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Le régime juridiques des ententes anticoncurrentielles

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par Nisrine NASSIRI
Faculté des sciences juridiques économiques et sociales de Salé Maroc - Licence en droit privé 2012
  

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B- Atteinte à la concurrence.

La restriction de la concurrence peut être potentielle ou actuelle. L'article 6 de la liberté des prix et de la concurrence comme l'article L.420 du code de commerce français prohibent les comportements anticoncurrentiels « pouvant avoir » pour objet ou pour effet de restreindre le jeu de la concurrence. Alors que l'article 81 du traité instituant la Communauté européenne vise les ententes « ayant » pour effet de fausser la concurrence. Cependant, la disparité n'est pas rondelette dans la pratique.

Les notions d'objet et d'effet établissent le lien de causalité entre la perturbation de concurrence et l'entente. Ces critères sont alternatifs : "la démonstration du fait que la pratique a eu un effet sur la concurrence n'est (...) pas nécessaire dès lors qu'il est établi que son objet était anticoncurrentiel ou qu'elle aurait pu avoir un effet anticoncurrentiel "10(*).

- La notion d'objet anticoncurrentiel : est particulièrement arachnéenne. Si on peut la rattacher à l'intention des parties, ce ne peut-être que dans une conception "objective" de l'intention. On ne peut exiger des autorités de la concurrence qu'elles prennent en considération la psychologie des parties, qu'elles quêtent les mobiles qui les aiguillonnent. L'intention se déduit de l'analyse des termes de l'entente, du contexte et de l'expérience acquise. Ainsi Madame SELINSKY juge-t-elle que l'intention anticoncurrentielle existe "lorsque les professionnels transgressent la loi en toute connaissance de cause, c'est-à-dire en ayant conscience des effets normalement prévisibles des pratiques qu'ils entendent mettre en oeuvre"11(*). Ne saurait être absolutoire pour les entreprises, l'excuse de l'ignorance ou de l'absence de conscience de la portée de leurs actes.

Ajoutons à cela que, objet est entendu au sens d'objectif, de « but poursuivi ».Pour le supputer, «  les autorités de concurrences ne se livrent à l'évidence pas à une recherche de l'intentionnalité des parties. ». L'autorité régulatrice doit parfois s'attacher au contexte juridique et économique de la pratique, en fonction des données du marché en cause.  

Il convient pour l'autorité régulatrice de «  prendre en considération la nature, la quantité limitée ou non des produits faisant l'objet des pratiques, la position et l'importance des parties sur le marché concerné, le caractère isolé de la pratique, ou au contraire, la place de celui-ci dans un ensemble d'accords (effets cumulatifs). » ; démystifie le conseil de concurrence. Dans cette dernière situation, un accord vertical peut être parfaitement légitime mais devient anticoncurrentiel au motif du verrouillage de marché par la présence d'accords verticaux similaires.12(*)

Les ententes dont la mise en oeuvre achemine nécessairement à restreindre la concurrence sont sanctionnées. Pour mieux faire apparaitre cette logique : Les ententes ne sont prohibées que si l'on peut prévoir, "avec un degré de probabilité suffisant " que leur mise en oeuvre produira des effets restrictifs.

Sous cette même logique, l'atteinte à la concurrence est présumée. Dès lors, l'examen des effets devient inutile. Cette analyse élucide qu'une entente puisse être interdite sans jamais avoir reçu application ; possible donc, est-il d'interdire un accord anticoncurrentiel avant même sa mise en oeuvre, que des ententes anticoncurrentielles ayant échoué soient cependant sanctionnées et que la simple tentative d'atteinte à la concurrence soit punissable. La tentative d'entente n'est pas punissable ; la tentative d'atteinte à la concurrence l'est.

