2. La Charte africaine des droits de l'homme et des
peuples
Les Etats africains membres de l'organisation de
l'unité africaine, antécédent de l'union africaine, ont
adopté le 27 juin 1981 une Charte appelée Charte africaine des
droits de l'homme et des peuples qui est entrée en vigueur le 21 octobre
1986. Cette Charte, ratifiée jusqu'au le 1er janvier 1996 par
50 Etats, reconnaît les droits fondamentaux de l'être humain dont
notamment son droit à la santé.
Par leur volonté commune, les Etats membres
reconnaissent ces droits pour leurs ressortissants dans « une totale
égalité devant la loi »1. Ces Etats s'engagent
à adopter des mesures législatives ou autres
»2 pour appliquer les droits reconnus dans la Charte et
dont la jouissance est, aux termes de l'article 2ème de la
Charte, garantie « sans distinction aucune, notamment de race,
d'ethnie, de couleur, de sexe, de langue, de religion, d'opinion politique ou
de toute opinion, d'origine nationale ou sociale, de fortune, de naissance ou
de toute autre situation »3.
Les Etats africains, quelques années après leur
indépendance, et en vue de développer et promouvoir les droits
fondamentaux de l'être humain vont adopter une Charte qui constitue
« un compromis entre les revendications des nouveaux Etats des
années soixante-dix et le droit international des droits de l'homme
élaboré essentiellement par les Etats occidentaux
»4.
Toutefois, à la lettre de Leader africain L.S. Senghor,
« l'humanité est une et indivisible et les besoins fondamentaux
de l'homme sont partout identiques... Il ne s'agira, pour nous africains, ni de
copier, ni de rechercher l'originalité. Il nous faudra faire preuve en
même temps, d'imagination et d'efficacité
»5.
Ainsi, la Charte devrait à la fois suivre
l'évolution universelle des droits de l'homme et s'inspirer des
traditions africaines. La Charte devrait donc concilier universalisme et
régionalisme, tradition et modernité. La question des droits de
l'homme en Afrique est restée durant longtemps une affaire interne pour
les Etats du continent.
1 Art. 3 al. 2ème de la charte.
2 Art. 1er de la Charte.
3 Art. 2ème de la Charte.
4 J. MATRINGE, Tradition et modernité dans
la Charte africaine des droits de l'homme et des peuples, éd,
BRUYLANT Bruxelles 1996, p. 15.
5 Adress delivred by H.E. Mr. Leopold Sedar Senghor,
President of the republic of OAU, DOC CAB/LEG/6715.
PREMIERE PARTIE : L'assurance sociale et la consécration
du droit à la santé 38
1 E-R. MBAYA, La charte Africaine :
première étape de la promotion des droits de l'homme en Afrique,
1990, p. 5.
2 Ibid.
Le droit à la santé comme droit social
fondamental est reconnu, d'une part, par « le préambule de la
Charte africaine (qui) souligne avec force une approche
intégrationniste et " développementaliste " des droits de l'homme
»1 et, d'autre part, par les articles de la Charte
notamment les articles 16 et 18.
Ainsi l'article 16 reconnaît à toute personne
« le droit de jouir du meilleur état de santé physique
et mentale qu'elle soit capable d'atteindre » et incite les Etats
parties à la Charte à « prendre les mesures
nécessaires en vue de protéger la santé de leurs
populations et de leur assurer l'assistance médicale en cas de maladie
».
De surcroît la Charte dans son article 18 prétend
protéger la santé de la famille dans l'alinéa
1er, la femme et l'enfant dans l'alinéa
3ème et les personnes âgées ou
handicapées dans l'alinéa 4ème.
A la base de ces dispositions on peut remarquer que «
contrairement à la Charte des nations unies et autres Conventions
régionales, européenne ou américaine, on a
réalisé une économie de textes, même s'il est
envisagé de conclure, en cas de besoin, des protocoles ou accords
particuliers pour compléter les dispositions de la Charte
»2.
Cette économie de textes est critiquable dans le sens
où on ne trouve pas une reconnaissance explicite du droit à la
sécurité sociale dans un instrument juridique visant
essentiellement la protection des droits de l'homme.
Toutefois, l'effectivité des Conventions
internationales reste liée à la volonté des Etats membres
qui vont reconnaître les droits précités par leurs propres
droits nationaux. Ceci dit qu'en est il du droit à la santé par
les assurances sociales en Droit tunisien ?
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