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L'impact de l'ouverture économique sur les pays en voie de développement

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par FENNIRA Youssef / Fourati Maleke
La Sorbonne -  2010
  

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I/ Revue de la littérature

I-1: Revue des modèles théoriques classiques sur la relation entre ouverture et inégalités:

Les théories classiques se sont déjà penchées sur la question de l'impact du libre échange sur les inégalités de richesse. Dans le modèle Hecksher-Ohlin, le théorème Stolper-Samuelson soutient que la hausse du prix d'un bien accroît le rendement réel du facteur qui utilise intensivement ce bien et par analogie diminue le rendement réel de l'autre facteur. A cet effet, lorsqu'un pays passe d'une situation d'autarcie à celle de libre échange, il fait face à une demande mondiale beaucoup plus significative que la demande nationale à laquelle il était préalablement confronté, ce qui va donc accroître le prix du bien pour lequel il est spécialisé. Si le pays est défini comme abondant en capital (ou en travail qualifié), il est net exportateur du bien fortement doté en capital (travail qualifié). In fine, la rémunération du capital (ou du travail qualifié) sera poussée à la hausse alors que celle du travail (non qualifié) le sera à la baisse. Ainsi, selon la théorie, les pays industrialisés devraient faire face à un accroissement des inégalités alors que l'inverse devrait s'appliquer aux pays en développement PED). Il est vrai que les travailleurs non qualifiés des pays développés sont souvent montrés comme étant les victimes, ou encore les laissés pour compte de la mondialisation, souffrant d'une plus grande compétitivité des PED. En revanche, la réalité empirique concernant l'évolution des inégalités a tendance à infirmer le modèle, dans les pays développés d'une part et les pays en voie de développement d'autre part.

Un autre modèle semble plus adéquatement refléter cette réalité. Le modèle des facteurs spécifiques d'Eaton (1987) présente une économie produisant deux biens, dotés de deux facteurs immobiles étant le capital et la terre et un facteur mobile, le travail. Si un pays est confronté à une hausse du prix d'un bien, alors la rémunération du facteur spécifique pour laquelle ce même bien est intensivement doté, va s'accroître alors que celle de l'autre facteur spécifique va diminuer. L'effet sur le facteur mobile est quant à lui plus ambigu. Il baisse pour le bien dont le prix a augmenté mais diminue pour l'autre bien. L'explication repose sur le fait que suite à une hausse de prix, la main d'oeuvre s'est orientée vers la production du bien qui a connu cette hausse et va à contrario se raréfier dans la production de l'autre bien. Par conséquent, le revenu marginal du travail baisse là où il est plus abondant et augmente là où il se trouve alors en moindre quantité.

Le modèle définit le revenu d'un agent privé, d'une part de son salaire (identique pour tous) et d'autre part de sa richesse (valeur de ses actifs, différents entre les individus). A court terme, si l'évolution de la part du salaire après l'ouverture au commerce international relative au revenu augmente, les inégalités au sein du pays diminuent. A long terme, l'évolution des inégalités dépend de celle du taux d'intérêt. Après le passage au libre échange, un pays abondant en terre, et donc net exportateur du bien utilisant intensivement ce facteur, va voir son stock de capital baisser. Cela va avoir pour conséquence un

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accroissement du revenu marginal expliquant une baisse de la part du salaire relative au revenu et une hausse du taux d'intérêt. Finalement, le pays en ressort plus inégalitaire. Le cas analogue est applicable au pays abondant en capital. Les pays d'Amérique latine sont largement dotés en terre, ce qui pourrait expliquer la hausse de leurs inégalités suite à leur ouverture. Ainsi les pays fortement dotés en terre semblent devoir trouver un compromis entre protection/égalité et libre-échange/efficacité.

