IIème PARTIE
UNE HISTOIRE ENCADREE PAR LE DROIT DANS LE CONTEXTE
D'UNE PERPETUELLE RECHERCHE DE PERFECTIONNEMENT DE LA DEMOCRATIE
A) Les normes de protection et de reconnaissance des
mémoires
Si la démocratie a pour objectif le bien être
générale elle se doit d'allier la protection de chacune des
expressions de l'histoire dans la société. Que ce soit l'histoire
prétendant à l'objectivité d'une science ou l'histoire
affirmant sa subjectivité chez les individus, chacune a ses enjeux
propres. Bien protégées et bien distinguées toutes les
expressions de l'histoire viendront s'enrichir mutuellement, alors que leurs
possibles affrontements ne font que diminuer la valeur de chacune.
C'est pourquoi la définition de politiques de
l'histoire doit se faire d'une part à travers l'existence d'un droit
mémoriel, d'autre part grâce à une histoire scientifique
protégée par des statuts juridiques précis.
1) Différentes formes d'encadrement de la
mémoire par le droit
On choisira ici d'isoler encore une fois le cas du
négationnisme, qui en droit relève d'un statut très
précis, à distinguer du reste des « lois mémorielles
». Cette particularité, reconnu par la grande majorité des
juristes et par de nombreux historiens, comme ceux en France du «
Comité de vigilance face aux usages publics de l'histoire » sera
développée plus loin.
On va donc se centrer dans un premier temps sur les modes
d'intervention des différents producteurs de droit dans le champ
mémoriel
Par le parlement
Comme le soulignait le rapport de la Mission d'information sur
les questions mémorielles de l'Assemblée nationale
française, l'intervention parlementaire dans le domaine de la
mémoire est « ancienne et protéiforme »117.
En France, dès la Révolution apparaissent des fêtes
civiques et un culte laïque des grands hommes dictés par le
législateur. Elles posent les bases de toutes les
cérémonie républicaines qui font naitre des
53
117 Bernard Accoyer, op.cit., p. 11
54
représentation essentielles à l'affermissement
d'un pouvoir nouveau qui a besoin d'une symbolique pour montrer sa
présence et se définir une nouvelle légitimité.
Comme l'écrit Bernard Accoyer: «
Révolutionnaire, la fête l'est dans la mesure où elle
prétend remplir à elle seule les trois fonctions des anciennes
festivités : à la fois politique par son contenu, religieuse par
son déroulement liturgique et populaire à travers son projet
pédagogique. Au contraire du sujet, le citoyen ne peut plus simplement
se réjouir d'une inversion temporaire et ludique de la
société : il s'élève à mesure qu'il prend
connaissance et conscience des efforts accomplis, avant lui et pour lui, par
les défenseurs de la liberté. » En ce sens ces
premières commémorations sont déjà «
mémorielles », car elle prétendent former chez le citoyen le
sentiment d'appartenir à une entreprise historique régulée
par le cycle des commémorations et guidée par l'exemple des
ainés dont sera conservé la « poussière et la trace
de leurs vertus » selon l'expression de la Marseillaise.
La Convention notamment fut particulièrement prolifique
en terme de fêtes civiques: fête de la Fraternité, de
l'Hospitalité, de la Régénération, de la Raison,
des Victoires, de l'Être Suprême. Comme le remarque Bernard
Accoyer, « dans les fêtes votées par les conventionnels, la
confusion de l'historique, de l'artistique et du politique est totale
»118, les artistes mettent en scène une histoire
imaginaire pour les besoins du moment à la demande des conventionnels,
David, à la fois peintre et député, administre le tout.
Parallèlement à la mise en place des
commémorations, le législateur crée les premiers monuments
mémoriels républicains: l'Eglise Sainte-Geneviève devient
le « temple de la patrie » en 1791 sous le noms de Panthéon
français. Les statuts et autres représentations des
précurseurs de la pensée révolutionnaire ou des grands
acteurs de la période commencent à être édifier un
peu partout dans les espaces publics.
