PREMIERE PARTIE :
Stratégie et objectifs d'intégration
sociale urbaine
Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
La ségrégation urbaine pèse sur le
fonctionnement de la société, la cohésion et le bien
être collectif ; stigmatisation, dysfonctionnements sociaux.
L'impératif d'intégration sociale et de
rénovation urbaine commande d'étendre la sphère collective
à l'ensemble des membres de la société. Lutter contre
l'exclusion urbaine ou la ségrégation urbaine c'est par
conséquent trouver le moyen « d'inclure » toutes les personnes
écartées par rupture d'égalité dans les espaces
sociaux qui sont composés par l'emploi et le logement.
La question n'est pas simple car il s'agit de s'interroger sur
les dysfonctionnements des processus intégrants, ceux qui
empêchent les mouvements des populations discriminées de
s'intégrer socialement, et ceux qui repoussent encore certains membres
du corps social vers les périphéries.
A travers ce premier chapitre, nous allons tout d'abord faire
une étude du concept de mixité sociale et analyser les outils mis
en place pour faire face à la problématique du logement au
Maroc.
Chapitre 1 : Pour des villes socialement inclusives
:
Il s'agit d'un mouvement global de réorganisation de la
ville, le logement est nécessaire, mais la rénovation urbaine
passe par une logique de globalité.
La reconnaissance des stratégies propres aux habitants
et les échecs des interventions qui ne prennent pas suffisamment en
compte leurs pratiques, loin de légitimer un recul des pouvoirs publics,
doivent susciter une réflexion sur la redéfinition de leurs modes
d'intervention et sur la place et la pratique des habitants.
Paragraphe 1 : La gouvernance sociale urbaine :
« Intégrer, c'est aussi se garder d'exclure
durablement »19, la ségrégation urbaine
pèse incontestablement sur le fonctionnement de la
société, la cohésion et la justice sociale.
« Pour ce faire, et eu égard à ce que sous
entend la cohésion sociale, la politique de la ville doit s'articuler
autour de concept d'intégration à la ville.
L'enjeu essentiel est de réinsérer durablement les
populations défavorisées et les quartiers marginalisés
dans une vie urbaine plus solidaire, par une politique globale et volontariste.
»20 Comment procéder pour consolider les fondements de la
cohésion sociale ?
19 A .SEDJARI, (sous la direction) « Les
politiques de la ville : intégration urbaine et cohésion sociale
», Edition l'Harmattan, 2006, p222
20 A.BOUSFIHA, Article « Villes et
cohésion sociale au Maroc », in, « Les politiques de la ville
: intégration urbaine et cohésion sociale » sous la
direction de A .SEDJARI, Edition l'Harmattan, 2006, p 208
a- Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
19
Maîtrise du phénomène urbain :
« L'urbanisation est un phénomène
complexe, et pour en maîtriser la complexité, de nouvelles
méthodes de planification de l'urbanisme, et l'ouverture à
d'autres sciences tels que la sociologie urbaine, l'aménagement du
territoire sont nécessaires pour bien appréhender ce domaine.
Ces sciences urbaines donnent aux spécialistes et aux
pouvoirs publics les outils nécessaires de gestion stratégique du
phénomène urbain. Cette gestion stratégique englobe toutes
les données humaines, économiques, sociales et même
environnementales.
Les politiques urbaines pour une meilleure gouvernance
urbaine, doivent intégrer tous ces aspects pour répondre aux
besoins de « la ville » et aux objectifs à atteindre en
matière « d'habitat dans la ville ». 21
Après l'analyse de la complexité du
phénomène urbain, des solutions efficaces doivent être
mises en place pour répondre aux différents problèmes et
blocages.
b- Production d'une offre adaptée de logements
La production de l'habitat peut apparaître comme un
phénomène aisée et très technique, mais en
réalité pour répondre à la demande en habitat il
faut prendre en compte tous les critères sociologiques et humains et
tous les critères déterminants tels que la mixité sociale,
les moyens de transports, la proximité de l'emploi.
Mais ces dernières années, il y a
malheureusement eu un cumul de dérapages par le développement des
« ceintures de misère » autour de nos villes qui vont à
l'encontre de toutes les valeurs sociales de la société.
Des catégories de population se trouvent isolées
à cause de cette déstructuration de la ville qui se traduit par
un développement de la ségrégation résultant de la
pression démographique. « L'aménagement urbain ne peut
être pensé dans l'urgence, il doit être
réfléchi, et doit prendre en considération nombre de
données, et les politiques doivent prendre leurs responsabilités
pour produire des logements bien répartis sur le territoire.