L'objet anticoncurrentiel peut en pratique se défalquer , soit de l'analyse des clauses juridiques du contrat constituant l'entente, si l'en existe un, soit le cas échéant, et en l'absence de toute formalisation écrite, de simples P.V de réunions qui peuvent suffire à constituer la preuve de l'intention de restreindre la concurrence. S'il s'avère que l'objet de l'accord en cause est anticoncurrentiel, l'analyse de l'effet devient inutile.

- La notion d'effet anticoncurrentiel : Lorsque l'objet n'est pas anticoncurrentiel, les autorités de la concurrence s'attachent aux effets anticoncurrentiels; cela permet de faire tomber sous le coup de l'interdiction des articles 6 de la loi 06-99, L.420 et 81 du traité, des accords pour lesquels il n'existe pas une intention de restreindre la concurrence. Conjointement, la détermination de l'effet permet aussi et surtout de prohiber des pratiques concertées qu'il n'est pas possible de dépister avant leur mise en oeuvre. Monsieur BLAISE fait remarquer que la référence du droit français à la simple potentialité d'effet "montre qu'il n'est nullement nécessaire de tenir compte des intentions des membres de l'entente. Il s'agit ici de la simple potentialité objective d'une altération de la concurrence ou des prix, en dehors de toute volonté des participants, et même à l'insu de ceux-ci "

La première démarche consiste à délimiter le marché en cause13(*), Comme pour l'article 86, celui-ci est fixé par la matière de l'activité concernée puis par sa configuration géographique. Or, si les critères utilisés sont identiques, l'estimation diffère : elle n'intervient que pour conjecturer l'importance de la distorsion à la concurrence, c'est-à-dire de l'applicabilité du droit communautaire et de la gravité de l'infraction. Dans l'affaire Windsurfing relative à un contrat de licence, la requérante contestait l'existence d'un commerce spécifique de composants isolés de planche à voile avant 1981. La cour reconnaît qu'il n'y aurait pas d'affectation possible de la concurrence à défaut d'un tel marché. Si tel n'était pas le cas en l'espèce, l'amende devait néanmoins être réduite : « la gravité des infractions est diminuée du fait que (...) le marché des composants n'était pas très important par rapport au marché des planches à voiles complètes » sur la période concernée.

Une fois le marché délimité, plusieurs éléments, que l'on retrouve dans le cadre de l'application de l'article 86, sont pris en compte par la Commission pour apprécier la distorsion d'une entente sur la concurrence. De façon plus explicite, « Démontrer que la pratique chavire la concurrence ou est susceptible de l'affecter à un tel point qu'il soit possible de prévoir avec une assez bonne probabilité que cette pratique aura sur le marché en cause des effets négatifs sur les prix, la production, l'innovation, la diversité ou la qualité des produits ou services » telle est la démarche. On voit donc que la prise en compte de l'effet ne touche que le trouble constaté sur le marché : sont examinés les effets potentiels, probables, de l'accord sur le jeu de la concurrence. Le pouvoir de marché des entreprises devient alors déterminant : plus ce pouvoir est fort, plus l'effet de leur pratique sera durement ressenti.

Il est à dire que la notion d'objet porte en germe celle de potentialité d'effet. On peut lire, dans les observations générales formulées par le Conseil en introduction de son septième rapport d'activité, que les pratiques anticoncurrentielles sont prohibées "dès lors qu'elles ont un objet ou même seulement une potentialité d'effet anticoncurrentiel et qu'il est indifférent, à cet égard, que ces pratiques aient eu peu ou n'aient eu même aucun effet sur le marché "14(*). L'affirmation est surprenante. Le droit français semble admettre qu'il existe "des ententes interdites par nature ". C'est bien à cette conclusion que conduit l'indifférence avouée à l'égard de l'effet anticoncurrentiel. Ces développements restent théoriques. Si l'on veut assimiler les notions d'objet et d'effet anticoncurrentiel, il faut illustrer notre propos de quelques exemples, dont la liste n'est pas exhaustive.