Cependant la théorie prédit qui si le libre échange est accompagné d'une mobilité des capitaux, il y aura alors un déplacement des capitaux dans la zone où ils sont les plus rentables, c'est-à-dire là où le taux d'intérêt est plus élevé. Cet effet aura pour conséquence la baisse du taux d'intérêt et in fine un impact positif sur la répartition des richesses dans un pays fortement doté en terre. L'effet inverse sera notable dans un pays intensif en capital. (Fischer R D. (2000))

Par ailleurs, Wood (1997) propose un autre modèle basé sur le modèle HOS avec plusieurs pays, biens et facteurs, pour expliquer les différentes évolutions des inégalités entre les pays d'Asie de l'Est et ceux d'Amérique latine. Les pays d'Asie sont largement compétitifs dans le secteur du travail non qualifié. Cinq des pays d'Asie à bas revenus (Bangladesh, Chine, Inde, Indonésie, Pakistan), représentants à eux seuls plus de la moitié de la population mondiale en travail non qualifié, se sont insérés dans le commerce international dans les années 1980. Selon l'auteur, ils ont probablement altéré l'avantage comparatif des pays à revenu moyen (dont le ratio travail qualifié sur non qualifié est au dessus de la moyenne mondiale mais en dessous de celle des pays développés), en déplaçant la demande mondiale qui leur était adressée non plus vers des biens non qualifiés mais vers des biens semi qualifiés. Ainsi les pays d'Amérique latine ont dû importer des biens qualifiés des pays développés et des biens non qualifiés des pays à faible revenu. C'est alors que le net effet sur l'évolution des salaires est ambigu. Or, comme la demande mondiale de travail non qualifié a relativement baissé au profit de celle du travail semi qualifié en Amérique Latine, l'écart des salaires a eu tendance à s'accroître dans les années 1980.

De manière générale, il est difficile d'évaluer le réel impact de l'ouverture commerciale sur la distribution des revenus, tant au niveau théorique (si l'on considère le nombre d'études théoriques visant à expliquer cet effet de causalité), qu'au niveau empirique (où les études dont les résultats diffèrent en fonction de l'échantillon observé, les variables contrôlées etc.). On voit ainsi que d'autres facteurs qui y sont liés entrent en jeux.

L'évolution des inégalités suite à l'introduction d'un pays au libre échange s'opère donc par le biais de plusieurs canaux. Anderson E. (2005) en distingue cinq:

- ouverture et part des facteurs relatifs

- ouverture et inégalité des actifs

- ouverture et inégalité géographique

- ouverture et inégalité de sexes

- ouverture et redistribution

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Cependant, bien qu'il apparaisse fondamental de mener une étude microéconomique visant à évaluer l`effet de l`ouverture sur l`évolution du salaire relatif et ce, par le biais de plusieurs créneaux (à titre d`exemple la proposition d`Anderson présentée plus haut), il est nécessaire d'analyser l'impact, statistiquement significatif ou non, du commerce extérieur sur les inégalités, au niveau macroéconomique. Pour cela nous nous intéresserons à l'indice de Gini et non plus au salaire relatif.

Après s'être penché sur les modèles théoriques, nous allons présenter certains des travaux récents portant sur cette question. Pour cela, il sera intéressant d'étudier l'évolution de l'indice de Gini dans les PED.

Bilan de l'évolution des revenus et des inégalités :

La première carte (Figure 1) représente le coefficient de Gini qui, rappelons-le, permet de voir les inégalités de distribution du revenu au sein des pays. Dans cette carte le coefficient varie entre 0 et 100, où 0 désigne l'égalité parfaite et 100 l'inégalité parfaite. Il est intéressant de commencer par s'intéresser aux 26 pays que nous avons choisi d'étudier et d'effectuer par la suite une comparaison avec le reste du monde. Ainsi, en Amérique latine et notamment au Brésil, au Chili, en Colombie, au Mexique... Pour l'ensemble des pays de la zone que nous avons choisi d'étudier, le coefficient de Gini est très élevé variant entre 44.2 et 62.3. Dans la région Asie, le constat est tout autre. En effet on remarque que les deux pays les plus peuplés de la planète, la Chine et l'Inde et de grands pays tels que le Pakistan et la Thaïlande ont un coefficient de Gini qui varie entre 30.06 et 34.66 reflétant des inégalités moins importantes que des pays développés tels que les Etats-Unis ou la France. En Asie du sud-est, le constat est différent. Les Philippines et la Malaisie possèdent des coefficients de Gini assez inégalitaires compris entre 44.2 et 51.51. En Europe de l'Est, on va également faire un constat différent des précédents. En effet, les pays tels que la Pologne, la Roumanie, la Hongrie et la Bulgarie font partie des pays les moins inégalitaires du monde loin devant la France, les Etats-Unis, l'Australie ou encore l'Italie. Enfin, en Afrique du Nord, la Tunisie possède un coefficient de Gini compris entre 39 et 44.2 alors que l'Algérie se situe entre 34.66 et 39. On remarque que l'ensemble des pays de cette région (bassin méditerranéen) excepté l'Espagne oscille autour des mêmes valeurs.

