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L'histoire d'une société rizicole en Côte d'Ivoire: le cas de la société de développement de la riziculture ( soderiz ) 1970 - 1977

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par Lassina Songfolo YEO
Université Alassane Ouattara de Bouake - Côte d'Ivoire - Maà®trise d'histoire 2012
  

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CHAPITRE I LES ETAPES DE LA CREATION DE LA SODERIZ.

L'avènement de la Soderiz est intervenu après plusieurs étapes qui ont favorisé la mise en place de l'institution rizicole. En effet, depuis la période coloniale, les bases du développement de la culture de riz furent jetées. D'abord, le grand intérêt accordé au riz par les colons, montre bien l'importance de cette denrée alimentaire aux yeux du colonisateur. Ensuite, après la lutte pour l'indépendance, les autorités ivoiriennes ont cherché à développer la riziculture au pays. Aussi, un accent particulier fut-il mis sur la culture du riz lors du plan décennal de 1961-1970.

I- LA POLITIQUE RIZICOLE AVANT 1970

A partir de 1893, avec l'installation coloniale, une nouvelle vision est donnée à la riziculture. Les autorités coloniales ont intensifié leurs actions en faveur de la riziculture jusqu'en 1960. A la veille de l'indépendance, l'Etat ivoirien poursuit la politique rizicole antérieure en créant la Société d'Assistance Technique et pour la Motorisation en Côte d'Ivoire (SATMACI) en 1963.

1. La question du riz pendant la colonisation

Dès le début de la colonisation française en Côte d'Ivoire, la culture du riz occupait une place marginale dans l'agriculture. Très tôt, les principes de l'autonomie financière de chaque territoire et du financement maximal des coûts de la colonisation par les colonies elles mêmes orientèrent l'action administrative vers un développement planifié et une intervention sur les structures de production et de commercialisation, de manière à limiter les importations de biens de subsistance par un développement de la production locale. Une politique d'autosuffisance alimentaire a été donc de ce fait très rapidement associée à l'action coloniale. Ainsi, pour prémunir en générale les colonies d'Afrique occidentale Française et en particulier la Côte d'Ivoire des

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dangers de la seule exploitation des produits de caoutchouc, cola et l'acajou, l'administration coloniale s'est préoccupée de développer les cultures nouvelles notamment la riziculture. Cet engagement visait à mettre le pays à l'abri d'éventuelle crise économique. C'est pourquoi s'adressant aux administrateurs, commandants des cercles, le sous directeur à l'agriculture Bervas disait « Je crois utile aujourd'hui d'attirer spécialement votre attention sur le développement de la culture du riz »16. A cette période, la riziculture était pour ainsi dire localisée à la région ouest de la colonie et sur le littoral dans la région de Grand Lahou. Le baoulé nord en possédait également quelques rizières, mais éprouvait les plus grandes difficultés à mieux pratiquer la culture du riz. La production ne suffisait pas à la consommation locale. La riziculture gagnait progressivement la forêt à partir des deux foyers du sud et du nord, malgré le refus de certains peuples à la pratiquer. Ce refus était pour les populations de la colonie un moyen de marquer leur opposition à l'action coloniale.

La riziculture fut la préoccupation des autorités coloniales dès 1908. Avec les nombreux essais effectués dans le jardin botanique de Bingerville, l'administration coloniale a réussi à hâter la culture du riz dans le pays notamment dans les cercles du baoulé sud et du baoulé nord17.

De 1908 à 1912, il s'agissait pour le colonat d'intensifier la culture du riz et d'augmenter les surfaces cultivées tout en tenant compte de la qualité et des efforts pour imposer la culture du riz18. Mais c'est aussi la période des cultures obligatoires de riz et des réquisitions de paddy. Selon Yayat d'Alepé Hubert, « avec la diffusion rapide de la culture du riz, les autorités décidèrent d'en faire une céréale d'exportation »19 . L'administration coloniale n'a donc pas hésité à distribuer gratuitement du paddy pour les semences afin d'accélérer la diffusion

16Archive Nationale de Côte d'Ivoire (ANCI) : 1912, 1RR80, circulaire n°81 à messieurs les administrateurs commandant des cercles au sujet de la culture du riz irrigué

17 ANCI : 1RR 76, rapport agricole et économique du troisième trimestre 1905

18 J, P CHAUVEAU : 1985, « l'avenir d'une illusion, histoire de la production et des politiques vivrières en Côte d'Ivoire », Etudes rurales Orstom, Paris, n° 99 - 100, pp77 - 123