- Sont réprimées par les deux ordres juridiques les ententes ayant pour objet ou pour effet de fixer les prix d'achat ou de vente (article 6.2 de la loi 06-99, article 81, §1 du Traité de Rome et L.420.2 du code de commerce français). La détermination des prix par le libre jeu du marché est un facteur important de la compétition économique. Les pratiques de prix imposés sont donc sévèrement sanctionnées ainsi que les concertations sur les prix et les marges. Les pratiques de prix conseillés sont, quant à elles, jugées suspectes.

- Sont également sanctionnées les ententes ayant pour objet ou pour effet de limiter l'accès au marché (article 6.1, 81.1, et L.420.1). Sont notamment visées les pratiques de quotas, les accords fixant des normes de production et les pratiques de boycott.

En addition à ces dénominateurs communs des éléments constitutifs de l'entente au regard du droit de la concurrence Marocain et le droit de la concurrence Français et communautaire, nous ajoutons brièvement :

- Le libre consentement : Dans un cas où à l'occasion d'une opération de concentration réalisée par lui, un groupe de distribution a fait savoir à l'ensemble de ses fournisseurs qu'il entendait subordonner la poursuite des relations commerciales à des conditions plus avantageuses, il n'y a d'adhésion des fournisseurs que parce qu'il y a une atteinte à leur autonomie de décision (Cass. Comm., 7 avr. 1988, Société Rallye)15(*). Dans cette affaire, la cour de cassation a cassé l'arrêt de la Cour d'appel en indiquant :

« ... Attendu que pour réformer la décision n 95-D-34 du 9 mai 1995 du Conseil de la concurrence et condamner la société Rallye au paiement d'une sanction pécuniaire, la Cour d'appel énonce que l'acte par lequel un distributeur à l'occasion d'une opération de concentration réalisée par lui, fait savoir à l'ensemble des fournisseurs d'une catégorie de produits ou à une partie substantielle d'entre eux à des conditions supplémentaires par rapport à celles qu'il avait acceptées, est susceptible d'être visé par les dispositions de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; ... attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'accord allégué ne pouvait être qualifié d'action concertée ou d'entente au sens de l'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 que s'il était établi que les parties y avaient librement consenti en vue de limiter l'accès au marché ou à la libre concurrence ; qu'ayant seulement constaté que cette pratique prise à l'initiative de la société Rallye, qui aurait été susceptible de recevoir d'autres qualifications juridiques au regard de l'ordonnance susvisée, avait été de nature à entraîner l'adhésion des fournisseurs ou de certains d'entre eux et avait eu pour effet d'affecter `leur autonomie de décision', la Cour d'appel a violé le texte susvisé. »

- L'autonomie de décision : Le problème peut se poser pour une société mère et ses filiales ou entre filiales.

En raison du défaut de l'autonomie de la volonté propre d'une entreprise, il ne peut y avoir entente. L'autonomie de la filiale à l'égard de la société mère est appréciée au niveau commercial et financier. Il n'y a pas autonomie s'il s'agit d'une filiale à 100% mais également à 50% et même 35% compte tenu de considération structurelles ou tenant au marché. En réalité, tout le comportement de la filiale à l'égard de la société mère sera pris en considération. Les entreprises liées entre elles ne doivent pas simuler la concurrence. La Cour d'appel de Paris, dans son arrêt Société Herlicq du 19 septembre 1990 a indiqué :

«  Considérant que des entreprises appartenant au même groupe qui ont présenté des offres distinctes mais préparées par des services techniques et des bureaux d'études du groupe, prétendent trouver une justification en alléguant la connaissance par le maître de l'ouvrage des liens existant entre elles ; considérant cependant que s'il est loisible à des entreprises unies par des liens juridiques et financiers mais disposant d'une réelle autonomie technique et commerciale de présenter des offres distinctes, elles doivent le faire en respectant les règles de la concurrence ; qu'il est sans incidence que les maîtres de l'ouvrage aient connu les liens juridiques unissant les sociétés concernées dès lors qu'ils ignoraient qu'elles constituaient une entreprise unique ou que leurs offres procédaient d'une connivence ».

