroissement du potentiel économique des petites collectivités est beaucoup plus favorisé par la PF à travers ces trois objectifs définis par Richard Musgrave. Cette relation spatiale, doit en premier lieu tenir compte de l'environnent économique et socioculturel local. Celle-ci permet également d'influencer le lien rétrospectif entre le patrimoine collectif et les nouvelles sources de richesse agissant sur les initiatives et les différents projets de développement qui caractérisent la gestion communale du DL. En général, cette étude fondée sur le dynamisme de la politique fiscale face au processus du développement local est portée sur les zones forestières centrafricaines. A cet effet, il est donc important de présenter ses aspects physiques avant toutes autres études éventuelles. II- Aspects physiques des zones forestières. La diversité régionale des zones forestières, exige en outre une description physique du milieu par une description de ces aspects géographiques, démographiques et socioéconomiques.
* 11JULIEN Pierre (1997), le développement régional, Comment multiplier les Beauce au Québec, L'IQRC, p.5. * 12 PREVOST Paul (2002) « Les dimensions et processus du développement des collectivités locales », Cahier de référence n° 01-05, p.18. * 13 Dr. BOKO Sylvain H. « Un aperçu sur la décentralisation fiscale et les Finances locales en Afrique francophone », 2008, Paris, p.36. * 14 PROULX Marc-Urbain (2003), « Capital et développement : instruction par le Haut ou par le Bas, économie et solidarité, », p.88. * 15 LAFONTAINE Daniel (2001), « Choix public et perspectives territoriales, Future anticipée », Gridecq, p.67-84. * 16 KEYNES Jean, (1936), « Théorie générale de l'emploi et de la monnaie », New York, p.390. * 17 DSRP2 (2O08-2O10), « Scénario sur le processus de décentralisation des petites collectivités locales », RCA, p.54. * 18 PREVOST Paul (2002), « Les dimensions et processus du développement des collectivités locales », Cahier de référence n° 01-05, p.8. |
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