19 Hubert Yayat D'ALEPE, op. cit p 303

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et l'adoption de la culture du riz. A cet effet le lieutenant gouverneur Angoulvant a encouragé par une note circulaire en date du 29 février 1912, le développement de la riziculture notamment celle du riz irriguée20. Cette note, adressée aux administrateurs des cercles et des subdivisions recommandait l'installation des rizières dans les dépressions humides a proximité des villages. Mais si des progrès sont constatés dans l'étendue consacrée à la culture du riz ; l'on doit noter les conditions défectueuses dans lesquelles les peuples ivoiriens pratiquaient cette culture. Pour Bervas sous inspecteur chargé de l'agriculture de la colonie de côte d'Ivoire, « l'indigène ne cultive le riz que sous la forme sèche, dite de montagne ou non irriguée encore moins inondée »21. Selon le colonat, ce type de culture ne permettait pas un progrès rapide. Les rendements étaient faibles. Ils pouvaient être nuls si les pluies sont insuffisantes car soumis seulement aux conditions climatiques.

En plus de ces conditions défavorables, la culture sèche présentait plusieurs inconvénients tels que, le choix et l'entretien de la zone de production qui rendait difficile le travail de la culture sèche de riz. En 1911, un essai important concluait que la culture du riz irriguée est parfaitement réalisable dans la colonie de Côte d'Ivoire et que son rendement était supérieur à celui de la culture sèche. Sur 1 hectare de riz cultivé on avait 2 tonnes dans les rizières irriguées contre 1,074 tonne en culture sèche22. Cet essai a été réalisé au poste de Diakpo (Boca N'da) par le lieutenant Pravaz qui avait fait un long séjour en Indochine où il avait acquis une connaissance pratique de la culture du riz irrigué23. Les populations locales témoins de cet essai ont reconnu l'énorme supériorité de ce système cultural. A cet effet, les rizières, les dépressions humides, les sols à consistance forte chargé de matières organique étaient mis en valeur pour la riziculture irriguée. Les terrains choisis étaient délimités en compartiment

20 Journal Officiel de Côte d'Ivoire (JOCI) : 1912, Du 29 février 1912, au sujet de la culture irriguée du riz.

21 ANCI : 1912, 1RR80, circulaire n°81 à messieurs les administrateurs commandant des cercles au sujet de la culture du riz irrigué.

22 H, Y, D'ALEPE, op. Cit, p 305

23 Chef de poste de Diapko (Boca N' da) en 1912

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destiné à retenir l'eau. Ensuite, des digues étaient formées, entassées jusqu'à 0,40 à 0,50 mètres de hauteur et sur une largeur un peu plus grande.

Par ailleurs, l'installation de la rizerie de la Compagnie Générale de l'Afrique Française à Bouaké pour la transformation du paddy, constituait le couronnement de la campagne de développement de la production de riz en 1913. Elle marque aussi l'ouverture d'une nouvelle ère caractérisée par la volonté de réduire les importations de riz24. Le fonctionnement de la rizerie permettait de centraliser le décorticage du paddy de la colonie et facilitait le ravitaillement des services et corps qui relevaient de l'administration.

Aussi avec l'intensification de la culture du riz, la métropole fut-elle servie en cette denrée. Comme l'indique le tableau n°1, plusieurs tonnes de riz produit en Côte d'Ivoire ont pu être rassemblées puis exportées vers la France par le Ministère du ravitaillement. Près de 600 tonnes au total de riz fut exportées vers la France entre 1916 et 1918. Cette action rentrait dans le cadre du soutien apporté à la métropole qui était en guerre.

Tableau n°1 : paddy exporté par la Côte d'Ivoire vers la France 1916 - 1918

Années

1916

1917

1918

Quantité en tonnes

8

540

53

Source : Yayat Hubert d'ALEPE, op. cit p 301

En outre, en 1922, dans le cade du plan Sarraut25 de mise en valeur méthodique et l'exploitation rationnelle des sols et sous sols coloniaux, un accent particulier a été mis sur l'irrigation26. Ce programme de portée économique préconisa la multiplication des petits barrages, favorisant ainsi

24 H, Y, D'ALEPE, op. Cit, p 297

25 Albert SARRAUT a été ancien Gouverneur Général de l'Indochine de 1911 à 1914 et de 1915 à 1919. En 1920 il est nommé ministre des colonies. Il, rédigea et soumit à l'approbation du Parlement Français un projet de loi qui fixait un programme général de mise en valeur des colonies.

26 Semi Bi ZAN : 1973, La politique coloniale des travaux publics en Côte d'Ivoire 1900- 1940, Thèse de doctorat de 3e cycle, Université Paris VII, p 39

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l'essor de la production rizicole. Le poste de Yamoussoukro dans le Baoulé permet de se faire une idée des résultats de ce programme. Un an après, les marigots du poste furent défrichés, dessouchés et 800 hectares furent ensemencés en rizières irriguée dont l'on espérait récolter 1800 à 2000 tonnes de paddy27. Au cours de l'exécution du programme du plan Sarraut, l'administration coloniale a même tenté d'améliorer les techniques de production de riz.

Plus de 130 tonnes furent produites lors de la campagne 192328. Cette production permettait de ravitailler en vivre les manoeuvres des chantiers publics et privés tel que le chantier de la voie ferrée. A cette période, l'on note la tentative de transformation de vastes régions et les abords de la voie ferrée en grenier pour le ravitaillement de ces chantiers.

En outre, le riz fournissait les revenus nécessaires pour payer l'impôt de capitation et faire des achats des produits manufacturés pour les indigènes29. Malgré le développement et la prépondérance de la riziculture jusqu'en 1944, la colonie fut plongé dans une situation de déficit alimentaire chronique due à une sècheresse qui sévissait dans presque toutes les régions productrices. Ce déficit était aussi le fait de l'exportation du riz produit dans la colonie pour ravitailler les soldats. Durant toute cette période de diffusion du riz les autorités coloniales continuèrent d'importer le riz de l'Indochine.

Comme l'indique le tableau n°2 Qp 28), de 1906 à 1920, le total de riz importé furent de 28 068 tonnes pour une dépense de 10 713 512 de francs. De 1906 à 1910, la quantité de riz importé oscille entre 2000 et 2800 tonnes. Cela s'explique par le fait que le riz n'était pas encore entré dans les habitudes

27 JOCI : 1924, Rapport de tournée dans le cercle du Baoulé sud du secrétaire du Gouverneur, du 14 janvier 1924, p 5

28 Archive Nationale du Sénégal et d'Outre Mer (ANSOM) :1925, Rapport n°46 de l'inspecteur Kair de la 31/03/1925 affaire politique carton n° 3047, cité par Hubert Yayat D'ALEPE, op.cit p390

29 J, L, CHALEARD : 1996, Temps des villes, temps des vivres l'essor du vivrier marchand en Côte d'Ivoire, Paris, Karthala, p 89

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alimentaires des populations. De 1911 à 1914, l'importation de riz atteint un niveau élevé dont la moyenne est de 3000 tonnes par an. C'est le résultat de l'intensification de la riziculture. Pendant cette période la colonie est en chantier, le riz est consommé aussi bien par les colons que par les ouvriers sur les chantiers. Entre 1919 et 1920, les importations de riz varient entre 400 et 2000 tonnes, d'où la volonté de faire face aux importations.

Tableau n°2 : Importation de riz par la Côte d'Ivoire de 1906-192030

Années

Quantité en tonnes

Valeur en francs

1906

1 678

_

1907

1 560

_

1908

2 564

517 881

1909

2 186

513 597

1910

2 749

669 299

1911

4 377

1 102 913

1912

3 852

1 111 049

1913

3 814

1 222 254

1914

1996

576 519

1919

471

_

1920

2208

_

Sources : Archive Nationale de Côte d'Ivoire (ANCI), 1912, 1RR80.

Ministère de l'agriculture et des eaux et forêts, annuaire rétrospectif de statistiques agricoles et forestières 1900 - 1983, tome 3, p 74

A partir de 1954, lors du deuxième plan quadriennal, l'administration coloniale s'est fixé comme objectif la suppression des importations de riz. Ce même objectif fut réaffirmé au cours du troisième plan quadriennal 1958 -1962, car les importations avaient dépassé plus de 10 000 tonnes par an en 1953. En outre, pour faire face à ce déficit, un important investissement est fait par le

30 Le tableau n°2 a été modifié car les archives nationales de Côte d'Ivoire(ANCI), 1912, 1RR80 ne nous fournissent pas les valeurs en francs des importations.

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Fond d'Investissement pour le Développement Economique et Social de l'Outre Mer (FIDES). Plus de 41% des crédits du FIDES étaient consacrés au développement de la riziculture soit près de 750 millions de francs31. Avec ce crédit les producteurs et commerçants de riz se sont organisés en coopératives. A cette même occasion, une caisse de péréquation fut créée en 1955. Elle fut chargée de rétablir l'équilibre entre le prix du riz local et celui du riz importé32.

Dans l'ensemble, l'administration coloniale a donné une place importante au riz, particulièrement à la riziculture irriguée. Au lendemain de l'indépendance, le bilan de la production du riz parait moins catastrophique. Les nouvelles autorités ivoiriennes décidèrent alors de s'en inspirer et de poursuivre la politique rizicole antérieure, cette fois ci avec la mise en place de structures spécialisées d'encadrement.

Durant la première guerre mondiale, la colonie de Côte d'Ivoire a servie de grenier à la France. Elle a ravitaillé la métropole avec des centaines de tonnes de paddy dans le but de contribuer à l'effort de guerre.

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"Le doute est le commencement de la sagesse"   Aristote