La théorie de l'autonomie de la volonté, même contestée, est cardinale en droit des obligations. Elle signifie que l'homme, face à la volonté du législateur, est "apte à se donner sa propre loi "16(*). Elle allègue, dans l'opinion commune, la force obligatoire de l'engagement souscrit par l'individu.

La notion d'autonomie a en droit de la concurrence une signification plus pragmatique. Toute connotation philosophique ou morale en est absente. Elle n'est pas une théorie, elle n'est pas une justification ; elle est une condition d'application d'une règle prohibitive.

Seuls les agents autonomes sont susceptibles d'être visés par l'article 81, paragraphe 1. L'autonomie ainsi exigée est essentiellement économique, mais nous verrons, à travers différents exemples, que des critères juridiques sont également utilisés.

Certains opérateurs, parfaitement capables de contracter, sont jugés comme non autonomes par le droit de la concurrence. Ils ne sont pas considérés comme parties à une concertation. Tout contrat n'est pas une entente. C'est le cas des accords auxquels sont parties des intermédiaires de commerce (a) ou des filiales (b).

a- Les auxiliaires de commerce.

Le problème des auxiliaires de commerce a été amplement débattu en doctrine et en jurisprudence. Les contrats conclus avec les représentants par lesquels ils s'engagent, pour une partie déterminée du territoire de la Communauté, "à négocier des affaires pour le compte d'une entreprise, ou à conclure au nom et pour le compte de celle-ci", ne sont pas visés par la prohibition. Ces contrats sont considérés comme non restrictifs de concurrence : l'agent agissant pour le compte du commettant, celui-ci ne peut pas se faire concurrence à lui-même.

b- Les relations entre entreprises appartenant à un même groupe.

L'autorité exercée par la mère sur sa filiale interdisait de voir en elle "une entité économique pouvant entrer en concurrence avec la société mère ".

C'est donc l'absence d'entrave à la concurrence qui était invoquée à l'appui de la solution.

Le fondement a été encore affermi sur la dépendance de la filiale par rapport à la société mère. La première ne faisant qu'exécuter les instructions de la seconde. Il ne peut y avoir entre elles concours de volontés. La dépendance dont il s'agit est d'ordre économique. Juridiquement les sociétés sont bien distinctes : elles ont chacune la personnalité morale.

La Cour a consacré l'inapplicabilité de l'article 85 aux accords et pratiques intragroupes, aux conditions que "les entreprises forment une unité économique à l'intérieur de laquelle la filiale ne jouit d'aucune autonomie réelle dans la détermination de sa ligne d'action sur le marché et (que) ces accords ou pratiques (aient) pour but d'établir une répartition des tâches entre les entreprises "17(*).

La société C.M.S. Dental est agent exclusif des produits de la marque Komet façonnés en Allemagne par la société Brasseler. Une clause additionnelle au contrat d'exclusivité qui les lie a été rédigée, tendant singulièrement à exclure la vente de ce matériel par correspondance. Mise en cause, la société C.M.S. Dental prétend que l'article 7 de l'ordonnance18(*) (nouveau L.420 du code de commerce français) est sans application en l'espèce du fait qu'étant une filiale de la société Brasseler, elle ne peut tomber sous le coup du grief d'entente avec celle-ci. Le Conseil lui oppose "qu'elle n'était devenue filiale de cette dernière qu'en 1990 " ; "qu'il résulte de cette situation qu'en tout cas jusqu'à l'année 1990, le contrat de distribution exclusive assorti de sa clause additionnelle avait bien le caractère d'une entente au sens de l'article 7 de l'ordonnance."

Une lecture a contrario de ce motif permet d'établir qu'à compter de 1990, les liens de mère à filiale font obstacle à l'application du texte.