Lorsque en 1880, les républicains enfin revenus au
pouvoir décident de créer une fête patriotique et
républicaine, ils choisissent la date du 14 juillet, date d'une prise de
la Bastille qui pour ses contemporains n'avait pourtant pas été
perçue comme un événement décisif si on en croit la
célèbre phrase du journal de Louis XVI: « aujourd'hui il ne
s'est rien passé » et qui devient dès-lors le centre d'une
attention et d'analyses historiques poussées qui lui donne un rôle
de tournant de la Révolution en partie exagéré. Mais la
célébration de la Révolution n'est pas exclusive d'autres
hommages ; à l'imitation de leurs grands ancêtres justement, les
parlementaires veulent fonder, par la loi, leur volonté
118 Bernard Accoyer, rapport, p. 15
55
d'honorer les grands hommes de leur temps. Dès lors
rien ne borne le domaine d'intervention de la loi, celle-ci comprise comme
l'expression de la volonté générale. Le Parlement
intervient de manière protéiforme, à travers les hommages
aux morts, les hommages aux vivants, les mesures réparatrices et
commémoratives. C'est ce que Pierre Nora appel « l'ère des
commémorations »119, devant à la fois, selon la
conception de Rousseau, « toucher le coeur »120 et
instruire les participants.
Monseigneur Darboy et les otages de la commune, Louis Blanc,
Gambetta, le président assassiné Sadit-Carnot, Félix Faure
reçoivent du Parlement des funérailles nationales, la loi y fixe
la participation symbolique et matérielle de l'Etat. Les «
panthéonisations » reprennent de l'importance avec l'entrée
de Hugo, de Zola, de Gambetta parmi « les grands hommes ».
La Première guerre mondiale marque la naissance de
nouvelles commémorations. Avec la loi du 2 juillet 1915 instituant la
mention « Mort pour la France » commence le « cycle du souvenir
»121, rapidement enrichi par les lois d'octobre 1915 relatives
à « la commémoration et à la glorification des Morts
pour la France au cours de la Grande Guerre » ou encore la loi du 8
novembre 1920 qui ordonne l'inhumation d'un soldat inconnu sous l'Arc de
Triomphe.
Globalement la loi s'est auto-attribuée de nombreux
pouvoirs relatifs à la mémoire: pouvoir de fixer les dates des
commémorations, cérémonies, annuelles ou ponctuelles, et
jours fériés, pouvoir de créer des monuments tel le
Sacré-Coeur ou de leur donner un statut particulier, pouvoir de
conférer des honneurs spéciaux et des récompenses
(médailles, titres, pensions à vie) à des individus ou des
groupes de personnes, pouvoir d'ouvrir des crédits spéciaux pour
réparer les conséquences d'un événement historique
et ainsi en effacer les conséquences, comme ce fut le cas pour le Coup
d'Etat de Napoléon III de 1851 et la Commune de Paris de 1870. Plus
récemment, notamment avec la loi du 4 janvier 2002 qui crée le
label « musée de France » et la création d'un Code du
patrimoine en 1978 le Parlement a distingué un statut particulier qui
renforce la protection des biens à valeur mémorielle.
Au final on peut distinguer trois « compétences
mémorielles » du législateur : une compétence
commémorative, une compétence statutaire, une
compétence réparatrice.
119 cité par Patrick Garcia, op.cit., p. 33
120 cité par P. Garcia, ibid., p.33
121 B. Accoyer, op.cit., p. 16
56
En plus de ces trois compétences les parlements
possèdent un pouvoir politique déclaratif, traduit
généralement dans des actes qualifiés de «
résolutions » ou de « déclarations ». En France,
la Vème République ne prévoyait pas jusqu'à la
réforme constitutionnelle du 23 Juillet 2008 la possibilité pour
le Parlement d'émettre ce type d'actes déclaratifs, ce qui l'a
poussé à utiliser la loi ordinaire pour exercer ce pouvoir
politique. Il en résulte l'aberration juridique des lois non-normatives
condamnée par le Conseil Constitutionnel français dans sa
décision n°2006-203 I du 31 janvier 2006.
