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Presse et responsabilité civile

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par Antoine Petit
Université Toulouse 1 Capitole - Master 2 droit privé fondamental 2012
  

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B. La présomption d'innocence, autre limite à l'information

143. Il est avant tout nécessaire de souligner l'importance du droit affirmé par l'article 91 du Code civil disposant que « chacun a droit au respect de la présomption

305 Civ. 1e, 23 oct. 1990 : Bull. civ.n°222.

306 D. De Bellescize, L. Franceschini, Droit de la communication, PUF, 2e éd., 2011, p. 418.

307 TGI Paris, 4 nov. 1965 : Gaz. Pal. 66. I. 37.

308 Là encore, la jurisprudence procède au cas par cas. Une partie de la doctrine a défendu la théorie du consentement tacite (V. notamment : R. Badinter, « Le droit au respect de la vie privée », JCP 1968, I. 2136 ; D. Becourt, Le droit de la personne sur son image, LGDJ, Paris, 1969) et fût ponctuellement suivie par la jurisprudence (V. par exemple : CA Versailles, 15 janv. 2009 : Légipresse 2009, n°259. I. p. 38 ; TGI Nanterre, 6 avr. 1995 : Gaz. Pal. 1996. I. 213).

309 Cette règle dite de la spécialité du consentement repose sur le principe d'indisponibilité des droits et attributs de la personnalité. On ne peut consentir à l'utilisation illimitée de ses attributs de la personnalité : sur cette question - encore une fois à nuancer selon les espèces - voir : B. Beignier, B. de Lamy et E. Dreyer, Traité de droit de la presse et des médias, Lexisnexis, 1ère éd., 2009, p. 938 et s.

310 Il a été jugé qu'une personne s'estimant lésée du fait de la publication d'une fiction inspirée d'éléments de sa vie privée ne peut se prévaloir du droit à réparation qu'offre l'article 9 du Code civil que ci cette dernière est identifiable avec certitude par les lecteurs : TGI Paris, 3avr. 2006 : Légipresse 2006, n°231. I. p. 72.

311 À titre d'exemple, le fils de Carla Bruni a été débouté en sa demande de réparation de l'atteinte portée à son image car la photographie litigieuse ne le faisait qu'apparaître de dos : TGI Nanterre, ord. réf., 25 sept. 2008 : Légipresse 2008, n°255. I. p. 134.

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d'innocence »312. Ce principe a été inscrit dans le Code civil en vue de permettre à toute personne mise en cause de pouvoir faire respecter son innocence hors de le la sphère judiciaire. Par conséquent, ce texte s'adresse moins aux organes de la procédure pénale - qui respectent déjà ce principe en vertu de l'article 9 de la DDHC - qu'aux organes de presse qui très souvent, se passionnent pour les épisodes judiciaires313.

144. Il faut bien comprendre, que s'il est un principe permettant de distinguer la démocratie du despotisme, c'est bien la présomption d'innocence. En effet, la démocratie veut que toute personne puisse être considérée comme innocente du moment qu'aucune déclaration définitive de culpabilité ne permet d'en juger autrement. Dans un État despotique au contraire, l'accusé sera très souvent d'ores et déjà considéré comme coupable sans qu'aucun jugement ne soit encore rendu314.

Il serait vain d'évoquer toutes les espèces où la présomption d'innocence a pu être allègrement violée par la presse315. On peut toutefois se remémorer les tristement célèbres affaires Dreyfus et Outreau, particulièrement révélatrices des désastres pouvant provoquer le non respect d'un tel principe. Ces deux exemples, espacés dans le temps, illustrent parfaitement comment tant hier qu'aujourd'hui, en raison de la puissance des médias, certains innocents ont pu passer du jour au lendemain pour d'ignobles criminels aux yeux de l'opinion public. Pourtant, « ces présumés coupables du premier jour ont vu les mêmes journalistes prendre fait et cause pour la thèse de leur innocence » lorsque celle-ci fut établie en justice316.

Il apparaît donc primordial, tant d'un point de vue idéologique qu'humain, de faire respecter ce principe cardinal que constitue la présomption d'innocence par les médias.

145. Bien entendu, l'idée n'est pas d'interdire aux médias la diffusion d'informations relatives au déroulement de la procédure, auquel cas la liberté d'expression - et a fortiori le droit à l'information - se trouverait fortement amputée. Toutefois, dans sa mission de rapporteur, le journaliste se doit de ne laisser apparaître aucune conviction de culpabilité à

312 Art. 9-1 modifié par la loi n°2000-516 du 15 juin 2000. Selon cette loi, l'atteinte à la présomption d'innocence est caractérisée dès lors « qu'une personne est, avant toute condamnation, présentée publiquement comme coupable de faits faisant l'objet d'une enquête ou d'une instruction judiciaire ».

313 E. Dreyer, « Panorama droit de la presse et droits de la personnalité », Recueil Dalloz, 17 mars 2011, n°11

314 Sous réserve bien sûr, qu'il parvienne à prouver son innocence (si tant est que les despotes s'en soucient !).

315 Mais pas seulement par la presse ! « La présomption d'innocence est régulièrement bafouée jusqu'au plus haut sommet de l'État » : V. pour quelques exemples : C. Prieur, « Présumé innocent ou présumé coupable, les termes du débat », Le Monde, 7 fév. 2011.

316 C. Charrière-Bournazel, « Présomption d'innocence et liberté d'expression » in Combat d'un bâtonnat, 24 août 2006, http://www.charriere-bournazel.com/categorie/combat-dun-batonnat.

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l'égard du mis en cause. Inutile alors de préciser combien la frontière entre le permis et l'interdit est poreuse. Les interprétations souvent contradictoires entre les juges du fond et la Haute juridiction peuvent d'ailleurs en témoigner317.

Les articles 9 et 9-1 du Code civil participent donc tous deux à la mise en place de remparts solides à l'extension de la liberté d'expression et au-delà desquels hélas, nombreux imprudents, souvent motivés par la rentabilité commerciale, aiment à s'aventurer. Mais quelles sont les relations entretenues par ces dispositions civiles spéciales avec l'article 1382 du Code civil et la loi du 29 juillet 1881 ? Nous allons voir que la question n'est pas dépourvue d'intérêt tant les possibilités de confusion de qualification sont nombreuses.

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"Entre deux mots il faut choisir le moindre"   Paul Valery