La décision est confirmée par la Cour d'appel de Paris 19(*), qui apporte une précision intéressante. La société C.M.S. Dental fait valoir devant la Cour qu'avant de devenir une filiale de la société Brasseler, elle était déjà "économiquement liée à elle ", et qu'elle ne pouvait, de ce fait, avoir mis en oeuvre des pratiques d'entente. Il lui est répondu que

"(...) le fait qu'elle ait depuis de nombreuses années pour seule activité la diffusion en

France des produits fabriqués par la société Brasseler avec laquelle elle est liée par un contrat l'obligeant à respecter ses consignes de distribution (...) ne (suffit) pas à établir qu'avant la prise de contrôle réalisée en 1990, elle avait déjà perdu son autonomie commerciale et financière à l'égard de son fournisseur exclusif et n'était pas une entreprise distincte de celui-ci."

L'élément intentionnel est, on le voit, rigoureusement contrôlé. Seules les volontés autonomes sont prises en ligne de compte par le droit des ententes, mais les entreprises ne peuvent trop facilement se réfugier derrière des liens économiques pour se soustraire à la sanction.

Eriger ainsi la volonté en élément constitutif semble impliquer que l'on veille à son intégrité. C'est le cas en droit des contrats. Le droit des ententes n'est pas aussi scrupuleux. Les pressions éventuellement exercées sur une entreprise pour qu'elle adhère à l'entente ne sont que rarement prises en compte.

L'effet des ententes est donc jaugé dans leur contexte juridique. Un même accord n'aura pas la même incidence s'il est cloîtré ou s'il régit seulement les relations d'entreprises qui ne représentent qu'une modique part du marché (d'où les seuils de sensibilité) ou si au contraire, il est de pratique générale et si courante qu'il en résulte un effet cumulatif

- Le seuil de sensibilité : La condition de sensibilité veut dire que seules les ententes restreignant de manière significative, sensible, le jeu de la concurrence sont prohibées. . Il paraît en effet inutile de sanctionner les ententes d'importance mineure20(*)

D'ailleurs, ce seuil de sensibilité n'est pas atteint-en cas d'accords horizontaux- tant que l'accord ne couvre pas au moins cinq pour cent du marché en cause.

La règle du seuil de sensibilité est d'origine prétorienne. Aucun texte de base, communautaire ou français, ne l'a posée. Elle fut cependant proférée très tôt en droit communautaire.

Quid que, la notion est fondamentale en droit communautaire. Elle connaît en droit français un destin un peu turbulent. En France, le Conseil de la concurrence a été longtemps hostile à l'adoption d'un seuil de sensibilité. Officiellement, il n'y pas de « petites affaires ». On a dit que le droit français s'illustre du droit communautaire en ce que l'article L.420 incrimine la simple possibilité d'un effet sur la concurrence, ce qui interdirait de mesurer les effets réels d'une entente.

- L'effet cumulatif : La théorie de «l'effet cumulatif» autorise, pour toiser la dangerosité d'une pratique, à prendre en considération l'ensemble des pratiques identiques ou similaires développées sur le même marché. C'est la conjonction de tous les accords et comportements parallèles qui vont permettre de condamner une entente, qui, à elle seule, ne relevait pas de la prohibition. La théorie de l'effet cumulatif n'a aucune assise juridique. Aucune des ententes prises «individuellement» n'ayant pour objet ou pour effet de porter atteinte à la concurrence, le lien de causalité entre la concertation et la perturbation du marché est distendu.

Finalement en matière de transports maritimes, le règlement (CEE) n° 4056/86 ne vise que « les transports maritimes internationaux au départ ou à destination d'un ou de plusieurs ports de la communauté »21(*). Dans le sens où il ne s'intéresse pas aux trafics extra-communautaires.

Néanmoins, le critère de l'effet anticoncurrentiel dans le marché commun n'est pas exclu.

Par exemple, la société Neptune Orient Lines, qui est une société américaine, a été condamnée quand il s'agissait des accords portant sur le trafic entre l'Europe et les Etats-Unis. En revanche, la même société, dont le siège était cette fois-ci à Singapour a été condamnée par la commission pour avoir participé à des accords de fret portant sur le segment terrestre entre l'Europe et l'Extrême-Orient. L'atteinte de la société étrangère, dont le siège est situé dans un pays faisant partie du trafic en cause est cherchée. Or, en matière de transport maritime, de nombreuses filiales sont essaimées à travers le monde, ce qui permet de mieux répondre aux attentes des professionnels locaux. Il importe seulement que la société filiale ou non soit partie à un accord produisant un effet anticoncurrentiel à l'intérieur du Marché commun.

* 10 Rapport d'activité du Conseil de la concurrence pour 1990

* 11 V. SELINSKY, "L'entente prohibée", Thèse Paris, Librairies techniques 1978, §397. Dans le même sens,

J. B. BLAISE, "Le statut juridique des ententes économiques dans le droit français et le droit des Communautés économiques", Thèse Paris, Librairies techniques, 1964, § 143, p.172.

* 12 "L'application en France du droit des pratiques anticoncurrentielles" L.G.D.J éd. P.96

* 13 La définition du marché en cause permet d'identifier et de définir le périmètre à l'intérieur duquel s'exerce la concurrence entre entreprises. Elle permet d'établir le cadre dans lequel la Commission applique la politique de la concurrence. Son objet principal est d'identifier de manière systématique les contraintes que la concurrence fait peser sur les entreprises données. La définition du marché permet, entre autres, de calculer les parts de marché, qui apportent des informations utiles concernant le pouvoir de marché. Le marché en cause est délimité tant au niveau des produits que dans sa dimension géographique. D'une manière générale, le marché de produits en cause comprend tous les produits et/ou services que le consommateur considère comme interchangeables ou substituables (substituabilité) en raison de leurs caractéristiques, de leurs prix et de l'usage auquel ils sont destinés. Il convient également de prendre en compte les produits et/ou les services qui pourraient être facilement commercialisés par d'autres producteurs sans coût de réorientation important, ou par des concurrents potentiels, à un coût raisonnable, et dans un laps de temps limité. Le marché géographique en cause comprend le territoire sur lequel les entreprises concernées sont engagées dans l'offre des biens et des services donnés, sur lequel les conditions de concurrence sont suffisamment homogènes et qui peut être distingué de zones géographiques voisines parce que, en particulier, les conditions de concurrence y diffèrent de manière appréciable .Voir la communication de la Commission sur la définition du marché en cause aux fins du droit communautaire de la concurrence (JO C 372 du 9.12.1997, p. 5).

* 14 Rapport d'activité pour 1993, p. XIV.

* 15 A. GUEDJ «Pratique du droit de la concurrence national et communautaire» LexisNexis éd. P :31

* 16 D. F. TURNER," The Definition of Agreement Under the Sherman Act : Conscious Parallelism and Refusals to Deal" , 75 Harv. L. Rev., 655 (1962), cité par A. PERROT et L. VOGEL

* 17 Décision CHRISTIANI-NIELSEN, précitée. Dans le même sens, arrêt BEGUELIN de la C.J.C.E. en date du 25 nov. 1971, aff.22-71 Rec. 949.

* 18 L'ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence, modifiée par la loi du 15 mai 2001 sur les nouvelles régulations économiques, a largement dépénalisé les pratiques anticoncurrentielles

* 19 Cour d'appel de Paris, 15 septembre 1993, B.O.C.C.R.F. du 8 avril 1994 (pourquoi une publication si tardive?), p. 142.

* 20 L'on parle aussi dans ce cas d'une règle de minimis.

* 21 V. ART .1 sous section 2 du règlement (CEE) n° 4056/86.

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