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Les données UTIP (UTIP data: University of Texas Inequality Project), permettent une révision sur l'évolution des inégalités à l'échelle mondiale à la fois entre les nations et au travers du temps. Cela reste impossible à réaliser avec les ensembles de données de Deninger et Squire.

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Ainsi, dans la carte ci-dessus (figure2), on observe les inégalités globales dans le monde d'après les données de l'UTIP. On observe pour commencer qu'en Europe de l'Est les données sont à peu de choses près semblables à celles que nous avons vu précédemment, à savoir que les inégalités sont très faibles. En Amérique du Sud, le constat est différent et varie entre chaque pays. Le Mexique est le moins inégalitaire de la région avec un coefficient variant entre 0.0178 et 0.03742. Ensuite, nous avons le Venezuela et l'Argentine avec un coefficient variant entre 0.03742 et 0.05281 suivis du Chili et de la Colombie avec un coefficient compris entre 0.05281 et 0.07439. Le Brésil, le Panama, le Pérou, le Costa Rica, la Jamaïque, le Salvador et a République Dominicaine sont les pays les plus inégalitaires de la région avec un coefficient variant entre 0.07439 et 0.09872. Concernant l'Asie, c'est la Chine « communiste » qui est le seul pays à se démarquer en terme de faible inégalité. En effet son coefficient est inférieur à 0 .0178. Suivent les Philippines avec un coefficient variant entre 0.0178 et 0.03742 puis le Pakistan avec un coefficient compris entre 0.03742 et 0.05281. Le reste des pays de la zone Asie que nous étudions arrivent ensuite avec des coefficients fortement inégalitaires compris entre 0.07439 et 0.09872. Enfin, en Afrique du Nord, l'Algérie se démarque du reste du continent avec un coefficient compris entre 0.0178 et 0.03742 alors que la Tunisie fait figure de mauvais élève avec un coefficient variant entre 0.07439 et 0.09872.

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« The age of globalization... (1988-1994)

Now the largest increases in inequality in are the post-communist states; an exception is in booming Southeast Asia, before 1997... »

La carte qui suit (FigureA2) a pour but de montrer la façon dont les inégalités on évolué au sein des pays, le but étant de voir si les pays sont parvenus ou non à réduire leurs inégalités sur le temps. Le premier constat que nous pouvons faire concerne les pays d'Europe de l'Est que nous étudions et plus généralement l'homogénéité de l'ex-bloc communiste dont ces derniers faisaient partis. On observe que ces pays ont les plus mauvais résultats à l'échelle de la planète avec des coefficients variant entre 88.32 et 303.2. Concernant l'Asie, l'Indonésie se démarque du reste avec un coefficient inférieur à -11.2 et donc une forte réduction de ses inégalités. Viennent ensuite l'Inde, la Chine et les Philippines avec une réduction moins importante des inégalités (entre -0.1068 et 10.64). Le Pakistan arrive après avec un coefficient compris entre 10.64 et 38.78, signe d'un accroissement des inégalités. Pour finir, on retrouve la Thailande et la Malaisie avec des coefficients compris entre 38.78 et 88.32. En Amérique latine, le meilleur élève est le Chili avec le coefficient le plus élevé inférieur à -11.2 suivi de la Colombie avec un coefficient compris entre -11.2 et

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-0.1068. Le Mexique et le Brésil, pour leur part, arrivent après avec un coefficient compris entre 10.64 et 38.78. Le reste des pays sud-américains que nous étudions sont à la traine avec des coefficients compris entre 38.78 et 88.32 sauf le Pérou qui est bon dernier avec un coefficient variant entre 88.32 et 303.2. Enfin, en Afrique du Nord, les données sont absentes pour la Tunisie et l'Algérie possède un coefficient compris entre -0.1068 et 10.64.

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"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand