Presse et responsabilité civile( Télécharger le fichier original )par Antoine Petit Université Toulouse 1 Capitole - Master 2 droit privé fondamental 2012 |
B. Le « magnétisme » de la loi du 29 juillet 1881
324 Le développement qui suit serait aussi valable pour l'atteinte à la présomption d'innocence, elle aussi très encline à se fondre en diffamation au sens de l'article 29 de la loi de 1881. Mais les exemples jurisprudentiels tendant à vouloir lui privilégier la loi sur la liberté de la presse sont moins explicites : V. à titre d'exemple, Civ. 1e, 28 juin 2007 : Bull. civ.I. n°247. 325 D. De Bellescize, L. Franceschini, op. cit. p.415. 326 TGI Paris, 29 janv. 2003 : LPA n°90, 6 mai 2003, note D. de Bellescize ; Civ. 1e, 30 mai 2006 : Revue Lamy dr. immat. 2006, n°541, p. 44 ; Civ. 1e, 31 mai 2007 : JCP G 2007. IV. 2396 ; CA Toulouse, 3e ch., 22 juill. 2004 : Comm. com. élect. 2005, comm. n°74. 327 C'est exactement l'idée qui ressort d'une décision des plus récente rendue le 4 avril 2012 par le Tribunal de grande instance de Paris ayant fait valoir qu'il est possible d'intenter une action sur le fondement de l'article 9 du Code civil seulement si la violation invoquée repose sur des éléments distincts d'un délit de presse : TGI Paris, 4 avr. 2012, Légipresse n°295, juin 2012, p. 352. 88 Alors bien entendu, pour se rassurer, on peut faire valoir - et c'est un moindre mal ! - que l'article 35 de la loi du 29 juillet 1881 prohibe l'exception de vérité quand l'imputation diffamatoire a trait à la vie privée328. Mais en quoi l'article 9 du Code civil devrait-il faire figure de droit commun par rapport à la loi de 1881329 ? Rappelons quand même que celui-ci possède une égale valeur normative que la loi sur la liberté de la presse. Dès lors, l'argument positiviste reposant sur le principe de hiérarchie des normes, s'il pouvait donner lieu à discussion pour ce qui est de l'application de l'article 1382 du Code civil à la liberté d'expression330, semble irrecevable en ce qui concerne l'article 9. Pour ces diverses raisons donc, il apparait que le magnétisme exercé par la loi sur la liberté de la presse à l'égard de l'article 9 procède plus d'une faveur accordée par la jurisprudence à la liberté d'expression que d'un raisonnement juridique imparable. Il convient toutefois de relativiser son impact. En effet, en dépit de l'empirisme du texte de 1881, les affaires dans lesquelles les organes de presse ont pu être condamnés pour atteinte à la vie privée et à la présomption d'innocence sur les fondements que constituent les articles 9 et 9-1 du Code civil ont continué d'être récurrentes. Ces articles sont donc encore bien au coeur des affaires que regroupe le contentieux de la presse. Cela est d'ailleurs d'autant plus vrai concernant l'article 9. Depuis sa consécration, il s'est révélé être la « matrice »331 de nouveaux attributs de la personnalité parmi lesquels figure un droit des plus essentiels en matière de presse, le droit à l'image. |
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