Si on observe les lois mémorielles récentes et
litigieuses on s'aperçoit que certaines obéissent à ces
compétences ou sont des déclarations. La loi Badinter de 1985
instituant la mention « Mort en déportation » relève de
la compétence statutaire. La loi du 29 janvier 2001 relative à la
reconnaissance du génocide arménien de 1915 est purement
déclarative avec son article unique qui dispose que : « La France
reconnaît publiquement le génocide arménien ». La loi
Taubira de 2001 tendant à la reconnaissance de la traite et de
l'esclavage en tant que crime contre l'humanité a principalement une
porté déclarative. Elle comporte aussi des objectifs
commémoratifs en fixant notamment des modalités pour
l'organisation de cérémonies dans les Départements et
Collectivités d'Outre-mer, ainsi qu'au niveau international car elle
établi une requête en reconnaissance de crime auprès du
Conseil de l'Europe et de l'Organisation des Nations Unies visant à
l'institution d'une date internationale de commémoration. Seul l'article
2 de cette loi est controversé car il dispose que les programmes
scolaires et les programmes de recherche en sciences humaines accorderont
à la traite négrière et à l'esclavage « la
place conséquente qu'ils méritent » - on verra plus loin que
le législateur a dépassé dans cet article son champ de
compétence. La loi du 23 février 2005 « portant
reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des
Français rapatriés », qui est en partie une réponse
partisane à la loi précédente, relève en grande
partie du pouvoir déclaratif et de la compétence de
réparation car elle alloue des aides financières à ces
victimes d'une décolonisation brutale. Là encore seul un article,
le 4, est véritablement controversé, il prévoit que:
« Les programmes de recherche universitaire accordent
à l'histoire de la présence française outre-mer, notamment
en Afrique du Nord, la place qu'elle mérite.
Les programmes scolaires reconnaissent en particulier le
rôle positif de la présence française outre-mer, notamment
en Afrique du Nord, et accordent à l'histoire et aux
57
sacrifices des combattants de l'armée française
issus de ces territoires la place éminente à laquelle ils ont
droit.
La coopération permettant la mise en relation des
sources orales et écrites disponibles en France et à
l'étranger est encouragée. ».
Cet article, dont l'alinéa 2 a été
déclassé au rang de norme réglementaire par le Conseil
Constitutionnel dans sa décision n°2006-203 I du 31 janvier 2006,
pour ensuite être abrogé par le décret n°2006-160 du
15 février 2006, relevait là encore d'un abus de
compétence et reste critiquable en particulier pour son alinéa 1
qui, lui, reste en vigueur.
La loi espagnole « par laquelle sont reconnus et
élargis des droits et sont établis des mesures en faveur des
personnes ayant souffert de persécution et de violence durant la guerre
civile espagnole » de 2007 122 , plus
généralement appelée Loi de Mémoire historique, est
quant-à-elle une loi principalement de réparation, avec des
effets statutaires et commémoratifs, ainsi qu'une portée
déclarative sans équivoque. Elle permet la révision sur
demande de tous les procès réalisés par les tribunaux
franquistes, étend la réparation financière
déjà existante pour les victimes du franquisme, établit la
participation de l'Etat espagnol dans la localisation, l'identification et
l'éventuelle exhumation des républicains disparus et souvent
enterrés dans des fosses communes. Elle permet aux anciens membres des
« brigades internationales » et aux descendants de
républicains en exil d'obtenir la nationalité espagnole et
comporte un volet commémoratif, en établissant un statut
particuiler pour le Valle de los Caidos, mais aussi un volet «
anti-commémoratif » lorsqu'elle impose le retrait des symboles du
pouvoir franquiste.
Avant d'étudier la spécificité des lois
relatives au négationnisme on peut observer le rôle des autres
producteurs de droit.