L'urgence dans la production de l'habitat ne répond
malheureusement pas aux objectifs d'intégration sociale et de
rénovation urbaine.
Dans une perspective de développement durable et de
cohésion sociale il faut revoir toutes les méthodes de travail
pour éviter un coût social, économique, financier et
culturel. »22
21 A. SEDJARI, chapitre « Gouvernance urbaine,
intégration sociale par le logement : quelle articulation ? » in
« Gouvernance, réforme et gestion du changement ou quand le Maroc
se modernisera » »Edition L'Harmattan, 2006, p462-463
22A. SEDJARI, chapitre « Gouvernance urbaine,
intégration sociale par le logement : quelle articulation ? » in
« Gouvernance, réforme et gestion du changement ou quand le Maroc
se modernisera » »Edition L'Harmattan, 2006
Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
20
c- Promotion de l'habitat locatif :
Dans cette recherche d'intégration sociale, le secteur
locatif est une alternative très fréquente au besoin de logement
d'une population n'ayant pas les moyens d'accéder à la
propriété.
C'est une étape intermédiaire, inévitable
pour cette population. L'habitat locatif permet de vivre dans un standing plus
élevé qu'on ne pourrait obtenir en étant
propriétaire.
« Mais ce secteur connaît à son tour des
contraintes qui ont fait de lui le parent pauvre des interventions publiques
». 23
S'agissant des promoteurs privés, la diminution de
leurs investissement dans le marché locatif vient surtout du fait du
manque de confiance entre bailleurs et locataires à cause des
impayés de loyers, ainsi qu'à l'inadaptation de la
législation dans ce domaine, surtout lorsqu'il s'agit du recouvrement
des loyers, de la résiliation des contrats et des litiges qui en
découlent. Le dispositif juridique régissant le contrat bail se
juxtapose à des textes très anciens. Ces derniers même
tombés en désuétude, sont toujours en vigueur.
L'inexistence d'un travail de codification législative et
réglementaire relative au bail cause non seulement leur
éparpillement mais aussi leur méconnaissance tant par les
locataires, les bailleurs que par les agences immobilières.
Les règles juridiques régissant le bail
consacrent l'instabilité contractuelle et causent un
déséquilibre flagrant entre propriétaire et locataire. En
effet, contenues dans une législation jugée surtout limitative
quant aux prérogatives du bailleur, ces règles protègent
le locataire et assignent au propriétaire des obligations contraignantes
(déclaration de vacances locales, dégagement des locaux à
usage d'habitation, non-opposition du refus de location, réquisition des
locaux par l'Etat et affection à la location forcée, ...). En
effet, la loi n°63-99 modifiant et complétant la loi n°6-79
n'a pas pu atteindre les objectifs relatifs à la réalisation d'un
équilibre entre les intérêts du locataire et ceux du
bailleur.
Le locatif s'avère vulnérable à toute
conjoncture défavorable. La demande locative baisse de façon
inéluctable, entraînant dans son sillage gel et réduction
immédiate des investissements, provoquant de ce fait inadéquation
et déficit quantitatif et qualitatif de l'offre en logements locatifs.
En un mot, le déséquilibre de la balance locative s'instaure
conduisant à une léthargie du marché du
locatif.24
23 En effet durant les dix dernières
années, le secteur locatif a connu une vraie régression, puisque
la production dans ce secteur est passé de 4000 à 200 logements
par an, cette situation est due essentiellement aux politiques successives des
pouvoirs publics destinées à l'accession et non pas à la
location.
24 MHUAE, DPI, « Etude relative à la
relance de l`habitat locatif », Juin 2005
Siham BENSAID Les politiques urbaines d'intégration
sociale par le logement au Maroc
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d- Mise en place d'une politique foncière
adaptée :
Pour cerner le problème foncier, une série de
réformes doit être mise en oeuvre afin de, simplifier et
accélérer les procédures d'immatriculation, comme activer
les dossiers relatifs aux problèmes fonciers transmis aux tribunaux,
contribuer au développement maîtrisé d'une urbanisation en
milieu urbain et rural dans le cadre d'une politique d'aménagement du
territoire, favoriser l'accès des investisseurs aux terrains
nécessaires à la concrétisation de leurs projets
d'investissement, approvisionner les promoteurs publics et privés en
terrains destinés à la satisfaction des besoins en
l'habitat.25
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