Par le pouvoir exécutif
Le pouvoir exécutif et notamment le chef de l'Etat a
toujours eu dans le domaine
122 « Ley por la que se reconocen y amplían
derechos y se establecen medidas en favor de quienes padecieron
persecución o violencia durante la Guerra Civil y la Dictadura »
(« Loi par laquelle sont reconnu et élargis des droits et sont
établis des mesures en faveur des personnes ayant souffert de
persécution et de violence durant la guerre civile espagnole »
traduction personnelle), adoptée par le Congrès des
députés (chambre basse espagnole) le 31 octobre 2007
58
mémoriel un rôle solennel et déclaratif
particulièrement important. C'est le Président ou le Premier
ministre d'une démocratie qui participent aux plus grandes
commémorations et les animent. C'est dans les discours et les attitudes
des membres du gouvernement qu'apparaissent certaines reconnaissances ou
repentances mémorielles comme on l'a vu pour l'Allemagne avec le
Chancelier Willy Brandt en 1970, ou comme le Premier ministre Lionel Jospin l'a
fait en France vis-à-vis des mutins de 1917 dans un discours
prononcé le 5 novembre 1998 sur le plateau de Craonne.
Le discours d'un Président peut aussi inspirer une loi.
Celui de Jacques Chirac le 16 juillet 1995 est à l'origine de la loi
française du 10 juillet 2000 « instaurant une journée
nationale à la mémoire des victimes des crimes racistes et
antisémites de l'État français et d'hommage aux Justes de
France », mêlant repentance et hommage.
D'autre part l'exécutif est à l'origine de la
création d'une grande partie des monuments, mémoriaux et
musées nationaux. A caractère d'établissement public,
généralement en régie, ils sont gérés et
entretenus par les services de l'Etat, et dépendent pour leur grande
majorité des ministères de la Culture.
Enfin, c'est l'exécutif et notamment les
ministères de l'Education qui définissent les programmes
scolaires et les contenus pédagogiques des enseignements à
contenu mémoriel: histoire mais aussi français, géographie
ou éducation civique. Si dans les démocraties européennes
les parlements peuvent parfois comme en France poser les principes fondamentaux
de l'enseignement, confier à l'exécutif la définition des
programmes est essentiel pour les dépolitiser le plus possible en
confiant leur élaboration à des professionnels et en laissant au
Parlement le rôle de contrôler leur neutralité a
posteriori, dans son rôle d'évaluateur des politiques
gouvernementales.
Par les pouvoirs locaux
L'importance des pouvoirs locaux dans l'encadrement et
l'institutionnalisation de la mémoire est centrale. Parce que ce sont
eux qui mettent en oeuvre les commémorations nationales, parce qu'ils
organisent des commémorations locales mais aussi parce qu'il
créent une mémoire institutionnelle au quotidien dans le choix
des noms de rues et de bâtiments publics, dans la création de
musée, de mémoriaux et de centres culturels ou dans le
financement de projets et de sorties scolaires, ils sont « le point
d'ancrage « naturel »
59
des commémorations et les premiers animateurs »
123 des politiques mémorielles.
Comme l'a déclaré André Kaspi dans son
audition par la Commission de l'Assemblée: « Chaque commune est
dépositaire d'une histoire, chaque région est pourvue de lieux de
mémoire ; toutes doivent être animées par la volonté
de développer le sentiment identitaire. C'est à partir de cette
réalité parlante et émouvante, témoignage de
l'existence d'une mémoire locale et régionale inscrite dans la
mémoire nationale, que les esprits des jeunes pourront être
formés. »124
La Commission française de réflexion sur la
modernisation des commémorations publiques a ainsi proposé dans
la conclusion numéro 3 de son rapport125 de renforcer ce
rôle mémoriel des autorités décentralisées et
de faire passer à l'échelon local une partie de la surcharge de
commémoration qui a envahi la vie publique nationale.
De façon croissante, par les institutions
internationales
Les institutions internationales jouent aussi un rôle
dans la protection et l'encadrement des mémoires.
Tout d'abord, et comme les gouvernements ou parlements
nationaux elles peuvent faire des déclarations politiques sur le
passé. Par exemple le Génocide arménien a
été reconnu par la Sous-commission des Nations-Unies pour la
prévention des discriminations et la protection des minorités
dès le 2 juillet 1985, par le Parlement européen le 20 juillet
1987 et par le Conseil de l'Europe le 24 avril 1998.
Les organisations internationales peuvent aussi être
à l'origine de commémorations comme l'a fait l'Assemblée
générale des Nations Unies en adoptant en novembre 2005 une
résolution pour que le 27 janvier devienne la « Journée
internationale de commémoration en mémoire des victimes de
l'Holocauste ».
Une compétence statutaire leur a aussi parfois
été attribuée, c'est le cas notamment pour l'UNESCO avec
les classements au « Patrimoine mondiale de l'Humanité » mis
en place par la Convention Concernant la Protection de l'Héritage
Culturel et Naturel Mondial, le 16 novembre 1972, qui protège
déjà en Europe plusieurs centaines de sites
123 B. Accoyer, op.cit., p. 131
124 A. Kaspi cité par B. Accoyer, op.cit., p. 131
125 Rapport de la Commission de réflexion sur la
modernisation des commémorations publiques présidée par
André Kaspi, rendu public le 12 novembre 2008, p. 9
60
considérés comme ayant une valeur culturelle et
mémorielle centrale. Depuis 1992 le programme « Mémoire du
monde » est venu compléter ce classement avec un registre de
patrimoine documentaire qui comprend des nombreuses oeuvres,
bibliothèques et archives européennes et cherche à les
protéger mais aussi à les valoriser pour le grand public.
En Europe, les institutions de l'Union et du Conseil sont
très actives dans le domaine mémorielle. Parce qu'elles cherchent
à valoriser la coopération et la citoyenneté
européenne, elles mettent en avant la mémoire européenne
et le multiculturalisme en produisant notamment des recommandations aux Etats
européens sur le contenu et la forme de leurs commémorations et
de leurs enseignements. On peut donner un exemple qui a beaucoup aidé
à la réalisation de ce mémoire: le Conseil de la
coopération culturel du Conseil de l'Europe a lancé en 1999 un
projet « Apprendre et enseigner l'histoire de l'Europe du XXème
siècle » qui a donné lieu à des travaux et des
rencontres nombreux et riches ainsi qu'à de nombreux documents de
conseil pédagogique et à une liste de recommandations aux Etats
membres126.
Enfin, un rôle considérable des institutions
internationales, propre actuellement au Conseil de Sécurité des
Nations Unies et à la Cour Pénale Internationale, est la
qualification juridique de certains faits comme les « Génocide
» ou les « Crime contre l'humanité ».
Cette qualification, qui confère un statut
spécifique aux faits entraine une protection particulière de leur
mémoire comme on l'a déjà vu et comme on va le
développer plus loin.
On peut donc considérer que l'intervention des
producteurs de droit dans le domaine mémoriel est
généralisée. Chaque niveau d'autorité politique et
réglementaire cherche à la fois à fonder et
émanciper tout en les équilibrant les différentes
mémoires, et à produire une mémoire institutionnelle
conforme à ses objectifs. Cet encadrement se produit sous la forme
d'actes divers, souvent sans normativité juridique, mais créant
des normes d'action et de pensée qui deviennent des institutions.
La répartition des compétences et pouvoirs
relatifs à la mémoire entre les différentes
autorités n'est pas un débat négligeable, le fait de
priver un parlement de prérogatives en matière mémorielle
a pu conduire en France à un détournement de la loi à des
fins déclaratives qui a eu raison d'inquiéter la
communauté historienne. Ce genre de dérive où sont
confondus pouvoir politique et pouvoir législatif du parlement est
particulièrement
126 Rec(2001)15 du 31 octobre 2001
61
dangereux car il fait courrir le risque de la création
d'une « histoire d'Etat » là où il n'y avait qu'une
intention de positionnement sur l'histoire de la part des parlementaires.
Il est donc à la fois important de confier une
responsabilité aux parlements dans la politique commémorative,
notamment la fixation des grandes dates de commémorations nationales et
en même temps de laisser les autres acteurs politiques jouer un
rôle mémoriel conséquent, chacun à son
échelle et de telle sorte que soit protégées la
liberté de l'enseignement et les libertés d'initiative
locales.
On va voire maintenant que le cas du négationnisme
relève d'un domaine très particulier de la protection des
mémoires qui a pu justifier le recours à la loi et à la
répression juridique la plus lourde, le pénal.
|